Michel Onfray : vision spéciste ou anti-spéciste du monde

lire l’article sur Kaizen

Avez-vous déjà entendu parler de l’antispécisme ? Cette approche part du principe qu’il n’existe pas de différences entre les espèces et considère ainsi que rien ne justifie l’exploitation des animaux par les humains “de manières qui ne seraient pas acceptées si les victimes étaient humaines”, indiquent les Cahiers antispécistes, référence actuelle du mouvement.

Le philosophe utilitariste Peter Singer, figure de proue de cette idéologie, estime en ce sens que tout être vivant sensible doit être protégé de la souffrance physique, et psychologique. En interrogeant directement les critères d’humanité et d’animalité, cette question a toujours soulevé de brûlants débats.

Aussi le philosophe Michel Onfray signait-il en août 2009 dans Siné Hebdo un article qui a été largement repris dans la communauté végétarienne. Pour cause, il soulignait à quel point les idées antispécistes, dont les fondements sont justes, peuvent atteindre des extrêmes malheureux.

Alors que l’exploitation excessive du vivant entraînée par la croissance de consommation carnée de nos régimes alimentaires est de plus en plus pointée du doigt, nous avions envie de l’interroger à nouveau sur cette question.

Les scandaleux tribunaux d’arbitrage internationaux

Agoravox

C’est une terrible invention des années 1990  : des cours internationales d’avocats d’affaire qui jugent les contentieux entre les entreprises et les Etats, mis sur le même plan. Malgré l’opposition de l’opinion, leur rôle s’étend tellement que même The Economist a fini par s’en émouvoir  !

Pourquoi il faut s’y opposer
« Au revoir les protections environnementales européennes. Au revoir à la sécurité sociale britannique. Au revoir, pour cette raison, à la capacité, pour les électeurs dans les démocraties souveraines de déterminer la sorte de pays dans lequel ils souhaitent vivre. Toutes ces choses sont condamnées, à cause d’une clause obscure dans les accords de libre-échange que l’UE a négocié avec les Etats-Unis sur les Règlements des Différends entre Investisseurs et Etats (RDIE, ou ISDS en anglais), voici ce que disent les opposants à ces accords  ». Même si The Economist qualifie cela d’exagération et persiste à trouver l’idée bonne, il affirme qu’il y a une portion de vérité dans ces affirmations.
Mieux, la bible des élites néolibérales cite des exemples choquants, comme celui de Philip Morris, qui a demandé des compensations à l’Australie pour sa décision d’imposer des photos de victimes de cancer du poumon sur les paquets de cigarettes. C’est aussi par ce biais là qu’une compagnie pétrolière étasunienne poursuit le Québec pour son interdiction de la fracturation hydraulique. Pire, le nombre de procédures ne cesse d’augmenter et elles restent désespéremment opaques. En effet, certaines multinationales utilisent tous les subterfuges légaux et jouent de leur implantation dans un pays qui accepte l’autorité de ces tribunaux pour pouvoir ensuite mener des actions devant ces cours.

Le plus grand crime de l’histoire

Yuval Noah Harari – pour lire l’intégralité de l’article

La disparition de la faune sauvage est une catastrophe d’une ampleur inouïe, mais la situation est tout aussi critique pour les animaux les plus nombreux de la planète – les animaux d’élevage. Récemment nous avons assisté à une prise de conscience croissante des conditions dans lesquelles ces animaux sont élevés, et le destin que nous leur réservons pourrait bien constituer le plus grand crime jamais perpétré dans l’histoire humaine. Si nous jugeons de l’atrocité d’un crime en fonction de l’ampleur de la souffrance et de la détresse qu’il cause à des créatures sensibles, cette affirmation radicale se justifie.

Pour prendre la mesure de la condition absolument misérable des animaux domestiqués, nous devons nous appuyer sur les recherches approfondies menées par une nouvelle science, la psychologie de l’évolution. Du point de vue de la psychologie de l’évolution, le problème majeur de l’agriculture industrielle ne vient pas des abattoirs ou de l’exploitation des animaux, mais du mépris de leurs besoins subjectifs.

Nous atteignons maintenant le cœur du problème. Si l’on en croit la psychologie de l’évolution, les besoins émotionnels et sociaux des vaches, des poulets se sont manifestés pendant des millions d’années à l’état sauvage, lorsqu’ils étaient effectivement indispensables à la survie et à la reproduction. Pourtant, au cours des derniers siècles – un battement de cil en termes d’évolution – les humains ont élaboré un système agricole artificiel qui permet aux animaux de survivre et de se reproduire même lorsque leurs besoins émotionnels et sociaux sont ignorés. Cependant, ces animaux continuent d’éprouver ces besoins émotionnels et sociaux, et s’ils ne sont pas satisfaits, les animaux souffrent terriblement.

….

Le fait que les émotions soient fondamentales chez les mammifères a été prouvé dans les années 1950, après une série d’expériences très éprouvantes menées par le psychologue américain Harry Harlow. Harlow séparait des bébés singes de leurs mères quelques heures après la naissance. Chaque bébé singe était mis à l’écart dans une petite cage, dans laquelle Harlow avait préalablement installé deux mères factices. L’une d’elle était recouverte de fils métalliques et équipée d’une bouteille de lait à laquelle les bébés singes pouvaient téter. L’autre, de bois, était habillée de tissus qui lui donnaient l’apparence d’une vraie maman singe, sans qu’elle n’ait rien de concret à offrir au petit.

La conclusion était incontournable : les singes doivent avoir des besoins et des désirs psychologiques qui vont bien au-delà des nécessités matérielles ; s’ils ne sont pas comblés, ils souffriront terriblement. Les bébés singes de Harlow préféraient passer du temps auprès de la mère stérile faite de chiffons parce qu’ils recherchaient un lien affectif, et pas seulement du lait. Dans les décennies qui ont suivi, de nombreuses études ont montré que cette conclusion ne vaut pas seulement pour les singes, mais aussi pour d’autres mammifères, pour les oiseaux et peut-être même pour certains reptiles et poissons. Ces découvertes ont révolutionné non seulement notre compréhension des animaux, mais aussi notre connaissance de nous-mêmes. Dans les années 1950, les enfants placés en orphelinat étaient éduqués selon un régime très sévère qui, s’il comblait leurs besoins matériels, négligeait totalement en revanche leurs besoins émotionnels. On dissuadait les enfants de jouer ou d’entretenir des liens trop étroits avec les autres enfants et les visiteurs, dans le but d’éviter l’indiscipline et la propagation de maladies infectieuses. Les résultats psychologiques de ce traitement ont été catastrophiques. Aujourd’hui nous savons que pour être heureux, les humains en général, et les enfants en particulier, ont besoin d’entretenir beaucoup de contact avec leurs semblables.

Alors oui, l’agriculture industrielle veille à satisfaire les besoins matériels des animaux. Toutefois elle n’a aucun véritable intérêt à répondre à leurs besoins émotionnels et sociaux. Résultat : une profonde souffrance, à une échelle encore jamais vue. On peut débattre du fait qu’il s’agisse du plus grand crime jamais commis par l’humanité ; mais ce qui est sûr, c’est qu’il s’agit d’une chose devant laquelle nous ne pouvons pas rester insensibles.

 

 

 

 

 

Appel à nous éveiller à une révolution totale-Vimala Thakar

journal intégral

En se manifestant à travers un évènement, la dynamique de l’évolution se cristallise en une forme qui devient ainsi, pour tous ceux qui savent l’interpréter, un signe des temps chargé de sens. Ainsi en est-il du mouvement Nuit Debout qui, depuis le 30 Mars, d’abord sur la place de la République à Paris puis dans de nombreuses villes de France jusqu’en Europe, apparaît comme le laboratoire d’une conscience collective portée par la jeunesse qui cherche à inventer et à imaginer de nouvelles formes d’organisation sociale en refusant de jouer le rôle des gens bons de service pris dans le sandwich de l’état d’urgence entre fondamentalismes marchand et religieux. 
Pour nourrir cette intelligence collective nous proposons au débat la réflexion de Vimala Thakar sur l’éveil à une révolution totale :
«Lorsque les ténèbres recouvrent l’esprit de l’homme il est urgent pour ceux qui se sentent concernés de s’éveiller, de s’engager sur la voie d’une révolution… L’appel d’aujourd’hui est un appel à dépasser les cloisonnements, à nous éveiller à une révolution totale. Cet appel n’est pas en faveur des vieilles recettes révolutionnaires ; elles ont échoué, alors pourquoi les ressortir à nouveau, même parées d’une nouveauté factice ? Le défi d’aujourd’hui est de créer une révolution vitale et complètement nouvelle qui embrasse la vie toute entière. » 
Si la révolution prônée par Vimala Thakar est totale c’est qu’elle est à la fois intérieure et extérieure : elle ne concerne pas seulement l’organisation socio-politique mais naît de l’interdépendance entre le développement psycho-spirituel de l’individu, la mutation culturelle de la conscience collective et la transformation des structures sociales : « Nous devons nous rendre compte que l’intérieur et l’extérieur s’interpénètrent subtilement en une totalité, et que nous ne pouvons faire face à l’un sans faire face à l’autre. Structures et systèmes conditionnent notre conscience intime, tandis que les conditionnements de notre conscience donnent vie aux structures et aux systèmes… A notre époque, être un chercheur spirituel dénué de conscience sociale est un luxe que nous ne pouvons guère nous permettre, et se dévouer à une cause sociale sans une compréhension scientifique des mécanismes du mental est pure folie. » 

Directive européenne sur le secret des affaires

le jeudi 14 avril 2016, le parlement européen a adopté la directive sur le secret des affaires dont le texte peut être lu sur le site du parlement.

 

vote secret des affaires

pour voir le détail du vote sur votewatch.eu

L’article 5 prévoit en principe des dérogations visant notamment les lanceurs d’alerte.

Article 5

Dérogations

▌Les États membres veillent à ce qu’une demande ayant pour objet ▌l’application des mesures, procédures et réparations prévues par la présente directive soit rejetée lorsque l’obtention, l’utilisation ou la divulgation alléguée du secret d’affaires a eu lieu dans l’une ou l’autre des circonstances suivantes:

a)  pour exercer le droit à la liberté d’expression et d’information établi dans la Charte, y compris le respect de la liberté et du pluralisme des médias;

b)  pour révéler une faute, un comportement inapproprié ou une activité illégale, à condition que ▌le défendeur ait agi dans le but de protéger l’intérêt public général ;

c)  la divulgation par des travailleurs à leurs représentants dans le cadre de l’exercice légitime par ces représentants de leur fonction conformément au droit de l’Union ou au droit national, pour autant que cette divulgation ait été nécessaire à cet exercice;

d)  aux fins de la protection d’un intérêt légitime reconnu par le droit de l’Union ou le droit national .”

Mais ce texte met à la charge du lanceur d’alerte ou du journaliste la preuve qu’il agit dans l’intérêt général :

“Malgré des améliorations d’importance par rapport à la version initiale du projet, la directive qui vient d’être adoptée soulève toujours des incertitudes quant à la question de savoir si les journalistes et leurs sources, en particulier les lanceurs d’alerte, seront protégés de façon suffisante. Les exceptions prévues à l’article 5 pour l’exercice de la liberté d’expression et d’information manquent de clarté. Les garanties apportées à la liberté des médias dépendront largement de la façon dont les gouvernements appliqueront la directive. En outre, les lanceurs d’alerte sont laissés potentiellement sans protection, dès lors qu’ils seront tenus de prouver que la révélation d’une information a été faite “dans le but de protéger l’intérêt général”. cf Reporters sans frontière

 

CETA – le Conseil européen se prononcera les 22 et 23 septembre 2016

Les mythes du traité CETA selon le collectif stop TAFTA

Mythe no 1 : la nouvelle proposition sur l’arbitrage d’investissement institue une « cour publique » où siégeront des « juges »

La proposition de l’UE pour le TAFTA et le texte de l’accord avec le Canada (CETA) créent uniquement des listes restreintes d’arbitres « freelance » appelés à siéger en cas de différend, et en aucun cas une « cour publique ».

Les « juges » n’en sont pas puisqu’ils ne relèvent pas d’une magistrature indépendante et ne sont pas contraints d’arrêter leurs activités de conseillers juridiques. Les risques de conflits d’intérêts sont bien toujours réels. Le chapitre sur l’investissement du CETA donnera aux multinationales canadiennes et à 41 811 firmes américaines qui ont des filiales au Canada le droit d’attaquer les lois et réglementations françaises.

Un consensus européen se dessine : magistrats, experts et parlementaires de toutes les familles politiques rejettent cette proposition, dont ils estiment qu’elle institutionnalisera l’arbitrage privé dans les accords commerciaux de l’UE.

Mythe no 2 : le modèle agricole français est préservé

65 000 tonnes de viande bovine et 75 000 tonnes de viande de porc canadiennes à travers le CETA entreront à terme en Europe sans droits de douane. Cette libéralisation du commerce agricole va ravager la production de viande française, sans retour en arrière possible : la pression sur les prix accélèrera considérablement l’industrialisation de la production et la disparition des éleveurs.

Mythe no 3 : les normes sanitaires et sociales vont vers le mieux disant

Les chapitres sur les réglementations vont durablement modifier le processus réglementaire européen. Ils créent notamment un organe où les lobbies industriels et financiers trouveront un guichet lorsqu’ils voudront revendiquer l’allégement des règles protégeant le consommateur ou la santé au travail — encore une fois sans retour en arrière possible. Nul besoin de déréglementer dans le texte du traité lui-même, le Forum de coopération réglementaire pourra se saisir ultérieurement des réglementations les plus chères aux citoyens européens : interdiction des OGM, rinçage des viandes, hormones de croissance, législations sur les pesticides ou produits chimiques…

Mythe no 4 : le grand marché transatlantique va permettre à nos PME de se développer

L’alignement à la baisse des normes de production et de qualité des produits font que nombre de nos PME subiront la concurrence des entreprises états-uniennes dont la production est déjà alignée sur des normes au rabais, donc à moindre coût.

Pour celles de nos PME qui auraient les ressources de transformer leur offre et leur système de production, cela ne sera pas sans risque car on ne change pas un savoir faire et une culture d’entreprise d’un claquement de doigts : outre le coût financier -et humain- de tels changements, le temps de latence nécessaire pour amortir ces évolutions manquera dans la plupart des cas.

Pour les survivantes, la libéralisation plus poussée encore des services financiers renforcera la restriction des crédits que leur accordent les banques.

Pour les PME sous-traitantes des transnationales, le risque est si grand que les transnationales délocalisent aux USA certaines de leurs activités, la main d’œuvre y étant moins chère.

L’ouverture des marchés publics qui interdira aux collectivités territoriales de soutenir l’approvisionnement local mettra en très grand danger les PME qui vivent de ces marchés.

Mythe no 5 : le CETA « va promouvoir la croissance au Canada et dans l’Union européenne, et donc consolider l’ensemble de nos économies »

Aucune étude d’impact sérieuse n’augure d’effets positifs significatifs du TAFTA, et encore moins du CETA, sur notre économie et nos territoires. Pour ce dernier, l’évaluation économique conjointe du gouvernement canadien et de la Commission européenne réalisée en 2008 pour justifier l’accord prévoit une gain total de 12 milliards d’euros, soit une hausse dérisoire de 0,08 % du PIB de l’UE [1] . Pour TAFTA, l’étude CEPR (financé pourtant par toutes les plus grandes banques du monde) donne un gain par foyer fiscal de 450 euros annuels soit … 1,23 euros par jour. Ces études d’impact reposent en outre sur un ensemble d’hypothèses irréalistes et vivement critiquées par de nombreux économistes. Les risques sont en revanche avérés et ces accords éloigneront encore un peu plus la France et l’UE de l’emploi et d’une véritable transition énergétique et d’une relocalisation de l’économie.

Mythe no 6 : « La France sera également très vigilante pour que les accords commerciaux, ne remettent pas en cause, de manière subreptice, les avancées qui ont été décidées lors de la COP 21 »

Les dispositions sur l’environnement du chapitre « Développement Durable » relèvent de la généralité et des bonnes intentions ; aucune n’a la portée légale nécessaire pour primer sur les normes de protection du commerce et de l’investissement.

Les grandes entreprises pourront se saisir de l’arbitrage Investisseur-État pour s’attaquer à toute régulation environnementale ou toute loi sur le climat qui viendrait répondre aux exigences étayées par l’Accord de Paris (COP 21).

Les lobbies industriels pourront, via le processus de coopération réglementaire, remettre en cause « de manière subreptice » ces mêmes lois de lutte contre le changement climatique et édulcorer leur contenu en amont du processus politique.

Le commerce des énergies carbonées (notamment le pétrole brut et bitumineux) est fortement libéralisé.

Mythe no 7 : le Parlement français et les citoyens ne seront pas réduits au silence

Même dans le cas d’un accord mixte, c’est-à-dire comportant des dispositions relevant des compétences de l’UE et des États membres ,le CETA pourra être mis en œuvre dès l’approbation du Conseil, sans même l’assentiment nécessaire du Parlement français ! C’est le cas de tous les accords conclus par l’UE et déjà ratifiés à l’instar des accords UE-Corée du Sud, UE-Colombie/Pérou et UE-Ukraine qui étaient mis en application depuis des mois, voire des années, sans qu’aucun débat démocratique n’ait jamais eu lieu. Pire : même en cas de rejet par la représentation nationale de l’un des 28, le chapitre Investissement du CETA continuerait de s’appliquer pendant trois ans. Le débat et le vote du Parlement français interviendront trop tard pour enrayer ces dispositions inacceptables. Il n’existe qu’une façon de garantir la démocratie : refuser le traité et ses modalités d’application lorsqu’ils seront présentés, dans une seule proposition, au Conseil.

Les inquiétudes des parlementaires sont également partagées par de nombreux élus locaux : à ce jour, plus de 650 collectivités territoriales françaises se sont déclarées hors traités transatlantiques , ou en vigilance, et de nouvelles s’expriment chaque semaine. Et les mêmes critiques sont énoncées dans toute l’Europe, par des millions de personnes depuis trois ans, dont au minimum 380 000 Français .

Le Collectif Stop TAFTA demande au gouvernement français de refuser la signature du CETA et de plaider officiellement pour la cessation des négociations sur le TAFTA.

L’Europe et le Canada modifient leur accord CETA pour faire taire les critiques

Le Monde -2 mars 2016 -pour lire l’ensemble de l’article

On croyait le CETA, accord commercial inédit entre l’Union européenne et le Canada, scellé depuis la poignée de main du 26 septembre 2014 à Ottawa entre le premier ministre canadien Stephen Harper et le président de la Commission européenne José Manuel Barroso. Le scepticisme de l’opinion publique et les pressions de quelques Etats européens auront pourtant eu raison de ce statu quo.

Lundi 29 février 2016, Ottawa et Bruxelles ont en effet présentée une nouvelle version de leur “Comprehensive Economic and Trade Agreement”, qui est loin d’être un simple “toilettage juridique” du texte présenté en 2014, comme le prétend la Commission, qui répétait il y a encore peu que la négociation était close. Les négociateurs européens et canadiens ont profité de ces dix-huit mois pour remanier discrètement, mais en profondeur, le chapitre le plus controversé du traité : les tribunaux d’arbitrage privés.

Avant, le règlement des différends était assuré par un panel ad hoc composé de trois arbitres privés, choisis quasiment arbitrairement par les parties au conflit, et souvent soupçonnés de partialité et de conflits d’intérêts, car il leur arrivait de passer d’une affaire sur l’autre du rôle d’avocat à celui d’arbitre. En outre, la procédure se passait parfois dans un huis clos total, sans aucun document rendu public.

Désormais1, les cas seront traités par une cour permanente composé de 15 juges, nommés pour des mandats de cinq ou dix ans par les autorités canadiennes et européennes. Parmi eux figureront 5 Européens, 5 Canadiens et 5 tiers, devant justifier de qualifications juridiques et d’une expertise en droit international de l’investissement. Pour limiter le risque de conflit d’intérêts, le président du tribunal (tiré au sort pour deux ans) leur assignera des affaires aléatoirement et selon un principe de rotation, comme dans un tribunal public. Au lieu d’être payés par la défense et l’accusation, ils recevront des honoraires financés par Ottawa et Bruxelles (à un montant pas encore précisé, mais qui devrait avoisiner les 2 000 € mensuel, selon l’UE). En outre, ils pourront être récusés par les parties en cas de conflit d’intérêts avéré. Pour favoriser la transparence, le CETA prévoit une publicité des débats et des documents, limitée par la problématique de la confidentialité.

Toutefois, comme le relève Amélie Canonne, présidente de l’Aitec (Association internationale des techniciens, experts et chercheurs) et membre du collectif Stop Tafta, si ce nouveau mécanisme n’a en apparence plus rien à voir avec l’arbitrage privé, on est encore loin d’un tribunal public : “Il s’agit d’un pool d’arbitres défrayés pour être en astreinte, mais en aucun cas de magistrats, car il n’y a pas de magistrature de supervision insérée dans le système juridictionnel européen”.

  • Un système d’appel encore flou

Jamais aucun traité avec ISDS n’avait jusqu’à présent prévu de mécanisme d’appel des décisions – ce qui était vivement critiqué, car l’appel est l’un des meilleurs moyens pour corriger les décisions injustes et assurer une cohérence dans la jurisprudence.

Pour la première fois, le CETA va en introduire un. Il permettra de contester toute sentence du tribunal sous 90 jours2.

Etrangement, toutefois, les négociateurs n’ont donné quasiment aucun détail sur son organisation pratique, renvoyant à une délibération conjointe de l’UE et du Canada sur ces questions qui devra intervenir “rapidement” après l’entrée en vigueur de l’accord. Certains craignent que cette “clause de rendez-vous” soit un moyen de verouiller le système d’appel en dehors de l’examen démocratique, en écartant les parlements de la décision. L’avenir le dira.

 

À quand le temps subversif du vif et des vivants !

un poème de CAMILLE LOTY MALEBRANCHE

à lire sur son site : http://intellection.over-blog.com/

Voici les temps du blême

Les hommes hagards

De la société terne de l’utilitaire

Ont rabroué rêves et passions

Dans la course à l’insipide 

 

Voici les temps du blême

Les temps de l’assouvissement compulsif des folies de règne

Par l’avoir qui sacrifie l’être,

Immole la vie à l’autel des vanités

Ô tellement vains conquérants

Qui séquestrent le monde

Mais ne savent se conquérir eux-mêmes!

 

Voici les temps du blême

Où les fleurs humaines

Blêmies par l’érosion des consciences

Sont gestuelles mortes sur la scène du non sens

Ah! Que d’abominations justifiées dans la gracieuseté des mots officiels!

Que de crimes dans le cours macabre de l’Achéron des idéologues!

Crimes financiers que l’économie orchestre

Pour la gloire lugubre d’insatiables coryphées avides sans état d’âme!

 

Voici les temps du blême

Le sens avachi, abâtardi

Se moque de la dignité

Traitée en pathologie

Dans l’espace iatrogène des royautés pathogènes

Qui gouvernent par infection politique sans souci de leur nocuité

 

Voici les temps du blême

Des humanoïdes qui traînent dans le même

Sans jamais oser refuser!

Misérables organismes anthropomorphes,

Blêmis jusqu’à l’automation compulsive

Réflexes organiques, choses serviles

Des superstructures effaceuses,

Qui ne leur laissent que l’objectale contagion du flagorneur,

Morne pulsion d’infrabestialité…

 

Voici les temps du blême

Le blême que la connivence des soumis,

Inflige immonde, à la dignité minoritaire

Des hommes restés Homme, mais victimes de la machinalité du nombre,

 

Le blême temps sévit par la diligence des foules larbines

Entités desséchées, artisanes inconscientes du royaume des spectres

Que mènent les Charons cupides

Qui fabriquent en leur sinistre jonglerie,

Un monde-dépouille  

Pour bâfrer et s’en gaver,

Exhibant éhontés et cruels, leurs crocs ironiques inassouvis de comptes!

Ah! Anthropocide dévoration économique de leur morsure pécuniaire!

Triste et blême temps où les ombres heureuses aux réflexes d’esclaves

Entretiennent et servent l’insipide esbroufe financière des monstres!

 

À quand le temps subversif du vif et des vivants!

À quand le temps qui fera mourir la mort

Pour faire un monde humain ! ?

Devenir veilleur au nom d’une cohérence, d’une conscience

 

 

Cet article est issu du site de l’Union Comtoise de Yoga auquel il convient de se référer pour le lire intégralement.

Il fait écho à l’article sur la radicalité du “non” dans la méditation publié  il y a quelques jours.

Swami Atmarupananda est américain, il a rejoint la mission Ramakrishna en 1969. Très engagé dans le dialogue inter-spirituel, il a été un membre actif du Spiritual Paths Institute et a cofondé l’Alliance Spirituelle pour la Global Peace Initiative of Women (GPIWW). C’est à ce titre qu’il a été invité à prendre la parole lors de la COP21.

Il réside actuellement à *Belur Math, siège de la Mission Ramakrishna, où il prépare une version révisée des œuvres intégrales de Swami Vivekananda. 

  *Belur Math, ensemble d’institutions, temples, écoles (16 ha) sur la rive ouest de la Hooghly (Ganga), dans le Bengale occidentale (Inde), est un lieu de pèlerinage pour les différentes confessions religieuses, y compris les personnes non intéressées par la religion, mais soucieuses de venir y respirer la paix.

En fait, nous devons agir simultanément. Nous ne pouvons pas attendre d’être spirituellement accompli pour agir dans le monde, et nous ne pouvons pas agir sans nous perfectionner spirituellement. C’est ce que Swami Vivekananda a proposé à travers la pratique du karma yoga : “travailler, agir, car la nature même de l’homme nous amène à agir à chaque instant, mais, afin d’éviter d’alourdir notre karma créé par l’action, il nous propose d’utiliser l’action elle-même pour grandir spirituellement, en agissant selon des buts et des perspectives plus nobles”.

Chacun de nous peut-il devenir un veilleur ?

Oui, certainement, il est nécessaire de devenir veilleur, non au sens d’une personne qui va toujours vouloir avoir raison et corriger les autres, mais bien au nom d’une cohérence, d’une conscience, d’une vigilance sur notre action dans le monde, sur la manière dont elle affecte les autres et le monde.

Sans cette vigilance du veilleur, nous ne pouvons être pleinement humain, ni un être spirituel. Dans la Bible, Jésus dit à ses disciples, la nuit précédant sa Passion : « Veillez et priez ». Et c’est bien là l’essence même de la vie spirituelle.

 

 

un chercheur dénonce l’inutilité de nombreux travaux scientifiques

Passeur de science -blog le Monde-

Le chercheur américain John Ioannidis, professeur à Stanford, montrait dans un article publié en 2005  par  PLoS Medicine et Intitulé “Pourquoi la Plupart des découvertes publiées Sont fausses” que les bases statistiques sur lesquelles s’appuyaient bon nombre d’études n’étaient pas suffisamment rigoureuses.

Dans un  article  publié le 21 octobre 2014 par  Medicine PLoS, surmonté d’un autre titre provocateur Comment faire en sorte que plus d’études publiées soient vraies“, il met de nouveau les pieds dans le plat de la recherche scientifique.

On le comprend d’entrée de jeu, le but de John Ioannidis n’est pas de démolir la science ni ceux qui la font à grands coups de démonte-pneu. Son objectif consiste à améliorer le fonctionnement de la recherche car la marge de manœuvre, suggère-t-il, est grande. Dans l’énoncé du diagnostic, le chercheur américain, spécialiste de questions de santé, ne fait pas dans le diplomatique mais plutôt dans le direct. Il a recensé, entre 1996 et 2011, plus de 25 millions d’études scientifiques publiées, signées par quelque 15 millions de personnes de par le monde. Une quantité phénoménale d’articles, donc, à comparer avec un nombre de découvertes importantes beaucoup plus modeste.

John Ioannidis est convaincu depuis des années que le problème principal est  dû au fait que le système de recherche ne fonctionne plus correctement et que la plupart des “découvertes” qu’il engendre ou enregistre n’en sont pas : par la faute de protocoles inadaptés, de biais, de mauvais traitements statistiques voire de malhonnêteté intellectuelle, les résultats soi-disant significatifs sont trop souvent des faux positifs que l’on ne peut reproduire. Au bout du compte, en biomédecine, c’est jusqu’à 85 % des investissements faits dans les recherches qui sont perdus, soit un total annuel astronomique de 200 milliards de dollars ! Une autre estimation, moins précise, évoque un gâchis portant sur “des dizaines de milliards de dollars”.

John Ioannidis fait une description, en termes choisis mais qui contiennent souvent leur dose de vitriol, d’un monde académique parfois sclérosé où les personnes qui attribuent les budgets publics de recherche sont rarement de grands chercheurs, où le conservatisme le dispute au népotisme et au sexisme.

L’article n’aurait pas grand intérêt si John Ioannidis se contentait de critiquer. Mais le chercheur, qui co-dirige aussi depuis le printemps le Metrics (Meta-Research Innovation Center at Stanford), une institution travaillant justement sur l’amélioration des processus de recherche, est venu avec deux batteries de propositions. La première concerne la manière de mener des études et met l’accent sur le cheval de bataille de John Ioannidis : une plus grande collaboration entre les équipes pour obtenir des échantillons plus importants et des résultats sans équivoque ; inciter à la reproduction des travaux pour s’assurer que les effets mesurés sont réels, ce qui passe par une standardisation et un partage totalement transparent des protocoles, du matériel de recherche et des résultats. John Ioannidis insiste aussi sur un point sensible : la mise en place de critères plus stricts avant de crier à la victoire, à la découverte. Le but, écrit-il, est de réduire les faux positifs “dans les domaines qui ont jusqu’ici été trop accomodants (comme l’épidémiologie, la psychologie ou l’économie). Cela pourrait leur conférer une crédibilité plus importante, comparable à celle des secteurs qui ont traditionnellement été plus rigoureux de ce point de vue, comme les sciences physiques.”

La seconde batterie de propositions est bien plus iconoclaste puisqu’elle touche non plus à la manière de faire des études mais à celle dont le petit monde de la recherche les “valorise”. Sans jamais citer la fameuse formule “Publie ou péris”, John Ioannidis explique que, dans le système scientifique, les articles publiés sont comme une monnaie : ils servent à obtenir des “biens” (un poste, un échelon hiérarchique). Cela n’est pas sans conséquence puisqu’on voit parfois certains chercheurs avoir une production prolifique de travaux médiocres voire non-reproductibles, en profiter pour monter dans les hiérarchies, entrer dans les revues, bénéficier de renvois d’ascenseur et obtenir leur signature dans une étude pour laquelle ils n’ont donné qu’un avis, etc. J’ai moi-même pu constater que certains adoptaient ce que John Ioannidis appelle (joliment) la technique du “salami”, qui consiste à découper une recherche en tranches, en sous-sections, et à “vendre”, sur la base d’une seule expérience, plusieurs études à des revues différentes…

A l’opposé, le système actuel ne récompense que mal ou pas du tout ceux qui veulent reproduire les expériences des autres pour vérifier leurs résultats ou ceux qui s’investissent à fond dans la relecture des articles des confrères. Seule l’étude publiée importe. John Ioannidis propose donc de modifier la manière dont la bibliométrie est prise en compte dans l’évaluation des chercheurs, de ne pas donner de valeur aux publications per se mais d’en accorder à celles qui ont été confirmées.

Le chercheur américain a conscience que son scénario est “délibérément provocateur” et qu’il risquerait par exemple de décourager les ambitions de ceux qui veulent diriger un laboratoire. Néanmoins, l’article a le mérite de pointer les détails qui font mal, notamment le gâchis en temps et en argent que représentent toutes ces études dont les résultats ne se retrouvent jamais. A fréquenter chercheuses et chercheurs depuis presque dix-huit ans, j’ai entendu ici ou là, souvent sur le ton de la confidence, la plupart de ces critiques. Il y a quelque chose de sain et de salutaire à les voir, sans tabou, rassemblées sur la place publique.

Pierre Barthélémy