Nikola Tesla es-tu là ?

2H37RWF Nikola Tesla (1856-1943), 1919. Tesla in 1919 holding a gas-filled phosphor coated wireless light bulb which he developed in the 1890’s to replace incandescent lamp.

Le 7 janvier 1943, Nikola Tesla meurt, seul, croulant sous les dettes dans une chambre d’hôtel à New York. Une disparition bien triste pour celui qui a été une véritable « rock star » en tant que scientifique et inventeur de génie, à l’origine d’une partie de notre système électrique actuel. Depuis sa disparition, sa popularité n’a cessé d’augmenter. Dans une Grande traversée en quatre épisodes, sur France Culture, en compagnie d’historiens, d’auteurs et de réalisateurs, le journaliste Mattéo Caranta dresse avec nuance un portrait de ce personnage complexe, source de beaucoup de fantasmes.

 

Résumé

Comment parler de Nikola Tesla ? Ce premier épisode se penche sur le “roman Tesla”,  un homme dont la vie mêle sans cesse le réel et la fiction, le spectacle et la science. Une anomalie de l’histoire des sciences, tombée brutalement dans l’oubli.

En savoir plus

Nikola Tesla est un homme aux mille visages, doué d’une imagination débordante. Ses inventions participent de la modernité technique du XXe siècle. Parmi elles, le moteur à courant alternatif, qui structure encore aujourd’hui 80% de nos systèmes électriques. Il est aussi un pionnier de la radio, expérimentateur aux prémices des rayons X, inventeur du premier objet téléguidé, de la bobine Tesla, et de 300 autres brevets.

Personnage atypique pétri de phobies aux airs de gentleman victorien, Nikola Tesla incarne la figure du savant fou et solitaire. C’est l’une des raisons pour lesquelles il est difficile d’approcher Nikola Tesla : des pans entiers de son existence restent dans l’ombre et font l’objet de spéculations. Son rapport aux autres, l’absence apparente de vie affective, sa méthode de travail : tout, chez Nikola Tesla, interroge.

En réalité, Nikola Tesla s’inscrit dans une tradition scientifique, celle des cabinets de curiosité. Il fait voir des merveilles dans un contexte où le “faire” précède le “savoir”, où la science est encore en mouvement, où les règles rationnelles de la méthodologie et de la démonstration ne sont pas encore établies. Tesla fait voir des merveilles et rêve d’un monde futur forcément meilleur, libéré par ses inventions.

Un personnage romanesque à tous égards

Adulé puis oublié, Nikola Tesla devient, après sa mort, un véritable mythe de la pop culture américaine. La réalité historique de l’ingénieur laisse place au personnage de fiction. Il devient ainsi une référence que se réapproprient de diverses façons certaines théories du complot, qui en font la figure prophétique d’un fonctionnement occulte du monde ; les artistes, qui célèbrent sa capacité d’invention et de poésie pour nourrir leurs projets de fiction ; les pays, comme la Serbie et la Croatie, les deux terres d’origine de Tesla, qui l’érigent en héros national.

Scientifique, poète, inventeur, héros, exilé, savant fou sont les qualificatifs que, tour à tour, se voit attribuer Nikola Tesla. Alors comment raconter son histoire ? Qui est cet homme aux mille visages ? Ce savant méprisé par ses pairs et oublié ? Comment a-t-il construit sa propre mythologie ? Nous lui avons posé la question…

Premier épisode avec :

  • Aleksandar Protic, directeur d’une structure éducative dédiée à la vulgarisation scientifique, inspirée par Nikola Tesla
  • Jean Echenoz, écrivain, auteur notamment de Des éclairs, aux éditions de Minuit
  • Fleur Hopkins-Loféron, docteure en Histoire de l’art
  • Michael Almereyda, cinéaste, auteur du film Tesla (2020)
  • Martine Le Coz, écrivaine, autrice notamment de L’homme électrique, aux éditions Michalon
  • Vladimir Pistalo, historien, directeur de la Bibliothèque nationale de Serbie, auteur de Tesla : A Portrait with Masks, aux éditions Macmillan
  • Bernard W. Carlson, historien, auteur de Tesla : Inventor of the Electrical Age, aux éditions Princeton University Press
  • Patrice Carré, historien
  • Bernadette Bensaude-Vincent, philosophe des sciences, co-autrice avec Christine Blondel : Des savants face à l’occulte. 1870-1940, aux éditions de La Découverte
  • Lecture des textes de Nikola Tesla, par Olivier Martinaud
  • Lecture Des éclairs, de Jean Echenoz par l’auteur lui-même
  • 1. Nikola Tesla, es-tu là

    Mardi 16 août 2022

  • 58 mn
  • pour écouter :

 

Pour aller plus loin

  • L’autobiographie de Nikola Tesla, Mes inventions, est disponible aux éditions Ethos
  • L’homme électrique, de Martine le Coz, aux éditions Michalon
  • Histoire de l’électricité, de Christine Blondel, est disponible en édition poche
  • The Current War : Les Pionniers de l’électricité, un film d’Alfonso Gomez-Rejon (2017)
  • Coffee and Cigarettes, un film de Jim Jarmusch (2003)

Une Grande Traversée signée Mattéo Caranta, réalisée par Rafik Zenine.

Attachée de Production : Marie Viguier. Prise de son : Ludovic Auger, Morgane Danan, Helène Langlois. Mixage : Marie Lepeintre. Documentation : Anne Lise Signoret et Antoine Vuilloz. Traductions : Raphael Kraft et Nicolas Champeaux. Coordination : Christine Bernard.

 

LA GAUCHE ET LE TRANSGENRISME-La gauche et les gens ordinaires … et la religion du progrès

Jean-Claude Michéa -8 octobre 2014

Semblable au pauvre Orphée, le nouvel Adam libéral est condamné à gravir le sentier escarpé du «Progrès» sans jamais pouvoir s’autoriser le moindre regard en arrière. Voudrait-il enfreindre ce tabou – «c’était mieux avant» – qu’il se venait automatiquement relégué au rang de beauf ; d’extrémiste, de réactionnaire, tant les valeurs des gens ordinaires sont condamnées à n’être plus que l’expression d’un impardonnable «populisme». C’est que gauche et droite ont rallié le mythe originel de la pensée capitaliste : cette anthropologie noire qui fait de l’homme un égoïste par nature. La première tient tout jugement moral pour une discrimination potentielle, la seconde pour l’expression d’une préférence strictement privée. Fort de cette impossible limite, le capitalisme prospère, faisant spectacle des critiques censées le remettre en cause. Comment s’est opérée cette double césure morale et politique ? Comment la gauche a-t-elle abandonné l’ambition d’une société décente qui était celle des premiers socialistes ? En un mot, comment le loup libéral est-il entré dans la bergerie socialiste ? Voici quelques-unes des questions qu’explore, Jean-Claude Michéa dans cet essai scintillant, nourri d’histoire, d’anthropologie et de philosophie.

Philosophe socialiste d’inspiration orwellienne, Jean-Claude Michéa n’a pas attendu l’affaire du Sofitel de New York pour se démarquer de la « gauche DSK ». Sa philosophie politique des gens ordinaires est en effet bien éloignée des analyses du think-tank Terra Nova, dirigé par Olivier Ferrand, proche de l’ancien directeur du Fonds monétaire international. Ferrand suggérait récemment à tout futur candidat socialiste à la présidentielle de cibler électoralement les classes moyennes supérieures plutôt que les classes populaires, considérées comme irréductiblement réactionnaires – slogan possible : « Plutôt les bobos que les prolos »… Depuis Impasse Adam Smith (Climats, 2002), Michéa déconstruit la « religion du progrès » qui a égaré la gauche, acculée de courir après les prétendues avancées de la modernité. Car cette gauche « moderne » déteste regarder dans le rétroviseur ou éprouver le moindre pincement de cœur pour le monde d’hier, qu’elle juge forcément « réac’ ». Michéa se sent ainsi plus proche des partisans de la démondialisation que des apôtres de la globalisation, même amendée par l’inévitable discours sur la régulation, qui n’est, selon lui, qu’une façon d’aménager socialement le capitalisme financier. C’est en ce sens que la gauche « progressiste » est victime du Complexe d’Orphée. Cet Orphée qui rejoint au royaume des morts sa belle Eurydice, mordue par un serpent le jour de leurs noces, afin de la ramener dans le monde des vivants. Seule condition, lui intime Hadès : ne pas se retourner derrière lui. « Le tabou fondateur de toute pensée de gauche […] est bien cette interdiction religieuse de regarder en arrière ou, a fortiori, d’accorder le moindre intérêt à la recherche du temps perdu », écrit l’auteur.

Nicolas Truong sur philomag.com

Jeunisme, sans-frontiérisme, béatitude néotechnologique, ringardisation des vieux et de la culture populaire, rien n’illustrerait mieux cette gauche que les postures des Inrockuptibles, de Libération ou du Grand journal de Canal+ qui célèbre la transgression publicitaire et la subversion subventionnée, et ridiculise un peuple aux nappes à carreaux et aux cheveux gras, mis en scène par les Deschiens et autres humoristes au conformisme prétendument « décalé ». Pour que la gauche gagne et retrouve son tranchant, Michéa l’invite, au contraire, à s’intéresser aux « gens de peu », comme les peignait l’écrivain Pierre Sansot, c’est-à-dire à « la femme de ménage qui joue au loto tous les vendredis, à l’ouvrier qui lit L’Équipe ou la petite veuve qui promène son teckel ». Jean-Claude Michéa revisite cet « anarchisme tory », cette gauche à la fois radicale et conservatrice qu’il avait déjà décelée chez George Orwell – Orwell, anarchiste tory (Climats, 1995). Un socialisme qui accepte de regarder en arrière et qui ne considère pas les mœurs des gens ordinaires avec l’œil hautain de certains bourgeois des grands centres urbains. Une gauche proche d’Albert Camus et de Pier Paolo Pasolini, de John Ford et de Jacques Tati. Mais Jean-Claude Michéa n’a peut-être pas totalement perçu que la « bien-pensance » avait changé de camp. Et que ce n’est pas la « gauche sans papiers » mais « la droite décomplexée » qui est aux commandes, au sommet de l’État et dans les médias. Vous l’aurez en tout cas compris, aux primaires socialistes, Michéa optera pour un socialisme « primaire », celui des gens ordinaires.

 

Beaucoup se sont étonnés de la manière dont toute la gauche, de la plus molle à la prétendument plus radicale, s’est récemment et unanimement prononcée en faveur des choix du Planning familial, c’est-à-dire en faveur des idées de l’Église Trans. Il me semble que c’est se méprendre sur la nature (réelle) de la gauche. Comme le note Jean-Claude Michéa dans “Le Complexe d’Orphée” :
« Le basculement inévitable du libéralisme culturel dans le libéralisme économique possède, bien entendu, son pendant symétrique. Si la logique du capitalisme de consommation est de vendre n’importe quoi à n’importe qui (business is business), il lui est en effet indispensable d’éliminer un à un tous les obstacles culturels et moraux (tous les “tabous” — dans la novlangue libérale et médiatique) qui pourraient s’opposer à la marchandisation d’un bien ou d’un service (sous un capitalisme digne de ce nom, il doit être évidemment possible de louer à tout moment le ventre d’une “mère porteuse” ou de commander sur catalogue une épouse ukrainienne ou un enfant haïtien).
Le libéralisme économique intégral (officiellement défendu par la droite) porte donc en lui la révolution permanente des mœurs (officiellement défendue par la gauche), tout comme cette dernière exige, à son tour, la libération totale du marché. D’un point de vue topologique, on pourrait dire que le libéralisme est structuré comme un ruban de Möbius : il présente toujours deux faces apparemment “opposées”, mais qui, dans les faits, n’offrent aucune solution réelle de continuité. Tel est, en définitive, le véritable fondement de la division actuelle du travail entre la “droite” et la “gauche”, que seules les contraintes de la comédie électorale incitent encore à masquer sous les rhétoriques respectives des deux ailes du château libéral. »
C’était déjà des gens de gauche qui, dans les années 1970, se prononçaient plus ou moins ouvertement en faveur de la pédophilie. Et c’est aujourd’hui à gauche qu’on défend la prostitution comme un métier comme les autres, digne et même émancipateur. La gauche a toujours soutenu, au nom du progrès — aussi bien social que technologique —, tout et n’importe quoi.
Comme le souligne Michéa dans son livre, la gauche, c’est depuis longtemps déjà le parti de la transgression aveugle « de toutes les limites morales et culturelles léguées par les générations antérieures », en direction de « l’indifférenciation et de l’illimitation absolues ». « Aux yeux de l’intellectuel de gauche contemporain, il va nécessairement de soi que le respect du passé, la défense de particularismes culturels et le sens des limites ne sont que les trois têtes, également monstrueuses, de la même hydre réactionnaire. » C’est ainsi que la dévastation industrielle de la planète, en cours depuis déjà des décennies, et même des siècles, on la doit en (bonne) partie à la gauche — et aussi à la droite — et à son culte du développement technologique.
Beaucoup de gens continuent malgré tout d’associer la gauche à la lutte pour l’égalité, contre la hiérarchie et l’autoritarisme, pour l’émancipation, pour le « progrès social » — et la droite à la préservation des hiérarchies sociales, de l’autorité, de l’ordre établi. S’il y a du vrai là-dedans (surtout concernant la droite), il y a aussi beaucoup de faux. La fascination de la gauche pour le progrès technologique l’a toujours amenée (paradoxalement) à soutenir des horreurs, des choses hautement nuisibles pour le « progrès social », pour l’égalité, pour la démocratie. Il y a longtemps que la gauche n’est plus (réellement) une force en faveur de l’égalité, de la démocratie, de la justice, etc.
Certes, les visées transgressives de la gauche peuvent parfois produire des résultats qui se défendent :
« Il ne s’agit pas de nier que la révolution permanente des mœurs – que le capitalisme porte en lui comme la nuée l’orage – ne puisse induire, à la marge, certains effets d’émancipation tout à fait réels (le statut des femmes ou des homosexuels s’est, de toute évidence, objectivement amélioré au cours des dernières décennies). Le problème, c’est que le marché ne peut émanciper les êtres humains que selon ses propres lois (ce que Debord formulait, à sa manière, en écrivant que dans la société du spectacle “le vrai est un moment du faux”). Cela signifie que chacune de ces “libérations” particulières demeure structurellement soumise aux lois générales de l’aliénation capitaliste (“la femme qui ne se libère de la tyrannie de la tradition que pour se plier à celle de la mode” — écrivait par exemple Christopher Lasch — ou l’adolescent qui ne se révolte contre le pensionnat religieux que pour se soumettre aux diktats, bien plus sévères encore, de la “culture jeune”). » (Michéa, Le Complexe d’Orphée)
La gauche, c’est juste l’aile gauche du capitalisme technologique.

Résister au mensonge-vivre en chrétien dissident

de Rod Dreher  (Auteur), Hubert Darbon (Traduction)-14 avril  2021

éditions Artège

Né en 1967, Rod Dreher est journaliste pour le magazine The American Conservative. Il a collaboré auparavant au New York Times. Originaire d’une famille méthodiste, il se convertit au catholicisme en 1993 puis à l’orthodoxie en 2006. Son invitation à retrouver la tradition de philosophie morale aristotélicienne rencontre un puissant écho outre-Atlantique. Auteur du mémorable Comment être chrétien dans un monde qui ne l’est plus, succès de librairie aux États-Unis comme en Europe, l’auteur récidive avec Résister au mensonge, Vivre en chrétiens dissidents.

 

Après son brillant essai sur le « pari bénédictin », Rod Dreher développe une réflexion aussi puissante que féconde autour du soft totalitarisme occidental. Pas d’interdiction officielle d’opinion, pas de déploiement d’un État policier, mais l’émergence insidieuse d’une tyrannie douce qui, sous l’égide d’un credo progressiste, annihile tout esprit critique et paralyse jusqu’au plus indépendant des libres penseurs. Qu’est-ce que le soft totalitarisme ? Comment l’homme moderne en vient-il à renoncer à sa liberté d’expression et aux lumières du bon sens ? Pourquoi l’Occident est-il gagné par le novlangue et la réécriture de l’histoire ?
C’est en s’appuyant sur les précieux témoignages d’anciens dissidents des régimes communistes que le penseur américain répond aux interrogations de notre époque. Incisif et lucide, il place le chrétien devant le vertige des temps d’aujourd’hui et de demain et l’appelle à la foi profonde, à la résistance familiale, à la soif de la vérité, seules à même de fissurer les fantasmes d’une époque qui nous infantilise et nous noie dans les paradis artificiels.
Aiguillé par l’exigence de vérité, cet essai magistral nous donne les moyens de résister au mensonge qui ronge et liquéfie l’âme.

pour aller plus loin 

Les apparitions de Marie-Lourdes et le pélérinage du Rosaire vécu par Annie, hotesse

 

Il y a 13 lieux d’apparition de Marie, mère de Jésus, qui sont reconnus par l’Eglise catholique et d’autres qui, sans être reconnus, donnent lieu à des pèlerinages autorisés par elle.

Par ailleurs, l’Eglise orthodoxe reconnaît 5 apparitions mariales  en Egypte entre 1968 et 2009.

L’Eglise anglicane reconnaît aussi 3 apparitions mariales dont celle de Lourdes.

Parmi les 13 lieux d’apparition reconnus par l’Eglise 4 se situent en France : Laus (1664-1718) ( cf Notre Dame du Laus), La Salette (1846), Lourdes ( 1858) et Pontmain (1871).

Citons aussi,  hors de France, le pélerinage célèbre de Fatima (Portugal -1917)

Parmi les autres pélerinages autorisés mais non encore reconnus par l’Eglise, celui de Guadalupe au Mexique ( 1531) est le plus important de la chrétienté. ( cf Notre Dame de Guadalupe   ;      Avec 20 millions de personnes qui visitent la basilique Notre-Dame-de-Guadalupe de Mexico où est exposée son image, dont près de la moitié le 12 décembre (et les jours précédents), le sanctuaire marial de Notre-Dame de Guadalupe est le lieu de dévotion catholique le plus visité après le Vatican.

Les apparitions de “la belle Dame“, “aquero” à Bernadette Soubirous

Bernadette Soubirous

la maison du Pélerin 

Bernadette Soubirous n’était qu’une jeune adolescente de 14 ans lorsque la vierge Marie lui est apparue. Une série de 18 apparitions du 11 février  au 16 juillet 1858 transformera sa vie à tout jamais et fera d’elle la porteuse du message de Lourdes.

Fille de François et Louise Soubirous, Bernarde-Marie Soubirous est née à Lourdes le 7 janvier 1844 au moulin de Boly. Rapidement ses proches l’appeleront Bernadette. Ses parents ne sont pas pauvres, son père est meunier et locataire du moulin. Les affaires marchent bien. Elle est l’aînée de 9 enfants, dont 4 seulement arriveront à l’âge adulte. De santé fragile, en novembre 1844, elle ira en nourrice à Bartrès jusqu’en avril 1846. Elle revient au moulin, c’est l’époque du bonheur.

Son père et sa mère sont de braves gens, pieux et généreux avec les pauvres. Plus tard vont arriver les moments difficiles : décès des petits frères et soeurs et blessure grave du père au travail. Il perdra un oeil.

La “révolution industrielle” fera le reste. Le moulin ne rapporte plus de quoi payer le loyer et la famille est expulsée en juin 1854.

François, le père, loue un moulin plus petit et moins cher mais moins rentable. C’est à nouveau l’échec. Il devient manoeuvre. Louise, sa mère, va faire des ménages et Bernadette reste à la maison s’occuper de ses frères et de sa soeur. Elle ne va pas à l’école et parle le bigourdan. Elle ne va pas non plus au catéchisme et donc ne peut pas faire sa première communion.

En 1854, Bernadette est atteinte du choléra. Elle vivra mais restera très fragile.

En février 1857, leur cousin, Sajous, accepte de les loger gratuitement dans une pièce appelée “le Cachot“. C’est une ancienne cellule de prisonnier. Une seule pièce, sombre et malsaine, leur servira de cuisine et de chambre pour 6 personnes.

A partir de janvier 1858, elle ira à l’hospice des soeurs qui font aussi école (les soeurs de l’instruction chrétienne de Nevers). Elle va régulièrement, avec sa soeur et des amies de son âge, ramasser du bois mort pour se chauffer dans le glacial cachot.

“Que soy era l’immaculada Concepciou”

Ce 11 février 1858 elle va avec sa soeur Toinette et une amie à Massabielle (vieille pierre en bigourdan) pour ramasser du bois mort.

C’est là que, dans le creux du rocher, lui apparut la “belle dame”. A son retour à la maison, elle en parle à ses parents qui lui conseillent de n’en rien dire à personne. Ils ont bien assez de soucis comme ça…

Elle retourne à Massabielle le dimanche 14 février et à nouveau la dame lui apparait. Elle reste à genoux, sort son chapelet et prie. Son visage est radieux.

Le jeudi 18 février est le jour de la troisième apparition. La dame lui parle pour la première fois :

“Voulez vous me faire la grâce de venir ici pendant 15 jours ?”.

Puis elle ajouta

“Je ne vous promets pas de vous rendre heureuse en ce monde mais dans l’autre”.

Vendredi 19 février, 4ème apparition.

Samedi 20 février, 5ème apparition.

Dimanche 21 février, 6ème apparition.

Le lundi 22 février a été un jour sans apparition.

Mardi 23 février, 7ème apparition.

Mercredi 24 février, 8ème apparition au cours de laquelle la dame parle de nouveau :

“Pénitence, pénitence, pénitence. Vous prierez Dieu pour les pécheurs. Allez baiser la terre pour la conversion des pécheurs.”

C’est lors de la 9ème apparition, le Jeudi 25 février que la dame lui dit : “Allez boire à la fontaine et vous y laver” avant d’ajouter

“Vous mangerez de cette herbe qui est là”.

Bernadette fait donc un trou dans l’herbe, à l’endroit où elle se trouvait. De ce trou va jaillir la source.

Le vendredi 26 février a été un jour sans apparition.

Samedi 27 février, 10ème apparition. Les mêmes paroles que le 24 février sont prononcées.

Dimanche 28 février, 11ème apparition, les mêmes paroles sont de nouveau prononcées.

Lundi 1er mars, 12ème apparition.

Mardi 2 mars, 13ème apparition. La dame lui dit :

“Allez dire au prêtre qu’on vienne ici en procession et qu’on y bâtisse une chapelle”. 

Mercredi 3 mars, 14ème apparition et nouvelle demande la dame pour la chapelle.

Jeudi 4 mars, 15ème apparition sans demande et dernier jour de la quinzaine.

Les autorités de la ville empêchent à présent l’accès à la grotte. Elle sera interrogée plusieurs fois par la police mais ne variera jamais dans ses déclarations. On veut lui faire dire qu’elle a vu la vierge mais elle continuera à dire “la dame” ou “aquero”.

Le jeudi 25 mars, elle pourra retourner à la grotte. Ce sera la 16ème apparition. Bernadette demande son nom à la dame qui lui répond “Que soy era l’immaculada Concepciou” (je suis l’immaculée Conception).

Après avoir été menacée de prison, à la fin de la 17ème apparition du Mercredi 7 avril à laquelle le juge était venu assister, la flamme du cierge de Bernadette se mit à lécher sa main, sans la brûler. Un docteur présent sur les lieux, le docteur Douzous, confirmera les faits. C’est le miracle du cierge.

La 18ème et dernière apparition date du vendredi 16 juillet et il n’y eut pas de parole.

Lourdes en 1858

La vie de Bernadette Soubirous est largement détaillée ici. On en tirera seulement ces quelques extraits :

Le , Bernadette quitte les Pyrénées, qu’elle ne reverra jamais. Elle arrive le 7 à la maison mère, le couvent Saint-Gildard de Nevers.

Le , elle prend l’habit de novice et reçoit le nom de sœur Marie Bernard.

À partir de 1875, elle est constamment malade. Elle est atteinte de tuberculose et souffre de son asthme chronique. Elle prononce ses vœux perpétuels le . Après avoir fait ôter toutes les images pieuses de sa chambre pour ne conserver qu’un crucifix, elle meurt à l’infirmerie Sainte-Croix le , à 15 h 30, à l’âge de 35 ans.

Elle est canonisée ( cf là canonisation) le  par le pape Pie XI, non en raison des apparitions dont elle dit avoir été le témoin, mais eu égard à sa foi et à l’exemplarité de sa vie religieuse.

Avant cette date et pour les besoins de l’instruction du procès de béatification ( cf là), phase qui précède celle de la canonisation, son corps doit être exhumé : le cercueil est ouvert trois fois, le 22 septembre 1909, le 3 avril 1919 et 18 avril 1925. Les docteurs sont surpris que le cadavre ne répande aucune odeur vu la tuberculose osseuse et le chancre du genou de Bernadette Soubirous. L’odeur de sainteté étant un critère retenu pour la béatification, les autorités religieuses n’hésitent pas à faire appel à des médecins attestant avoir retrouvé le corps de la future sainte dans un état de « conservation extraordinaire »« intact » voire « in-corrompu » ( cf là l’incorruptibilité). Tel est le cas lors de la première exhumation de Bernadette Soubirous, les docteurs faisant état d’une « conservation extraordinaire » .

Le docteur Thérèse Valot, tenant compte de la présence de charbon et de sels, estime pour sa part que « le corps de Bernadette a été embaumé ». À chaque exhumation, l’épiderme est lavé à deux reprises avec des détergents. On souhaite exposer le corps, mais « la face noirâtre avec les yeux et le nez excavés auraient produit sans doute sur le public une impression pénible. » Aussi charge-t-on un artiste d’exécuter un masque de cire colorée qui, depuis, recouvre le visage de Bernadette. Pour une même raison, les mains subissent un traitement analogue.

Elle est béatifiée le 14 juin 1925 et le 3 août de la même année , son corps, placé dans une châsse de verre et de bronze, est transféré dans la chapelle Saint-Gildard de son couvent, où les pèlerins affluent aussitôt pour le voir.

Le pèlerinage du Rosaire 

 

Le pèlerinage du Rosaire ( cf là)

 

Le rosaire, à l’origine, est une forme de dévotion mariale qui consiste à réciter trois chapelets, composés chacun de cinq dizaines de grains qui symbolisent cinquante roses envoyées à Marie. Ces quinze dizaines permettent de méditer sur des « mystères » liés à Marie et à Jésus. Depuis le pontificat de Jean-Paul II, un quatrième chapelet a été ajouté, portant le total à vingt dizaines.

Le pape Jean-Paul II a expliqué dans la lettre apostolique Rosarium Virginis Mariae que « chaque mystère du chapelet, bien médité, met en lumière le mystère de l’homme. En même temps, il devient naturel d’apporter à cette rencontre avec la sainte humanité du Rédempteur les nombreux problèmes, préoccupations, labeurs et projets qui marquent notre vie. “Décharge ton fardeau sur le Seigneur : il prendra soin de toi” (Ps 55:23). Méditer le Rosaire consiste à confier nos fardeaux aux cœurs miséricordieux du Christ et de sa Mère. »

Les prières répétitives apparaissent dès les premiers siècles du christianisme. On attribue à Antoine le Grand, ermite dans le désert d’Égypte, l’invention du komvoskhinion, chapelet orthodoxe encore utilisé par les moines du mont Athos.

La dévotion du Rosaire, déjà en usage chez les Cisterciens depuis le XIIème siècle, s’est développée au XIIIème siècle sous l’influence des Dominicains. Il n’existe sous sa forme actuelle que depuis le XIV ème  siècle. C’est pourquoi de nombreux tableaux de la « Vierge du Rosaire » représentent celle-ci offrant une rose ou un chapelet à des membres de cet ordre : saint Dominique, le fondateur, ou Alain de La Roche et Catherine de Sienne.

 

Le Rosaire des Dominicains date du XIIIème siècle. Au terme de trois jours de prière dans la forêt de Bouconne, aux portes de Toulouse, Dominique de Guzmán aurait reçu le Rosaire comme moyen de convertir les populations adeptes du catharisme. Cette légende ne fait que traduire l’attachement des Dominicains à la récitation du Rosaire, mais celui-ci ne s’est stabilisé que beaucoup plus tardivement, vers le XVème  siècle.

C’est au frère dominicain Alain de la Roche, né en Bretagne en 1428, que l’on doit sa diffusion : il prêche en Flandre puis à Lille, où, en contact avec des monastères chartreux, il découvre les clausules de Dominique de Prusse, qui l’enthousiasment. Alain de La Roche devient alors l’apôtre du Rosaire, qu’il appelle « Psautier du Christ et de la bienheureuse Vierge Marie ».

Notre-Dame du Rosaire est dans le catholicisme une des nombreuses dénominations de Marie.

Pour accéder à la page des mystères du Rosaire 

Pour écrire cet article, j’ai rencontré Annie qui participe depuis 25 ans au pélerinage du Rosaire organisé par l’Association du Rosaire Bourgogne -Franche-Comté  comme il l’est aussi dans chaque région de France et des DOM-TOM. Il commence le premier lundi d’octobre. ( cette année il aura lieu du 4 au 9 octobre2022)

C’est un des plus grands pélerinages de Lourdes. ( on peut citer aussi  le pélerinage de l’Ordre de Malte, le pélerinage militaire international, le pélerinage national du 15 août, le pélerinage Lourdes cancer espérance, parmi environ 35 pélerinages nationaux et internationaux)  Le pélerinage du Rosaire  regroupe environ 50 000 pélerins. Les départ se font en TGV spéciaux et de jour depuis 2015. Pour la région, partent environ 1200 pélerins dont 80 malades et environ 200 jeunes des écoles catholiques de la région.

C’est une gigantesque organisation  pour le voyage d’abord et ensuite sur place. Le pélerinage du Rosaire  fut fondé en 1908 par l’ordre des Dominicains (ordre des frères prêcheurs). Il nécessite au départ et sur place  la présence de médecins, d’infirmiers, aide-soignants, brancardiers  qui accompagnent  les malades qui recevront  les soins nécessaires au cours du voyage et durant le pélerinage dans un hôpital construit à cet effet à l’intérieur du sanctuaire.

Les rôles de tous les accompagnateurs sont  très précis et l’organisation d’ensemble  est de “type militaire” dit Annie .

Il y a les hôtesses  qui accueillent, renseignent, aident à prier pour les chemins de croix, à recueillir l’eau de Lourdes aux fontaines, participent à la vente des livres, chapelets et autres objets en lien avec le pélerinage. Le service est entièrement bénévole sans autre avantage que la joie de servir. Les hôtesses porte un uniforme et tous les frais du séjour sont à leur charge.

photo hôtesses 2021

 

Plusieurs milliers d’hospitaliers et hospitalières sont au service des 1500 malades du pélerinage avec médecins, pharmaciens, infirmières, kinésithérapeutes, brancardiers … C’est une hospitalité d’accompagnement dans la prière des mystères du Rosaire   : mystères joyeux, douloureux, glorieux et lumineux   en lien avec la vie de Jésus et Marie. ( cf là  la page de présentation des mystères)

Les commissaires assurent le fonctionnement technique et l’organisation des cérémonies du Pélerinage du Rosaire. Ils constituent le service d’ordre durant cette semaine.

Enfin la chorale du Rosaire se constitue par région et se regroupe à Lourdes où elle anime les diverses célébrations.

Tous les jours les laudes ont lieu à 8h15 et les vêpres à 18h. Il ya aussi les confessions, les chemins de croix sur la colline ou dans la prairie. Il y a aussi les conférences grandes et moins grandes , les témoignages, les échanges autour de différents visages de l’Eglise ( action catholique des milieux indépendants, équipes du Rosaire, Espérance et Vie, fraternités laïques dominicaines, monde rural  etc…) Il y aussi le cinéma autour des thèmes en lien avec l’Eglise et son message.

Les guérisons de Lourdes

Les guérisons de Lourdes qui sont considérées comme miraculeuses par l’Église catholique, depuis les premières en 1858 jusqu’à 2020, sont au nombre de 70 reconnues  sur près de 7 200 jugées inexpliquées

Pour qu’une guérison soit reconnue comme miraculeuse par l’Église catholique, il faut qu’un groupe de médecins la déclare complète, durable et « inexplicable dans l’état actuel des connaissances médicales », puis qu’un évêque la déclare miraculeuse. Ces miracles sont attribués à la Vierge Marie, et ont contribué à faire des sanctuaires de Notre-Dame de Lourdes un important centre de pèlerinage.

En 1884, l’Église catholique a mis en place une structure (le bureau des constatations médicales) pour examiner les déclarations et, parfois, authentifier les miracles. Le processus d’authentification passe par trois grandes étapes : examen par le bureau médical de Lourdes (ancien bureau des Constatations), transfert au bureau médical international (comité médical international de Lourdes fondé en 1925), investigation par le diocèse d’origine de la personne guérie.

À ce jour (), sur plus de 7 300 dossiers de guérisons déposés à Lourdes depuis 1883, et considérées comme inexpliquées par le bureau des constatations, 70 guérisons ont reçu le statut de « guérison miraculeuse » après un processus qui s’étale sur plusieurs années ( de l’ordre de 10 ans), soit un peu moins de 1 %.

 

Seules les deux premières étapes ont un caractère véritablement scientifique (la dernière étape est essentiellement de nature religieuse) et mènent à une éventuelle déclaration du bureau sur le caractère non explicable scientifiquement au moment de la guérison. À cette étape, les médecins invités à s’exprimer (et l’avis ainsi formé) ne se limitent pas aux seuls médecins catholiques. Tout médecin présent peut tenter de proposer une explication naturelle à la guérison. Les critères de base examinés par le bureau médical sont les suivants :

  • la maladie doit avoir été elle-même authentifiée et le diagnostic confirmé préalablement à la supposée guérison ;
  • le pronostic doit être totalement clair pour les médecins (y compris quand il s’agit de lésions à caractère permanent ou d’un pronostic de décès) ;
  • la guérison doit être complète, immédiate, sans convalescence, définitive et sans rechute ;
  • aucun des traitements ne peut être considéré comme la cause de la guérison, ni y avoir contribué.
  • Dans la thèse de Justine louis  page 108( cf supra)
  • le nombre de guérisons retenues par le Bureau médical de Lourdes a diminué depuis plusieurs années.
  • Entre 1918 et 1947 soit 30 ans, (année de la création du CMIL), le Bureau enregistre 611 déclarations de guérisons, et en reconnaît 228318.
  • De 1947 à 1971 soit 25 ans , sur les 1 057 guérisons déclarées, 58 ont été retenues comme « certaines, définitives et extraordinaires »
  • Puis, de 1972 à 1990 ( soit 19 ans), 3 seulement ont été certifiées sur les 284 allégations reçues au Bureau320.

Annie a bien connu Jean-Pierre Bely originaire de la région. Le 66 ième miraculé de Lourdes est déclaré miraculé en 1999 après douze ans  d’examens divers. Il est guéri d’une sclérose en plaques.

Voir sur le site de l’Eglise catholique la déclaration de Claude Dagens alors évêque d’Angoulême  de reconnaître le 9 février 1999 la guérison de Jean-Pierre Bely comme un don personnel de Dieu

“Au nom de l’Église, je reconnais donc publiquement le caractère authentique de la guérison dont a bénéficié Monsieur Jean-Pierre BÉLY à Lourdes, le vendredi 9 Octobre 1987.
Cette guérison subite et complète est un don personnel de Dieu pour cet homme et un signe effectif du Christ Sauveur, qui s’est accompli par l’intercession de Notre Dame de Lourdes.”

 

Dans sa thèse soutenue en  2008 sur l’extraordinaire chrétien depuis Vatican II , Justine Louis écrit ceci page 97 à propos de la guérison de Jean-Pierre Bely :

“il n’est pas anodin de remarquer qu’en 1999, lors de la reconnaissance de la guérison de Jean­Pierre Bély, 66ème miraculé de Lourdes, son évêque, Mgr Dagens, décide de ne pas employer le mot « miracle ». L’évêque d’Angoulême préfère insister sur le caractère subjectif du « signe », en laissant chacun interpréter à sa manière la guérison : « J’ai interprété cette guérison comme un don de Dieu. Mais chacun est libre : d’autres peuvent penser autrement. »
Comme le rappelle le Dr Theillier, directeur du Bureau Médical de Lourdes : « On ne pourra jamais prouver un miracle, comme un miracle ne prouve rien en lui­ même »
, seule la foi apporte la certitude de la présence de Dieu dans la vie des hommes. Le miracle, lui, n’est qu’un signe qui ne peut être prouvé et qui laisse libre de croire. Bernadette Soubirous a dit : « Je ne suis pas amenée à vous faire croire, mais à vous le dire. » De plus, nous avons déjà souligné l’amalgame que certaines personnes opéraient entre les mots « miracle » et « prodige ». La hiérarchie catholique déplore que trop de fidèles perçoivent avant tout l’aspect extraordinaire du miracle. “

Voici aussi le témoignage de Soeur Bernadette Moriau, la 70 ième miraculée de Lourdes en 2008

 

Pour ceux qui voudraient approfondir l’extraordinaire chrétien dans l’Eglise catholique vous êtes invités à accéder à la thèse  d’histoire contemporaine de  Justine Louis soutenue à L’Université Jean Moulins Lyon III en 2008 :

L’Eglise catholique face à l’extraordinaire chrétien depuis Vatican II 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

“La synagogue brûle mais nous regardons ailleurs”- l’appel de Michel Onfray

Je relaie cet appel de Michel Onfray paru le 30 juillet dans le JDD

Le philosophe et essayiste Michel Onfray dénonce « un troisième temps de l’antisémitisme », alimenté selon lui par certains membres de la gauche, du Parti Communiste et de la France Insoumise notamment. 

Voici la tribune de Michel Onfray :  « Le service communication du président de la République avait fait savoir qu’à l’occasion de la commémoration de la rafle du Vél d’Hiv, il prononcerait à Pithiviers “un discours offensif”. Comme on pouvait s’en douter, ce fut une bouillie pour les chats dont la trame fut que l’antisémitisme était bel et bien là, mais chez Éric Zemmour, juif au demeurant, ou du côté d’une “extrême droite” fantasmée, qu’on songe en effet à ce qu’elle est vraiment en lisant Brasillach ou Rebatet, Déat ou Doriot. Le mot d’ordre était : la synagogue brûle, mais regardons ailleurs.

Nous sommes pourtant entrés dans le troisième temps de l’antisémitisme : après sa formule anti-judaïque chrétienne qui invoque le peuple déicide​, puis sa formule anticapitaliste qui, sauf rares exceptions, rassemble les socialistes du XIXe siècle qui, Marx et Engels compris, assimilent les Juifs au Capital et à l’Argent dont il faudrait se défaire, voici venu le temps de sa formule antisioniste qui permet à la gauche des barbelés d’inviter à la haine du peuple d’Israël depuis 1948 en invoquant colonialisme, crimes contre l’humanité et régime d’apartheid. Cet antisionisme procède d’un islamo-gauchisme dont ses partisans nient qu’il existe, c’est d’ailleurs leur signature, car le négationnisme est la meilleure façon de refuser le débat : on ne discute pas de ce qui n’existe pas !

Une proposition de résolution condamnant l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’apartheid à l’encontre du peuple palestinien” a été présentée par un certain nombre de député-e-s”, sic, dont Fabien Roussel, patron du PCF. Ce texte a été déposé par le député communiste Jean-Paul Lecoq, par ailleurs vice-président de la commission des affaires étrangères à l’Assemblée nationale ! Il est signé par 38 parlementaires issus des quatre groupes de gauche.

Des députés PCF, LFI, PS et EELV ont donc paraphé un texte qui invoque sans vergogne la domination d’un groupe racial” sur “un autre groupe racial d’êtres humains”. Les fascistes des années 1930, la véritable extrême droite donc, eussent aimé qu’on oppose ainsi la race juive à la race palestinienne afin de fustiger la première pour mieux célébrer la seconde ! Le Drumont de La France juive eût applaudi des deux mains. Et je ne vais chercher ma référence que de ce côté-là du Rhin…

Pourquoi le PCF se trouve-t-il en pointe sur ce genre de combat antisémite ? Et LFI en compagnon de route ? À cause d’un mythe gaullo-communiste qui s’avère le non-dit de la politique française alors qu’il en constitue l’axe depuis l’après-guerre. Cette gauche, si prompte à en appeler à l’Histoire, oublie ce qu’elle a été véritablement au profit d’une légende savamment entretenue par ceux qui assurent la domination gramscienne depuis l’après-guerre gaulliste. Car dans les années noires, nombre de socialistes ou de communistes ayant connu la Première Guerre mondiale soutiennent Pétain, sinon la collaboration, par pacifisme.

Les premiers gaullistes qui partent à Londres après l’Appel du 18 juin 1940 ne sont pas communistes puisqu’à cette époque le PCF soutient le pacte germano-soviétique qui, jusqu’au 22 juin 1941, invite à collaborer avec l’occupant nazi sous prétexte que marxistes-léninistes et nationaux-socialistes ont les mêmes ennemis : la City, les gaullistes, la ploutocratie, les États-Unis, le capitalisme et… les Juifs. Le PCF collabore donc.

Nous sommes entrés dans le troisième temps de l’antisémitisme

Pour preuve, dans l’édition de L’Humanité datée du 4 juillet 1940, on peut lire ceci : Travailleurs français et soldats allemands, il est particulièrement réconfortant, en ces temps de malheur, de voir de nombreux Parisiens s’entretenir amicalement avec des soldats allemands soit dans la rue, soit au bistrot du coin. Bravo camarades, continuez, même si cela ne plaît pas à certains bourgeois aussi stupides que malfaisants… “ Les bourgeois stupides et malfaisants, voilà un genre de petite musique très contemporaine.

C’est de Gaulle qui crée ce mythe d’une France gaullo-communiste résistante. Cette légende lui permet de rassembler les Français dans un temps où ils se trouvent plus divisés que jamais. S’il avait dû, lui qui disposait de la légitimité de la Résistance, demander des comptes après-guerre aux intellectuels, aux journalistes, aux écrivains, aux magistrats, à la police, à l’armée, aux universitaires, aux banquiers, aux apparatchiks du PCF donc, et à tant d’autres qui ont rendu l’Occupation possible, la France eût été proprement ingouvernable.​

Mais nous n’en sommes plus là.

À l’heure où tout le monde invoque l’Histoire, banco, allons-y : écartons les idéologues de cour et déconstruisons cette mythologie qui permet à la gauche” de croire qu’elle incarne systématiquement le camp du bien, de la morale et de la vertu, y compris quand elle pare son antisémitisme d’un antisionisme que partageait déjà le Grand Mufti de Jérusalem qui souhaitait ardemment la victoire du IIIe Reich.

Il y aurait en effet beaucoup à dire sur la panoplie de l’homme de gauche : de l’homme régénéré” à coups de tribunal révolutionnaire et de guillotine par Robespierre en 1793 à “l’homme déconstruit” de Sandrine Rousseau ; du colonialisme célébré par Jules Ferry qui, au nom des principes de 1789, envoie la soldatesque ​française en Algérie, à cette même idéologie soutenue par la guillotine activée pendant la guerre d’Algérie par un ministre de l’Intérieur SFIO qui avait pour nom François Mitterrand ; de la haine des homosexuels, de la contraception​, de l’avortement portée par le PCF dans les années 1950 à la marchandisation du corps humain soutenue aujourd’hui par une certaine gauche.

Un mot pour finir : à Tel-Aviv, où un ami m’avait hébergé dans le quartier de Jaffa, j’ai été réveillé le premier petit matin par l’appel du muezzin lancé du haut du minaret de l’une des quatre mosquées de la ville. Singulier régime d’apartheid celui dans lequel la race palestinienne” peut prier son Dieu en toute sécurité ! »

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

condamnant l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’apartheid contre le peuple palestinien,

présentée par Mesdames et Messieurs

JeanPaul LECOQ, Moetai BROTHERSON, Alain BRUNEEL, MarieGeorge BUFFET, André CHASSAIGNE, Pierre DHARRÉVILLE, JeanPaul DUFRÈGNE, Elsa FAUCILLON, Sébastien JUMEL, Karine LEBON, Stéphane PEU, Fabien ROUSSEL, Hubert WULFRANC,

Député‑e‑s.

auteur Jean-Paul Lecoq: Proposition de résolution condamnant l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’apartheid contre le peuple palestinien, n° 5222 , déposé(e) le mardi 10 mai 2022

Proposition de résolution nº 143 condamnant l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’apartheid à l’encontre du peuple palestinien enregistrée à l’Assemblée nationale le 13 juillet 2022

présentée par Mesdames et Messieurs

JeanPaul LECOQ (PC), Soumya BOUROUAHA( PC), Moetai BROTHERSON( Polynésie parti Tavini huiraatira), JeanVictor CASTOR ( Guyanne mouvement de décolonisation et émancipation sociale), Steve CHAILLOUX( Polyénsie Tavini huiraatira), André CHASSAIGNE,(Parti communiste) Pierre DHARRÉVILLE   (parti communiste)  , Elsa FAUCILLON  ( Parti communiste)     , Sébastien JUMEL ( Parti communiste)    , Emeline K/BIDI, ( FI)      Karine LEBON ( parti pour la Réunion)       Tematai LE GAYIC( Polynésieparti  Tavini huiraatira)  Yannick MONNET,   (, PC, gauche démocrate et socialiste) Marcellin NADEAU( St Pierre et Martinique parti Péyi-A), Davy RIMANE, (groupe communiste) Stéphane PEU  (PC)      , Fabien ROUSSEL, (PC)Nicolas SANSU,  (GDR)     JeanMarc TELLIER  ( PC) Jiovanny WILLIAM    ( GDR)        , Hubert WULFRANC,( PC) Idir BOUMERTIT, LFI)        Emmanuel FERNANDES,(LFI) ,David GUIRAUD (LFI)Julie LAERNOES,(EELV) Charlotte LEDUC   ( LFI)        , Pascale MARTIN,  ( LFI)  Francesca PASQUINI, (      Thomas PORTES,(PCF) Loïc PRUD’HOMME,(LFI) Sabrina SEBAIHI,( EELV) Ersilia SOUDAIS,(  LFI)     Aurélien TACHÉ,(les nouveaux démocrates) Bénédicte TAURINE,(LFI)

Député‑e‑s.

 

 

Proposition de résolution nº 5222 condamnant l’institutionnalisation par Israël d’un régime d’apartheid contre le peuple palestinien- Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 9 mai 2022. ( observation rajoutée :  texte présenté avant les élections législatives des 12 et 19 juin en métropole)

Exposé des motifs

 

Ce système de discrimination institutionnalisée en vue d’une domination permanente est construit sur la pratique régulière d’actes inhumains, tels que des exécutions arbitraires et extrajudiciaires, des actes de tortures, la mort violente d’enfants, ou le déni des droits humains fondamentaux. Les arrestations arbitraires et les détentions administratives de Palestiniens (y compris de nombreux enfants) soumis à des procès non équitables et aux actes de violence à l’égard des détenus, mais aussi au transfert de détenus palestiniens dans des prisons israéliennes constituent des atteintes au droit humanitaire international et aux droits de l’homme.

Comme le souligne, M. Michael Lynk, Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, » la répétition de ces actes sur de longues périodes, de même que leur aval par la Knesset et par le système judiciaire israélien, indique qu’ils ne sont ni aléatoires ni isolés, mais font partie intégrante du système de domination israélien. »

Dans les territoires palestiniens occupés, les forces israéliennes recourent régulièrement à une force meurtrière afin d’étouffer les actions de protestation de Palestiniens revendiquant le respect de leurs droits.

En mai 2021, lors des bombardements intensifs israéliens, sur des endroits densément peuplés où vivent des populations civiles, 260 Palestiniens ont été tués, dont 66 enfants, et 2 200 ont été blessés, « certains d’entre eux étant susceptibles de souffrir de handicap à long terme nécessitant une rééducation », selon le Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU (OCHA).

En Cisjordanie occupée, 77 personnes ont été tuées par les soldats israéliens, le résultat de la politique de l’armée israélienne autorisant à tirer à balles réelles sur des Palestiniens.

Le blocus de la bande Gaza institué depuis juin 2007 par Israël organise une politique inhumaine d’enfermement de toute une population. En quatorze années de blocus, la situation s’est considérablement dégradée, la population gazaouie n’a pas accès à son espace aérien, son espace maritime a été grandement amputé et les autorités israéliennes empêchent la plupart de la population de Gaza de traverser au Poste de contrôle d’Erez, seul point de passage entre Gaza et Israël par lequel les Palestiniens peuvent se rendre en Cisjordanie et à l’étranger. Ce blocus militaire israélien entrave l’accès à l’eau, l’assainissement et l’accès à l’énergie des deux millions d’habitants de la bande de Gaza.

Le coordinateur humanitaire de l’ONU pour les territoires palestiniens, déplorait déjà en 2010, ce blocus persistant « à l’origine de la détérioration en cours des déterminants sociaux, économiques et environnementaux de la santé. Il entrave la fourniture de matériel médical et la formation du personnel de santé et empêche les patients atteints de maladies graves d’obtenir en temps opportun des traitements spécialisés en dehors de Gaza. » L’Organisation mondiale de la santé (OMS) déclarait également en 2011, « le blocus compromet l’exercice du droit à la santé des Gazouis. »

La situation s’est largement détériorée depuis. La circulation des Palestiniens fait en effet aujourd’hui l’objet d’un contrôle sans précédent.

Les autorités israéliennes ont renforcé le blocus lors de la pandémie de Covid‑19. Lors des neuf premiers mois de 2021, 86 Palestiniens de Gaza en moyenne sortaient du territoire chaque jour par le passage d’Erez, soit 17 % seulement de la moyenne journalière de 500 enregistrée en 2019 et moins de 1 % de la moyenne quotidienne de plus de 24 000 enregistrée en septembre 2000, selon Gisha, une organisation israélienne de défense des droits humains. Ce blocus constitue une violation des droits humains fondamentaux et une violation du droit humanitaire.

La reconnaissance de la réalité de ce régime d’apartheid par l’ensemble de la communauté internationale est aujourd’hui indispensable pour permettre une résolution juste et durable du conflit israélo‑palestinien.

Depuis des années, il existe un nombre grandissant de travaux, d’enquêtes, de recherches d’universitaires, d’avocats, d’experts, d’associations, d’organisations et institutions internationales qui convergent pour la reconnaissance du fait qu’Israël a institué un régime d’apartheid à l’encontre de la population palestinienne.

De nombreux rapports, manifestations, tribunes, prises de position dressent ce même constat.

– Dès 2006, l’ancien président Carter, dans un livre sur Israël, osa faire figurer le mot dans son titre (Palestine : la paix, pas l’apartheid), il souleva des clameurs d’indignation.

– En 2014, le secrétaire d’État américain, John Kerry, lors d’une réunion à huis clos, avait averti Israël du risque de devenir un État d’ « apartheid » s’il ne faisait pas la paix rapidement avec les Palestiniens.

– Dix ans après, le 15 mars 2017, une agence de l’ONU publiait un rapport ([6]) qui, pour la première fois, prouvait qu’Israël soumettait les Palestiniens à un régime d’apartheid.

Émanant de la Commission économique et sociale pour l’Asie occidentale (ESCWA), le document avait été rédigé par Richard Falk, professeur de droit international et ex‑rapporteur spécial de l’ONU pour les droits de l’Homme en Palestine, et Virginia Tilley, professeure de science politique et spécialiste des conflits ethniques. Le rapport, qui préconisait le soutien à la campagne BDS, déclencha une réaction très violente de groupes de pression et des États‑Unis et d’Israël. Sous la pression, le secrétaire général de l’ONU Antonio Guterres demanda le retrait de ce rapport. Cette censure donna lieu à la démission de Rima Khalaf, secrétaire exécutive de l’ESCWA en signe de protestation.

– Le 5 février 2021, la Chambre préliminaire I de la Cour Pénale Internationale a décidé, à la majorité, que la compétence territoriale de la Cour dans la situation en Palestine, un État partie au Statut de Rome de la CPI, « s’étend aux territoires occupés par Israël depuis 1967, à savoir Gaza et la Cisjordanie, y compris Jérusalem‑Est » ([7]).

Le Rapporteur Spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme dans le territoire palestinien occupé a souligné que : “Cette décision ouvre la porte à ce que des allégations crédibles de crimes relevant du Statut de Rome fassent enfin l’objet d’une enquête et puissent éventuellement atteindre le stade du procès devant la CPI” /…/ Selon l’expert, les allégations de crimes graves qui pourraient faire l’objet d’une enquête par la Procureure de la CPI comprennent « les actions d’Israël pendant la guerre de 2014 contre Gaza, le meurtre et les blessures de milliers de manifestants en grande partie non armés pendant la Grande Marche du retour en 2018‑2019, et les activités de colonisation d’Israël à Jérusalem‑Est et en Cisjordanie ». « La Procureure peut également examiner les allégations de crimes graves impliquant des groupes armés palestiniens » ([8]).

Cette décision ouvre la voie à la justice pénale internationale pour examiner tout ce qui a été observé, documenté et dénoncé provenant du territoire palestinien (et ce depuis juin 2014). Elle constitue un grand pas pour mettre un terme à l’impunité de l’État israélien et garantir la justice. Elle revêt non seulement une portée juridique, mais également une portée symbolique importante.

– Le 27 avril 2021, l’ONG de défense des droits de l’homme, Human Rights Watch publie un rapport ([9]) qui analyse le traitement par Israël des Palestiniens.

Kenneth Roth, son directeur, indique qu’Human Rights Watch est arrivé à la conclusion que les crimes contre l’humanité d’apartheid et de persécution sont commis par le gouvernement israélien contre une partie de la population palestinienne. Le rapport est fondé sur deux ans d’enquête et deux décennies de travail en Israël et dans les territoires occupés. En usant du terme « apartheid », il ne s’agit pas de faire une analogie historique, mais d’appliquer le droit international. L’ONG rappelle que ce mot trouve son origine en Afrique du Sud, mais il a un statut en droit international, dans la convention de 1973 sur l’apartheid et dans le statut de Rome de la Cour pénale internationale (CPI), tous deux ratifiés par de nombreux États.

– Dans son rapport ([10]) du 1er février 2022, intitulé « L’Apartheid commis par Israël à l’encontre des Palestiniens. Un système cruel de domination et un crime contre l’humanité », Amnesty International montre que les saisies massives de biens fonciers et immobiliers palestiniens, les homicides illégaux, les transferts forcés, les restrictions draconiennes des déplacements, ainsi que le refus de nationalité et de citoyenneté opposé au peuple palestinien, sont autant de facteurs constitutifs d’un système qui peut être qualifié d’apartheid en vertu du droit international.

Réalisées en concertation avec des experts internationaux et des associations palestiniennes, israéliennes et internationales, les recherches d’Amnesty International démontrent que ce système correspond à la définition juridique de l’apartheid. Il s’agit d’un crime contre l’humanité définie par la Convention sur l’apartheid de 1973 et le Statut de Rome de la Cour pénale internationale de 1998. Amnesty international appelle ainsi la Cour pénale internationale (CPI) à considérer la qualification de crime d’apartheid dans le cadre de son enquête actuelle dans les territoires palestiniens occupés et appelle tous les États à exercer la compétence universelle afin de traduire en justice les personnes responsables de crimes d’apartheid.

– Le 25 mars 2022, dans un rapport sur la situation des droits de l’homme dans les territoires palestiniens occupés depuis 1967, le Conseil des droits de l’homme de l’ONU, par la voix de son rapporteur spécial, Michael Lynk, a reproché à la communauté internationale d’avoir permis à Israël d’y avoir instauré pendant des décennies d’occupation un système politique qu’il a qualifié d’ « apartheid ». Ce rapport répondait à la question de savoir si les pratiques répressives d’Israël « au cours de son régime qui a duré cinquante‑cinq ans » avaient évolué d’une « occupation sans fin » vers quelque chose « de plus sombre, de plus dur et de plus atroce ». Dans son étude, le Rapporteur Spécial conclut que, le système politique appliqué aux territoires palestiniens occupés répond à la norme de preuve concernant l’existence de l’apartheid.

Premièrement, un régime institutionnalisé d’oppression et de discrimination raciale systématique a été instauré. Les Juifs israéliens et les Arabes palestiniens de Jérusalem‑Est et de Cisjordanie vivent sous un régime qui différencie la répartition des droits et des avantages sur la base de l’identité nationale et ethnique, et qui assure la suprématie d’un groupe sur l’autre. Les différences dans les conditions de vie et les droits liés à la citoyenneté sont flagrantes, profondément discriminatoires et maintenues par une oppression systématique et institutionnalisée.

Deuxièmement, ce système de règle étrangère a été établi dans l’intention de maintenir la domination d’un groupe ethnique‑national‑racial sur un autre. Les dirigeants politiques israéliens, passés et présents, ont déclaré à plusieurs reprises qu’ils avaient l’intention de conserver le contrôle de l’ensemble du territoire occupé afin d’agrandir les blocs de terre pour les colonies juives actuelles et futures, tout en confinant les Palestiniens dans des « réserves de population ». Dans ce système particulier, les libertés d’un groupe sont inextricablement liées à l’assujettissement de l’autre groupe.

Enfin, ce système de discrimination institutionnalisée en vue d’une domination permanente est construit sur la pratique régulière d’actes inhumains : exécutions arbitraires et extrajudiciaires, des actes de tortures, la mort violente d’enfants, ou le déni des droits humains fondamentaux.

II‑Reconnaissance de l’État de Palestine

En outre, au‑delà de la condamnation du régime d’apartheid instauré par l’État d’Israël, la présente proposition de résolution réaffirme que la solution de deux États suppose la reconnaissance de l’État de Palestine aux côtés de celui d’Israël et invite, par conséquent, le Gouvernement français à reconnaître l’État de Palestine en vue d’obtenir un règlement définitif du conflit, conformément à la résolution de l’Assemblée nationale portant sur la reconnaissance de l’État de Palestine, adoptée le 2 décembre 2014.

Plus de soixante‑dix ans après la partition de la Palestine, il est plus que temps de reconnaître l’État de Palestine comme un État souverain et autonome. Il s’agit de la seule solution possible pour mettre fin à toutes les formes de violence et de discrimination, et pour ouvrir une nouvelle phase historique de paix, de coopération et de coexistence, fondée sur la reconnaissance et le respect mutuel des deux peuples, israélien et palestinien.

139 pays reconnaissent déjà l’État de Palestine. En octobre 2014, le parlement britannique s’est prononcé pour la reconnaissance de l’État de Palestine par le Royaume‑Uni ; le 30 octobre 2014, la Suède a reconnu officiellement l’État palestinien.

La France doit s’engager, à son tour, en faveur d’une paix durable au Proche‑Orient en reconnaissant aujourd’hui l’État palestinien. Elle peut, comme elle l’avait fait lors du vote du 29 novembre 2012 à l’Assemblée générale de l’ONU, qui avait accordé à la Palestine le statut d’État observateur non‑membre auprès de l’Organisation des Nations Unies, être à l’initiative au sein de l’Union européenne dans cette démarche de reconnaissance de l’État palestinien.

Les auteurs de cette proposition de résolution invitent ainsi la France à prendre ses responsabilités et faire preuve de cohérence si elle veut restaurer sa crédibilité sur la scène internationale.

III- Reconnaissance de la légalité de l’appel au boycott des produits israéliens

Enfin, la présente proposition de loi rappelle que la France a été condamnée par la Cour européenne des droits de l’homme pour avoir interdit l’appel au boycott des produits israéliens dans un arrêt du 11 juin 2020 (CEDH, 11 juin 2020, arrêt Baldassi et autres c. France, nos 15271/16 et 6 autres). En effet, la Cour européenne des droits de l’homme a jugé que l’appel au boycott des produits israéliens ne peut pas en soi constituer une infraction pénale : il est, en effet, protégé par la liberté d’expression.

La France n’ayant pas fait appel de l’arrêt, celui‑ci est donc juridiquement définitif depuis le 11 septembre 2020 ([11]). Conformément à l’article 46 de la Convention européenne des droits de l’homme, l’exécution d’un arrêt de la Cour EDH condamnant un État implique, en principe, que cet État prenne toutes les mesures qu’appellent, d’une part, la réparation des conséquences que la violation de la convention a entraînées pour le requérant et, d’autre part, la disparition de la source de cette violation.

En conséquence, les autorités françaises, en particulier le ministère de la Justice aurait dû abroger les circulaires Alliot‑Marie du 12 février 2010 ([12]) et Mercier du 15 mai 2012 ([13]) lesquelles prescrivent aux procureurs de poursuivre les personnes appelant au boycott des produits israéliens dans le cadre de la campagne internationale Boycott Désinvestissement Sanction (BDS).

Or, non seulement, lesdites circulaires n’ont pas été abrogées, mais le 20 octobre 2020, le ministère de la Justice a adopté une dépêche adressée aux procureurs consacrée « à la répression des appels discriminatoires au boycott des produits israéliens » ([14]), qui s’efforce de préserver la pénalisation à la française des appels au boycott. La dépêche affirme même que les circulaires Alliot‑Marie et Mercier sont toujours valables et que les opérations appelant au boycott des produits israéliens sont encore susceptibles de constituer une infraction.

Le Gouvernement a de nouveau porté atteinte à la liberté d’expression en prononçant, le 9 mars 2022, sur le fondement de l’article L. 212‑1 du code de la sécurité intérieure (CSI), la dissolution du Comité Action Palestine et du Collectif Palestine Vaincra.

Le 29 avril 2022, le Conseil d’État a suspendu, en urgence, l’exécution des décrets de dissolution. Le juge des référés considère que « l’instruction comme les débats lors de l’audience n’ont pas établi que les prises de position du Comité Action Palestine, bien que radicales voire virulentes sur la situation au Proche‑Orient et le conflit israélo‑palestinien, constitueraient des incitations à la discrimination, la haine et la violence pouvant justifier une mesure de dissolution. De la même façon, il retient que l’appel au boycott de produits israéliens par le Collectif Palestine Vaincra ne peut en soi justifier une mesure de dissolution, en l’absence d’autres agissements incitant à la haine ou à la violence. » ([15])

Le Conseil d’État a rappelé que « l’appel au boycott, en ce qu’il traduit l’expression d’une opinion protestataire, constitue une modalité particulière d’exercice de la liberté d’expression et ne saurait par lui‑même, sauf circonstances particulières établissant le contraire, être regardé comme une provocation ou une contribution à la discrimination, à la haine ou à la violence envers un groupe de personnes, susceptible de justifier une mesure de dissolution sur le fondement du 6° de l’article L. 212‑1 du code de la sécurité intérieure. En l’espèce, il ne ressort pas des éléments versés à l’instruction menée par le juge des référés que la participation du groupement de fait à des campagnes de boycott de produits israéliens se serait accompagnée d’agissements susceptibles de justifier une mesure de dissolution fondée sur le 6° de l’article L. 212‑1. »

Ainsi, il appartient à l’État français, condamné par la Cour européenne des droits de l’homme et par le Conseil d’État, de reconnaître que l’appel au boycott est protégé par la liberté d’expression. Les auteurs de cette proposition de résolution lui rappellent qu’ « en droit international, le boycottage est considéré comme une forme légitime d’expression politique, et que les manifestations non violentes de soutien aux boycotts relèvent, de manière générale, de la liberté d’expression légitime qu’il convient de protéger. » ([16])