(Dans sa sagesse infinie Patanjali enseigna aux hommes (en recherche)

-       ˆ communiquer efficacement : Mahabhashya, traitŽ de grammaire

-       ˆ conserver santŽ et longŽvitŽ : AyurvŽda, systme traditionnel indien de santŽ

-        

-       ˆ trouver la paix mentale : Yoga-sutra)

(Certains situent ces ouvrages entre 200 et 800 avant JC dĠautres jusquĠˆ 200 aprs JC)

 

 LES YOGA SóTRAS DE PATANJALI : La maturitŽ de la joie par Jean Bouchart dĠOrval 1992- extraits et rŽsumŽ

 

 

(LĠouvrage est composŽ de 4 Ç pada È (chapitres) et en tout de 195 Ç sutra È. Tous les sutras sont interdŽpendants et constituent ensemble Ç un fil qui conduit au yoga È)

 

Prologue :   Quelque chose dĠimmense est en route. LĠHeure vient dŽsormais o la lumire enfouie dans notre cÏur depuis le dŽbut montera ˆ nos lvres en toute clartŽ. Mais cette poussŽe dŽcisive vers le haut touchera ceux qui veillent.

 

Il nĠy a quĠune joie, cĠest la joie.

 

É A toutes les Žpoques, des tres de gr‰ce, devenus un avec la parole, cĠest-ˆ-dire devenus un avec le silence qui la sous-tend, lĠont rŽvŽlŽ ˆ lĠhumanitŽ en marche, qui en a retenu quelques uns.

 

AssurŽment, le ma”tre de la parole pour lĠOccident fut  le Christ.

 

Notre philosophie sĠest coupŽe de lĠexpŽrience directe de la vŽritŽ de lĠtre.

Les textes sacrŽs occidentaux demeurent Žtrangement silencieux sur lĠaspect pratique de la vie spirituelle. ComparŽe ˆ lĠOrient notre indigence para”t incroyable.

 

CĠest dans cette perspective que sĠouvre le dialogue avec PATANJALI.

 

Le PATANJALI YOGA DARSHANA (Ç la vision de lĠUnique de Patanjali È) ne peut que faire redŽcouvrir la splendeur de la parole celle-lˆ mme que JŽsus a rŽvŽlŽe ˆ lĠOccident. (195 aphorismes traduits ˆ partir de lĠoriginal sanskrit)

Les aphorismes sont le fruit de lĠexpŽrience directe non un amoncellement de spŽculations intellectuelles.

LĠobjet des Sžtras est la rŽalisation spirituelle. Le chemin pratique ouvert par Patanjali nous sort enfin du monde ŽtriquŽ de la question et de la rŽponse.

 

Le commentaire se rŽfre souvent ˆ lĠenseignement du Christ.

Quand lĠessentiel Žmerge enfin, la vie entire peut devenir un chant, une danse.

 

 

UNE REVELATION MAGISTRALE :

Sans doute lĠun des plus anciens et des plus importants textes ˆ jamais avoir ŽtŽ rŽdigŽ sur la rŽalisation spirituelle.

Il dŽcrit comment la lumire de notre nature vŽritable fait son chemin dans ce que nous appelons notre vie.

Bien quĠoriginaire de lĠInde il ne fait jamais rŽfŽrence aux dŽitŽs ou rites et croyances de cette rŽgion.

Il nĠy a ni Occident ni Orient, il nĠy a que la Connaissance. Elle permet de prŽciser et dĠarticuler avec lĠenseignement de JŽsus, figure centrale de lĠhistoire de lĠhumanitŽ et de lĠOccident en particulier.

 

Tristesse, morositŽ, culpabilitŽ, remords, pleurs, grincements de dents, maladie, pauvretŽ, misre, mort, peur, souffrance, ne nous font aucunement progresser vers la rŽalisation spirituelle. Un esprit complaisant dans tout cela dŽnote moins la saintetŽ que lĠinsalubritŽ mentale.

Les aphorismes ont ŽtŽ traduits en sanskrit  qui signifie Ç correct È, Ç juste È. Cette langue antique, vŽnŽrable, ajoute ses vibrations profondŽment juste pour lĠ‰me. Le sanskrit constitue une langue sacrŽe. Nous savons peu de chose sur lĠauteur mme, pas sžr quĠil sĠagissait dĠun seul auteur. Il a sans doute ŽtŽ consignŽ au IIIime sicle avant JC.

QuĠon le dise dans lĠalphabet devanagari (=lieu du divin) ou romain la prononciation juste du sanskrit demeure trs importante.

 

Mme si elle expose la vision de lĠUnique, la dŽmarche est dualiste dans sa forme en ce sens que lĠauteur tient pour acquise la rŽalitŽ du mental par rapport au Soi. Cette approche a la vertu de se mettre au niveau de lĠhumanitŽ errante pour lĠaccompagner dans sa marche vers sa vraie nature. Il sĠagit dĠune approche pratique et non philosophique.

 

Le chemin vers le Simple est simple. LĠInde recle une quantitŽ de textes sacrŽs ou philosophiques et les bibliothques du monde entier sont engorgŽes par lĠaffluence de textes dĠEcoles tentant ˆ rŽfuter les hŽrŽsies des autres Ecoles, par exemple, les interminables querelles entre bouddhistes et hindous. On a souvent opposŽ les voies dites non duelles, ou voies abruptes, ˆ celles rŽputŽes duelles ou progressives.

Ce qui compte cĠest lĠarrire-plan duquel tout vient et vers quoi tout va. Les yoga Sžtras empruntent souvent le langage dualiste du Samkhya ( une des Ecoles de lĠInde) entre autre ce qui a trait ˆ Purusha et Prakiti ( le Soi et le monde)

Patanjali insiste dans son exposŽ magistral autant sur abyasa, la pratique que sur vairagya, lĠŽquanimitŽ qui est lĠabsence dĠarrivisme et le fait quĠil nĠy a pas une personne qui se libre.

La fin de lĠerrance de lĠhomme est possible gr‰ce aux 8 branches du yoga qui rappellent lĠoctuple sentier du Bouddha.

Le chemin qui mne du premier mot de Patanjali : (Ç atha È : dŽsormais) au dernier Ç iti È :ainsi) expose la vision de lĠUnique sans compromis : Ç DŽsormais il en est ainsi È. CĠest le Ç ainsi soit-il È ou Ç Amen È (Amen vient de lĠhŽbreux am”n  qui dŽrive du verbe aman qui signifie Ç ne fait quĠun avec È.

 

 

LE SAMċDHI

(Il dŽfinit le yoga et ses caractŽristiques, expose les problmes rencontrŽs pour rŽaliser lĠŽtat de yoga, ainsi que les moyens de les rŽsoudre)

 

I.1 DŽsormais commence la rŽvŽlation du yoga :

( Atha=maintenant, yoga=Žtat dĠunitŽ, anusasanam= des instructions, un ŽclairageÉ ÈMaintenant que vous tes prts, votre capacitŽ dĠtre va vous tre rŽvŽlŽe È. La motivation, lĠintensitŽ de la demande. CĠest cette Žnergie qui est le moteur de la recherche Ç yoga È : ne perdons pas de vue quĠil sĠagit dĠun Žtat, dĠun Žtat dĠunitŽ.)

 

Le yoga signifie lĠUnique, la pure existence. Il rejoint le cÏur des hommes dans toutes les contrŽes et les traditions. Les opprimŽs sont ceux qui entretiennent lĠidŽe que quelque chose dĠextŽrieur les tourmente.

Anusasanam : Il sĠagit dĠune discipline donc dĠun apprentissage pratique qui sĠadresse ˆ ceux qui sont prts ˆ aller au fond des choses et ˆ approfondir la joie.

 

Le ma”tre de Nazareth reprend cette parole  dĠIsa•e :

Ç LĠesprit du Seigneur est sur moi,

Parce quĠil mĠa consacrŽ par lĠonction,

Pour porter la bonne nouvelle aux pauvres ;

Il mĠa envoyŽ annoncer aux captifs la dŽlivrance et aux aveugles le retour ˆ la vue,

Renvoyer en libertŽ les opprimŽs,

Proclamer une annŽe de gr‰ce du Seigneur È

 

 

I.2 Le yoga est la cessation de la fragmentation du mental :

(Yoga se produit lorsque le Ç mouvement sortant È (incohŽrent) de notre mental est arrtŽ, interrompu-Il faut considŽrer que les yoga-sutra de Patanjali sont une È table des matires È dont le ma”tre donne jour aprs jour un enseignement. Donc autant de ma”tres autant dĠouvrages. DĠo la variŽtŽ des Ç commentaires È et Ç interprŽtations È quĠa suscitŽ au cours des sicles le    texte de  Patanjali-S nĦ3)

(Yogascittavrttinirodhah= Lorsque les pensŽes cessent, lĠŽtat dĠunitŽ se rŽvle.)

 

Tout est dit ici. On parle de champ mental ds quĠil existe un sujet et un objet.

La parole-nirodha- porte en elle toute lĠessence de la rŽalisation spirituelle. Elle est la cessation, le silence.

 

Mais quĠest ce que le silence ? Le silence imposŽ par la pensŽe nĠest pas le silence. CĠest une lutte, un malaise.

 

On peut traduire ce sžtra de 2 manires soit Ç cessation de lĠactivitŽ mentale È soit Ç cessation de la fragmentation mentale È. La premire traduction est proposŽe par certaines techniques ˆ la mode. Elle nĠest perue que comme absence de pensŽe.  Tout tre humain qui conna”t sa nature vŽritable est un authentique prophte car il prophŽtise, il parle pour.

 

 Quand la parole montre la diffŽrence entre les hommes, elle les divise quand elle fait signe vers lĠessentiel elle les rassemble. La mŽditation cĠest maintenir son attention su cela qui en nous conna”t.

Rien ne peut perturber la mŽditation car Ç tout dŽrangement È est encore peru et portŽ par la mme conscience, la mme unique rŽalitŽ ocŽanique.

 

Entre les deux traductions possibles de ce sžtra se dŽploie le spectre entier de la vie spirituelle.

 

I.3 La conscience est ds lors Žtablie dans sa nature vŽritable :

(Drastar=celui qui voit, il dŽsigne lĠatman, lĠ‰me, le soi, lĠessence de lĠtre. Ç En consŽquence, notre Conscience, sĠŽtablit dans sa vŽritable nature È)S nĦ 8)

 

La vŽritŽ est donc quelque chose a dŽcouvrir ˆ dŽvoiler : retirer le voile qui cache cela qui voit.

 

I.4 Autrement elle sĠidentifie ˆ ses formes :

Le systme nerveux est un instrument de perception qui permet la saisie des formes extŽrieures mais aussi la conscience de soi. Le dŽvoilement final suppose quĠon laisse toutes nos re-prŽsentations pour sĠattacher aux prŽsentations. Maintenir son attention sur cette prŽsence  en dehors de toute pensŽe, expŽrience, Žmotion, voilˆ ce quĠest la mŽditation. CĠest vivre la cessation de la fragmentation. La conscience est soit au niveau de la fragmentation soit en Žtat de cessation.

 

I.5 La conscience prend 5 formes mentales, qui peuvent tre porteuses de souffrance.

(Le Ç mange des pensŽes : citavrtti. Il existe quatre Žtats

- Susupta : Pas de veille pas de rve : CĠest le sommeil sans rves

-Svapna : pas de veille, mais du sommeil plus du rve

-jagrat Svapna : veille plus rve (mŽlangŽ). CĠes cet Žtat que nous vivons habituellement, cĠest cet Žtat qui nous crŽe nos malheurs, car nous sommes inconscients de rverÉNous prenons nos rves pour la rŽalitŽ. LĠaction  ne sera donc pas en adŽquation avec la rŽalitŽ.

-Turya. : Conscience de rver lorsquĠon rve. CĠest cet Žtat qui transforme. CĠest Ç tre prŽsent au prŽsent È. CĠest tre conscient dĠtre sans tre pris dans le tourbillon de ce que nous nommons lĠexistence.

-La Tradition parle dĠun cinquime Žtat : Turyatita : Celui o le quatrime Žtat serait constant o la conscience se transformerait en inconscience. En fait quand on est mort on n e rve plus. S nĦ8)

Les mouvements de conscience ne sont ni bons ni mauvais en eux-mmes. La libertŽ est dans la libertŽ. LĠtre libre ne pense pas ni nĠagit  dans le but de sĠaffranchir ou de devenir plus ceci ou cela.

Le jugement bon ou mauvais se rŽfre toujours ˆ un but spŽcifique.

En rgle gŽnŽrale nul ne saurait se porter en juge de ce qui est bon ou mauvais pour un autre.

Patanjali propose ici la mme perspective pratique que Bouddha : A savoir lĠŽlimination de la souffrance.

Les activitŽs que nous nommons vie spirituelle tendent vers la reconnaissance de notre nature vŽritable qui seule permet lĠŽradication complte de toute forme de souffrance.

 

 

I.6 Ce sont la connaissance juste, lĠerreur, lĠimagination, le sommeil et la mŽmoire :

(Patanjali Žnumre les 5 types de mouvements qui peuvent faire fluctuer nos pensŽes : cf I -7 ˆ I-11-S nĦ10)

Il sĠagit dĠune grille, il en existe bien dĠautres. Toute activitŽ mentale peut-tre assimilŽe ˆ lĠune ou lĠautre de ces catŽgories.

 

 

I.7 La connaissance juste nous vient dĠune perception directe, dĠun raisonnement ou dĠun tŽmoignage.

(pramana : est la connaissance juste. Elle est soutenue par notre conscience, notre centre dĠ Èobservation È. CĠest la rŽelle intelligence. Pramana comporte 3 aspects :

-       pratyaksa : apprŽhension avec les sens, directement.

-       anumana : dŽduction juste ˆ partir dĠun fait secondaire : (il y a de la fumŽe, donc il y a du feu)

-       agamah : par induction, recevoir la vue juste de ceux qui ont fait lĠexpŽrience de la rŽalitŽ. S nĦ10)

Seule la perception directe nous permet de venir ˆ bout des doutes qui assaillent lĠtre humain.

La science vit des deux premiers modes. Elle vŽrifie, voilˆ bien ce qui a fait son bonheur et Éson malheur. Mais elle ne vŽrifie que les phŽnomnes et ne peut donc conna”tre la rŽalitŽ elle-mme.

Mais Patanjali ne jette pas lĠanathme sur le raisonnement et le tŽmoignage.

La lumire de la mŽditation laisse une impression mentale et imprime la Ç connaissance  juste È dans la mŽmoire.

 

 

I.8 LĠerreur est une connaissance inexacte, fondŽe sur une impression trompeuse de la rŽalitŽ.

(viparyaya : cĠest la vue fausse, erronŽe, lĠopposŽ de pramana. CĠest une vue alimentŽe par lĠagitation, le mange des pensŽes. S nĦ10)

Les apparences sont trompeuses tant quĠelles sont interprŽtŽes par le mental selon une vision dualiste.

On ne peut utiliser aucun sens il faut utiliser Ç le troisime Ïil È ou entendre Ç le son non frappŽ È

 

JŽsus disait Ç Je vous donnerai ce que lĠÏil nĠa pas vu, ce que lĠoreille nĠa pas entendu, ce que la main nĠa pas touchŽ et ce qui nĠest pas montŽ dans le cÏur de lĠhomme È (Thomas 17). La vie spirituelle consiste ˆ dŽceler le fond derrire les apparences trompeuses pour atteindre  la connaissance exacte.

QuĠest ce qui distingue la connaissance vraie de la connaissance inexacte ? Trs souvent rien ! LĠexpŽrience est nŽcessaire. Il convient de demeurer vigilant  et de maintenir Ç la mentalitŽ du dŽbutant È pour ne pas prendre les lŽgendaires Ç vessies È pour des Ç lanternes È. Mais le scepticisme ŽrigŽ en systme nĠest pas mieux. Ç  Le scepticisme est une fuite vers lĠignorance È clamait HŽraclite.

 

 

I.9 LĠimagination, fondŽe sur des reprŽsentations nĠest quĠŽchafaudage intellectuel dŽpourvu de rŽalitŽ objective.

(vikalpah : LĠimagination est le troisime vrtti. Il sĠagit des pensŽes non reliŽes ˆ un objet rŽel. Si nous le faisons sans en avoir conscience cĠest une forme dĠŽvasion qui nous Žloigne des rŽalitŽs. CĠest alors souffrance. Si nous le faisons consciemment cette imagination peut tre constructive. Elle est alors non souffrance.

LĠimagination peut contribuer ˆ lĠaffranchissement si elle ne sĠappuie pas sur un Žchafaudage dĠimagerie.

Le pouvoir dĠŽvocation joue un r™le important dans certaines formes de mŽditation.

 

 

I.10 Le sommeil est la forme de conscience fondŽe sur lĠidŽe de nŽant.

(Nidra : le Ç sommeil actif È. Notre systme nerveux nĠenregistre plus les informations venant de lĠextŽrieur. Il est uniquement tournŽ vers lĠintŽrieur. S nĦ11)

Patanjali qualifie de forme de conscience tout ce qui nĠest pas cessation. Or, mme si lĠactivitŽ mentale correspondant ˆ lĠŽtat de veille sĠest arrtŽe mme si il ne se passe rien, ce nĠest pas lĠillumination car  lĠobservateur ne conna”t pas sa nature vŽritable.

La mŽditation diffre du sommeil profond  par lĠŽtat de vigilance du systme nerveux. On ressort transformŽ dĠune mŽditation alors que le sommeil ne modifie en rien le mental. Quand on utilise les termes Ç prŽsence È ou Ç conscience È pour dŽsigner le Divin il sĠagit de la prŽsence pure, sans sujet ni objet sŽparŽs.

La perception implique lĠabsence totale de distance ou de sŽparation. CĠest la cessation des concepts qui permet lĠŽmergence de la sagesse.

 

 

I.11 La mŽmoire est la sauvegarde des impressions recueillies

(smrith : la mŽmoire est lĠenregistrement de  lĠaccumulation des expŽriences passŽes. Cette mŽmoire est souvent figŽe. Nous sommes envahis anarchiquement par les pensŽes formulŽes par la mŽmoire. Nous sommes alors esclaves de la mŽmoire, du passŽ. Cette mŽmoire est lĠŽnergie de vie de lĠego. Mais nous ne sommes pas mŽmoire mais conscience. Quand nous sommes conscient nous sommes dans le prŽsent. Nous sommes alors libres de la mŽmoire.

La mŽmoire joue un r™le dans la transformation de la psychŽ car elle est ni plus ni moins, cette psychŽ qui nous maintient dans lĠillusion. Mais elle est aussi la connaissance qui disperse lĠillusion. Sans la mŽmoire il nĠy a ni asservissement, ni libŽration.

La mŽmoire est au niveau mental le reflet de la qualitŽ fondamentale de la vie qui refuse de dispara”tre.

LĠidŽe du cheminement spirituel est de laisser la mŽmoire nous atteindre. Il nĠy a rien ˆ se rappeler.

Ç Heureux ceux qui ont une ‰me de pauvre, car le Royaume des Cieux est ˆ eux È. (Matthieu 5,3)

 

 

I.12 Par une pratique persistante et avec lĠŽquanimitŽ nous cessons dĠtre le jouet de ces formes de conscience.

(Nirodha : lĠarrt des pensŽes sĠobtient gr‰ce ˆ un Žtat qui contient ˆ la fois abhyasa et vairagya : pratique constante et attitude de non dŽpendance. S nĦ12)

DŽsormais nous ne nous Žcarterons plus gure de cette perspective : Comment passer de lĠŽtat de fragmentation mentale ˆ celui dĠillumination, ou de libertŽ absolue. La rŽponse cĠest Ç pratique È et Ç ŽquanimitŽ È. Le premier terme nomme ce que nous faisons et le second lĠesprit dans lequel nous le faisons.

Ç Cherchez dĠabord le Royaume des Cieux et sa justice, et tout le reste vous sera donnŽ par surcro”tÉMatthieu 6, 33-34)

LĠidŽe est donc de poursuivre la pratique en sachant que nous ne sommes jamais sŽparŽs des rŽsultats, dont nous nĠavons jamais dĠailleurs ˆ nous inquiŽter. Savoir cela profondŽment cĠest lĠŽquanimitŽ. Nous devrions toujours garder ˆ lĠesprit que nous sommes le Divin et que nous nĠavons besoin de rien dĠautre.

 

 

I.13 La pratique est lĠŽnergie dŽployŽe en vue de maintenir le mental Žtabli.

La pratique cĠest ce qui est fait pour amener le mental ˆ la tranquillitŽ.

Il faut dĠabord dŽployer de lĠŽnergie, mme du zle pour atteindre la rŽalisation spirituelle qui libre une Žnergie colossale. Ç  Car ˆ celui qui a, on donnera et il aura du surplus, mais ˆ celui qui nĠa pas, on enlvera mme ce quĠil a. È (Matthieu 13). Patanjali nomme Ç pratique È tout ce qui favorise les silences.

 

 

I.14 Cette pratique devient fermement enracinŽe si lĠon sĠy adonne sans interruption, avec ferveur et dŽvotion pendant longtemps.

Il y a un vŽritable rapport de force entre les impressions mentales contradictoires et cĠest toujours lĠimpression la plus vigoureuse qui ressort.

Celui qui cultive la connaissance de Soi avec zle nĠaura aucune peine ˆ conserver toute sa sŽrŽnitŽ ˆ lĠheure o les autres seront confondus.

Ç  Qui cherche la sagesse ds lĠaurore nĠaura pas ˆ peiner : il la trouvera assise ˆ sa parte. È Sagesse 6,14

 

 

I.15 LĠŽquanimitŽ est lĠŽtat de conscience  triomphant de celui qui sĠest affranchi des dŽsirs de ce monde et de lĠautre.

 LĠŽquanimitŽ nĠest pas la rŽpression, la morositŽ, la lŽthargie, la dŽpression, ou la maladie. CĠest un Žtat de conscience triomphant.

Ç Varagya est lĠabsence dĠintŽrt pour ce que vous nĠtes pas. È Les dŽsirs nĠont plus aucune prise sur la personne : en vŽritŽ il nĠy a plus personne. Un jour il appara”t Žvident que le seul dŽsir est le non-dŽsir. JŽsus prie son pre : Ç Je ne te prie pas de les (disciples) enlever du monde, mais de les garder du Mauvais È (Jean17, 15). LĠŽquanimitŽ, cĠest abandonner lĠidŽe de devenir une personne meilleure, plus heureuse, libŽrŽe etcÉ CĠest laisser aller la prŽtention fondamentale dĠtre une personne.

 

 

I.16 LĠŽquanimitŽ suprme est le dŽtachement face au jeu des Žnergies fondamentales, lorsque nous connaissons lĠEsprit.

On fait rŽfŽrence au Ç sam‰dhi absolu È du Sžtra I.51 : Ç Lorsque nous connaissons lĠEsprit È. Pour cela il convient de se dŽtacher des Žnergies fondamentales. Quelles sont les Žnergies fondamentales ?

-       rajas : activitŽ, travail, Žnergie, changement

-       tamas : conservation, repos, rŽsistance au changement, inertie

(Le cycle activitŽ -repos est vieux comme la vie il se dŽroule dans lĠespace et le temps)

-       sattva : cĠest la lumire de la connaissance, lĠŽclair de lĠintelligence, lĠouverture du cÏur. La connaissance directe vient sans effort. Les gens authentiquement spirituels sont Žnergiques sans tre agitŽs ou dispersŽs, conservateurs sans tre lŽthargiques ni sceptiques ˆ lĠexcs. Par-dessus tout ils portent en eux une grande clartŽ et une ineffable bontŽ naturelle. LĠapport de sattva transforme le cercle rajas-tamas en une spirale montante.

Aucune des Žnergies fondamentales nĠest bonne ou mauvaise en soi. Seul le dŽsŽquilibre engendre des problmes sans fin.

LĠharmonie lucide des trois Žnergies en nous, produit une vie splendide et nous mne ˆ la vison directe de la rŽalitŽ derrire le jeu.

 

 

I.17 Le discernement de la rŽalitŽ prend la forme de contemplation dĠun objet grossier ou subtil, de bŽatitude et de sentiment de pure existence.

(Le premier stade de samadhi est samprajnata. : Il se situe au niveau du raisonnement. De la rŽflexion. S nĦ14)

Le mental conna”t des Žtats de concentration variŽs qui passent de lĠagitation ˆ la dispersion, au calme, ˆ la concentration, au recueillement jusquĠˆ la cessation. Ce sžtra dŽcrit divers Žtats qui accompagnent la montŽe vers la cessation finale.

Ce qui est discernŽ ici cĠest lĠessence de lĠobjet de la mŽditation, le fond de sa rŽalitŽ.

-       contemplation dĠun objet grossier : veut dire que lĠon maintient son attention exclusivement sur un seul et mme objet matŽriel pendant une pŽriode de temps.

-       La contemplation dĠun objet subtil fait de mme sur une pensŽe, un mantra, une vibration, bref sur une forme-pensŽe.

-       Ç  Avant mme quĠAbrahm fžt, Je Suis È ( Jean 8,58). Mo•se avait reu la mme rŽvŽlation : Ç Je suis Celui qui suis È ( Exode 3,14)

-       Ce sžtra dŽcrit le processus qui mne ˆ Samadhi. Il sĠagit en fait dĠun rŽsultat Ç fabriquŽ È. Il y a encore un ferment de conscience individuelle qui demeure ˆ lĠŽtat potentiel. Il constitue encore une forme de fragmentation mentale mme si celle-ci laisse la place ˆ la cessation.

 

On ne passe pas nŽcessairement par toutes les formes. CĠest lĠexpŽrience qui compte

 

 

I.18 Aprs lĠexpŽrience rŽpŽtŽe de la pause, un autre Žtat voit le jour ; il y substitue des impressions latentes.

(Ici, lĠŽtat de fusion est sans support, mais les graines du passŽ sont toujours lˆ.)

LĠautre Žtat est le UN ou YOGA qui ne dŽcoule pas dĠun exercice de mŽditation mais constitue de plus en plus  la faon habituelle dĠtre de celui qui a suffisamment pratiquŽ la mŽditation.

La mŽditation est le cÏur de la pratique. LĠŽtat de cessation est souvent recouvert de fragmentation mentale et confiŽ ˆ la mŽmoire dans cet Žtat.

Il nĠy a quĠune rŽalitŽ et cette rŽalitŽ nĠest pas un Ç je È particulier. Cette absence totale dĠobservateur est ni plus ni moins quĠun cadeau, une gr‰ce.

LĠŽtat appelŽ Ç asampragyata È est dispensŽ de lui-mme, il ne dŽpend de rien mais encore faut-il se prŽparer ˆ le recevoir ; cĠest le rŽsultat de la vie spirituelle. Mais il subsiste encore des impressions mentales. Leur dissolution mne ˆ la cessation finale qui est la libŽration dŽfinitive. CĠest cela et cela seulement qui mŽrite dĠtre appelŽ la rŽalisation spirituelle.

 

 

I.19 CĠest lĠŽtat dĠtre de ceux qui se sont dŽtachŽs du corps et qui se sont absorbŽs dans la nature.

(Dans certains cas lĠŽtat de fusion, donc de pure tretŽ peut tre reu ds la naissance. S nĦ 14)

Pour ceux qui se sont dŽtachŽs du corps, il ne subsiste aucun voile. Nous avons donc tous une mort finalement trs heureuse, trs libŽratrice. Ces entitŽs pas plus que les vivants nĠexistent en tant quĠexistences sŽparŽes.

 

 

I.20 Pour les autres, cet Žtat vient ˆ maturitŽ ˆ force de foi, dĠŽnergie, de vigilance, de samadhi et dĠintelligence.

LĠouvrage entier sĠadresse  Ç aux autres È. La transformation du mental exige une Žnergie considŽrable. La libŽration de lĠŽnergie et sa conservation ˆ des fins spirituelles sont capitales. CĠest pour cela que les gens intŽressŽs par leur vie spirituelle surveillent et prŽviennent les fuites dĠŽnergie : bavardage, excs de nourriture, compagnie malsaine, dŽsŽquilibres en tout genre. LĠincontournable question de la cŽlŽbration sexuelle de lĠŽnergie sĠinscrit aussi dans ce cadre –cf supra- LĠŽnergie veut aussi dire que lĠon crŽe des conditions favorables ˆ lĠenthousiasme. Aucun tre humain nĠa jamais accompli quelque chose de grand sans enthousiasme. (lĠorigine grecque signifie que lĠon est avec le Divin). La vigilance, c.ˆ.d. lĠobservation de nos pensŽes, actions, rŽactions etcÉ est trs importante. Nous ne pouvons passer outre lĠexpŽrience de Samadhi. CĠest lĠexpŽrience du Samadhi qui confre la puissance ˆ la dŽmarche et la distingue de tout le reste.

 

 

I.21 Il se manifeste promptement pour ceux qui sĠy consacrent avec ardeur.

 

 

I.22 On trouve ici encore des diffŽrences selon que nous y consentons un effort faible, moyen ou intense.

 

 

I.23 On y accde aussi par lĠabandon au Divin.

Aprs avoir insistŽ sur lĠeffort individuel, Patanjali nous recommande lĠabandon au Divin ! On ne peut en fait esquiver ni lĠun ni lĠautre.

Il sĠagit ici de la paire Ç effort/abandon Ç,  È masculin/ fŽminin È.

On h‰te la rŽalisation en sĠimprŽgnant des deux attitudes et en nĠen refusant aucune. LĠabandon au Divin constitue le sens mme de la pratique, lĠessence du sam‰dhi.

La tradition chrŽtienne a dŽveloppŽ la vertu de lĠhumilitŽ.  Cette vertu eut sans doute ŽtŽ le plus beau fleuron de la civilisation occidentale si ce nĠest que lĠon a continuŽ ˆ sĠidentifier avec la manifestation mortelle et illusoire de la personne parce que lĠon a pas dŽveloppŽ lĠautre aspect, la pratique, lĠeffort, la connaissance.

 

 

I.24 Le Divin est cette PrŽsence unique, libre de toute souffrance, de toute action, de toute cause et de toute consŽquence.

Le Divin est la PrŽsence, lĠEsprit. Ç Je suis le premier et le dernier ; moi exceptŽ, il nĠy a pas de dieux. Qui est semblable ˆ moi ? QuĠil se lve et parle. È (Isa•e, 44, 6-7)

(La religion judŽo-chrŽtienne a confondu lĠĉtre avec une personne suprme. Cela a donnŽ naissance au messianisme cette thŽorie par laquelle nous devons attendre dĠtre sauvŽs par une personne suprme.)

 

 

I. 25 : En lui sĠŽpanche la source absolue de lĠomniscience.

 

 

I.26 Il est au-delˆ du temps ; Il est la Ma”tre des anciens.

Le temps est intŽrieur au Divin, il se dŽroule en Lui. Pour le Divin, rien nĠarrive rien ne change, rien ne na”t rien ne meurt. Il est lĠUnique, lĠimmensurable, la SingularitŽ. Nous Žvoluons ˆ lĠintŽrieur dĠune bulle espace-temps, bulle qui est intŽrieure ˆ la SingularitŽ qui elle est tout ce qui est.

Il est le ma”tre des anciens, c'est-ˆ-dire le Ma”tre de tous les ma”tres, ˆ lĠorigine et ˆ la fin de la lignŽe des ma”tres authentiques. Ç  CĠest moi lĠalpha et lĠOmŽga, Il est, il Žtait et il vient, le Ma”tre-de-tout È (Apocalypse I.8)

 

 

I .27 On lĠŽvoque par le son sacrŽ ( OM:

(Le pranava OM, la syllabe mystique contient ishvara, le ma”tre des ma”tres. En prononant, en chantant la syllabe mystique nous entrons dans sa signification.S nĦ14)

Dans toute les traditions spirituelles le nom du Divin revt une grande importance. Ç Au commencement Žtait la Parole et la Parole Žtait avec Dieu et la Parole Žtait Dieu. È(Jean1, 1). Le peuple choisi est le peuple du nom celui qui a la connaissance du nom. CĠest lĠhumanitŽ en mouvement vers sa source.

 

 

I.28 Nous devrions rŽpŽter le nom du Divin et en rŽaliser lĠessence.

Il sĠagit de la rŽpŽtition dĠun mantra. La vibration active la comprŽhension vŽritable.

Ne pourrions nous rŽpŽter Ç Amaram ham, Madhuram Ham È : Ç je suis immortel, je suis bienheureux È

CĠest le manque de perspective qui fait voir des obstacles. Il nĠy a que des occasions.

 

 

I.30 Ces obstacles, sources de dispersion mentale, sont la maladie, la fatigue, le doute, la tergiversation, la mollesse, lĠattachement aux habitudes, lĠillusion, le dŽcouragement ainsi que lĠinconstance.

(neuf obstacles qui causent la dispersion de nos pensŽes : maladie, apathie ou langueur, doute, dŽpression, paresse, dŽsir de jouissance temporelle, vision fausse, incapacitŽ dĠatteindre des Žtats de conscience plus subtils, instabilitŽ. S nĦ15)

 

 

I.31 Tout cela engendre de la souffrance, de la frustration, de lĠagitation, ainsi quĠune instabilitŽ de la respiration.

(Les sympt™mes qui accompagnent la dispersion des pensŽes sont : souffrance, insatisfaction- dispersion -agitation du corps -irrŽgularitŽ de la respiration. S nĦ15)

LĠinstabilitŽ de la respiration reflte lĠinstabilitŽ du mental.

 

 

I.32 Nous pouvons y remŽdier en contemplant souvent un seul objet.

Tous les obstacles viennent dĠune dispersion du mental. On doit sĠhabituer ˆ la prŽsence dĠun seul objet dans le champ de la conscience.  Plus tard sĠhabituer ˆ ne percevoir quĠune seule et mme rŽalitŽ dans tous les objets.

 

 

I.33 Nous purifions le mental en cultivant la bienveillance envers le joyeux, la compassion envers le malheureux, la joie ˆ lĠŽgard de la vertu et lĠindiffŽrence ˆ lĠŽgard du vice.

(La purification, lĠapaisement de la confusion mentale, sĠobtient par notre attitude :

-       gentillesse, considŽration, amitiŽ

-       disponibilitŽ inconditionnelle aux autres

-       cordialitŽ, affection

-       non-attachement

-       É Et cela, quelles que soient les circonstances S nĦ15)

Comment rendre le terrain propice ? Sourire, cĠest Žvoquer la vŽritŽ, cĠest demeurer lĠobservateur quoi quĠil arrive ˆ lĠextŽrieur. La mŽditation laisse jaillir la tranquille assurance de celui qui est. Le sourire vigilant prolonge la mŽditation, il est la mŽditation en action La mŽditation et le sourire devant toutes les opinions -celles des autres et les n™tres, grandissent ensemble.

 

 

I.34 Nous y parvenons aussi en expulsant et en retenant ainsi le souffle.

(La seule chose importante est la conscience constante au flot de lĠair. CĠest la relation directe du mental et du flot de lĠair qui permet au mental de sĠapaiser. S nĦ15)

Aprs lĠaspect mental, Patanjali nous prŽsente lĠaspect ŽnergŽtique. Le Ç souffle È (prana) dŽsigne beaucoup plus lĠŽnergie vitale que lĠair respirŽ par le corps physique. Le souffle est intimement liŽ ˆ la pensŽe.

Retenir le souffle aussi longtemps que cela demeure confortable aprs lĠavoir expulsŽ permet ˆ lĠŽnergie vitale dĠacquŽrir de la, profondeur et de la puissance.

Demeurer un moment dans cette dissolution permet de dŽnouer des nÏuds sans risquer de sĠŽgarer dans les labyrinthes de lĠanalyse psychologique.

 

 

I.35 Nous pouvons atteindre la stabilitŽ mentale en demeurant parfaitement prŽsents ˆ tout objet, ds quĠil se manifeste.

 

Cette pratique est extrmement importante. Il sĠagit de porter lĠespace mŽditatif sur le terrain de lĠaction. La vie spirituelle sĠinstalle dans le monde.

JŽsus prie son pre : Ç  Je ne te prie pas de les retirer du monde, mais de les garder du Mauvais È (Jean 17,15)

 

Avec le temps, lĠattention cesse de sauter frŽnŽtiquement dĠun objet ˆ lĠautre sans jamais pouvoir se fixer sur une seule et mme rŽalitŽ. La fŽbrilitŽ mentale –la pire des drogues- est un obstacle majeur ˆ la connaissance.

Patanjali redit que la sŽrŽnitŽ nĠa rien ˆ voir avec un quelconque devenir.

 

 

I.36 Nous y arrivons Žgalement en faisant lĠexpŽrience de la radieuse lumire intŽrieure, Žternellement libre de douleur.

LĠŽtat nommŽ Ç nirodha È nĠest pas lĠabsence de quelque chose.

Ç Je suis la lumire du  monde. Qui me suit ne marchera pas dans les tŽnbres, mais aura la lumire de la vie È (Jean 8,12)

La lumire intŽrieure est ˆ jamais libre de douleur ajoute Patanjali. Elle ne conna”t aucune autre rŽalitŽ et nĠentretient donc aucune attente.

 

 

I.37 Un autre moyen est de fixer notre attention sur un mental affranchi des dŽsirs.

Nous apprenons par imitation, voire par osmose. Le mental absorbe les qualitŽs de tout ce avec quoi il est en contact prolongŽ.  Le contact avec un tre rŽalisŽ demeure le plus formidable catalyseur. La prŽsence dĠun ma”tre authentique demeure inestimable. Nous pouvons progresser par nous-mmes, en frŽquentant les ma”tres du passŽ. Mais ces ma”tres lˆ, nous finissons par leur faire dire ce que le mental voudrait bien entendre. Celui qui sĠest affranchi des dŽsirs peut guider lĠ‰me en qute de paix.

 

 

I.38 Nous pouvons aussi y arriver par la connaissance du rve et du sommeil.

Dans lĠŽtat de veille nous avons lĠimpression en tant que personne distincte, dĠtre la source de notre propre pensŽe.

Il nĠest pas question ici de rves par lesquels une certaine forme de connaissance peut-tre transmise, ni de rves prŽmonitoires, ni dĠanalyse des rves tout ceci nĠŽtant pas dŽnuŽ dĠintŽrt mais ˆ nĠest pas le propos de Patanjali.

CĠest le Mme qui conna”t lĠŽtat de veille et de rve. En nous Žveillant nous rŽalisons que ce sujet, dans le rve , nĠŽtait quĠune pensŽe.

La connaissance du sommeil veut dire la connaissance de Celˆ qui est durant le sommeil. Il nĠexiste plus aucun sujet ni objet durant le sommeil profond  ce qui suggrerait Ç lĠidŽe de nŽant Èet pourtant ce nĠest pas Ç rien È. LĠidŽe de nŽant est un puissant levier de connaissance de lĠexistence. LĠexamen mŽditatif de cette possibilitŽ mne lĠattention inexorablement vers la pure existence. Heidegger appelait une telle expŽrience Ç lĠanticipation de la mort È et il suggŽrait la prise de conscience Žnergique du caractre absolu de la pure existence.

 

 

I.39 Nous y arrivons aussi en mŽditant sur notre objet de prŽdilection.

LĠidŽe est dĠutiliser lĠŽnergie lˆ o elle a ŽtŽ investie et o elle demeure. Il est sage dĠenquter et de mŽditer sur notre rŽalitŽ, sinon il persiste toujours une fragmentation.

CĠest dĠailleurs lˆ un des gros problmes de lĠusage des drogues dans le but dĠatteindre un Žtat de conscience supŽrieur : CĠest importer autre chose que ce qui est lˆ. Il nĠexiste aucun substitut ˆ lĠexamen lucide de ce qui est lˆ : nos dŽsirs, nos peurs, nos prŽfŽrences, nos identifications.

Il nĠest pas nŽcessaire dĠentreprendre des campagnes de vertu et dĠen tre rŽduit ˆ la morale.

Ds que nous accŽdons ˆ un certain niveau dĠŽquanimitŽ, nous rŽalisons que nous nĠavons plus besoin de mŽditer sur un Ç objet prŽfŽrŽ È. Le signe du succs est la perte de dŽpendance face ˆ cette mŽthode. Ultimement, la mŽditation porte sur le Soi en tant que Soi et sur rien dĠautre.

 

 

I.40 Le pouvoir du mental Žtabli, sĠŽtend de lĠinfiniment petit jusquĠaux confins de lĠinfiniment grand.

Tout ce qui est Ç connu È passe par le mental. Tout objet, perception, est mental. Ce que nous appelons Ç le monde È est mental. O est le monde dans le sommeil profond ? Le pouvoir du mental Žtabli sĠŽtend dans toutes les directions car un tel mental peut fixer son attention et conna”tre nĠimporte quel phŽnomne. CĠest la source de tous les pouvoirs surnaturels dont il sera question au chapitre 3.

 

 

I.41 Une fois lĠactivitŽ mentale calmŽe, (le mental)  devient comme un cristal pur et prend la couleur de ce en quoi il demeure fondu, quĠil sĠagisse de lĠobservateur, de lĠobservation ou de lĠobservŽ.

La rŽalitŽ est perue sans aucune dŽformation. Le mental ne dŽforme plus car il nĠessaie plus de former. On quitte le monde de la reprŽsentation pour celui de la prŽsentation. Chaque fois le mental est lĠobjet prŽsentŽ devant lui.

On doit comprendre Ç observation, observateur, observŽ Ç  comme lĠunicitŽ des trois.  Il y a fusion ( Ç ce en quoi il demeure fondu È)

 

 

I.42 Dans le premier stade dĠabsorption mentale, nous contemplons un objet grossier, en considŽrant encore indistinctement son essence, son nom et les pensŽes qui y sont associŽes ; cĠest la contemplation discursive.

 

 

I.43 Au cours du second stade dĠabsorption, le mental, alors purgŽ de tout le reste, sĠillumine de lĠessence seule ; cĠest la contemplation pure.

Aprs un certain temps, la mŽmoire sĠest tue, la tempte dĠimages sĠest apaisŽe, le calme rgne. Quand lĠattention est maintenue sur lĠobjet de mŽditation, le fond de lĠobjet ressort de plus en plus. Au dŽpart lĠintellect peroit une espce de vide. Mais lĠessence de lĠobjet est lˆ. Le premier rŽsultat est de permettre cette absorption du mental.

 

 

I.44 On explique de mme, les stades dĠabsorption discursive et pure, quand lĠobjet de contemplation est une forme-pensŽe.

Ici, lĠobjet de contemplation est soit une pensŽe, soit un mantra, soit un sentiment etcÉ

Dans lĠordre de la manifestation, la forme-pensŽe est plus prs de lĠespace sans forme que lĠobjet grossier.

Au dŽbut, des impressions mentales viennent se superposer  puis lĠessence de cet objet subtil demeure seul dans le champ de la conscience. Ce nĠest pas encore la connaissance du Soi car il y a encore quelque chose dans la conscience. LĠespace de grande paix se manifeste dĠabord sous forme de bŽatitude puis sous forme de sentiment de pure existence. La joie est le fond commun de toute pensŽe.  Il nĠy a quĠune joie, la mme pour tous, de mme quĠil nĠy a quĠun Èje È.( Le sentiment de Ç je suis È est encore un contenu)

 

 

I.45 Plus subtile que la forme-pensŽe la plus subtile : lĠEspace sans forme.

Avec la persŽvŽrance dans la pratique, le mŽditant finit pas percevoir uniquement lĠespace sans forme, sans signe distinctif.

Percevoir cĠest toujours sortir des sentiers battus et des idŽes reues. Ç Rares sont ceux qui peroivent avec leur propres yeux et sentent avec leur propre cÏur È disait Einstein.

De tels sauts libŽrateurs, mme quand ils ne durent quĠune fraction de seconde, demeurent ˆ lĠorigine des vŽritables dŽcouvertes scientifiques, artistiques et surtout personnelles.

La plupart des tres humains ignorent quĠils sont prisonniers des structures mentales.

Les prŽcŽdents niveaux de mŽditation sont des Žtapes de lĠignorance :

Savitarka : ignorance crasse

Nirvitarka : ignorance raffinŽe

Ananda : ignorance heureuse

Asmita : ignorance essentielle.

 

 

I.46 Ces Žtats de conscience constituent des sam‰dhis relatifs.

Dans tous les Žtats de sam‰dhi subsistent un ou des germes de fragmentation. Il faut beaucoup plus quĠune expŽrience pour libŽrer le mental dŽfinitivement. Le contact dĠun ma”tre vŽritable permet  dĠŽviter une telle stagnation. La mŽditation ne suffit pas il faut vivre sa vie dĠtre humain, tre en contact avec les autres, explorer son mental et le transformer.

 

 

I.47 A la suite du perfectionnement de lĠabsorption sur une forme-pensŽe jaillissent la splendeur et la sŽrŽnitŽ dispensŽe par lĠtre.

Tant la transfiguration de JŽsus que celle de Krishna illustrent cet Žclat de faon dramatique :

Ç Son visage resplendit comme le soleil et ses vtements devinrent blancs comme la lumire È (Matthieu 17,2)

 

Ç Si lĠŽclat de mille soleils illuminait le ciel, cela ressemblerait ˆ la splendeur de lĠtre. È( Bhagavad Gita 11,12)

Le processus de la mŽditation nous apprend que la rŽalitŽ ultime nĠest pas Ç quelque chose È et quĠelle nĠest pas Ç rien È non plus, bien au contraire. Les bouddhistes ont dŽveloppŽ le concept de vide qui nĠest pas Ç rien È ni Ç quelque chose È. Il faut en faire lĠexpŽrience directe. Le connu ne peut discuter du mystre.

LĠinvitation est claire ˆ mŽditer plut™t sur des objets subtils plut™t que grossiers.

Seule lĠautre rive dispense la perfection de lĠtre qui est aussi la maturitŽ de lĠesprit.

 

 

I.48.Nous dŽcouvrons alors la connaissance directe, source de vŽritŽ.

La connaissance directe (pragya) est la clartŽ. CĠest lĠŽlŽment clŽ dans la transformation du mental. CĠest la sagesse qui nous fait quitter le monde de lĠopinion pour la vŽritŽ de ce qui est. Sans la connaissance directe le mental nĠabandonne pas.

Ç Ma”tre, ma bouche nĠacceptera absolument pas que je dise ˆ quoi tu ressembles È (Thomas 13)

 

 

I.49 Celle-ci est dĠune tout autre Žtoffe que celle acquise par un tŽmoignage ou par un raisonnement, car elle touche directement lĠessence du rŽel.

(Patanjali indique ici que le champ dĠexpŽrience de samadhi est diffŽrent du champ dĠexpŽrience qui rŽsulte de la connaissance des textes  sacrŽs, diffŽrent Žgalement du champ dĠexpŽrience de la connaissance qui est la n™tre dans notre vie de tous les jours qui,elle, rŽsulte du raisonnement, de la dŽduction. S nĦ17)

Cet aphorisme Žnonce clairement ce qui a fait dŽfaut ˆ lĠOccident pendant longtemps : lĠexpŽrience directe, fruit de la mŽditation.

Nous nĠavons pas manquŽ de philosophes brillants, de thŽologiens astucieux, de profonds penseurs et de cÏurs dŽvouŽs mais lĠŽclat du grand jour nĠa pas encore prŽvalu.

La religion chrŽtienne repose sur lĠautoritŽ de certains textes alors quĠelle devrait dĠabord et avant tout avoir son assise sur la seule autoritŽ qui soit : celle du rŽel, de lĠexpŽrience directe.

Il en est de mme de la philosophie Occidentale  qui sĠest ŽpuisŽe en raisonnements. La Connaissance qui Žclaire Patanjali est la lumire Ç qui Žclaire tout homme È JeanI9)

Les beaux raisonnements, les textes pieux, les sermons, tout cela nĠa de sens que lorsque lĠexpŽrience directe les Žclaire.

 

 

I.50 LĠimpression mentale qui en Žmerge dŽsamorce les autres impressions :

CĠest au niveau du mental que sĠopre la libŽration, car cĠest uniquement ˆ ce niveau que se manifeste lĠasservissement. Le sommeil profond nous procure une paix parfaite mais le mental nĠen tire aucun profit, il dort ! Quand savons nous quĠil sĠagit de la vŽritable Connaissance? Quand elle commence ˆ opŽrer ses transformations et sĠinstalle en nous.

 

 

I.51 Lorsque mme cette impression se dissout ˆ son tour, toutes les impressions se sont rŽsorbŽes dans le silence ; cĠest la sm‰dhi absolu.

Toutes les impressions dualistes ont ŽtŽ dissoutes, y compris celle dĠtre un tre ŽveillŽ qui a atteint lĠautre Žtat.

La cessation de la cessation ! Telle est lĠŽtape finale annoncŽe. LĠallumette qui a allumŽ le feu se voit elle-mme consumŽe par les flammes.

Ç Vous donc serez parfaits comme votre Pre cŽleste est parfait È (Matthieu 5,48)

 

 

SUR LA VOIE

(Sadhana pada)

(Il commence par dŽfinir les qualitŽs nŽcessaires dans les pratiques du yoga, puis il dŽcrit la nŽcessitŽ de changer graduellement le mental pour atteindre lĠŽtat de yoga tel quĠindiquŽ en I-2. Enfin il explique le besoin de ces pratiques, leurs consŽquences et les consŽquences du manque de persŽvŽrance)

 

 

 

II. 1 Ascse, Žtude de soi et abandon de soi au Divin: tels sont les aspects pratiques du yoga.

Le yoga de lĠaction, ou dans lĠaction, contient trois aspects insŽparables :

-       tapas : le feu qui nous habite, la motivation.

-       Svadhyaya : lĠŽtude des textes qui Žclairent la conscience.

-       Ishvara-pranadhana : dŽposer au pied du Seigneur : Que ta  volontŽ soit faite. S nĦ18)

La discipline spirituelle, contrairement aux religions demeure avant tout quelque chose de pratique.

 

Maintenant que nous commenons ˆ tre saisis de lĠenjeu, Patanjali attire notre attention sur les aspects concrets de la pratique sans lequel tout , pour reprendre lĠexpression de lĠEcclŽsiaste, nĠest que Ç vanitŽ des vanitŽs È (lĠEcclŽsiaste 1,2)

Comment sĠy prend-on pour amener ˆ la paix un tre humain asservi ˆ lĠactivitŽ mentale et tourmentŽ ?

Comment le guider vers la plŽnitude de lĠexistence ? Tel est maintenant le propos.

QuĠest-ce que lĠascse ? Le mot Ç tapah È ˆ lĠorigine signifie : feu . CĠest le feu sacrŽ de celui qui nĠa plus le choix et qui se prend en main. Lˆ est le cÏur de lĠascse vŽritable : rŽaliser que nous ne sommes absolument rien de ce que la mŽmoire nous suggre et qui est fondŽ sur la fragmentation mentale des expŽriences passŽes. LĠascse authentique nĠest pas un mouvement rŽpressif cĠest une actualisation, dans lĠespace-temps donc dans le corps et le mental de la joyeuse intuition de ce que nous sommes. Un vŽritable ascte est profondŽment joyeux.

LĠŽtude veut dire la connaissance de sa nature vŽritable.

Ç Quel intŽrt a lĠhomme ˆ toute la peine quĠil prend sous le soleil ? Ç (lĠEcclŽsiaste 1,3)

Ç Que servira-t-il donc ˆ lĠhomme de gagner le monde sĠil ruine sa propre vie ? È(Matthieu 16,26)

Le savoir de lĠhomme tient habituellement lĠtre pour acquis et lĠignore. Cette Žtude prend la forme de lĠexamen de nos comportements, pensŽes, rŽactions, attentes, dŽceptions etcÉtout autant que lĠŽtude des Ecritures.

CĠest lĠŽtude de soi qui mne ˆ lĠabandon, au Divin.

 

II.2 Ils favorisent le samadhi et rŽduisent les causes de souffrance.

CĠest la clartŽ sur ce que nous voulons vraiment qui constitue le moteur de la pratique.

Ç Entrez par la porte Žtroite. Large, en effet, et spacieux est le chemin qui mne ˆ la perdition, et il est beaucoup qui sĠy engagent ; mais Žtroite est la porte et resserŽe le chemin qui mne ˆ la Vie, et il en est peu qui le trouve È (Matthieu, 7,13-4)

 

II.3 Ces causes sont lĠerrance, lĠŽgo•sme, lĠattachement, lĠaversion et la peur de la mort.

(Ici sont rŽsumŽs les 5 klŽshas :

-       Avidya : lĠignorance qui est la source des autres klŽshas :

-       Asmita ,  le sens du Ç je È, lĠego

-       Raga : le dŽsir, la passion

-       DvŽsha : lĠaversion, lĠinimitiŽ

-       Abhi-ni-vesha : la soif de vivre, les jouissances temporelles. On dit aussi la peur de la mort. S nĦ 18)

 

La souffrance est toujours une distance. CĠest la distance entre la rŽalitŽ telle quĠelle est et ce quĠon voudrait quĠelle soit, ou quĠelle ait ŽtŽ. Croire que les causes de la souffrance rŽsident ˆ lĠextŽrieur, cĠest ajourner la libŽration.

 

II.4 LĠerrance est la cause de toutes les autres causes, quĠelles soient latentes, faibles, intermittentes ou pleinement actives.

La cause des causes est lĠerrance, lĠaveuglement.

QuĠest-ce que lĠerrance ? Patanjali nous guide au sžtra suivant.

Les moments de crise sont des occasions de mesurer la marge dĠerrance en soi c'est-ˆ-dire le fait que notre nature vŽritable ne soit pas devenue Žvidente dans lĠintellect.

 

II.5 On nomme errance lĠincompŽtence ˆ distinguer le mortel de lĠŽternel, lĠimpur du pur, la souffrance de la joie et le non-Soi du Soi.

En grec ancien le terme Ç pŽcher È voulait dire : manquer la cible. LĠerrance cĠest cela. LĠerrance cĠest lĠillusion de la soliditŽ et de la permanence du monde matŽriel autant que celle du monde mental. Nous entretenons surtout lĠillusion suprme celle selon laquelle nous existons en tant que Ç je È individuel. LĠerrance cĠest quand on ne voit pas. LĠerrance nĠest pas une faute humaine cĠest le premier signe de la vŽritŽ c'est-ˆ-dire le voile qui recouvre la vŽritŽ. LĠerrance consiste ˆ ne pas dŽceler le fond derrire le phŽnomne.

LĠerrance vŽritable cĠest de nous croire ŽveillŽs. JŽsus disait aux pharisiens : Ç Si vous Žtiez aveugles, vous nĠauriez pas de faute ; mais vous dites Ç nous voyons ! Et votre faute demeure. È (Jean 9,41)

 

II.6 LĠŽgo•sme est la confusion entre le pouvoir de perception et lĠinstrument de perception.

LĠŽgo•sme consiste ˆ croire que nous sommes quelquĠun et le Ç je È est le fait de lĠintellect.

 

II.7 LĠattachement cĠest lĠadhŽsion au plaisir.

La suite de lĠerrance cĠest lĠarrivisme de lĠtre humain sŽparŽ et limitŽ. Tant que nous nous croirons sŽparŽs du reste de lĠunivers nous ressentirons le besoin dĠacquŽrir quelque chose. Le dŽsir de prendre Žtouffera lĠamour.

Attachement, signifie que nous accordons de la crŽdibilitŽ au plaisir en tant que joie procurŽe par des objets, des personnes, des circonstances.

Le dŽsir profond cĠest le non-dŽsir, la paix profonde.

 

II.8 LĠaversion cĠest lĠadhŽsion ˆ la souffrance.

LĠaversion cĠest adhŽrer ˆ la souffrance du mieux que lĠon peut !

Attachement et aversion montrent un manque de perspective fondamental qui nous fait croire en la rŽalitŽ sŽparŽe du Ç monde È.

Un ego mal assis durant lĠenfance –menacŽ ou mal protŽgŽ- conduira ˆ des mŽcanismes malsains comme repli sur soi ou autoprotection. Il est important de rassurer et bien dŽvelopper lĠego de lĠenfant, il y aura tout loisir de le dissoudre aprs lĠenfance.

 

II.9 La peur de la mort dŽcoule de lĠamour spontanŽ de la vie ; cet amour est profondŽment enracinŽ en chacun de nous, peu importe le niveau dĠinstruction.

Le mot abhinivesa nomme ce qui est le plus fort en nous, lĠamour spontanŽ de la vie. CĠest notre Žnergie de base. La diffŽrence entre la foi et la connaissance se vŽrifie ˆ lĠinstant de la mort du corps mais aussi ˆ la mort de chacune de nos prŽfŽrences.

 

II.10 Ces causes subtiles de souffrance doivent tre extirpŽes.

 

 

II.11Quant ˆ leurs manifestations, elles disparaissent gr‰ce ˆ la mŽditation.

 

Personne ne peut mŽditer et rester dans un Žtat mental agitŽ ou affligŽ mais la mŽditation seule ne vient pas ˆ bout des causes subtiles de souffrance. Il faut que lĠintellect sĠŽclaire et se pŽnŽtre compltement de la lumire qui transforme la pensŽe.

 

II.12 La souffrance provient des impressions mentales laissŽes par lĠaction ; ces impressions portent leurs fruits dans cette vie ou dans les vies futures.

 

 

La souffrance ne nous harcle jamais ˆ partir de contrŽes Žtrangres. La souffrance rŽsulte des conditionnements mentaux, fondŽs sur les impressions.

 

II.13 Tant que lĠaction laissera une semence dans le mental, cette semence engendrera de nouvelles naissances, de nouvelles vies et de nouvelles expŽriences.

Pour cela nous devons cesser de revendiquer les actions et leurs fruits car ce qui laisse une trace cĠest ce que nous pensons, cĠest lĠappropriation de lĠaction. Ce que nous appelons mŽditation cĠest lĠabandon rŽel envers cela qui agit en nous.

 

II. 14 Celles-ci comportent aussi des fruits : lĠaction juste apporte lĠallŽgresse, lĠaction non juste le tourment.

Chaque mouvement interne du Tout ne peut quĠappeler un mouvement de sens contraire et de mme intensitŽ, car le Tout reste Žternellement le mme.

LĠaction juste tient toujours compte du Tout et celle non-juste que dĠun aspect de la rŽalitŽ et la souffrance qui suit t™t ou tard nous rappelle au Tout.  La nature de la joie est lĠunitŽ celle de la souffrance est la sŽparation.

 

II.15 Les oppositions dynamiques des Žnergies fondamentales ne laissent rien de permanent, ce qui entra”ne de lĠangoisse et des impressions mentales gŽnŽratrices de dŽtresse ; celui qui a dŽveloppŽ son discernement sait que tout cela est souffrance.

 

Cet aphorisme et les deux suivants Žnoncent trois des Ç quatre nobles vŽritŽs È du Bouddha. (la quatrime est II.28 et 29). Rien nĠest stable dans lĠunivers, le stress est lĠŽnergie dŽployŽe par chacun pour sĠadapter ˆ ces changements. La recherche mme du plaisir est la grande source de souffrance.

 

II.16Nous pouvons Žviter la souffrance qui nĠest pas encore en marche.

CĠest la charnire du deuxime chapitre. Nous pouvons corriger notre trajectoire. JŽsus annonce ˆ lĠhomme sa libŽration : Celui qui Žcoute ma parole et croit ˆ celui qui mĠa envoyŽ a la vie Žternelle et nĠest pas soumis au jugement, mais il est passŽ de la mort ˆ la vie È (Jean5,24)

 

II.17 La cause de cette souffrance Žvitable est le recouvrement de la conscience par sa manifestation.

Les lectures, les confŽrences, les cours, les prires, les manifestations de groupe, tout cela joue un r™le, mais ne conserve aucune valeur si nous ne dŽcouvrons pas la conscience, cĠest ˆ dire lĠĉtre. Mme la mŽditation ne possde aucune valeur si elle ne mne pas ˆ cette dŽcouverte.

 

II.18 La manifestation est le jeu des Žnergies fondamentales, soient la lumire, lĠaction et la conservation. Ces principes sĠexpriment tant dans les ŽlŽments que dans la capacitŽ de les percevoir. La manifestation nĠa dĠautre sens que de nous fournir lĠexpŽrience et la libŽration finale.

Les Žnergies fondamentales ont ŽtŽ expliquŽes au sžtra I-16. On retrouve ces trois Žnergies dans lĠŽquation dĠEinstein : inertie=masse (m), action=Žnergie(E), et lumire (c) ondes ŽlectromagnŽtiques.

Patanjali ne divise pas les Žnergies en bonnes ou mauvaises : La vie terrestre est une grande cŽlŽbration. Pour celui qui ne distingue pas lĠessence de la vie tout est souffrance mais pour celui qui a compris la vie et son unicitŽ, tout est joie.

 

II.19 Les Žnergies fondamentales oprent ˆ divers niveaux : particulier, archŽtypal, causal et non manifeste.

Seule la rŽalisation du Tout libre dŽfinitivement.

 

II.20 LĠobservateur est pure conscience ; cĠest cela qui conna”t les pensŽes.

La conscience nĠest pas un centre, ce nĠest pas un lieu, ce nĠest pas une chose, ce nĠest mme pas un Žtat et ce nĠest surtout pas rien. La pure conscience se conna”t alors comme pensŽe. Cela conna”t aussi les pensŽes.

 

II.21 La manifestation nĠexiste que pour lĠEtre.

La manifestation est la vitrine, lĠEtre est le magasin.

Tous les buts sont vouŽs ˆ lĠŽchec irrŽmŽdiable.

 

II.22 LĠillusion du monde nĠexiste plus pour celui qui a rŽalisŽ la conscience ; mais elle nĠest pas dŽtruite pour autant, car elle continue pour les autres.

Le problme du prosŽlytisme est que nous agissons souvent dans ce domaine sous lĠemprise de lĠego et que nous voulons ˆ tout prix convaincre les autres ou les rŽduire au silence.

LĠenseignement doit procŽder dĠun surplus dĠesprit et dĠun trop plein du cÏur.

 

II.23 Le recouvrement du Soi par sa manifestation nous permet, en fin de compte, de reconna”tre la nature vŽritable des deux.

Pour libŽrer le mental il faut tenir dans la mme main le mental et la lumire.

Ç Quand vous serez dans la lumire que ferez-vous ? Au temps o vous Žtiez Un, vous avez fait le deux ; mais alors, Žtant deux, que ferez-vous ? (Thomas11)

 

II.24 CĠest lĠerrance qui nous empche de rŽaliser le Soi.

LĠobstacle cĠest lĠerrance et non la pensŽe, le corps, les autres. LĠerrance et la connaissance participent au mme mouvement.

 

II.25 La fin de lĠerrance est la disparition de lĠidentification. Il nĠy a plus quĠune seule rŽalitŽ.

Pour la conscience il nĠest jamais question dĠerrance. Le samyoga est le mŽlange, le recouvrement. Kaivalya est lĠisolement de la pure conscience, quand il nĠy a plus de mŽlange. Le chemin qui va de lĠerrance ˆ lĠaccomplissement est parsemŽ de morts partielles pour le mental identifiŽ ˆ la manifestation.

Socrate disait : Ç le philosophe nĠa quĠune seule t‰che, apprendre ˆ mourir È.

Ç Qui sĠattache ˆ sa vie la perd ; qui, ne sĠattache pas ˆ sa vie en ce monde, la garde pour la vie Žternelle È(Jean12,25)

 

II.26 Nous mettons fin ˆ lĠerrance gr‰ce au discernement ininterrompu entre la conscience et sa manifestation.

Le discernement doit tre continu sinon lĠerrance remplit les interstices. LĠtre rŽalisŽ, ou libŽrŽ, est celui qui nĠa jamais dĠautre conscience que celle dĠtre le Tout, que tout est le Tout.

Ç Fendez du bois, je suis lˆ ; levez la pierre, vous me trouverez lˆ È.(Thomas77)

 

II.27 Cette pratique du discernement mne ˆ sept rŽalisions ; cĠest la sphre de la connaissance directe.

La connaissance directe, lĠintelligence intuitive sont le couronnement dĠun processus pratique. Elle nĠest pas issue de thses de doctorats, de discussions philosophiques ou religieuses ou de vÏux pieux. Rien de tout cela nĠa menŽ lĠhomme ˆ la libŽration.

Le chiffre Ç 7 È se rŽfre au sept rŽalisations de la philosophie sankhia. Peu importe ces catŽgories que Patanjali ne se donne pas la peine dĠŽnumŽrer.

 

II.28 Gr‰ce ˆ la pratique soutenue des divers aspects du yoga, le systme nerveux se purifie et la lumire de la connaissance porte le discernement ˆ maturitŽ.

Il est bien question dĠaspect et non dĠŽtapes. Ces aspects, comme les branches dĠun arbre, poussent tous en mme temps, alors que des Žtapes sont parcourues lĠune aprs lĠautre. LĠillumination nĠest pas lĠaffaire de la personne, cĠest lĠaffaire de lĠillumination. La personne nĠa quĠˆ nettoyer ses Žcuries mentales et se prŽparer ˆ accueillir la lumire. Ç Heureux les cÏurs purs car ils verront Dieu È (Matthieu 5,8)

Avoir un cÏur pur signifie voir la rŽalitŽ sans compromis et la vivre.

(Cet aphorisme Žquivaut ˆ la quatrime des quatre nobles vŽritŽs du Bouddha celle o est introduit Ç lĠoctuple sentier È.

 

II. 29 Les huit aspects du yoga sont :

-la discipline sĠimpose dĠabord. Il sĠagit dĠune dŽmarche grossire mais nŽcessaire en son temps. CĠest le prŽalable ˆ toute Žvolution spirituelle sŽrieuse.(yama= contr™le de soi, discipline, on la retrouve dans toutes les traditions spirituelles)

- les observances, qui purifient raffinent le systme nerveux. LĠenfance de lĠhumanitŽ ne pourrait se passer de la morale sans se perdre mais par la suite le code moral devient superflu. (niyama=code moral de comportement vis-ˆ-vis des autres)

 -lĠassise, prŽpare le corps pour  lĠintŽriorisation car les huit aspects du yoga nous emmnent toujours plus vers lĠintŽrieur(asana=prŽpare le corps pour lĠintŽriorisation et la mŽditation. Si le corps nĠest pas heureux, la mŽditation sera difficile voire impossible. LĠassise favorise la libŽration du souffle.

-le pranayama. Il y a un saut avec pranayama : la connaissance prŽcde et dŽpasse alors la pensŽe (la rŽvŽlation intime est que ce nĠest plus notre souffle mais  le Souffle)

-lĠintŽriorisation, (pratyahara) est le mouvement centripte du mental qui rentre chez lui et se retire de plus en plus de lĠŽtourdissement extŽrieur.

 -le recueillement (concentration) (dharana) permet dĠaccŽlŽrer lĠŽvolution en focalisant sur une seule rŽalitŽ.

-la mŽditation  (dhyana) constitue lĠaction suprme, celle qui mne ˆ la connaissance vŽritable.

-le sam‰dhi. Etat transcendant de lĠUnique, le yoga, la vision lumineuse du Soi.

 

Patanjali va permettre ˆ un tre humain qui dŽpend dĠune lumire extŽrieure de devenir une Žtoile au firmament de la conscience et de distribuer sa vie et sa chaleur partout autour de lui.

 

II.30 La discipline consiste dans le respect de la vie, la franchise, la non-convoitise, la chastetŽ et la retenue.

Cette discipline sĠŽnonce en sanskri sous forme dĠinterdits. Le respect de la vie est beaucoup plus que le simple fait de ne pas tuer ou blesser, le respect de la vie signifie que nous avanons dans le sens du flot de la vie, que nous coulons avec elle.

En somme il sĠagit dĠtre un avec la vie. Quand nous avons compris cela nous en bŽnŽficions immŽdiatement et ˆ long terme.

 

II.31. Ces grandes lois ne sont pas limitŽes par le mode de vie, le lieu, le temps ni les circonstances ; elles sont universelles.

CĠest lĠattitude face ˆ la vie qui compte plus que lĠacte lui-mme. Par exemple tuer par peur, par colre, par vengeance, par aviditŽ ou par indolence, cĠest de lĠignorance. Mais certaines circonstances peuvent commander la destruction dĠun corps humain ou animal.

La cathŽdrale vŽritable nĠest pas de pierre, cĠest le systme nerveux de lĠhomme. Il ne sĠagit pas de suivre un code moral tatillon et quoique nous fassions toujours un peu hypocrite mais simplement dĠtre la vie.

 

II.32 Les observances sont la puretŽ, le contentement, lĠascse, lĠauto-observation et lĠabandon au Divin.

La puretŽ est la vertu ŽlŽmentaire, non seulement propretŽ physique mais aussi propretŽ mentale et verbale.

Il sĠagit dĠtre clair dans notre corps, notre environnement, nos pensŽes. Vivre dans un environnement en dŽsordre ne tend pas ˆ mener vers lĠillumination.

Le contentement(santosa) est une dŽmarche plus ponctuelle que lĠŽtat dĠŽquanimitŽ(vairagya).Le contentement exige, du moins dans ce sžtra encore un certain effort, alors que le second est un rŽsultat, un Žtat bienheureux gŽnŽral.

(LĠascse est un feu purificateur nŽcessaire pour Žtablir une certaine discipline, lĠauto-observation et lĠabandon au Divin ont dŽjˆ ŽtŽ discutŽs en II-1)

 

II.33 Quand une pensŽe indŽsirable nous oppresse, nous nĠavons quĠˆ nourrir la pensŽe contraire.

Quand une telle pensŽe nous harcle cĠest que nous lui avons gŽnŽralement accordŽ beaucoup dĠattention dans le passŽ.

Il faut prter attention ˆ la pensŽe contraire. Il ne faut pas prter attention ˆ la somme dĠefforts requise pour modifier la situation. Il faut avancer en toute sŽrŽnitŽ, en posant un pied devant lĠautre. Le plus long voyage commence par un pas.

 

II.34 Les pensŽes indŽsirables sont celles qui sĠopposent au flot de la vie, que nous les exŽcutions nous-mmes, que nous en causions lĠexŽcution ou que nous le permettions chez les autres. Elles sont le produit de lĠaviditŽ, de la colre e de lĠŽgarement ; leur intensitŽ peut varier de lŽgre, modŽrŽe, ˆ forte. Le rŽsultat est une errance et une souffrance sans fin. Voilˆ pourquoi on doit alimenter les pensŽes contraires.

É qui sĠoppose au flot de la vie : peu importe que cette opposition soit ˆ court, moyen ou long terme et peu importe notre degrŽ de responsabilitŽ dans lĠexŽcution de cette pensŽe.

 

II.35 Quand nous sommes fermement Žtablis dans le respect de la vie, toute animositŽ dispara”t autour de nous.

(AHIMSċ : Ç Non nuisance È. Ne point nuire dĠaucune sorte ˆ toute structure porteuse de vie.

Quand nous sommes Un avec la vie les tres vivants le sentent, dĠune faon ou dĠune autre et ils ne peuvent que se sentir en confiance. Nous sommes tous des Žponges qui absorbons les vibrations environnantes.

Tel Žtait le pouvoir de St Franois avec les animaux.

 

II.36 Lorsque nous sommes fermement ǎtablis dans le respect de la vŽritŽ, nos actions sont naturellement couronnŽes de succs. 

SATYA : la vŽracitŽ, le non-mensonge.

(Il y a le mensonge aux autres utile ou inutile et le mensonge ˆ soi-mme toujours inutile. Le mensonge aux autres est utile quand il permet dĠŽviter une nuisance ˆ lĠautre mais il faut lutter contre les justifications permanentes dans lesquelles lĠhomme est littŽralement ancrŽ.)

 Mensonge, tromperie, duplicitŽ etcÉ tout cela exprime la tentative dĠen arriver ˆ une fin, ˆ sa fin. T™t ou tard le ciel nous tombe sur la tte car rien nĠest sŽparŽ du Tout. Fermement est important, cela veut dire lĠaccomplissement ultime de la vŽritŽ.

 

Seul un tre Žtabli ˆ ce point est un juste, il est la vŽritŽ. Cet tre possde alors le pouvoir de bŽnir, c.ˆ.d. la capacitŽ de rendre lĠaction fructueuse.

Ce sžtra suggre une sorte dĠintermŽdiaire entre lĠhomme ordinaire, dont le dŽsir Žgo•ste trop marquŽ nuit ˆ lĠefficience de sa demande, et le yogi accompli, qui nĠa plus aucune demande ˆ formuler.

II.37 Quand nous sommes fermement Žtablis dans la non-convoitise, lĠabondance vient ˆ nous.

(ASTEYA : le non vol, la Ç non appropriation È.

Quand nous ne convoitons rien tout vient ˆ point. Plus nous donnons, plus nous recevons ˆ condition dĠtre Ç un È avec le flot. La vie est lĠunique abondance, il suffit de la laisser tre la vie en nous pour crŽer les conditions de lĠabondance.

Quand nous travaillons ˆ lĠÏuvre du Divin, tout le nŽcessaire nous vient aisŽment car lĠÏuvre elle-mme est le Divin.

Ç Ainsi, tout ce que vous dŽsirez que les autres fassent pour vous, faites-le vous-mmes pour eux : voilˆ la Loi et les Prophtes. È (Matthieu 7,12)

 

II.38 Fermement Žtablis dans la chastetŽ, nous disposons dĠune grande Žnergie intŽrieure.

(Brahmacharya : sĠabstenir des formes dĠŽmotions qui accompagnent la vie sexuelle et qui se produisent mme en dehors.

QuĠest ce que la chastetŽ ? Le mot Ç Brahmacharya È signifie littŽralement Ç le disciple de Brahma È ou Ç celui qui suit lĠexemple de Brahma È. Brahma est le crŽateur, lĠŽnergie crŽatrice. Le disciple maintient son attention sur lĠŽnergie crŽatrice c.ˆ.d. lĠŽnergie tout court. LĠŽnergie sexuelle nĠest pas ˆ part des autres. La chastetŽ vŽritable nĠa donc rien ˆ voir  ni avec une vie sexuelle active ni avec sa rŽpression. La chastetŽ consiste plut™t en un raffinement de lĠŽnergie vitale qui nĠa plus besoin de sĠexprimer par les canaux de la gŽnitalitŽ. Les relations amoureuses se transforment en une merveilleuse et innocente tendresse.

Cette chastetŽ procure une Žnergie abondante (v•rya) car on a alors dŽcouvert la source de lĠŽnergie.

 

II. 39 Fermement Žtablis dans la retenue, nous pouvons conna”tre le sens de la vie.

La retenue est la libertŽ face aux dŽsirs.

(APARIGRAHA )

II.40. La puretŽ nous aide ˆ nous dŽtacher de notre propre corps et ˆ cesser la recherche de la matire.

 

(SHAUCHA : premire des accessions de niyama. Elle se subdivise en puretŽ extŽrieure et intŽrieure.

QuĠest ce que la puretŽ ? Ce qui est pur est un. La puretŽ totale est la rŽalisation de lĠUnique. Le corps est le temple de lĠesprit. Ds lors nous ne recherchons plus la compagnie des autres corps mais plut™t la prŽsence de leur tre.

 

II.41 Avec la puretŽ amenŽe par lĠŽlŽvation spirituelle viennent la gaietŽ dĠesprit, la puissance de concentration, la ma”trise des sens et la capacitŽ de rŽaliser le Soi.

Avec la puretŽ, lĠ‰me sĠest dŽbarrassŽe des lourdeurs, des obstacles les plus grossiers. Les Žnergies fondamentales sĠŽquilibrent et laissent agir la troisime, plus subtile (sattva)

Ç Heureux les cÏurs purs car ils verront Dieu È (Matthieu 5,8)

Cet esprit de gaietŽ est la condition naturelle dĠun saint authentique et contraste avec les images morbides que lĠon nous a trop souvent laissŽes.

 

II.42 Gr‰ce au contentement, nous atteignons un bonheur insurpassŽ.

( Samtocha : le contentement inconditionnel quelque soit plaisir ou peine.

La mŽthode traditionnelle consiste ˆ rechercher les objets, personnes, situations, Žmotions qui plaisent au mental c.ˆ.d. aux impressions mentales accumulŽes.

La sagesse courante veut que la recherche du bonheur soit dĠatteindre quelque chose qui nous fait dŽfaut. Or, cĠest objet est toujours limitŽ et ne peut donc fournir quĠun bonheur limitŽ.

Il nĠest absolument pas question de fuir les objets et les circonstances qui nous plaisent. Que dit le sžtra ? La joie est la marque de lĠtre et lĠtre nĠa besoin de rien.

La poursuite du plaisir est un besoin maladif. Cela est trs ŽloignŽ de la joie naturelle ressentie au contact de tout ce qui pla”t ˆ la vie et ˆ nous.

 

II.43 Gr‰ce ˆ lĠascse nous Žliminons les impuretŽs et nous atteignons la perfection du corps et des sens.

(TAPAS : lĠaustŽritŽ. Trois composantes : physique, verbale et mentale.

LĠascse constitue ici, dans son acception particulire, une rupture brutale avec la poursuite du plaisir. Le mental enivrŽ nĠa parfois pas dĠautres moyen que de recourir ˆ la force pour se sŽparer de son objet de prŽdilection.

LĠascse vŽritable consiste ˆ maintenir notre attention sur la conscience qui peroit lĠobjet, sur la joie elle-mme. Ascse signifie devenir vrai, simple et un.

 

II. 44  A force de mŽditer sur nous-mmes, nous en arrivons ˆ la communion avec notre dŽitŽ bien-aimŽe.

(SVċDHYċYA : le Ç dŽveloppement de soi È qui conduit ˆ une conscience trs claire de lĠEtre suprme.

LĠobservation suggŽrŽe ici veut dire toute rŽflexion menŽe en vue de nous amŽliorer, c.ˆ.d. de corriger nos tendances ˆ lĠerrance. Ce qui nous rapproche le plus du Divin, ce nĠest pas la prŽtention dĠtre non affectŽ quand nous sommes affectŽs par les ŽvŽnements, cĠest de voir ce qui est.

Il peut nous appara”tre JŽsus, Mo•se, Khrishna ou notre grand-mre, mais le plus important cĠest la libŽration amenŽe par le regard honnte.

II.45 Nous atteignons lĠŽtat de parfait sam‰dhi en nous abandonnant totalement au Divin.

(ISHVARA PRANIDHARċ : Ç lĠabandon ˆ la divinitŽ È

Ce sžtra nous mne ˆ lĠessence mme de la mŽditation. Jean-Baptiste dŽclarait : Ç Nul ne peut rien sĠattribuer qui ne lui soit donnŽ du ciel. È (Jean 3,27)

LĠabandon au Divin ne constitue pas un exercice dŽlibŽrŽ et volontaire sinon cĠest encore le fait de lĠŽgo•sme. Cela ne veut, pas dire sĠabandonner ˆ un autre tre mais bien au seul tre, ˆ son tre.

Le sam‰dhi nĠest pas un exercice mental, cĠest lĠeffet de la gr‰ce Žclairante qui touche lĠhomme.

Swami Shyam (auprs duquel Jean Bouchard dĠOrval a sŽjournŽ en Inde) lanait : ÈNe vous inquiŽtez pas au sujet de samadhi : cĠest mon affaire ! Contentez-vous de maintenir votre corps en santŽ et votre mental pur. È

LĠintensitŽ de la foi conduit ˆ la contemplation et aux facultŽs exceptionnelles qui lĠaccompagnent. FacultŽs potentielles chez tout individu.

 

II.46LĠassise sera stable et facile.

 

Asana signifie exactement cela.  Les asanas ou postures du hatha-yoga ont pour principale vertu de permettre au corps de sĠasseoir en mŽditation sans tre dŽrangŽ. Cela est par la suite devenu une discipline.

Quand tout va bien dans le corps ; il nĠenvoie aucun signal et le rel‰chement sĠinstalle. Mais gardons nous dĠattendre la situation idŽale pour mŽditer.

Un tel tre demeure Ç  fermement Žtabli dans un espace heureux È (GŽrard Blitz dĠaprs Franoise Mazet yoga-sžtra de Patanjali –SpiritualitŽ vivante nĦ89 de 1991.)

Les conseils de Patanjali sont simples, il est compltement inutile, voire nuisible, de se lancer dans des dŽmarches compliquŽes et de se charger dĠun lourd fardeau pour le voyage de la libŽration.

Ç Venez ˆ moi, vous tous qui peinez et ployez sous le fardeau, et moi je vous soulagerai. Chargez-vous de mon joug et mettez-vous ˆ mon Žcole, car je suis doux et humble de cÏur, et vous trouverez soulagement pour vos ‰mes. Oui, mon joug est aisŽ et mon fardeau lŽger. È (Matthieu11, 28-30)

 

II.47 Pour cela il suffit de se rel‰cher et de sĠabsorber dans lĠInfini.

 

Le Divin est la joie et lĠaisance. Est-il pensable dĠy accŽder par la souffrance et la crispation ?

 

II.48 Nous ne sommes alors plus dŽrangŽs par les paires dĠopposŽs.

AbsorbŽ dans lĠInfini quĠest ce qui pourrait nous dŽranger ? Sinon nous sommes assailli par gain/perte, plaisir/douleur, bien/mal etcÉ

 

II.49 Nous pouvons alors dŽvelopper notre Žnergie, en pratiquant la non-respiration, le pranayama

Le prana est lĠŽnergie vitale. Elle nĠa pas de forme spŽcifique. CĠest lĠŽnergie avant quĠelle ne se manifeste sous une forme quelconque. Son expansion est donc essentielle. Il faut sentir cette Žnergie en nous et pour  la diriger vers des niveaux plus subtils, il est bon dĠŽviter de la diriger rŽgulirement vers des rŽgions plus grossires.

Les anciens dŽjˆ, en Occident,  reconnaissaient le lien entre le souffle et lĠEsprit : rouha en hŽbreu, pneuma en grec, spiritus en latin veulent dire ˆ la fois souffle et esprit.

 

II.50 Le souffle est suspendu aprs lĠexpiration ou aprs lĠinspiration. Selon le volume, la durŽe et la frŽquence de rŽpŽtition, le souffle se fait prolongŽ et subtil.

Le pranayama est un Žtat de cessation du processus habituel de la respiration qui peut se produire nĠimporte o. Le souffle se fait prolongŽ et subtil. LĠacquisition dĠun souffle profond et subtil Žlve et raffine la conscience et rŽciproquement.

 

II.51 Le quatrime Žtat de pranayama transcende les notions dĠexpiration et dĠinspiration.

Le mouvement entier du souffle est peru comme lĠactualisation de la non-respiration, qui est lĠunique rŽalitŽ. Ce quatrime Žtat transcende lĠespace et le temps, cĠest une gr‰ce totale. Cet Žtat subtil est la cessation parfaite dŽcrite dans le premier chapitre.

 

II.52 Ce qui voilait la lumire dispara”t alors.

LĠŽmergence du quatrime Žtat de pranayama Žlimine le voile et nus fait dŽboucher dans lĠinconnu, lˆ o il nĠy a rien dĠautre ˆ conna”tre.

 

II.53Le mental est dŽsormais apte au recueillement.

La subtilitŽ de la nouvelle perception permet le recueillement du mental. Tout sĠaccomplit doucement et en silence. Les exercices de pranayama nous font prendre conscience de lĠŽnergie plut™t que des formes quĠelle emprunte.

 

II.54 LĠintŽriorisation se dŽveloppe lorsque les sens ne sont plus mis en contact avec leur objet et quĠils atteignent la subtilitŽ du mental.

LĠintŽriorisation cĠest le retournement de lĠattention vers ce qui est plus prs de nous. Nous sommes ds lors moins attirŽs par le fard de lĠtre. -le phŽnomne- que par la rŽalitŽ elle-mme.

Mais le signe de lĠintŽriorisation mature cĠest quand nous sommes intŽriorisŽs y compris quand nous sommes en contact avec le monde Ç extŽrieur È.

 

II . 55 Lˆ rŽside la ma”trise suprme des sens.

La ma”trise suprme des sens ne consiste certainement pas ˆ les rŽprimer ou ˆ les mŽpriser. Il nĠy a rien ˆ atteindre Ç lˆ-bas È. Il ne reste quĠˆ cŽlŽbrer. Tel est lĠaspect du yoga : favoriser lĠŽmergence de la clartŽ et la laisser sĠactualiser dans notre vie.

HŽraclite disait Ç Avoir lĠesprit clair est la plus haute vertu ; la sagesse consiste ˆ parler de la rŽalitŽ telle quĠelle est et agir selon sa nature vŽritable, demeurant ˆ son Žcoute. È

 

 

LE DEPLOIEMENT

(Vibhuti pada)

(Il dŽcrit la capacitŽ du mental qui, gr‰ce aux diverses pratiques ŽnoncŽes aux deux premiers chapitres, peut atteindre un Žtat dŽpourvu de distraction. Un tel mental peut explorer profondŽment des objets et des concepts. Ses possibilitŽs sont vraiment innombrables. Le pratiquant acquiert une connaissance des objets dĠun niveau inconnu jusquĠici. Pourtant mme cette connaissance peut ˆ son tour devenir source de distraction et empcher la personne dĠatteindre lĠŽtat dĠtre suprme. Cet Žtat supŽrieur est lĠaffranchissement de toute perturbation, quelle quĠelle soit et ˆ tout moment.)

 

 

III.1 Le recueillement est le maintien de lĠattention sur un mme objet.

Nous ne pouvons prendre en considŽration quĠun seul objet ˆ la fois. Quand nous avons lĠimpression de faire plusieurs choses en mme temps, cĠest simplement que notre attention voyage de lĠune ˆ lĠautre.

La clŽ est dans le mot Ç maintien È. Le temps durant lequel sĠexerce lĠattention fait toute la diffŽrence.

Sans recueillement, la conscience de lĠobservateur ne peut devenir une avec lĠobjet observŽ, car elle nĠa pas le temps de se dŽtacher de tous les accessoires ( nom, forme, idŽes associŽes etcÉ)

Tant que nous ne pouvons devenir Ç un Ç avec lĠobjet, tant que nous sommes sŽparŽs de lui, nous ne pouvons le conna”tre vraiment.

Sur le chemin de la connaissance, le recueillement est incontournable.  Ç Qui nĠest pas avec moi est contre moi et qui nĠamasse pas avec moi dissipe. È (Luc11,23)

Pourquoi Ç recueillement È plut™t que la traduction habituelle de Ç concentration È ? Car ce mot ouvre une clairire que lĠautre ne pouvait indiquer. La pensŽe sĠest habituŽe ˆ recueillir Ç lĠŽtant È, la forme ; il sĠagit ici de recueillir lĠtre de tous les Ç Žtants È.

Quand la pensŽe, lasse de ses poursuites futiles et victoires fallacieuses, demeure tranquille dans un moment respectueux, quand le silence sĠŽcoule en un torrent ininterrompu, quelque chose de nouveau voit le jour.

Ravi, lĠexpŽrimentateur confie cela ˆ la mŽmoire qui le prend en garde. Avec la pratique persistante de ce moment de recueillement inou•, la pensŽe se met ˆ rŽflŽchir  cela.

Peu ˆ peu, elle sĠhabitue ˆ accueillir tel quel le continuum dĠune joie  sans sujet ni objet, lĠaction procde dŽsormais dĠun trop plein du cÏur et dĠune abondance de lĠEsprit.

 

III.2 Lorsque lĠobjet du recueillement occupe le champ de la conscience dĠune faon totale et ininterrompue, cĠest la mŽditation.

La mŽditation suit le recueillement, la frontire entre les deux peut sembler floue mais on peut la tracer lˆ o tout effort cesse et quand le recueillement devient total et ininterrompu.

Il convient de demeurer assez rigoureux pour ne pas laisser lĠinflation verbale ravaler la mŽditation ˆ une activitŽ qui, par comparaison, demeurera toujours relative, limitŽe et mondaine.

On peut mŽditer sur nĠimporte quoi comme le dit le sžtra III.6. La mŽditation ramne ultimement sur la prŽsence, sur la conscience ; CĠest cela qui permet finalement la transformation du mental.

 

III.3 Lorsque la nature essentielle de lĠobjet resplendit en toute puretŽ, comme sĠil nĠavait plus de forme propre, cĠest le sam‰dhi.

CĠest lĠŽtat de conscience dans lequel lĠintellect ne peroit plus quĠune seule rŽalitŽ et quĠil sĠidentifie ˆ cette rŽalitŽ.

Ç Je suis Celui qui est, issu de Celui qui est Žgal È (Thomas 61)

CĠest ˆ ce stade seulement que lĠon peut parler de transcendance. LĠexpŽrience du Sam‰dhi, qui est en fait la fin des expŽriences, ne peut tre ni analysŽe ni expliquŽe.

Pour celui qui le conna”t, le sam‰dhi vŽritable est le seul Žtat qui soit. Il nĠexiste rien en dehors de ce sam‰dhi.

III.4 Les trois forment un tout : le samyam.

IdŽe de fusion avec lĠobjet, dĠabsorption complte. Mais ce langage est dŽfectueux.

Le samyam est lĠŽtablissement de lĠunicitŽ dans ce que nous appelons la conscience individuelle. CĠest le symbolisme de la tunique de JŽsus. Ç Cette tunique Žtait sans couture, tissŽe tout dĠune pice de haut en bas È (Jean19, 23)

 

III.5 Une fois le samyam ma”trisŽ, lĠintelligence suprme sĠŽpanouit.

 

LĠintelligence, cĠest la facultŽ de Ç lire entre È : entre les lignes, entre les gens, entre les formes, entre les phŽnomnes. CĠest aussi le pouvoir de Ç lier ensemble È. LĠintelligence suprme (pragya) serait donc de dŽvoiler Cela qui est le plus inconnu. Elle rŽvŽle que la continuitŽ vŽritable de la vie repose dans lĠtre et jamais dans le phŽnomne. Tant la physique quantique que notre vie de tous les jours nous font signe dans cette direction.

Mais pour tre en mesure de rŽaliser Cela, il faut dĠabord abandonner le connu et laisser la vŽritŽ faire son chemin jusquĠˆ nous.

Conna”tre cĠest tre ce que lĠon conna”t et il nĠy a quĠun tre. Le samyam Žtablit lĠunicitŽ entre le sujet et lĠobjet ; il ouvre donc ˆ la connaissance et ˆ la puissance. Les pouvoirs surnaturels (siddhi) sont fondŽs sur cette rŽalitŽ.

 

III.7 Ces trois aspects de la pratique sont plus intimes que les prŽcŽdents.

La discipline du yoga constitue un vŽritable mouvement du dehors (lĠŽtant, la forme, la conscience) vers le dedans (lĠtre, lĠexistence, la conscience). De toute faon, la vie elle-mme semble bouger en ce sens. La discipline du yoga ne fait que lĠaccentuer. On dit des trois aspect du yoga, rŽsumŽs par le terme samyam, quĠils sont plus internes, car ils nous font accŽder ˆ lĠtre plus que tous les autres.

La quintessence de la pratique, cĠest la rŽalisation de lĠtre et non les exercices de hatha yoga, lĠascse ou les exercices de respiration.

 

III.8 Mais mme le samyam demeure un exercice en deˆ du sam‰dhi absolu.

Rien, absolument rien, ne peut se comparer au sam‰dhi absolu, car cĠest lˆ et seulement lˆ que luit la pleine splendeur de lĠtre. La tentation est grande de nous croire Ç arrivŽs È ds que nous commenons ˆ ma”triser le samyam. Mais tant quĠun soupon dĠerrance demeure, la pensŽe pensera sous emprise, bloquant toute possibilitŽ de libŽration ou dĠaccomplissement total.

 

III.9 La transformation de la cessation sĠopre lorsque le mental devient lĠinstant de cessation, avec la disparition des tendances mentales centrifuges et lĠapparition de ses tendances centriptes.

 

La vie nĠest quĠune suite de transformations. La transformation proclamŽe par Patanjali, reprŽsente alors la premire et seule mŽtamorphose digne de ce nom. Ce profond bouleversement est le passage de la pensŽe ˆ la non-pensŽe. Tout ce qui demeure en deˆ relve du domaine de lĠactivitŽ mentale, du point de vue et de lĠopinion.

 

III. 10 Le silence sĠŽcoule alors en un torrent ininterrompu, entra”nŽ par sa propre impulsion.

 

A mesure quĠelle sĠinstalle, la cessation fait boule de neige. Plus on mŽdite et plus on a envie de mŽditer.

Le ruisseau devient bient™t une cascade, puis un torrent de silence, une rivire de paix profonde et un fleuve dĠamour qui sĠouvre finalement sur lĠinfini.

 

III.11 La transformation du sam‰dhi est la fin de la dispersion mentale et la montŽe de la vision de lĠunicitŽ.

La vision de lĠUnique se dŽploie de plus en plus nettement.

A chaque niveau de Sampragyaha, (cf I.17) le mental passe de la dispersion ˆ la concentration. Nous rencontrons, ˆ chaque pas, un espace de distraction et un espace de recueillement sur le fond, sur lĠessence. Il y a alternance des deux Žtats.

 

III.12 Il sĠensuit alors la transformation de lĠunicitŽ : le mental reoit lĠapaisement et lĠactivation de son mouvement cognitif en un moment unique.

Quand nous nĠenregistrons plus de diffŽrence entre le son et le silence qui remplit les interstices, ou entre lĠactivitŽ mentale et la cessation, nous parlons alors de la transformation de lĠunicitŽ.

Chaque moment de la mŽditation est le Moment, qui est la conscience unique, la seule rŽalitŽ. Nous ne divisons plus lĠexistence ; il nĠy a plus quĠune seule rŽalitŽ. A ce moment nous avons cessŽ de sŽparer mŽditation et action. Nous vivons alors la vie comme elle devrait tre vŽcue.

 

III.13 On dŽcrit de la mme faon les transformations qui affectent le monde physique, par rapport aux changements de formes, ˆ la description temporelle de ces changements et ˆ lĠŽtat des formes.

Le mme patron de transformation se retrouve dans le monde physique et le monde mental.

Le changement peut tre illustrŽ par la transformation que subit un tronc dĠarbre qui devient papier, carton puis livre etcÉ

De la mme faon, le mental peut-tre concentrŽ ou dispersŽ. Mais ˆ chaque Žtat des formes correspond une maturitŽ de cette forme : le jeune arbre diffre du vieil arbre, de mme pour le papier ou le livre.

Il convient donc dĠobserver sur un long terme et ne pas sĠinquiŽter des pŽriodes o il ne se passe rien.

 

III.14 LĠessence est ce qui perdure ˆ travers toutes les transformations, rŽvolues, actuelles ou potentielles.

LĠessence est ici la substance qui est le sige du changement, cela qui perdure malgrŽ toutes les mŽtamorphoses.

Dans notre exemple de lĠarbre, lĠessence serait la matire ligneuse, composŽe des molŽcules organiques. La vie spirituelle consiste ˆ maintenir lĠattention sur lĠessence de la vie, sur la pure conscience, au-delˆ de toutes les formes quĠelle emprunte.

CĠest lˆ le secret de tous le siddhis ou pouvoirs surnaturels. Le maintien de lĠattention sur lĠessence permet de rŽaliser que nous sommes lĠessence et quĠil nĠy a que cela.

 

III. 15 La diversitŽ des formes est la consŽquence de la loi de lĠŽvolution.

La mme rŽalitŽ a expŽrimentŽ des myriades de transformations, donnant naissance aux formes que nous observons.

En mŽditant sur cela, nous connaissons lĠtre et son rapport avec sa manifestation. CĠest la connaissance de ce rapport qui constitue la base dĠo les pouvoirs surnaturels agissent sur la manifestation.

 

III.16 En faisant samyam sur les triples changements, nous acquŽrons la connaissance du passŽ et du futur.

Ce que lĠon nomme passŽ et futur demeure renfermŽ dans lĠessence et cela de tout temps. En faisant samyam sur les transformations de lĠessence, nous pouvons conna”tre le passŽ et le futur.

Les Ç triples changements È sont ceux mentionnŽs en III.13

Comment cela se passe–t-il ? Il sĠagit de conna”tre la forme prŽsente et de diriger notre attention sur les transformations passŽes ou futures. Alors Ç le film se dŽroule, È  image par image, chacune reprŽsentant une transformation infinitŽsimale par rapport ˆ la prŽcŽdente ou la suivante. La technique est simple mais cĠest parce que le samyam nŽcessite une longue pratique avant dĠtre ma”trisŽ –il ne sĠagit pas dĠun Žtat de conscience  banal- que la connaissance du passŽ et du futur est aussi rare.

III.17 Notre intelligence des tres est habituellement confuse parce que leurs sons, le sens et les concepts qui y sont associŽs se trouvent tous enchevtrŽs dans le mental. En dirigeant le samyam sur la distinction entre les trois, nous pouvons conna”tre le langage de tout tre vivant.

On y fait rŽfŽrence dans les aphorismes I.42 et I.43.Il sĠagit de voir clair malgrŽ la fort. Le samyam nĠentretient quĠune seule rŽalitŽ : lĠtre. Tout son Žmis par un tre vivant renferme sa vŽritŽ. Tout est dans tout. Nous pouvons conna”tre quelquĠun ˆ la faon dont cette personne se tient, marche, sĠassied, par sa voix, par son Žcriture, par ses yeux, etcÉLa vŽritŽ dĠun tre vivant ne se livre ˆ nous que si nous ne la noyons pas sous nos idŽes et nos perceptions. Voir la rŽalitŽ telle quĠelle est, dans tout son dŽpouillement : telle est lĠidŽe de base du Samyam car alors nous nĠŽcoutons plus nos propres projections mentales.

 

III.18 En prenant directement conscience des impressions mentales latentes, nous acquŽrons la connaissance des vies antŽrieures.

Les impressions mentales ne sont que le rŽsultat des expŽriences passŽes. On peut les Ç remonter È et ainsi conna”tre le passŽ, Ç son ÈpassŽ. Pour cela il suffit de suivre ˆ la trace une tendance mentale significative ; on fait samyam sur cette tendance. Les incarnations surviennent dans la foulŽe du cycle action-impression-dŽsir-action.

Tout ce qui nous est facile, nous lĠavons accompli trs souvent dans le passŽ. Nous pouvons donc faire samyam sur tout ce en quoi nous avons une habiletŽ innŽe, tout ce qui nous pla”t, tout ce qui nous sourit.

Mais nous pouvons faire samyam sur ce qui nous fait peur et nous repousse. Il sĠagit donc de faire samyam sur tout ce qui ne nous est pas indiffŽrent : cĠest autour de cela que les incarnations se cristallisent.

Cette faon dĠappliquer le samyam aux tendances mentales est valable tant pour nous-mmes que pour les autres.

III.19 En concentrant le samyam sur les pensŽes dĠun autre mental, nous en connaissons la nature.

Les pensŽes qui nous viennent ne font que reflŽter le mental. Ce dernier nĠest quĠun concept permettant de nommer la collectivitŽ des impressions.

 

III.20 Nous ne connaissons pas le contenu de ce mental, car cela nĠentre pas dans le champ de ce samyam.

Nous ne pouvons conna”tre toutes les pensŽes dĠun autre mental, car il y a un ŽlŽment non linŽaire qui entre en jeu. Nous ne pouvons mme jamais conna”tre notre propre mental : comment il rŽagira ˆ chaque situation, quĠest ce quĠil imaginera. A plus forte raison donc un autre mental. Au niveau mental, rien nĠest jamais terminŽ.

Un concept bien encrŽ veut quĠun tre rŽalisŽ sache toutes les pensŽes de quiconque se tient devant lui. Un tel tre conna”t uniquement les pensŽes quĠil a ˆ conna”tre.

 

III.21 Si nous portons le samyam sur la forme de notre corps, nous pouvons rendre celui-ci invisible, simplement en bloquant le pouvoir quĠil a dĠtre peru par lĠÏil.

La matire nĠest pas la matire. Tout nĠest que conscience et la matire nĠest que la conscience manifestŽe.

Ç Ainsi parla JŽsus et sĠen allant il se dŽroba ˆ leur vue È (Jean 12,36)

 

III.22 Les actes portent leurs fruits plus ou moins rapidement. En appliquant le samyam sur eux, nous pouvons conna”tre lĠheure de notre mort et dŽchiffrer les prŽsages.

 

Cet aphorisme sĠapparente ˆ III,18. Les actes rŽsultent des dŽsirs et chaque incarnation ajoute une Žtape dans ce jeu. Une incarnation particulire se termine quand ce qui avait ŽtŽ accompli ou appris lĠa ŽtŽ, quand certains actes passŽs ont portŽ leurs fruits. Personne ne part trop vite et chaque chose arrive en son temps.

Tant que le moment nĠest pas venu, rien ni personne ne saurait provoquer la dissolution dĠune forme.

Quand lĠheure a sonnŽ rien ne pourrait la faire retarder.

Ç Qui dĠentre vous peut, en sĠen inquiŽtant, ajouter une seule coudŽe ˆ la longueur de sa vie È ? (Matthieu 6,27)

Cette connaissance est possible tout simplement parce que les consŽquences des actes sont ces mmes actes, sous une autre forme. LĠessence demeure malgrŽ les transformations. ( voir III.13 et14)

 

III.23. En portant notre samyam sur la bienveillance, la joie et la compassion, ces qualitŽs fleurissent.

Nous pouvons expŽrimenter cela aisŽment. Par le samyam, nous devenons un avec lĠobjet contemplŽ.

Nous apprenons souvent par Žmulation. Quand nous admirons intensŽment un personnage et maintenons notre attention sur lui, nous finissons par adopter ses qualitŽs. La vie des ma”tres spirituels est stimulante. Nous pouvons aussi porter notre attention sur la compassion.

 

III.24 En dirigeant le samyam sur la force dĠun ŽlŽphant, nous acquŽrons cette force.

CĠest la force qui est forte jamais une personne. En faisant samyam sur la force nous devenons la force ;

 

III .25 Gr‰ce ˆ lĠabsorption sur lĠŽclair premier de lĠintelligence, nous connaissons ce qui est subtil, voilŽ ou ignorŽ.

En devenant lĠŽclair intuitif, nous perons tous les voiles car nous nous plaons avant la manifestation. Nous voyons directement et non par phŽnomnes interposŽs. Les apparences voilˆ tout ce que lĠhomme non entra”nŽ au samyam est ˆ mme de percevoir.

JŽsus affirme : Ç il nĠy a rien de cachŽ qui ne se rŽvŽlera. È(Thomas5)

III.26 En appliquant le samyam sur le soleil, nous connaissons les diverses rŽgions de lĠunivers.
Faire samyam sur le soleil (soleil intŽrieur) cĠest contempler lĠordre cosmique.

 

III.27 En portant le samyam sur la lune, nous connaissons la disposition des Žtoiles.

 

III.28 En faisant samyam sur lĠŽtoile polaire, nous connaissons le mouvement des Žtoiles.

Il sĠagit du mouvement autour de lĠŽtoile polaire. Cela conduit, entre autres, ˆ la rŽalisation que la Terre tourne autour de lĠaxe polaire.

 

III.29 En faisant samyam sur le plexus du nombril, nous connaissons lĠarrangement interne de lĠorganisme.

CĠest par lˆ que nous sommes reliŽs ˆ la mre. LĠorganisme entier sĠest distribuŽ et rŽparti de lˆ.

 

III. 30 En faisant samyam sur le creux de la gorge nous ma”trisons la faim et la soif.

 

III.31 En faisant samyam sur le canal dĠŽnergie en forme de tortue, nous acquŽrons la stabilitŽ.

Le  diaphragme est ni plus ni moins quĠune porte entre le monde des Žmotions et le monde de la lumire, de lĠamour et de la paix.

Le samyam sur le Ç mŽridien en forme de tortue È dans la cage thoracique apaise les Žmotions et libre la voie vers les rŽalisations supŽrieures. Ce passage est critique dans lĠŽvolution de tout individu. Notre culture fait beaucoup porter lĠaccent sur les Žmotions, de sorte que nous en venons souvent ˆ considŽrer celles-ci comme la forme la plus ŽlevŽe de la manifestation humaine. Il sĠagit en rŽalitŽ dĠune manifestation relativement grossire. Les grandes Žmotions flattent lĠŽgo. Trs peu dĠentre nous rŽussissent ˆ transcender lĠenclos des Žmotions.

Le samyam guide ici lĠhomme vers une rŽalitŽ ˆ la fois plus subtile et plus durable.

 

III.32 En faisant samyam sur la lumire de la connaissance au sommet de la tte, nous pouvons voir les tres cŽlestes.

La lumire de la connaissance, cĠest la lumire divine. Or les tres parfaits (les siddhas) sont cette lumire.

 

III.33 La lumire de lĠintuition directe permet de tout conna”tre.

ExpŽrimenter directement cĠest tre. Rien ne peut remplacer lĠexpŽrience directe. Pourquoi ne pas viser le Tout ds le dŽpart ?

Ç Cherchez dĠabord le Royaume des Cieux et sa justice, et tout le reste vous sera donnŽ par surcro”t È (Matthieu 6,33)

Pourquoi nous contenter dĠune recherche partielle et de rŽsultats en deˆ de la rŽalisation parfaite ?

 

III.34 En faisant samyam sur le cÏur de lĠtre, nous acquŽrons la connaissance du mental.

QuĠest ce que le cÏur ? Il nĠa rien ˆ voir avec les Žmotions. Le cÏur est cette facultŽ dĠabandon total ˆ lĠtre.

Le cÏur cĠest le secret de lĠtre, cĠest ce qui est le plus intime. Il nĠest donc pas recommandŽ de condamner son mental, encore moins de le torturer, le, battre ou le tuer. Tout ce quĠil y a ˆ faire cĠest de tranquillement remonter ˆ son essence, le cÏur de lĠtre.

 

III. 35 LĠEsprit et la lumire cognitive sont en fait trs diffŽrents, car la lumire est lĠinstrument de lĠEsprit. Notre soif dĠexpŽriences et de savoir extŽrieurs marque notre incompŽtence ˆ distinguer les deux.

En faisant Samyam sur ce qui existe en soi, nous acquŽrons la connaissance de lĠEsprit.

Quelle est la principale diffŽrence entre lĠEsprit et la lumire cognitive (sattva) ?

LĠEsprit est ; il ne va nulle part. La lumire cognitive, elle, a encore un objectif, mme si cet objectif est trs noble. Mme si elle Žclaire et raffine, elle entretient encore entre deux rŽalitŽs.

Nous pouvons demeurer accrochŽs trs longtemps ˆ la lumire cognitive. Nous percevons lĠEsprit ˆ travers cette lentille dŽformante et sommes encore dans le monde fragmentŽ.

 Pour conna”tre lĠEsprit, il faut mŽditer sur Lui. Le ma”tre affirme : Ç Si les gens vous disent Ç dĠo tes-vous ? È dites-leur : Ènous sommes venus de la lumire o la lumire est nŽe dĠelle-mme. È (Thomas50)

 

III.36 De lˆ naissent lĠŽclair de la connaissance directe, lĠaudition subtile, le toucher subtil, la vision subtile, le gožt subtil et lĠodorat subtil.

Quand lĠŽpais se retire, le subtil devient apparent. Nous nĠavons pas besoin de crŽer le subtil ; il nĠy a quĠˆ se libŽrer du grossier ! Nous en venons ˆ conna”tre subtilement, car nous remontons vers la source.

 

III.37 Voilˆ des pierres dĠachoppement sur le chemin de la libŽration, mais des rŽussites pour un mental encore Žtourdi par le monde extŽrieur.

Ce monde subtil se maintient malgrŽ tout au niveau de la forme, sur le plan du phŽnomne.

Nous avons tous la profonde nostalgie de ce monde de lĠastral et cĠest pourquoi nous pouvons en venir ˆ le rechercher dans cette vie-ci.

Plus le niveau atteint est ŽlevŽ et plus il Žblouit et plus il est difficile de sĠen dŽtacher.

 Ici encore lĠapport dĠun ma”tre vivant sĠavre extrmement prŽcieux.

Les Žcrits philosophiques qui accompagnent la pratique accomplissent aussi un r™le du mme genre, mais nous pouvons toujours tenter dĠinterprŽter ˆ notre guise. Nous ne pouvons pas manipuler un ma”tre vivant et cĠes pourquoi les egos fragiles le redoutent.

 

III.38 Quand lĠattachement au corps se rel‰che et que nous ma”trisons parfaitement les mouvements du mental, celui-ci peut entrer dans un autre corps.

LĠattachement au corps (c'est-ˆ-dire ˆ lĠespace et au temps) alourdit le mental et nous empche de nous envoler. Avec la pratique cet attachement rel‰che son emprise graduellement. Nous en venons ˆ conna”tre Ç les mouvements du mental È qui nĠobŽissent pas nŽcessairement aux lois de lĠespace et du temps telles que nous les connaissons.

Ç MisŽrable est le corps qui dŽpend dĠun corps et misŽrable est lĠ‰me qui dŽpend de ces deux. È (Thomas87)

 

III .39 Si nous ma”trisons lĠŽnergie ascendante, nous pouvons nous Žlever au-dessus de lĠeau, de la boue et des Žpines (nous pouvons lŽviter)

 

Qui ne conna”t pas lĠhistoire de JŽsus marchant sur les eaux ?

LĠŽnergie ascendante, udana, constitue lĠune des cinq Žnergies de base, ou prana, dans le systme humain. Ma”triser cette Žnergie veut dire la conna”tre directement.

 

III.40 Si nous ma”trisons lĠŽnergie Žquilibrante, le corps devient radieux.

Cette È Žnergie Žquilibrante È est celle qui distribue les ressources ŽnergŽtiques dans le systme humain. Quand nous la ma”trisons le corps acquiert une beautŽ exceptionnelle. On remarque que le corps des mŽditants, mme avant cette ma”trise totale, devient de plus en plus raffinŽ et radieux.

 

III.41 En dirigeant le samyam sur la relation entre le pouvoir dĠaudition et lĠespace, nous acquŽrons lĠaudition cŽleste.

Toute vibration fait vibrer quelque chose. On nomme cela un milieu propagateur. ( lĠair est un milieu propagateur du son sur la terre).

LĠaudition cŽleste permet de percevoir une sorte de son subtil, que nous pourrions nommer le son du silence.

Il sĠagit dĠune sorte de courant secret souvent perturbŽ par les bruits extŽrieurs ou intŽrieurs.

LĠespace mentionnŽ ici nĠa rien de physique (akasa) cĠest le milieu propagateur du son cŽleste.

 

III.42 En portant le samyam sur la relation entre le corps et lĠespace, ou en nous imprŽgnant de la lŽgretŽ du coton, nous pouvons nous dŽplacer ˆ volontŽ dans lĠespace.

 

III.43 On appelle Ç grand Žtat ex-corporel È lĠŽtat durant lequel le mental opre ˆ lĠextŽrieur des limites du corps. Le voile qui recouvrait la lumire est alors levŽ.

Nous rŽalisons alors dĠune faon dramatique que nous ne sommes pas le corps.

 

III.44 En amenant le samyam sur les ŽlŽments physiques, sur leurs formes visibles et subtiles, sur leurs interrelations et sur leur but Žvolutif, nous ma”trisons les ŽlŽments.

 

III.45 De lˆ viennent les manifestations de rŽtrŽcissement relatif au corps ; celui-ci acquiert la perfection et devient dŽsormais protŽgŽ.

En fait, il lĠest souvent bien avant cela car nous sommes protŽgŽs par lĠintelligence qui nous a manifestŽs.

 

III.46 Les perfections du corps sont la beautŽ, la gr‰ce, la force et la rŽsistance du diamant.

Le corps est la vitrine du dedans. Si le mental devient parfait, le corps suivra. Platon Žcrivait ;: Ç la beautŽ cĠest la splendeur du vrai. È

III.47 En dirigeant le samyam sur la perception des sens, la forme physique de leur manifestation, le sentiment dĠindividualitŽ qui les accompagne, leurs relations et leur but Žvolutif, nous obtenons la parfaite ma”trise de ces sens.

Ce samyam remonte la piste des sens, ˆ partir de leur manifestation grossire jusquĠˆ leur cause. Il faut conna”tre la nature vŽritable des sens avant  dĠespŽrer les ma”triser. La parfaite ma”trise des sens correspond ˆ la rŽalisation du but Žvolutif des sens et du sentiment dĠindividualitŽ : la connaissance du Soi.

 

III.48 Nous pouvons alors nous dŽplacer ˆ la vitesse du mental et acquŽrir la perception et lĠaction extra-sensorielles ; cĠest la ma”trise de la Nature.

Le corps est plus lent que le mental mais cet Žtat de chose peut-tre modifiŽ quand nous rŽalisons lĠinhŽrente unicitŽ entre le physique, le mental et la rŽalitŽ sous-jacente.

 

III.49 Seul celui qui rŽalise la distinction entre lĠEsprit et la lumire cognitive rgne sur toute la crŽation et sait tout.

RŽaliser la diffŽrence entre lĠEsprit (purusa) et la lumire cognitive (sattva) cĠest abattre la dernire et plus subtile barrire sur la voie. La lumire cognitive est le premier mouvement de manifestation du Soi.

CĠest cela qui est Ç au commencement È dans la, Gense et le prologue de Jean.

 

III.50 Celui qui demeure dŽtachŽ, mme de cet Žtat, a dŽtruit ˆ jamais les germes de tout asservissement ; cĠest la libŽration absolue.

 

Ds que nous arrtons quelque part, nous devenons asservis. Nous devons maintenir le cap sur la connaissance vŽritable, sur la parole, car seule la vŽritŽ nous libre.

Ç Si vous demeurez dans ma parole, vous tes vraiment mes disciples et vous conna”trez la vŽritŽ et la vŽritŽ vous librera. È(Jean 8,31-32)

Cet aphorisme met en garde contre la tentation de sĠarrter ˆ lĠomniscience (celle des phŽnomnes mmes subtils)

La rŽalisation est dynamique, jamais statique. Ce qui demeure figŽ est appelŽ mental ou monde de la reprŽsentation.

 

III. 51 Nous ne devrions pas tirer un plaisir indu ou tomber dans lĠorgueil ˆ cause des manifestations supranormales ; ici encore nous pouvons trŽbucher.

Prendre un plaisir indu aux pouvoirs surnaturels cĠest encore les traiter comme quelque chose dĠextraordinaire et dĠextŽrieur.

 

II.52 En faisant samyam sur les moments et sur leur succession, nous acquŽrons le plus fin discernement.

Le concept de Ç moment È(ksana) est trs rŽpandu dans la philosophie indienne.

Le temps nĠa de sens que sĠil y a mouvement, changement. Il doit donc y avoir perception dĠune ou plusieurs formes. CĠest un peu lĠŽvolution dĠun phŽnomne Ç image par image È. Quand nous nous absorbons dans lĠintervalle entre deux perceptions nous dŽcouvrons le vide interstitiel. Si nous portons notre attention sur ce vide avant le dŽbut de la perception suivante nous acquŽrons le plus fin discernement.

Ce sžtra remet en question notre comprŽhension habituelle de la causalitŽ. Ce nĠest pas un moment qui entra”ne le suivant. Les deux sont la manifestation de lĠunique. Nous nĠŽchappons pas encore au monde de lĠaffirmation et de la nŽgation, au monde des contraires. Toute illusion tombe et la rŽalitŽ nĠest plus quelque chose ˆ percevoir, encore moins ˆ atteindre.

CĠest cela la voie du milieu ( madhya) quand , dans lĠabsorption dans le vide interstitiel, lĠŽnergie emprunte la voie du milieu en nous.

Einstein avec sa thŽorie de la relativitŽ restreinte avait remontŽ la piste ouverte par cet aphorisme. Le temps est un outil du mental et nĠa aucune rŽalitŽ absolue en lui-mme.

Cette rŽalitŽ que quiconque peut vŽrifier dans lĠintimitŽ de sa conscience trouve un bel Žcho dans la description magistrale de lĠunivers par la physique quantique.

Le smyam sur les moments nous fait voir lĠirrŽalitŽ du temps tel que nous lĠimaginons habituellement. Tous les changements et phŽnomnes sont donnŽs. CĠest la donne initiale et unique de lĠunivers. Le fait que nous puissions conna”tre le passŽ et le futur montre que tout est Žcrit de tout temps.

 

III.53 Ceci permet de distinguer deux objets qui autrement sont identiques par leur genre, leur apparence et leur position dans lĠespace.

Au niveau des formes jamais lĠunivers nĠest le mme. Par ce samyam, on parvient ˆ percer les formes les plus subtiles.

 

III.54 Cette connaissance nŽe du discernement est transcendante, omnisciente, au-delˆ de lĠespace et du temps, et elle nĠest pas Žvolutive.

 

Patanjali dissipe ici tout doute quant ˆ la nature de la connaissance . On se gardera bien de banaliser ces connaissances en lĠassimilant ˆ une quelconque mondanitŽ.

Notre connaissance intellectuelle est Žvolutive, mais pas la connaissance ultime. La mŽditation vŽritable est sans objet, sans but  ni utilitŽ.

 

III.55 Lorsque la lumire cognitive devient aussi pure que lĠEsprit lui-mme, celui-ci brille comme lĠunique rŽalitŽ sans aucune autre ; cĠest la libŽration absolue.

 

 

 

LA PLENITUDE

(Kaivala pada)

(Il prŽsente les possibilitŽs offertes ˆ une personne qui aurait acquis un mental hautement purifiŽ. Le mental est fondamentalement un serviteur, non un ma”tre. En permettant au mental de jouer le r™le du ma”tre, quels que soient les accomplissements rŽalisŽs, la personne sera finalement en butte ˆ des problmes et la sŽrŽnitŽ sera hors de son atteinte)

 

 

 

IV.1 Nous pouvons possŽder des pouvoirs surnaturels innŽs ; nous pouvons aussi les acquŽrir au moyen de drogues, en rŽcitant des mantras, par lĠascse ou par le sam‰dhi.

Les pouvoirs ou siddhis dŽcrits au dernier chapitre peuvent tre acquis autrement que par le samyam. Par exemple, si nous les possŽdions au cours de la dernire incarnation. Il nĠy a pas de brisure dans lĠŽvolution. Il en va de mme avec nĠimporte quel talent que nous avons pu dŽvelopper dans le passŽ.

 

IV.2 Tout changement dĠŽtat est le dŽbordement du trop-plein de la nature en dŽploiement.

Par exemple la vie spirituelle, comme telle, ne peut dŽbuter que lorsque les tendances les plus grossires du mental se sont retirŽes et quĠun certain vŽcu a ŽtŽ accumulŽ.

Ce nĠest pas la personne qui est la source des pouvoirs ; cĠest lĠtre, la conscience. Il faut se rappeler que la Ç personne È nĠest que la vitrine de lĠtre.

 

IV.3 Les causes apparentes dĠun changement ne sont pas vraiment motrices, elles ne font que briser les obstacles ˆ lĠŽvolution naturelle, tout comme le fermier ne fait quĠaider la nature.

Nous passons notre temps ˆ nous illusionner sur les causes des changements auxquels nous assistons. Il nĠexiste quĠune seule force motrice cĠest la vie. Tout nous est donnŽ en temps voulu. JŽsus disait : Ç Votre pre cŽleste sait que vous avez besoin de tout cela. È (Matthieu 6,32). Le jardinier nĠest que lĠoutil du dŽploiement de la nature.

Celui qui sauve est compltement diffŽrent de notre concept de messie, qui est toujours peru comme un Dieu extŽrieur ˆ nous. CĠest notre propre Soi qui est lĠÏuvre en nous, par nous et pour nous.

 

IV.4 Tout mental nĠest que la crŽation de lĠego.

Ce que Patanjali nomme mental est en rŽalitŽ la collection des impressions mentales accumulŽes depuis toujours et qui dictent nos prŽfŽrences et nos aversions.

Patanjali avait abordŽ son exposŽ en admettant la rŽalitŽ du mental ; cĠest pourquoi on dit son approche Ç dualiste È. Mais on comprend que cela ne signifie pas que Patanjali ignore lĠunicitŽ de lĠtre.

 

IV.5 Bien que chaque mental agisse diffŽremment, tous agissent sous lĠimpulsion du champ mental unique.

Il sĠagit dĠun concept pour dŽcrire une suite dĠactions, rŽactions, impressions. Il nĠy a quĠun seul champ mental ˆ lĠintŽrieur dĠune seule conscience. Les frontires entre personnalitŽs sont artificielles et nĠont de rŽalitŽ que celle que lĠon veut bien leur prter. Pendant tout ce temps nous sommes la Pure Conscience et nous demeurons conscient du champ mental.

 

IV.6 De ces mentaux, seul celui qui mŽdite parvient ˆ se libŽrer du cycle des dŽsirs.

 

Cet aphorisme capital Žnonce le fondement de la pratique mŽditative. Seule, la mŽditation dissout cette idŽe tenace que nous sommes une entitŽ sŽparŽe, un ego, un mental une personnalitŽ, un corps, etcÉOr, cette idŽe est le fondement du cycle des dŽsirs. Il faut recueillir la lumire de la mŽditation, pour ensuite confronter nos idŽes irrŽalistes et malsaines avec ce qui est. Toute autre procŽdure laisse lĠerrance intacte. Par cette parole, Patanjali nous livre lĠinformation capitale qui a fait si cruellement dŽfaut ˆ la tradition occidentale, tradition tronquŽe, amputŽe de son aspect pratique. Le message est clair : la pratique de la mŽditation est essentielle pour se libŽrer de lĠerrance. Parvenus ˆ un certain niveau de rŽalisation, il est tentant de nous croire au-dessus de cela, mais cĠest une erreur grossire.

 

IV.7 Les actes dĠun tre illuminŽ ne sont ni blancs ni noirs ; ceux des autres sont triplement colorŽs.

LĠtre illuminŽ est celui qui sĠest libŽrŽ du cycle des dŽsirs. Ses actes ne sont ni bons ni mauvais car il nĠy a plus personnes pour en revendiquer la paternitŽ. Ç Pourquoi mĠappelez-vous bon ? È dit JŽsus. Par contre, lĠtre qui se croit encore limitŽ, nĠŽchappe pas au destin engendrŽ par la croyance quĠil est lĠauteur de Ç ses È actes.

Notre nature originelle nĠest ni bonne ni mauvaise. La Gense, dans sa langue trs mŽtaphorique, dŽcrit cette chute originelle de lĠhomme qui aurait mangŽ du fruit de Ç lĠarbre de la science du bien et du mal È. La chute originelle cĠest lĠoubli que nous sommes tous le Mme et que ce Mme nĠest ni bon ni mauvais. Il est.

 

IV.8 Les seuls dŽsirs qui se manifestent sont ceux dont la rŽalisation portera ˆ maturitŽ les tendances mentales rŽsiduelles.

 

Pourquoi tel dŽsir vient-il ˆ telle personne et pas ˆ une autre ? CĠest tout simplement que les tendances rŽsiduelles diffrent ˆ cause de lĠhistoire diffŽrente de ces personnes.

Ç LĠhomme bon, de son bon trŽsor tire de bonnes choses ;et lĠhomme mauvais, de son mauvais trŽsor en tire de mauvaises. È(Matthieu 12,35)

Il nĠarrivera jamais quĠun dŽsir survienne sans quĠil ne doive son apparition ˆ quelque tendance latente, parfois oubliŽe depuis longtemps.

Cela explique beaucoup de comportements inattendus et surprenants de la part de personnes que lĠon croyait pourtant conna”tre trs bien.

 

IV.9 Les tendances rŽsiduelles ne sont ni plus ni moins que des souvenirs ; ceux-ci forment les tendances qui agissent en nous dĠune faon continue dans le temps, dans lĠespace et ˆ lĠoccasion des incarnations successives.

Platon Žcrivait que penser cĠest se souvenir. Mme les Ç dŽcouvertes È sont des souvenirs. LĠEcclŽsiaste nous dit : ÈCe qui fut, cela sera ; ce qui sĠes fait se refera ; et il nĠy a rien de nouveau sous le soleil. Soi quelque chose dont on dise : Ç Tiens ! cĠest neuf ! Cela fut dŽjˆ dans le passŽ. È (LĠŽcclŽsiaste 1,9-10)

Quant ˆ la joie liŽe aux objets, elle est Žgalement une forme de souvenir, car lĠtre est la joie pure et cĠest la nostalgie de cette joie qui nous fait rechercher les objets ou les circonstances qui, croit-on, vont faire revivre cette joie. Les tendances rŽsiduelles ont le bras long et peuvent se manifester trs longtemps, y compris au cours dĠincarnations ultŽrieures. Le mental en errance croit quĠil doit agir sous lĠimpulsion du moindre de ses dŽsirs, alors que lĠtre illuminŽ demeure libre face ˆ ceux-ci ; cĠest en cela que rŽside toute la diffŽrence.

 

IV.10 Les dŽsirs remontent ˆ la nuit des temps, car la soif de plŽnitude est Žternelle.

Au plus profond de chacun dĠentre nous la soif de plŽnitude nous appelle ˆ passer de lĠautre c™tŽ, ˆ nous installer sur lĠautre rive. Cette soif est Žternelle, il nĠy a donc aucun autre moyen de combler notre soif. 

JŽsus disait ˆ la Samaritaine : Ç Quiconque boit de cette eau, aura soif ˆ nouveau ;mais qui boira de lĠeau que je lui donnerai nĠaura plus jamais soif ; lĠeau que je lui donnerai deviendra en lui source dĠeau jaillissant en vie Žternelle. È(Jean4, 13-14) HŽraclite disait : Ç Il est pŽnible de lutter contre le dŽsir car il sĠachte ˆ prix dĠ‰me. È 

LĠhomme plongŽ dans les tŽnbres de lĠerrance poursuit ses dŽsirs avec frŽnŽsie. LĠhomme, plongŽ dans les tŽnbres de la rŽaction, rŽprime  ses dŽsirs avec vengeance . Ni lĠun ni lĠautre ne voit la plŽnitude. La paix nĠa rien ˆ voir avec lĠaccomplissement ou non des dŽsirs. Il suffit de voir.

La sagesse est avant tout pratique. Elle est pure intelligence et lĠintelligence cĠes savoir Ç lire entre È. Nous nĠenlverons rien ˆ la vie que nous menons, sauf le brouillard et la confusion. LĠapplication dĠune lumire fulgurante sur les derniers bastions de la confusion fait la diffŽrence entre des moments dĠillumination fugitifs et la libŽration finale et donc, entre lĠŽtat de sabija samadhi(I-46) et nirbija samadhi(I-51) ou kaivalya (IV-34)

 

IV.11 Les dŽsirs sont perpŽtuŽs par lĠasservissement du mental aux objets de son attention ; il sĠagit dĠun cycle de causes et dĠeffets. LĠŽlimination de et asservissement entra”ne la disparition des dŽsirs.

Tant que la joie est tributaire des phŽnomnes, elle demeure incomplte et passagre. LĠerrance consiste ˆ croire que les objets, les personnes, les expŽriences et les Žmotions vont un jour nous procurer la joie absolue. Or, cĠest justement lˆ la cause de notre asservissement et de notre souffrance. Contrairement ˆ ce que prchent un grand nombre de moralistes, dĠŽditorialistes, de gens bien pensants et dĠhommes religieux, il est inutile dĠessayer dĠŽliminer, dĠignorer, de combattre ou de refouler les dŽsirs dĠune faon permanente ; nous nĠavons pour nous en convaincre, quĠˆ observer lĠŽchec lamentable de tous ces braves gens.

JŽsus dit : Ç Il nĠest pas possible que quelquĠun entre dans la maison du fort et la prenne de force ˆ moins quĠil ne lui lie les mains ; alors il bouleversera sa maison. È (Thomas 35)

MŽditer cĠest abandonner lĠespoir quĠun jour tout ira mieux en faveur de la certitude que tout est parfait.

IV.12 Le passŽ et le futur ont une rŽalitŽ ; ils sont le rŽsultat des chemins Žvolutifs diffŽrents des formes manifestŽes.

Ce que nous nommons prŽsent, semble rŽel, alors que le passŽ et le futur seraient plut™t des idŽes. En fait tout est rŽel, cĠest lĠunique Conscience, lĠunique Moment. CĠest cela qui semble rŽel dans le Ç prŽsent È. CĠest lĠidŽe que nous sommes des crŽatures sŽparŽes existant dans le prŽsent  qui limite notre vision aux formes telles quĠelles sont maintenant. Nous sommes la prŽsence. Le passŽ et le futur sont rŽels car ils se tiennent dans la prŽsence. LĠtre explore toutes les avenues en mme temps et nĠen tient aucune pour plus ou moins rŽelle que les autres. CĠest le jeu du Divin. Quand Patanjali affirme que le passŽ et le futur ont une rŽalitŽ, il entre dans le jeu. Le tout est dĠy entrer consciemment.

 

IV.13 Les caractŽristiques manifestŽes constituent le prŽsent ; celles qui ne le sont pas forment le passŽ et le futur. Toutes, sont le jeu des Žnergies fondamentales.

Les Žnergies fondamentales, examinŽes dans les chapitres prŽcŽdents, se combinent de faon ˆ crŽer tout ce qui existe dans lĠunivers manifestŽ, ˆ tous les niveaux. Rien ne dispara”t ni nĠappara”t, car lĠessence demeure non affectŽe par les transformations.

 

IV.14 LĠŽtat particulier dĠun objet est lĠexpression de lĠunicitŽ dĠune certaine combinaison des Žnergies fondamentales.

Chaque objet est lĠexpression dĠune combinaison unique des Žnergies fondamentales. Tout nĠest quĠapparitions diffŽrentes du Mme.

 

IV.15 Deux objets identiques paraissent diffŽrents ˆ cause des faons diffŽrentes dont ils sont perus par le mental.

Voilˆ qui rejoint bien la physique quantique, ou, mieux, est rejoint par la physique quantique. LĠobservateur doit toujours spŽcifier le mode dĠobservation dĠun objet, car cela influence le rŽsultat observŽ. Une observation est toujours le rŽsultat de lĠinteraction de lĠobservateur avec lĠobjet. Si nous nous percevons comme des individus sŽparŽs, alors nous acceptons la fragmentation ainsi crŽŽe, avec toutes ses sŽquelles.

 

IV.16 LĠexistence dĠun objet ne dŽpend pas de sa perception par un mental individuel ; sinon quĠest-ce qui existerait quand lĠobjet nĠest pas peru par ce mental ?

Patanjali rŽfute une exagŽration grossire qui a encore parfois cours, ˆ savoir que lĠexistence de lĠobjet dŽpend uniquement de lĠobservateur particulier. Rien nĠest plus faux. QuĠest ce donc quĠun objet ? Seul un esprit mŽditatif peut-tre saisi de cette rŽalitŽ. La rŽalitŽ, ou la continuitŽ (tantram) dĠun objet nĠest ni dans la forme È perue ni dans le mental qui peroit. Elle est Dieu et cĠest ce que nous sommes aussi, cette pure conscience.

 

IV.17 On peroit lĠobjet uniquement lorsque celui-ci colore le mental.

La perception est le processus  par lequel lĠobjet est peru par les sens. LĠÏil et le nerf optique auront beau tre en bonne santŽ si la rŽgion du cerveau qui forme les images est endommagŽe, rien nĠest peru par le mental. La perception est beaucoup plus interne quĠon ne le croit.

 

IV.18 Le mental et toute son activitŽ sont toujours perus par leur crŽateur, lĠimmuable Esprit.

Ce qui conna”t est lĠEsprit (Purusa) ; rien dĠautre ne conna”t. Quand on dit que le mental conna”t, cela signifie que lĠEsprit conna”t lĠobjet tel que peru par les sens et enregistrŽ dans la pensŽe (le mental).

Quand Il est au repos, Il se conna”t comme pur Esprit. Quand lĠactivitŽ mentale prend place, Il se conna”t en tant quĠactivitŽ mentale. Quand lĠtre humain a rŽalisŽ sa nature vŽritable, Il se conna”t comme Esprit  qui inclut lĠactivitŽ mentale.

Ç SĠils vous demandent quel est le signe de votre Pre qui est en vous, dites leur : cĠest un mouvement et un repos. È (Thomas 50). LĠEsprit est le Tout ; Il est ˆ la fois le Tout, la lumire du Tout, les objets du Tout, lĠobservateur du Tout et la rŽalisation du Tout parvenu au Tout ˆ travers le systme nerveux humain.

JŽsus dit : Ç Je suis la lumire qui est sur eux tous. Je suis le Tout. Le Tout est sorti de moi et le Tout est parvenu ˆ moi. Fendez du bois, je suis lˆ ; levez la pierre, vous me trouverez lˆ. È

 

IV.19 Le mental ne sĠŽclaire pas lui-mme ; il est ŽclairŽ.

 

Ce qui est conscient est cela qui conna”t. Le reste nĠest que concepts utiles, inutiles ou nuisibles. Le mental est un de ces concepts.

LĠerrance consiste ˆ croire que nous sommes le mental et quĠen tant que tel nous nous Žclairons. La montŽe de la lumire spirituelle vient bouleverser cela de fond en comble.

JŽsus disait : Ç CĠest pour un discernement que je suis venu en ce monde : pour que ceux qui ne voient pas voient et que ceux qui voient deviennent aveugles. È(Jean 9, 39). Nous rŽussissons ˆ Žtablir la lumire en mŽditant sur la lumire et non sur ses reflets changeants que sont les phŽnomnes et les pensŽes.

 

IV.20 CĠest pourquoi il ne peut tre ˆ la fois conscient de lĠobjet et de lui-mme.

La mŽditation portera donc sur ce qui Žclaire plut™t que sur ce qui est ŽclairŽ ; cĠest la seule mŽditation qui puisse libŽrer.

Les visualisations, les musiques douces, les mantras, les expŽriences astrales et autres, tout cela est connu et ne conna”t pas. Ce ne sont que des images de la rŽalitŽ mme si elles peuvent avoir leur utilitŽ.

Ç Nous sommes venus de la lumire, lˆ o la lumire est nŽe dĠelle-mme. È (Thomas 50)

IV.21 Si le mental Žtait ŽclairŽ par un autre mental, il faudrait alors une infinitŽ de mentals, avec une inŽluctable confusion des impressions enregistrŽes.

Il met en garde contre la construction presque inconsciente dĠun Ç observateur È qui ne serait en fait quĠune nouvelle crŽature du mental, un super-mental  connaissant le premier et peut-tre lui aussi connu par un autre observateur. LĠObservateur vŽritable est la vie, lĠunique rŽalitŽ. Aucun concept ne peut nous donner la rŽalisation que procure la connaissance de notre vraie nature.

CĠest ce quĠavanait JŽsus : Ç Si ceux qui vous guident vous disent : Ç Voici, le Royaume est dans le ciel , alors les oiseaux du ciel vous devanceront ; sĠils vous disent quĠil est dans la mer, alors les poissons vous devanceront. Mais le Royaume, il est le dedans et il est le dehors de vous. Quand vous serez connus, alors vous serez connus et vous saurez  que cĠest vous les fils du Pre le Vivant. Mais sĠil vous arrive de ne pas vous conna”tre, alors vous tes dans la pauvretŽ, et cĠest vous la pauvretŽ. È (Thomas 3)

 

IV.22 La connaissance de soi appara”t quand le mental assume une forme immuable.

 

Quand le mental assume une forme immuable, cĠest que le Soi reflte en lui sa nature vŽritable en tant que Soi, en tant que lumire. CĠest la dernire transformation subie par le mental, cĠest le couronnement de lĠŽvolution. Tant quĠil conna”t le changement, il ignore la rŽalitŽ.

 

IV.23 Le mental colorŽ ˆ la fois par la conscience et par lĠobjet conna”t tout.

Un tel mental ne conna”t plus la fragmentation. La science rŽelle ne consiste pas, comme on le croirait, ˆ savoir tout ce quĠil y a ˆ savoir ; cĠest plut™t de demeurer Žtabli dans lĠŽtat exempt de questions. CĠest le samadhi  permanent.

 

IV.24 MalgrŽ ses tendances innombrables, le mental existe pour le Soi, car il nĠen est pas sŽparŽ.

Le sens de lĠŽvolution devient apparent lorsque celle-ci tire ˆ sa fin. Les Ç innombrables tendances du mental Ç  ne nous distraient plus. La manifestation vise ˆ fournir lĠexpŽrience du Soi et rien dĠautre, mme si en cours de route il semble se dessiner une plŽthore de buts et de desseins.

 

IV.25 Celui qui peroit la distinction rŽalise la conscience du Soi et nĠentretient plus aucune interrogation ˆ son sujet.

 

Tant que nous nĠavons pas peru directement la distinction entre mental et Soi nous demeurons dans le doute, le scepticisme, les hypothses, les doctrines religieuses, les dogmes, les exercices intellectuels comme thŽologie et philosophie, les tergiversations, les discussions acadŽmiques, les sermons Žmotifs, bref, dans lĠerrance et la misre spirituelle.

Le prophte Isa•e disait : Ç le Seigneur a dit : ce peuple mĠhonore des lvres, mais leur cÏur est loin de moi. Vain est le culte quĠils me rendent : les doctrines quĠils enseignent ne sont que prŽceptes humains, leons apprises !... La sagesse de ses sages tournera court, lĠintelligence de ses intelligents sĠŽclipsera. È Isa•e 29,13-14)

Patanjali, JŽsus et tous les ma”tres et les prophtes passŽs et prŽsents nous indiquent le moyen de nous extraire de cette indigence lamentable ; ce qui compte ce nĠest pas le personnage historique, cĠest la pratique de ce quĠil a recommandŽ. Ç  Ce nĠest pas en me disant : Ç Seigneur , Seigneur È, que lĠon entrera dans le Royaume des Cieux, mais cĠest en faisant la volontŽ de mon Pre qui est dans les Cieux. È(Matthieu 7,21)

RŽaliser la distinction entre le Soi et le mental, cĠest savoir ce qui est, par rapport aux reprŽsentations de ce qui est.

Le jour o nous laissons les Ç prŽceptes humains È -que nous croyons divins- et que nous considŽrons la rŽalitŽ telle quĠelle est, ce jour lˆ une grande lumire jaillit et lĠon entre dans un espace o les questions perdent leur sens.

Quelle question peut-on entretenir sur le Soi quant on est le Soi ?  

 

Ç Ce jour lˆ, vous ne me poserez aucune question È. (Jean 16,23)

 

IV.26 Ds lors, le mental maintient une propension continue au discernement et il est irrŽsistiblement attirŽ par lĠunique rŽalitŽ.

Le point tournant de la vie consiste en cette expŽrience directe, cette comprŽhension vŽritable de ce quĠest le Soi. Ds lors plus rien nĠest pareil, nous ne pouvons plus revenir en arrire et feindre dĠignorer. Nous perdons intŽrt ˆ tout ce qui ne rŽvle pas notre vraie nature en tant que Soi. Quand la vision de lĠUnique demeure stable, cĠest la libŽration dŽfinitive et totale, la plŽnitude.

 

IV.27 Toute autre pensŽe qui se glisse alors dans le mental nĠest que le rŽsultat des impressions rŽsiduelles.

Une ou des expŽriences directes ne veulent pas dire que le mental a ŽtŽ totalement purifiŽ. En fait, cĠest ˆ ce moment que le travail peut commencer. Il sĠagi dĠexaminer ˆ mesure quelles se prŽsentent les pensŽes porteuses de fragmentation mentale et de les lessiver avec la connaissance que nous sommes le Soi. Tant que cela nĠest pas complŽtŽ, les impressions mentales risquent de refaire surface et dĠobscurcir la vision.

 

IV.28 Nous pouvons les amener au repos de la faon dŽcrite pour les obstacles.

Cf chapitre II.

LĠexpŽrience dŽmontre que tant que nous ne nous engageons pas sŽrieusement dans cette pratique nous demeurons de la matire premire pour les thŽrapeutes de toutes sortes.

 

IV.29 Celui qui vit en permanence dans le discernement ne ressent plus aucun engouement, mme pour les plus subtils niveaux intellectuels ; il a atteint le samadhi dit du Nuage de Vertu.

 

IV.30 Celui-ci Žlimine les causes de souffrance et dĠasservissement aux actes et au destin.

Il ne reste plus personne pour revendiquer les actes et leurs consŽquences.

 

IV.31 Toute impuretŽ enlevŽe, la connaissance se rŽvle tre infinie ; le savoir relatif para”t alors insignifiant.

 

IV.32 De ce fait, lĠŽvolution des Žnergies fondamentales, ayant rempli son r™le, arrive ˆ son accomplissement.

Le long chemin que nous avons cru interminable sĠachve dans lĠapothŽose vŽritable.

 

IV.33 LĠŽvolution est la sŽquence ininterrompue des moments ; nous la comprenons vraiment lorsquĠelle arrive ˆ son terme.

 

Le Christ assure : Ç Ce jour lˆ vous ne me poserez plus aucune question. È( Jean 16, 23)

 

IV. 34 Les Žnergies fondamentales nĠont alors plus de r™le ˆ jouer pour la Conscience et elles retournent ˆ leur Žtat latent originel. CĠest la plŽnitude : la puissance de la Pure Conscience est ainsi Žtablie dans sa nature vŽritable.

 

La fin est dans le commencement, dans la puissance. Ç Je suis lĠAlpha et lĠOmŽga. Ç (Apocalypse 1,8)

Ç Le vent souffle o il veut et tu entends sa voix, mais tu ne sais pas dĠo il vient ni o il va. Ainsi en est-il de quiconque est nŽ de lĠEsprit. È  (Jean 3,8)