Vu sur le journal de la science
S’engager dans une pratique régulière de la méditation modifie durablement le fonctionnement du cerveau, selon une étude menée par par des chercheurs de l’Hôpital Général du Massachusets (Boston, Etats-Unis), et publiée le 1er novembre 2012 dans la revue Frontiers in Human Neuroscience.
Si les neurologues savaient depuis longtemps que le cerveau d’une personne en train de méditer a un fonctionnement différent de celui habituel, cette étude vient aujourd’hui montrer que la méditation peut aussi engendrer des modifications neuronales durables, c’est-à-dire subsistant après l’activité de méditation proprement dite.
Plus encore, ces modifications durables semblent pouvoir apparaître assez rapidement. En effet, l’étude menée par les chercheurs de l’Hôpital Général du Massachusets a porté sur des individus initialement novices en matière de pratique méditative, et qui ont suivi des cours de méditation sur une durée de 8 semaines seulement.
Le fonctionnement de l‘amygdale modifié
Plus précisément, qu’ont découvert les chercheurs ? Ils ont constaté une modification dans le fonctionnement de l’amygdale, une zone du cerveau associée au traitement des émotions, et plus particulièrement impliquée dans les émotions telles que la peur, l’aversion et l’anxiété.
Pour parvenir à ce résultat, les chercheurs ont formé deux groupes de volontaires, lesquels ont tous deux suivi des cours de méditation pendant huit semaines. Mais alors que les cours suivis par le premier groupe étaient consacrés à une méditation orientée vers le développement de la conscience de soi (appelée « méditation de pleine conscience », cette technique consiste à se concentrer sur un phénomène physiologique propre, comme sa respiration, en ramenant à chaque fois ses pensées vers la conscience de ce phénomène), les cours suivis par le deuxième groupe étaient plutôt orientés vers l’aptitude à faire émerger le sentiment de compassion pour autrui.
Au terme de ces huit semaines, 12 volontaires au sein de chacun de ces deux groupes ont été exposés à une série de 216 photographies, dont certaines véhiculaient des émotions positives (joie, sérénité, etc.), d’autres des émotions neutres, et d’autres enfin des émotions négatives (souffrance, peur, dégoût, etc.). Pendant le défilement des photographies, l’activité cérébrale des volontaires était analysée via imagerie à résonance magnétique fonctionnelle, une technologie qui permet de cartographier les variations d’activité du cerveau au cours du temps.
Une moindre sensibilité émotionnelle aux stimulations extérieures
Résultat ? Chez les volontaires qui avaient suivi des cours de méditation orientée vers le développement de la conscience de soi (la méditation dite de « pleine conscience »), l’activité de l’amygdale était sensiblement diminuée pour tous les types de photographies, traduisant donc un abaissement de la réponse émotionnelle aux photographies visionnées. D’une certaine manière, les volontaires de ce groupe étaient devenus émotionnellement « moins sensibles » aux stimulations de leur environnement.
Quant aux volontaires qui avaient pratiqué une méditation orientée vers le sentiment de compassion, le résultat a été là aussi un abaissement de l’activité de l’amygdale, mais uniquement pour les photos à contenu émotionnel positif et neutre. En revanche, pour les photos à contenu émotionnel négatif, comme par exemple le visage d’une personne en train de souffrir, les chercheurs ont observé une augmentation de l’activité de l’amygdale. Selon les chercheurs, ce phénomène est la conséquence directe du développement du sentiment de compassion induit par le type spécifique de méditation auquel ils avaient participé.
Si la pérennité des changements cérébraux induits par la méditation, pointés par cette étude, constitue à l’évidence un résultat important, il faut toutefois noter qu’une étude précédente avait déjà trouvé des résultats allant dans cette direction. Cette étude, publiée en janvier 2011 dans la revue Psychiatry Research Neuroimaging, avait déjà montré que la pratique régulière de la méditation avait pour effet de diminuer la quantité de matière grise présente dans l’amygdale (la matière grise est constituée de neurones, en opposition à la matière blanche qui est constituée de fibres nerveuses).
Ces travaux, publiés sous le titre « Mindfulness practice leads to increases in regional brain gray matter density », avaient également pointé une augmentation de la production de matière grise dans la partie gauche de l’hippocampe, une zone du cerveau connu pour son implication dans les mécanismes de la mémoire, mais aussi dans le développement de la conscience de soi, le sentiment de compassion, et l’introspection.