(Dans sa sagesse infinie Patanjali enseigna aux
hommes (en recherche)
-
communiquer efficacement : Mahabhashya, trait
de grammaire
-
conserver sant et longvit : Ayurvda, systme
traditionnel indien de sant
-
-
trouver la paix mentale : Yoga-sutra)
(Certains situent ces
ouvrages entre 200 et 800 avant JC dĠautres jusquĠ 200 aprs JC)
LES
YOGA SóTRAS DE PATANJALI : La maturit de la joie par Jean Bouchart dĠOrval 1992- extraits et rsum
(LĠouvrage est compos de 4 Ç pada È (chapitres) et en tout de 195
Ç sutra È. Tous les sutras sont interdpendants et constituent
ensemble Ç un fil qui conduit au yoga È)
Prologue :
Quelque chose dĠimmense est en route. LĠHeure vient dsormais o la
lumire enfouie dans notre cÏur depuis le dbut montera nos lvres en toute
clart. Mais cette pousse dcisive vers le haut touchera ceux qui veillent.
Il nĠy a
quĠune joie, cĠest la joie.
É A toutes
les poques, des tres de grce, devenus un avec la parole, cĠest--dire
devenus un avec le silence qui la sous-tend, lĠont rvl lĠhumanit en
marche, qui en a retenu quelques uns.
Assurment,
le matre de la parole pour lĠOccident fut le Christ.
Notre
philosophie sĠest coupe de lĠexprience directe de la vrit de lĠtre.
Les textes sacrs occidentaux demeurent trangement silencieux sur
lĠaspect pratique de la vie spirituelle. Compare lĠOrient notre indigence parat
incroyable.
CĠest dans
cette perspective que sĠouvre le dialogue avec PATANJALI.
Le PATANJALI
YOGA DARSHANA (Ç la vision de lĠUnique de Patanjali È) ne peut que
faire redcouvrir la splendeur de la parole celle-l mme que Jsus a rvle
lĠOccident. (195 aphorismes traduits partir de lĠoriginal sanskrit)
Les aphorismes sont le fruit de lĠexprience directe non un amoncellement
de spculations intellectuelles.
LĠobjet des
Stras est la ralisation spirituelle. Le chemin pratique ouvert par
Patanjali nous sort enfin du monde triqu de la question et de la rponse.
Le
commentaire se rfre souvent lĠenseignement du Christ.
Quand
lĠessentiel merge enfin, la vie entire peut devenir un chant, une danse.
UNE REVELATION MAGISTRALE :
Sans doute
lĠun des plus anciens et des plus importants textes jamais avoir t rdig
sur la ralisation spirituelle.
Il dcrit
comment la lumire de notre nature vritable fait son chemin dans ce que nous
appelons notre vie.
Bien
quĠoriginaire de lĠInde il ne fait jamais rfrence aux dits ou rites et
croyances de cette rgion.
Il nĠy a ni
Occident ni Orient, il nĠy a que la Connaissance. Elle permet de prciser et dĠarticuler
avec lĠenseignement de Jsus, figure centrale de lĠhistoire de lĠhumanit et de
lĠOccident en particulier.
Tristesse,
morosit, culpabilit, remords, pleurs, grincements de dents, maladie,
pauvret, misre, mort, peur, souffrance, ne nous font aucunement progresser
vers la ralisation spirituelle. Un esprit complaisant dans tout cela dnote
moins la saintet que lĠinsalubrit mentale.
Les
aphorismes ont t traduits en sanskrit
qui signifie Ç correct È, Ç juste È. Cette langue
antique, vnrable, ajoute ses vibrations profondment juste pour lĠme. Le
sanskrit constitue une langue sacre. Nous savons peu de chose sur lĠauteur
mme, pas sr quĠil sĠagissait dĠun seul auteur. Il a sans doute t consign
au IIIime sicle avant JC.
QuĠon le
dise dans lĠalphabet devanagari (=lieu du divin) ou romain la prononciation
juste du sanskrit demeure trs importante.
Mme si elle
expose la vision de lĠUnique, la dmarche est dualiste dans sa forme en ce sens
que lĠauteur tient pour acquise la ralit du mental par rapport au Soi. Cette
approche a la vertu de se mettre au niveau de lĠhumanit errante pour
lĠaccompagner dans sa marche vers sa vraie nature. Il sĠagit dĠune approche
pratique et non philosophique.
Le chemin
vers le Simple est simple. LĠInde recle une quantit de textes sacrs ou
philosophiques et les bibliothques du monde entier sont engorges par
lĠaffluence de textes dĠEcoles tentant rfuter les hrsies des autres Ecoles,
par exemple, les interminables querelles entre bouddhistes et hindous. On a
souvent oppos les voies dites non duelles, ou voies abruptes, celles
rputes duelles ou progressives.
Ce qui
compte cĠest lĠarrire-plan duquel tout vient et vers quoi tout va. Les yoga Stras empruntent souvent le langage dualiste du Samkhya ( une des Ecoles de
lĠInde) entre autre ce qui a trait Purusha et Prakiti ( le Soi et le monde)
Patanjali
insiste dans son expos magistral autant sur abyasa,
la pratique que sur vairagya, lĠquanimit qui est
lĠabsence dĠarrivisme et le fait quĠil nĠy a pas une personne qui se libre.
La fin de
lĠerrance de lĠhomme est possible grce aux 8 branches du yoga qui rappellent
lĠoctuple sentier du Bouddha.
Le chemin
qui mne du premier mot de Patanjali : (Ç atha È : dsormais) au dernier Ç iti È :ainsi)
expose la vision de lĠUnique sans compromis : Ç Dsormais il en est
ainsi È. CĠest le Ç ainsi
soit-il È ou Ç Amen È
(Amen vient de lĠhbreux amn qui drive du verbe aman qui signifie
Ç ne fait quĠun avec È.
LE SAMċDHI
(Il dfinit le yoga et ses caractristiques,
expose les problmes rencontrs pour raliser lĠtat de yoga, ainsi que les
moyens de les rsoudre)
I.1
Dsormais commence la rvlation du yoga :
( Atha=maintenant, yoga=tat
dĠunit, anusasanam= des instructions, un
clairageÉ ÈMaintenant que vous
tes prts, votre capacit dĠtre va vous tre rvle È. La
motivation, lĠintensit de la demande. CĠest cette nergie qui est le moteur de
la recherche Ç yoga È : ne perdons pas de vue quĠil sĠagit dĠun
tat, dĠun tat dĠunit.)
Le yoga signifie
lĠUnique, la pure existence. Il rejoint le cÏur des hommes dans toutes les
contres et les traditions. Les opprims sont ceux qui entretiennent lĠide que
quelque chose dĠextrieur les tourmente.
Anusasanam : Il
sĠagit dĠune discipline donc dĠun apprentissage pratique qui sĠadresse ceux
qui sont prts aller au fond des choses et approfondir la joie.
Le matre de
Nazareth reprend cette parole dĠIsae :
Ç LĠesprit du Seigneur est sur moi,
Parce quĠil mĠa consacr par lĠonction,
Pour porter la bonne nouvelle aux pauvres ;
Il mĠa envoy annoncer aux captifs la dlivrance
et aux aveugles le retour la vue,
Renvoyer en libert les opprims,
Proclamer une anne de grce du Seigneur È
I.2 Le yoga
est la cessation de la fragmentation du mental :
(Yoga se produit lorsque le Ç mouvement
sortant È (incohrent) de notre mental est arrt, interrompu-Il faut
considrer que les yoga-sutra de Patanjali sont une È table des matires È
dont le matre donne jour aprs jour un enseignement. Donc autant de matres
autant dĠouvrages. DĠo la varit des Ç commentaires È et
Ç interprtations È quĠa suscit au cours des sicles le texte de Patanjali-S nĦ3)
(Yogascittavrttinirodhah=
Lorsque les penses cessent, lĠtat dĠunit se rvle.)
Tout est dit
ici. On parle de champ mental ds quĠil existe un sujet et un objet.
La parole-nirodha- porte en elle toute lĠessence de la
ralisation spirituelle. Elle est la cessation, le silence.
Mais quĠest
ce que le silence ? Le silence impos par la pense nĠest pas le silence.
CĠest une lutte, un malaise.
On peut
traduire ce stra de 2 manires soit Ç cessation de lĠactivit
mentale È soit Ç cessation de la fragmentation mentale È. La
premire traduction est propose par certaines techniques la mode. Elle nĠest
perue que comme absence de pense.
Tout tre humain qui connat sa nature vritable est un authentique
prophte car il prophtise, il parle
pour.
Quand la parole montre la diffrence
entre les hommes, elle les divise quand elle fait signe vers lĠessentiel elle les
rassemble. La mditation cĠest maintenir son attention su cela qui en nous
connat.
Rien ne peut
perturber la mditation car Ç tout drangement È est encore peru et
port par la mme conscience, la mme unique ralit ocanique.
Entre les
deux traductions possibles de ce stra se dploie le spectre entier de la vie
spirituelle.
I.3 La conscience est ds lors tablie dans sa nature
vritable :
(Drastar=celui qui voit, il dsigne lĠatman, lĠme,
le soi, lĠessence de lĠtre. Ç En consquence, notre Conscience, sĠtablit
dans sa vritable nature È)S nĦ 8)
La vrit est donc quelque chose a dcouvrir dvoiler :
retirer le voile qui cache cela qui voit.
I.4 Autrement elle sĠidentifie ses formes :
Le systme nerveux est un instrument de perception qui permet
la saisie des formes extrieures mais aussi la conscience de soi. Le
dvoilement final suppose quĠon laisse toutes nos re-prsentations pour sĠattacher aux prsentations. Maintenir son attention sur cette prsence en dehors de toute pense, exprience,
motion, voil ce quĠest la mditation. CĠest vivre la cessation de la
fragmentation. La conscience est soit au niveau de la fragmentation soit en
tat de cessation.
I.5 La conscience prend 5 formes mentales, qui peuvent tre
porteuses de souffrance.
(Le Ç mange des penses :
citavrtti. Il existe quatre tats
- Susupta :
Pas de veille pas de rve : CĠest le sommeil sans rves
-Svapna :
pas de veille, mais du sommeil plus du rve
-jagrat
Svapna : veille plus rve (mlang). CĠes cet
tat que nous vivons habituellement, cĠest cet tat qui nous cre nos malheurs,
car nous sommes inconscients de rverÉNous prenons nos rves pour la ralit.
LĠaction ne sera donc pas en
adquation avec la ralit.
-Turya. :
Conscience de rver lorsquĠon rve. CĠest cet tat qui transforme. CĠest
Ç tre prsent au prsent È. CĠest tre conscient dĠtre sans tre
pris dans le tourbillon de ce que nous nommons lĠexistence.
-La Tradition parle dĠun
cinquime tat : Turyatita : Celui o le
quatrime tat serait constant o la conscience se transformerait en
inconscience. En fait quand on est mort on n e rve plus. S nĦ8)
Les mouvements de conscience ne sont ni bons ni mauvais en
eux-mmes. La libert est dans la libert. LĠtre libre ne pense pas ni
nĠagit dans le but de sĠaffranchir
ou de devenir plus ceci ou cela.
Le jugement bon ou mauvais se rfre toujours un but
spcifique.
En rgle gnrale nul ne saurait se porter en juge de ce qui
est bon ou mauvais pour un autre.
Patanjali propose ici la mme perspective pratique que
Bouddha : A savoir lĠlimination de la souffrance.
Les activits que nous nommons vie spirituelle tendent vers la
reconnaissance de notre nature vritable qui seule permet lĠradication
complte de toute forme de souffrance.
I.6 Ce sont la connaissance juste, lĠerreur, lĠimagination, le
sommeil et la mmoire :
(Patanjali numre les 5
types de mouvements qui peuvent faire fluctuer nos penses : cf I -7 I-11-S nĦ10)
Il sĠagit dĠune grille, il en existe bien dĠautres. Toute
activit mentale peut-tre assimile lĠune ou lĠautre de ces catgories.
I.7 La connaissance juste nous vient dĠune perception directe,
dĠun raisonnement ou dĠun tmoignage.
(pramana :
est la connaissance juste. Elle est soutenue par notre conscience, notre centre
dĠ Èobservation È. CĠest la relle intelligence. Pramana
comporte 3 aspects :
- pratyaksa : apprhension avec
les sens, directement.
- anumana : dduction juste
partir dĠun fait secondaire : (il y a de la fume, donc il y a du feu)
- agamah : par induction,
recevoir la vue juste de ceux qui ont fait lĠexprience de la ralit. S nĦ10)
Seule la perception directe nous permet de venir bout des
doutes qui assaillent lĠtre humain.
La science vit des deux premiers modes. Elle vrifie, voil
bien ce qui a fait son bonheur et Éson malheur. Mais elle ne vrifie que les
phnomnes et ne peut donc connatre la ralit elle-mme.
Mais Patanjali ne jette pas lĠanathme sur le raisonnement et
le tmoignage.
La lumire de la mditation laisse une impression mentale et
imprime la Ç connaissance juste È dans la mmoire.
I.8 LĠerreur est une connaissance inexacte, fonde sur une
impression trompeuse de la ralit.
(viparyaya : cĠest la vue fausse, errone,
lĠoppos de pramana. CĠest une vue alimente par
lĠagitation, le mange des penses. S nĦ10)
Les apparences sont trompeuses tant quĠelles sont interprtes
par le mental selon une vision dualiste.
On ne peut utiliser aucun sens il faut utiliser Ç le
troisime Ïil È ou entendre Ç le son non frapp È
Jsus disait Ç Je vous donnerai ce que lĠÏil nĠa pas vu,
ce que lĠoreille nĠa pas entendu, ce que la main nĠa pas touch et ce qui nĠest
pas mont dans le cÏur de lĠhomme È (Thomas 17). La vie spirituelle
consiste dceler le fond derrire les apparences trompeuses pour atteindre la
connaissance exacte.
QuĠest ce qui distingue la connaissance vraie de la
connaissance inexacte ? Trs souvent rien ! LĠexprience est
ncessaire. Il convient de demeurer vigilant et de maintenir Ç la mentalit du
dbutant È pour ne pas prendre les lgendaires Ç vessies È pour
des Ç lanternes È. Mais le scepticisme rig en systme nĠest pas
mieux. Ç Le scepticisme est une fuite vers lĠignorance È clamait
Hraclite.
I.9 LĠimagination, fonde sur des reprsentations nĠest
quĠchafaudage intellectuel dpourvu de ralit objective.
(vikalpah : LĠimagination est le troisime vrtti. Il sĠagit des penses non relies un objet rel.
Si nous le faisons sans en avoir conscience cĠest une forme dĠvasion qui nous
loigne des ralits. CĠest alors souffrance. Si nous le faisons consciemment
cette imagination peut tre constructive. Elle est alors non souffrance.
LĠimagination peut contribuer lĠaffranchissement si elle ne
sĠappuie pas sur un chafaudage dĠimagerie.
Le pouvoir dĠvocation joue un rle important dans certaines
formes de mditation.
I.10 Le sommeil est la forme de conscience fonde sur lĠide
de nant.
(Nidra : le Ç sommeil actif È.
Notre systme nerveux nĠenregistre plus les informations venant de lĠextrieur.
Il est uniquement tourn vers lĠintrieur. S nĦ11)
Patanjali qualifie de forme de conscience tout ce qui nĠest
pas cessation. Or, mme si lĠactivit mentale correspondant lĠtat de veille
sĠest arrte mme si il ne se passe rien, ce nĠest pas lĠillumination car
lĠobservateur ne connat pas sa nature
vritable.
La mditation diffre du sommeil profond par lĠtat de vigilance du systme
nerveux. On ressort transform dĠune mditation alors que le sommeil ne modifie
en rien le mental. Quand on utilise les termes Ç prsence È ou
Ç conscience È pour dsigner le Divin il sĠagit de la prsence pure,
sans sujet ni objet spars.
La perception implique lĠabsence totale de distance ou de
sparation. CĠest la cessation des concepts qui permet lĠmergence de la
sagesse.
I.11 La mmoire est la sauvegarde des impressions recueillies
(smrith : la mmoire est lĠenregistrement de lĠaccumulation des expriences passes.
Cette mmoire est souvent fige. Nous sommes envahis anarchiquement par les
penses formules par la mmoire. Nous sommes alors esclaves de la mmoire, du
pass. Cette mmoire est lĠnergie de vie de lĠego. Mais nous ne sommes pas
mmoire mais conscience. Quand nous sommes conscient nous sommes dans le
prsent. Nous sommes alors libres de la mmoire.
La mmoire joue un rle dans la transformation de la psych
car elle est ni plus ni moins, cette psych qui nous maintient dans lĠillusion.
Mais elle est aussi la connaissance qui disperse lĠillusion. Sans la mmoire il
nĠy a ni asservissement, ni libration.
La mmoire est au niveau mental le reflet de la qualit
fondamentale de la vie qui refuse de disparatre.
LĠide du cheminement spirituel est de laisser la mmoire nous
atteindre. Il nĠy a rien se rappeler.
Ç Heureux ceux qui ont une me de pauvre, car le Royaume
des Cieux est eux È. (Matthieu 5,3)
I.12 Par une pratique persistante et avec lĠquanimit nous
cessons dĠtre le jouet de ces formes de conscience.
(Nirodha :
lĠarrt des penses sĠobtient grce un tat qui contient la fois abhyasa et vairagya :
pratique constante et attitude de non dpendance. S nĦ12)
Dsormais nous ne nous carterons plus gure de cette
perspective : Comment passer de lĠtat de fragmentation mentale celui
dĠillumination, ou de libert absolue. La rponse cĠest Ç pratique È
et Ç quanimit È. Le premier terme nomme ce que nous faisons et le
second lĠesprit dans lequel nous le faisons.
Ç Cherchez dĠabord le
Royaume des Cieux et sa justice, et tout le reste vous sera donn par
surcrotÉMatthieu 6, 33-34)
LĠide est donc de poursuivre la pratique en sachant que nous
ne sommes jamais spars des rsultats, dont nous nĠavons jamais dĠailleurs
nous inquiter. Savoir cela profondment cĠest lĠquanimit. Nous devrions
toujours garder lĠesprit que nous sommes le Divin et que nous nĠavons besoin
de rien dĠautre.
I.13 La pratique est lĠnergie dploye en vue de maintenir le
mental tabli.
La pratique cĠest ce qui est fait pour amener le mental la
tranquillit.
Il faut dĠabord dployer de lĠnergie, mme du zle pour
atteindre la ralisation spirituelle qui libre une nergie colossale. Ç
Car celui qui a, on donnera et il aura du surplus, mais celui qui nĠa pas,
on enlvera mme ce quĠil a. È (Matthieu 13). Patanjali nomme
Ç pratique È tout ce qui favorise les silences.
I.14 Cette pratique devient fermement enracine si lĠon sĠy
adonne sans interruption, avec ferveur et dvotion pendant longtemps.
Il y a un vritable rapport de force entre les impressions
mentales contradictoires et cĠest toujours lĠimpression la plus vigoureuse qui
ressort.
Celui qui cultive la connaissance de Soi avec zle nĠaura
aucune peine conserver toute sa srnit lĠheure o les autres seront
confondus.
Ç Qui cherche la sagesse ds lĠaurore nĠaura pas
peiner : il la trouvera assise sa parte. È Sagesse 6,14
I.15 LĠquanimit est lĠtat de conscience triomphant de celui qui sĠest affranchi
des dsirs de ce monde et de lĠautre.
LĠquanimit nĠest
pas la rpression, la morosit, la lthargie, la dpression, ou la maladie.
CĠest un tat de conscience triomphant.
Ç Varagya est lĠabsence
dĠintrt pour ce que vous nĠtes pas. È Les dsirs nĠont plus aucune
prise sur la personne : en vrit il nĠy a plus personne. Un jour il
apparat vident que le seul dsir est le non-dsir. Jsus prie son pre :
Ç Je ne te prie pas de les (disciples) enlever du monde, mais de les
garder du Mauvais È (Jean17, 15). LĠquanimit, cĠest abandonner lĠide de
devenir une personne meilleure, plus heureuse, libre etcÉ
CĠest laisser aller la prtention fondamentale dĠtre une personne.
I.16 LĠquanimit suprme est le dtachement face au jeu des
nergies fondamentales, lorsque nous connaissons lĠEsprit.
On fait rfrence au Ç samdhi
absolu È du Stra I.51 : Ç Lorsque nous connaissons
lĠEsprit È. Pour cela il convient de se dtacher des nergies fondamentales.
Quelles sont les nergies fondamentales ?
-
rajas : activit, travail,
nergie, changement
-
tamas : conservation,
repos, rsistance au changement, inertie
(Le cycle activit -repos est vieux comme la vie il se droule
dans lĠespace et le temps)
-
sattva : cĠest la lumire
de la connaissance, lĠclair de lĠintelligence, lĠouverture du cÏur. La
connaissance directe vient sans effort. Les gens authentiquement spirituels
sont nergiques sans tre agits ou disperss, conservateurs sans tre
lthargiques ni sceptiques lĠexcs. Par-dessus tout ils portent en eux une
grande clart et une ineffable bont naturelle.
LĠapport de sattva transforme le cercle rajas-tamas en une spirale montante.
Aucune des nergies fondamentales nĠest bonne ou mauvaise en
soi. Seul le dsquilibre engendre des problmes sans fin.
LĠharmonie lucide des trois nergies en nous, produit une vie splendide et nous mne la vison directe de
la ralit derrire le jeu.
I.17 Le discernement de la ralit prend la forme de
contemplation dĠun objet grossier ou subtil, de batitude et de sentiment de
pure existence.
(Le premier stade de samadhi
est samprajnata. : Il se situe au niveau du raisonnement. De la
rflexion. S nĦ14)
Le mental
connat des tats de concentration varis qui passent de lĠagitation la
dispersion, au calme, la concentration, au recueillement jusquĠ la
cessation. Ce stra dcrit divers tats qui accompagnent la monte vers la
cessation finale.
Ce qui est
discern ici cĠest lĠessence de lĠobjet de la mditation, le fond de sa
ralit.
-
contemplation dĠun objet
grossier : veut dire que lĠon maintient son attention exclusivement sur un
seul et mme objet matriel pendant une priode de temps.
-
La contemplation dĠun
objet subtil fait de mme sur une pense, un mantra, une vibration, bref sur
une forme-pense.
-
Ç Avant mme quĠAbrahm ft, Je Suis È ( Jean
8,58). Mose avait reu la mme rvlation : Ç Je suis Celui qui
suis È ( Exode 3,14)
-
Ce stra dcrit le
processus qui mne Samadhi. Il sĠagit en fait dĠun rsultat Ç fabriqu È.
Il y a encore un ferment de conscience individuelle qui demeure lĠtat
potentiel. Il constitue encore une forme de fragmentation mentale mme si
celle-ci laisse la place la cessation.
On ne
passe pas ncessairement par toutes les formes. CĠest lĠexprience qui compte
I.18 Aprs lĠexprience rpte de la pause, un autre tat
voit le jour ; il y substitue des impressions latentes.
(Ici, lĠtat de fusion est sans support, mais les
graines du pass sont toujours l.)
LĠautre tat
est le UN ou YOGA qui ne dcoule
pas dĠun exercice de mditation mais constitue de plus en plus la faon habituelle dĠtre de celui qui
a suffisamment pratiqu la mditation.
La
mditation est le cÏur de la pratique. LĠtat de cessation est souvent
recouvert de fragmentation mentale et confi la mmoire dans cet tat.
Il nĠy a
quĠune ralit et cette ralit nĠest pas un Ç je È particulier.
Cette absence totale dĠobservateur est ni plus ni moins quĠun cadeau, une
grce.
LĠtat
appel Ç asampragyata È est dispens de
lui-mme, il ne dpend de rien mais encore faut-il se prparer le
recevoir ; cĠest le rsultat de la vie spirituelle. Mais il subsiste
encore des impressions mentales. Leur dissolution mne la cessation finale
qui est la libration dfinitive. CĠest cela et cela seulement qui mrite
dĠtre appel la ralisation spirituelle.
I.19 CĠest
lĠtat dĠtre de ceux qui se sont dtachs du corps et qui se sont absorbs
dans la nature.
(Dans certains cas lĠtat de fusion, donc de pure tret peut tre reu ds la naissance. S nĦ 14)
Pour ceux
qui se sont dtachs du corps, il ne subsiste aucun voile. Nous avons donc tous
une mort finalement trs heureuse, trs libratrice. Ces entits pas plus que
les vivants nĠexistent en tant quĠexistences spares.
I.20 Pour les autres, cet tat vient maturit force de
foi, dĠnergie, de vigilance, de samadhi et
dĠintelligence.
LĠouvrage
entier sĠadresse Ç aux
autres È. La transformation du mental exige une nergie considrable. La
libration de lĠnergie et sa conservation des fins spirituelles sont capitales. CĠest pour cela que les gens intresss par
leur vie spirituelle surveillent et prviennent les fuites dĠnergie :
bavardage, excs de nourriture, compagnie malsaine, dsquilibres en tout
genre. LĠincontournable question de la clbration sexuelle de lĠnergie
sĠinscrit aussi dans ce cadre –cf supra-
LĠnergie veut aussi dire que lĠon cre des conditions favorables
lĠenthousiasme. Aucun tre humain nĠa jamais accompli quelque chose de grand
sans enthousiasme. (lĠorigine grecque signifie que
lĠon est avec le Divin). La vigilance, c..d. lĠobservation de nos penses,
actions, ractions etcÉ est trs importante. Nous
ne pouvons passer outre lĠexprience de Samadhi. CĠest lĠexprience du Samadhi
qui confre la puissance la dmarche et la distingue de tout le reste.
I.21 Il se manifeste promptement pour ceux qui sĠy consacrent
avec ardeur.
I.22 On trouve ici encore des diffrences selon que nous y
consentons un effort faible, moyen ou intense.
I.23 On y accde aussi par lĠabandon au Divin.
Aprs avoir
insist sur lĠeffort individuel, Patanjali nous recommande lĠabandon au
Divin ! On ne peut en fait esquiver ni lĠun ni lĠautre.
Il sĠagit
ici de la paire Ç effort/abandon Ç, È masculin/ fminin È.
On hte la
ralisation en sĠimprgnant des deux attitudes et en nĠen refusant aucune.
LĠabandon au Divin constitue le sens mme de la pratique, lĠessence du samdhi.
La tradition
chrtienne a dvelopp la vertu de lĠhumilit. Cette vertu eut sans doute t le plus
beau fleuron de la civilisation occidentale si ce nĠest que lĠon a continu
sĠidentifier avec la manifestation mortelle et illusoire de la personne parce
que lĠon a pas dvelopp lĠautre aspect, la pratique,
lĠeffort, la connaissance.
I.24 Le
Divin est cette Prsence unique, libre de toute souffrance, de toute action, de
toute cause et de toute consquence.
Le Divin est
la Prsence, lĠEsprit. Ç Je suis le premier et le dernier ; moi
except, il nĠy a pas de dieux. Qui est semblable moi ? QuĠil se lve et
parle. È (Isae, 44, 6-7)
(La religion judo-chrtienne a confondu lĠĉtre avec
une personne suprme. Cela a donn naissance au messianisme cette thorie par
laquelle nous devons attendre dĠtre sauvs par une personne suprme.)
I. 25 :
En lui sĠpanche la source absolue de lĠomniscience.
I.26 Il est au-del du temps ; Il est la Matre des
anciens.
Le temps est intrieur au Divin, il se droule en Lui. Pour le
Divin, rien nĠarrive rien ne change, rien ne nat rien ne meurt. Il est
lĠUnique, lĠimmensurable, la Singularit. Nous voluons lĠintrieur dĠune
bulle espace-temps, bulle qui est intrieure la Singularit qui elle est tout
ce qui est.
Il est le matre des anciens, c'est--dire le Matre de tous
les matres, lĠorigine et la fin de la ligne des matres authentiques.
Ç CĠest moi lĠalpha et lĠOmga, Il est, il tait et il vient, le
Matre-de-tout È (Apocalypse I.8)
I .27 On lĠvoque par le son sacr ( OM) :
(Le pranava OM, la syllabe mystique contient ishvara, le matre des matres. En prononant, en chantant
la syllabe mystique nous entrons dans sa signification.S
nĦ14)
Dans toute les traditions spirituelles
le nom du Divin revt une grande importance. Ç Au commencement tait la
Parole et la Parole tait avec Dieu et la Parole tait Dieu. È(Jean1, 1).
Le peuple choisi est le peuple du nom celui qui a la connaissance du nom. CĠest
lĠhumanit en mouvement vers sa source.
I.28 Nous devrions rpter le nom du Divin et en raliser
lĠessence.
Il sĠagit de la rptition dĠun mantra. La vibration active la
comprhension vritable.
Ne pourrions nous rpter Ç Amaram
ham, Madhuram
Ham È : Ç je suis immortel, je suis bienheureux È
CĠest le manque de perspective qui fait voir des obstacles. Il
nĠy a que des occasions.
I.30 Ces obstacles, sources de dispersion mentale, sont la
maladie, la fatigue, le doute, la tergiversation, la mollesse, lĠattachement
aux habitudes, lĠillusion, le dcouragement ainsi que lĠinconstance.
(neuf
obstacles qui causent la dispersion de nos penses : maladie, apathie ou
langueur, doute, dpression, paresse, dsir de jouissance temporelle, vision
fausse, incapacit dĠatteindre des tats de conscience plus subtils,
instabilit. S nĦ15)
I.31 Tout cela engendre de la souffrance, de la frustration,
de lĠagitation, ainsi quĠune instabilit de la respiration.
(Les symptmes qui
accompagnent la dispersion des penses sont : souffrance, insatisfaction-
dispersion -agitation du corps -irrgularit de la respiration. S nĦ15)
LĠinstabilit de la respiration reflte lĠinstabilit du
mental.
I.32 Nous pouvons y remdier en contemplant souvent un seul
objet.
Tous les obstacles viennent dĠune dispersion du mental. On
doit sĠhabituer la prsence dĠun seul objet dans le champ de la
conscience. Plus tard sĠhabituer
ne percevoir quĠune seule et mme ralit dans tous les objets.
I.33 Nous purifions le mental en cultivant la bienveillance
envers le joyeux, la compassion envers le malheureux, la joie lĠgard de la
vertu et lĠindiffrence lĠgard du vice.
(La purification,
lĠapaisement de la confusion mentale, sĠobtient par notre attitude :
- gentillesse,
considration, amiti
- disponibilit
inconditionnelle aux autres
- cordialit, affection
- non-attachement
- É Et cela, quelles que
soient les circonstances S nĦ15)
Comment rendre le terrain propice ? Sourire, cĠest
voquer la vrit, cĠest demeurer lĠobservateur quoi quĠil arrive
lĠextrieur. La mditation laisse jaillir la tranquille assurance de celui qui
est. Le sourire vigilant prolonge la mditation, il est la mditation en action
La mditation et le sourire devant toutes les opinions -celles des autres et
les ntres, grandissent ensemble.
I.34 Nous y parvenons aussi en expulsant et en retenant ainsi
le souffle.
(La seule chose importante
est la conscience constante au flot de lĠair. CĠest la relation directe du
mental et du flot de lĠair qui permet au mental de sĠapaiser. S nĦ15)
Aprs lĠaspect mental, Patanjali nous prsente lĠaspect
nergtique. Le Ç souffle È (prana) dsigne
beaucoup plus lĠnergie vitale que lĠair respir par le corps physique. Le
souffle est intimement li la pense.
Retenir le souffle aussi longtemps que cela demeure
confortable aprs lĠavoir expuls permet lĠnergie vitale dĠacqurir de la,
profondeur et de la puissance.
Demeurer un moment dans cette dissolution permet de dnouer
des nÏuds sans risquer de sĠgarer dans les labyrinthes de lĠanalyse
psychologique.
I.35 Nous pouvons atteindre la stabilit mentale en demeurant
parfaitement prsents tout objet, ds quĠil se manifeste.
Cette pratique est extrmement importante. Il sĠagit de porter
lĠespace mditatif sur le terrain de lĠaction. La vie spirituelle sĠinstalle
dans le monde.
Jsus prie son pre : Ç Je ne te prie pas de les
retirer du monde, mais de les garder du Mauvais È (Jean 17,15)
Avec le temps, lĠattention cesse de sauter frntiquement dĠun
objet lĠautre sans jamais pouvoir se fixer sur une seule et mme ralit. La
fbrilit mentale –la pire des drogues- est un obstacle majeur la
connaissance.
Patanjali redit que la srnit nĠa rien voir avec un
quelconque devenir.
I.36 Nous y arrivons galement en faisant lĠexprience de la
radieuse lumire intrieure, ternellement libre de douleur.
LĠtat nomm Ç nirodha È
nĠest pas lĠabsence de quelque chose.
Ç Je suis la lumire du monde. Qui me suit ne marchera pas dans
les tnbres, mais aura la lumire de la vie È (Jean 8,12)
La lumire intrieure est jamais libre de douleur ajoute
Patanjali. Elle ne connat aucune autre ralit et nĠentretient donc aucune
attente.
I.37 Un autre moyen est de fixer notre attention sur un mental
affranchi des dsirs.
Nous apprenons par imitation, voire par osmose. Le mental
absorbe les qualits de tout ce avec quoi il est en contact prolong. Le contact avec un tre ralis demeure
le plus formidable catalyseur. La prsence dĠun matre authentique demeure
inestimable. Nous pouvons progresser par nous-mmes, en frquentant les
matres du pass. Mais ces matres l, nous finissons par leur faire dire ce
que le mental voudrait bien entendre. Celui qui sĠest affranchi des dsirs peut
guider lĠme en qute de paix.
I.38 Nous pouvons aussi y arriver par la connaissance du rve
et du sommeil.
Dans lĠtat de veille nous avons lĠimpression en tant que
personne distincte, dĠtre la source de notre propre pense.
Il nĠest pas question ici de rves par lesquels une certaine
forme de connaissance peut-tre transmise, ni de rves prmonitoires, ni
dĠanalyse des rves tout ceci nĠtant pas dnu dĠintrt mais nĠest pas le
propos de Patanjali.
CĠest le Mme qui connat lĠtat de veille et de rve. En nous
veillant nous ralisons que ce sujet, dans le rve ,
nĠtait quĠune pense.
La connaissance du sommeil veut dire la connaissance de Cel qui est durant le sommeil. Il nĠexiste plus aucun
sujet ni objet durant le sommeil profond
ce qui suggrerait Ç lĠide de nant Èet pourtant ce nĠest pas
Ç rien È. LĠide de nant est un puissant levier de connaissance de
lĠexistence. LĠexamen mditatif de cette possibilit mne lĠattention
inexorablement vers la pure existence. Heidegger appelait une telle exprience
Ç lĠanticipation de la mort È et il suggrait la prise de conscience
nergique du caractre absolu de la pure existence.
I.39 Nous y arrivons aussi en mditant sur notre objet de
prdilection.
LĠide est dĠutiliser lĠnergie l o elle a t investie et
o elle demeure. Il est sage dĠenquter et de mditer sur notre ralit, sinon il persiste
toujours une fragmentation.
CĠest dĠailleurs l un des gros problmes de lĠusage des
drogues dans le but dĠatteindre un tat de conscience suprieur : CĠest
importer autre chose que ce qui est l. Il nĠexiste aucun substitut lĠexamen
lucide de ce qui est l : nos dsirs, nos peurs, nos prfrences, nos
identifications.
Il nĠest pas ncessaire dĠentreprendre des campagnes de vertu
et dĠen tre rduit la morale.
Ds que nous accdons un certain niveau dĠquanimit, nous
ralisons que nous nĠavons plus besoin de mditer sur un Ç objet
prfr È. Le signe du succs est la perte de dpendance face cette
mthode. Ultimement, la mditation porte sur le Soi en tant que Soi et sur rien
dĠautre.
I.40 Le pouvoir du mental tabli, sĠtend de lĠinfiniment
petit jusquĠaux confins de lĠinfiniment grand.
Tout ce qui est Ç connu È passe par le mental. Tout
objet, perception, est mental. Ce que nous appelons Ç le monde È est
mental. O est le monde dans le sommeil profond ? Le pouvoir du mental
tabli sĠtend dans toutes les directions car un tel mental peut fixer son
attention et connatre nĠimporte quel phnomne. CĠest la source de tous les pouvoirs
surnaturels dont il sera question au chapitre 3.
I.41 Une fois lĠactivit mentale calme, (le mental) devient comme un cristal pur et prend la
couleur de ce en quoi il demeure fondu, quĠil sĠagisse de lĠobservateur, de
lĠobservation ou de lĠobserv.
La ralit est perue sans aucune dformation. Le mental ne
dforme plus car il nĠessaie plus de former. On quitte le monde de la
reprsentation pour celui de la prsentation. Chaque fois le mental est lĠobjet prsent devant lui.
On doit comprendre Ç observation, observateur, observ
Ç comme lĠunicit des trois. Il
y a fusion ( Ç ce en quoi il demeure
fondu È)
I.42 Dans le premier stade dĠabsorption mentale, nous
contemplons un objet grossier, en considrant encore indistinctement son
essence, son nom et les penses qui y sont associes ; cĠest la
contemplation discursive.
I.43 Au cours du second stade dĠabsorption, le mental, alors
purg de tout le reste, sĠillumine de lĠessence seule ; cĠest la
contemplation pure.
Aprs un certain temps, la mmoire sĠest tue, la tempte
dĠimages sĠest apaise, le calme rgne. Quand lĠattention est maintenue sur
lĠobjet de mditation, le fond de lĠobjet ressort de plus en plus. Au dpart
lĠintellect peroit une espce de vide. Mais lĠessence de lĠobjet est l. Le
premier rsultat est de permettre cette absorption du mental.
I.44 On explique de mme, les stades dĠabsorption discursive
et pure, quand lĠobjet de contemplation est une forme-pense.
Ici, lĠobjet de contemplation est soit une pense, soit un
mantra, soit un sentiment etcÉ
Dans lĠordre de la manifestation, la forme-pense est plus
prs de lĠespace sans forme que lĠobjet grossier.
Au dbut, des impressions mentales viennent se superposer puis lĠessence de cet objet subtil
demeure seul dans le champ de la conscience. Ce nĠest
pas encore la connaissance du Soi car il y a encore quelque chose dans la
conscience. LĠespace de grande paix se manifeste dĠabord sous forme de
batitude puis sous forme de sentiment de pure existence. La joie est le fond
commun de toute pense. Il nĠy a
quĠune joie, la mme pour tous, de mme quĠil nĠy a quĠun Èje È.( Le sentiment de Ç je suis È est encore un
contenu)
I.45 Plus subtile que la forme-pense la plus subtile :
lĠEspace sans forme.
Avec la persvrance dans la pratique, le mditant finit pas
percevoir uniquement lĠespace sans forme, sans signe distinctif.
Percevoir cĠest toujours sortir des sentiers battus et des
ides reues. Ç Rares sont ceux qui peroivent avec leur propres yeux et
sentent avec leur propre cÏur È disait Einstein.
De tels sauts librateurs, mme quand ils ne durent quĠune
fraction de seconde, demeurent lĠorigine des vritables dcouvertes
scientifiques, artistiques et surtout personnelles.
La plupart des tres humains ignorent quĠils sont prisonniers
des structures mentales.
Les prcdents niveaux de mditation sont des tapes de
lĠignorance :
Savitarka : ignorance
crasse
Nirvitarka :
ignorance raffine
Ananda : ignorance heureuse
Asmita : ignorance
essentielle.
I.46 Ces tats de conscience constituent des samdhis relatifs.
Dans tous les tats de samdhi
subsistent un ou des germes de fragmentation. Il faut beaucoup plus quĠune
exprience pour librer le mental dfinitivement. Le contact dĠun matre
vritable permet dĠviter une telle
stagnation. La mditation ne suffit pas il faut vivre sa vie dĠtre humain,
tre en contact avec les autres, explorer son mental et le transformer.
I.47 A la suite du perfectionnement
de lĠabsorption sur une forme-pense jaillissent la splendeur et la srnit
dispense par lĠtre.
Tant la transfiguration de Jsus que celle de Krishna
illustrent cet clat de faon dramatique :
Ç Son visage resplendit comme le soleil et ses vtements
devinrent blancs comme la lumire È (Matthieu 17,2)
Ç Si lĠclat de mille soleils illuminait le ciel, cela
ressemblerait la splendeur de lĠtre. È( Bhagavad Gita 11,12)
Le processus de la mditation nous apprend que la ralit
ultime nĠest pas Ç quelque chose È et quĠelle nĠest pas
Ç rien È non plus, bien au contraire. Les bouddhistes ont dvelopp
le concept de vide qui nĠest pas Ç rien È ni Ç quelque
chose È. Il faut en faire lĠexprience directe. Le connu ne peut discuter
du mystre.
LĠinvitation est claire mditer plutt sur des objets
subtils plutt que grossiers.
Seule lĠautre rive dispense la perfection de lĠtre qui est
aussi la maturit de lĠesprit.
I.48.Nous dcouvrons alors la connaissance directe, source de
vrit.
La connaissance directe (pragya) est
la clart. CĠest lĠlment cl dans la transformation du mental. CĠest la
sagesse qui nous fait quitter le monde de lĠopinion pour la vrit de ce qui
est. Sans la connaissance directe le mental nĠabandonne pas.
Ç Matre, ma bouche nĠacceptera absolument pas que je
dise quoi tu ressembles È (Thomas 13)
I.49 Celle-ci est dĠune tout autre toffe que celle acquise
par un tmoignage ou par un raisonnement, car elle touche directement lĠessence
du rel.
(Patanjali indique
ici que le champ dĠexprience de samadhi est
diffrent du champ dĠexprience qui rsulte de la connaissance des textes sacrs, diffrent galement du champ dĠexprience
de la connaissance qui est la ntre dans notre vie de tous les jours qui,elle,
rsulte du raisonnement, de la dduction. S nĦ17)
Cet aphorisme nonce clairement ce qui a fait dfaut lĠOccident
pendant longtemps : lĠexprience directe, fruit de la mditation.
Nous nĠavons pas manqu de philosophes brillants, de
thologiens astucieux, de profonds penseurs et de cÏurs dvous mais lĠclat du
grand jour nĠa pas encore prvalu.
La religion chrtienne repose sur lĠautorit de certains
textes alors quĠelle devrait dĠabord et avant tout avoir son assise sur la
seule autorit qui soit : celle du rel, de lĠexprience directe.
Il en est de mme de la philosophie Occidentale qui sĠest puise en raisonnements. La Connaissance
qui claire Patanjali est la lumire Ç qui claire tout homme È
JeanI9)
Les beaux raisonnements, les textes pieux, les sermons, tout
cela nĠa de sens que lorsque lĠexprience directe les claire.
I.50 LĠimpression mentale qui en merge dsamorce les autres
impressions :
CĠest au niveau du mental que sĠopre la libration, car cĠest
uniquement ce niveau que se manifeste lĠasservissement. Le sommeil profond
nous procure une paix parfaite mais le mental nĠen tire aucun profit, il dort !
Quand savons nous quĠil sĠagit de la vritable Connaissance? Quand elle
commence oprer ses transformations et sĠinstalle en nous.
I.51 Lorsque mme cette impression se dissout son tour,
toutes les impressions se sont rsorbes dans le silence ; cĠest la smdhi absolu.
Toutes les impressions dualistes ont t dissoutes, y compris
celle dĠtre un tre veill qui a atteint lĠautre tat.
La cessation de la cessation ! Telle est lĠtape finale
annonce. LĠallumette qui a allum le feu se voit elle-mme consume par les
flammes.
Ç Vous donc serez parfaits comme votre Pre cleste est
parfait È (Matthieu 5,48)
SUR LA VOIE
(Sadhana pada)
(Il commence par
dfinir les qualits ncessaires dans les pratiques du yoga, puis il dcrit la
ncessit de changer graduellement le mental pour atteindre lĠtat de yoga tel
quĠindiqu en I-2. Enfin il explique le besoin de ces pratiques, leurs
consquences et les consquences du manque de persvrance)
II. 1 Ascse, tude de soi et abandon de soi au Divin: tels
sont les aspects pratiques du yoga.
Le yoga de lĠaction, ou dans lĠaction, contient
trois aspects insparables :
- tapas : le feu qui
nous habite, la motivation.
- Svadhyaya : lĠtude des textes
qui clairent la conscience.
- Ishvara-pranadhana : dposer au pied du
Seigneur : Que ta volont soit
faite. S nĦ18)
La discipline spirituelle, contrairement aux religions demeure
avant tout quelque chose de pratique.
Maintenant que nous commenons tre saisis de lĠenjeu,
Patanjali attire notre attention sur les aspects concrets de la pratique sans
lequel tout , pour reprendre lĠexpression de lĠEcclsiaste, nĠest que
Ç vanit des vanits È (lĠEcclsiaste 1,2)
Comment sĠy prend-on pour amener la paix un tre humain
asservi lĠactivit mentale et tourment ?
Comment le guider vers la plnitude de lĠexistence ? Tel
est maintenant le propos.
QuĠest-ce que lĠascse ? Le mot Ç tapah È lĠorigine signifie : feu
. CĠest le feu sacr de celui qui nĠa plus le choix et qui se prend en
main. L est le cÏur de lĠascse vritable : raliser que nous ne sommes
absolument rien de ce que la mmoire nous suggre et qui est fond sur la
fragmentation mentale des expriences passes. LĠascse authentique nĠest pas
un mouvement rpressif cĠest une actualisation, dans lĠespace-temps donc dans
le corps et le mental de la joyeuse intuition de ce que nous sommes. Un
vritable ascte est profondment joyeux.
LĠtude veut dire la connaissance de sa nature vritable.
Ç Quel intrt a lĠhomme toute la peine quĠil prend
sous le soleil ? Ç (lĠEcclsiaste 1,3)
Ç Que servira-t-il donc lĠhomme de gagner le monde sĠil
ruine sa propre vie ? È(Matthieu 16,26)
Le savoir de lĠhomme tient habituellement lĠtre pour acquis
et lĠignore. Cette tude prend la forme de lĠexamen de nos comportements,
penses, ractions, attentes, dceptions etcÉtout
autant que lĠtude des Ecritures.
CĠest lĠtude de soi qui mne lĠabandon, au Divin.
II.2 Ils favorisent le samadhi et rduisent les causes de souffrance.
CĠest la clart sur ce que nous voulons vraiment qui constitue
le moteur de la pratique.
Ç Entrez par la porte troite. Large, en effet, et
spacieux est le chemin qui mne la perdition, et il est beaucoup qui sĠy
engagent ; mais troite est la porte et ressere
le chemin qui mne la Vie, et il en est peu qui le trouve È (Matthieu,
7,13-4)
II.3 Ces causes sont lĠerrance, lĠgosme, lĠattachement,
lĠaversion et la peur de la mort.
(Ici sont rsums les
5 klshas :
- Avidya : lĠignorance
qui est la source des autres klshas :
- Asmita , le sens du Ç je È, lĠego
- Raga : le dsir, la
passion
- Dvsha : lĠaversion,
lĠinimiti
- Abhi-ni-vesha :
la soif de vivre, les jouissances temporelles. On dit aussi la peur de la mort.
S nĦ 18)
La souffrance est toujours une distance. CĠest la distance
entre la ralit telle quĠelle est et ce quĠon voudrait quĠelle soit, ou
quĠelle ait t. Croire que les causes de la souffrance rsident lĠextrieur,
cĠest ajourner la libration.
II.4 LĠerrance est la cause de toutes les autres causes,
quĠelles soient latentes, faibles, intermittentes ou pleinement actives.
La cause des causes est lĠerrance, lĠaveuglement.
QuĠest-ce que lĠerrance ? Patanjali nous guide au stra
suivant.
Les moments de crise sont des occasions de mesurer la marge
dĠerrance en soi c'est--dire le fait que notre nature vritable ne soit pas
devenue vidente dans lĠintellect.
II.5 On nomme errance lĠincomptence distinguer le mortel de
lĠternel, lĠimpur du pur, la souffrance de la joie et le non-Soi
du Soi.
En grec ancien le terme Ç pcher È voulait
dire : manquer la cible. LĠerrance cĠest cela. LĠerrance cĠest lĠillusion
de la solidit et de la permanence du monde matriel autant que celle du monde
mental. Nous entretenons surtout lĠillusion suprme celle selon laquelle nous
existons en tant que Ç je È individuel. LĠerrance cĠest quand on ne
voit pas. LĠerrance nĠest pas une faute humaine cĠest le premier signe de la
vrit c'est--dire le voile qui recouvre la vrit. LĠerrance consiste ne
pas dceler le fond derrire le phnomne.
LĠerrance vritable cĠest de nous croire veills. Jsus
disait aux pharisiens : Ç Si vous tiez aveugles, vous nĠauriez pas
de faute ; mais vous dites Ç nous voyons ! Et votre faute
demeure. È (Jean 9,41)
II.6 LĠgosme est la
confusion entre le pouvoir de perception et lĠinstrument de perception.
LĠgosme consiste croire que nous sommes quelquĠun et le
Ç je È est le fait de lĠintellect.
II.7 LĠattachement cĠest lĠadhsion au plaisir.
La suite de lĠerrance cĠest lĠarrivisme de lĠtre humain
spar et limit. Tant que nous nous croirons spars du reste de lĠunivers
nous ressentirons le besoin dĠacqurir quelque chose. Le dsir de prendre
touffera lĠamour.
Attachement, signifie que nous accordons de la crdibilit au
plaisir en tant que joie procure par des objets, des personnes, des
circonstances.
Le dsir profond cĠest le non-dsir, la paix profonde.
II.8 LĠaversion cĠest lĠadhsion la souffrance.
LĠaversion cĠest adhrer la
souffrance du mieux que lĠon peut !
Attachement et aversion montrent un manque de perspective
fondamental qui nous fait croire en la ralit spare du Ç monde È.
Un ego mal assis durant lĠenfance –menac ou mal
protg- conduira des mcanismes malsains comme repli sur soi ou
autoprotection. Il est important de rassurer et bien dvelopper lĠego de lĠenfant,
il y aura tout loisir de le dissoudre aprs lĠenfance.
II.9 La peur de la mort dcoule de lĠamour spontan de la
vie ; cet amour est profondment enracin en chacun de nous, peu importe
le niveau dĠinstruction.
Le mot abhinivesa nomme ce qui est le plus fort en nous, lĠamour
spontan de la vie. CĠest notre nergie de base. La diffrence entre la foi et
la connaissance se vrifie lĠinstant de la mort du corps mais aussi la mort
de chacune de nos prfrences.
II.10 Ces causes subtiles de souffrance doivent tre extirpes.
II.11Quant leurs manifestations, elles disparaissent grce
la mditation.
Personne ne peut mditer et rester dans un tat mental agit
ou afflig mais la mditation seule ne vient pas bout des causes subtiles de
souffrance. Il faut que lĠintellect sĠclaire et se pntre
compltement de la lumire qui transforme la pense.
II.12 La souffrance provient des impressions mentales laisses
par lĠaction ; ces impressions portent leurs fruits dans cette vie ou dans
les vies futures.
La souffrance ne nous harcle jamais partir de contres
trangres. La souffrance rsulte des conditionnements mentaux, fonds sur les
impressions.
II.13 Tant que lĠaction laissera une semence dans le mental,
cette semence engendrera de nouvelles naissances, de nouvelles vies et de
nouvelles expriences.
Pour cela nous devons cesser de revendiquer les actions et
leurs fruits car ce qui laisse une trace cĠest ce que nous pensons, cĠest
lĠappropriation de lĠaction. Ce que nous appelons mditation cĠest lĠabandon
rel envers cela qui agit en nous.
II. 14 Celles-ci comportent aussi des fruits : lĠaction
juste apporte lĠallgresse, lĠaction non juste le tourment.
Chaque mouvement interne du Tout ne peut quĠappeler un
mouvement de sens contraire et de mme intensit, car le Tout reste
ternellement le mme.
LĠaction juste tient toujours compte du Tout et celle
non-juste que dĠun aspect de la ralit et la souffrance qui suit tt ou tard
nous rappelle au Tout. La nature de
la joie est lĠunit celle de la souffrance est la sparation.
II.15 Les oppositions dynamiques des nergies fondamentales ne
laissent rien de permanent, ce qui entrane de lĠangoisse et des impressions
mentales gnratrices de dtresse ; celui qui a dvelopp son discernement
sait que tout cela est souffrance.
Cet aphorisme et les deux suivants noncent trois des
Ç quatre nobles vrits È du Bouddha. (la
quatrime est II.28 et 29). Rien nĠest stable dans lĠunivers, le stress est
lĠnergie dploye par chacun pour sĠadapter ces changements. La recherche
mme du plaisir est la grande source de souffrance.
II.16Nous pouvons viter la souffrance qui nĠest pas encore en
marche.
CĠest la charnire du deuxime chapitre. Nous pouvons corriger
notre trajectoire. Jsus annonce lĠhomme sa libration : Celui qui
coute ma parole et croit celui qui mĠa envoy a la vie ternelle et nĠest
pas soumis au jugement, mais il est pass de la mort la vie È (Jean5,24)
II.17 La cause de cette souffrance vitable est le
recouvrement de la conscience par sa manifestation.
Les lectures, les confrences, les cours, les prires, les
manifestations de groupe, tout cela joue un rle, mais ne conserve aucune
valeur si nous ne dcouvrons pas la conscience, cĠest dire lĠĉtre. Mme la
mditation ne possde aucune valeur si elle ne mne pas cette dcouverte.
II.18 La manifestation est le jeu des nergies fondamentales,
soient la lumire, lĠaction et la conservation. Ces principes sĠexpriment tant
dans les lments que dans la capacit de les percevoir. La manifestation nĠa
dĠautre sens que de nous fournir lĠexprience et la libration finale.
Les nergies fondamentales ont t expliques au stra I-16.
On retrouve ces trois nergies dans lĠquation dĠEinstein : inertie=masse
(m), action=nergie(E), et lumire (c) ondes lectromagntiques.
Patanjali ne divise pas les nergies en bonnes ou
mauvaises : La vie terrestre est une grande clbration. Pour celui qui ne
distingue pas lĠessence de la vie tout est souffrance mais pour celui qui a compris
la vie et son unicit, tout est joie.
II.19 Les nergies fondamentales oprent divers
niveaux : particulier, archtypal, causal et non manifeste.
Seule la ralisation du
Tout libre dfinitivement.
II.20 LĠobservateur est pure conscience ; cĠest cela qui
connat les penses.
La conscience nĠest pas un centre, ce nĠest pas un lieu, ce
nĠest pas une chose, ce nĠest mme pas un tat et ce nĠest surtout pas rien. La
pure conscience se connat alors comme pense. Cela connat aussi les penses.
II.21 La manifestation nĠexiste que pour lĠEtre.
La manifestation est la vitrine, lĠEtre est le magasin.
Tous les buts sont vous lĠchec irrmdiable.
II.22 LĠillusion du monde nĠexiste plus pour celui qui a
ralis la conscience ; mais elle nĠest pas dtruite pour autant, car elle
continue pour les autres.
Le problme du proslytisme est que nous agissons souvent dans
ce domaine sous lĠemprise de lĠego et que nous voulons tout prix convaincre
les autres ou les rduire au silence.
LĠenseignement doit procder dĠun surplus dĠesprit et dĠun
trop plein du cÏur.
II.23 Le recouvrement du Soi par sa manifestation nous permet,
en fin de compte, de reconnatre la nature vritable des deux.
Pour librer le mental il faut tenir dans la mme main le
mental et la lumire.
Ç Quand vous serez dans la lumire que ferez-vous ?
Au temps o vous tiez Un, vous avez fait le deux ; mais alors, tant
deux, que ferez-vous ? (Thomas11)
II.24 CĠest lĠerrance qui nous empche de raliser le Soi.
LĠobstacle cĠest lĠerrance et non la pense, le corps, les autres.
LĠerrance et la connaissance participent au mme mouvement.
II.25 La fin de lĠerrance
est la disparition de lĠidentification. Il nĠy a plus quĠune seule ralit.
Pour la conscience il nĠest jamais question dĠerrance. Le samyoga
est le mlange, le recouvrement. Kaivalya est lĠisolement de la pure conscience, quand il
nĠy a plus de mlange. Le chemin qui va de lĠerrance lĠaccomplissement est
parsem de morts partielles pour le mental identifi
la manifestation.
Socrate disait : Ç le philosophe nĠa quĠune seule
tche, apprendre mourir È.
Ç Qui sĠattache sa vie la perd ; qui, ne sĠattache
pas sa vie en ce monde, la garde pour la vie ternelle È(Jean12,25)
II.26 Nous mettons fin lĠerrance grce au discernement
ininterrompu entre la conscience et sa manifestation.
Le discernement doit tre continu sinon lĠerrance remplit les
interstices. LĠtre ralis, ou libr, est celui qui nĠa jamais dĠautre
conscience que celle dĠtre le Tout, que tout est le Tout.
Ç Fendez du bois, je suis l ; levez la pierre, vous
me trouverez l È.(Thomas77)
II.27 Cette pratique du discernement mne sept
ralisions ; cĠest la sphre de la connaissance directe.
La connaissance directe, lĠintelligence intuitive sont le
couronnement dĠun processus pratique. Elle nĠest pas issue de thses de
doctorats, de discussions philosophiques ou religieuses ou de vÏux pieux. Rien
de tout cela nĠa men lĠhomme la libration.
Le chiffre Ç 7 È se rfre au sept ralisations de
la philosophie sankhia. Peu importe ces catgories
que Patanjali ne se donne pas la peine dĠnumrer.
II.28 Grce la pratique soutenue des divers aspects du yoga,
le systme nerveux se purifie et la lumire de la connaissance porte le
discernement maturit.
Il est bien question dĠaspect et non dĠtapes. Ces aspects,
comme les branches dĠun arbre, poussent tous en mme temps, alors que des
tapes sont parcourues lĠune aprs lĠautre. LĠillumination nĠest pas lĠaffaire
de la personne, cĠest lĠaffaire de lĠillumination. La personne nĠa quĠ
nettoyer ses curies mentales et se prparer accueillir la lumire.
Ç Heureux les cÏurs purs car ils verront Dieu È (Matthieu 5,8)
Avoir un cÏur pur signifie voir la ralit sans compromis et
la vivre.
(Cet aphorisme quivaut la quatrime des quatre nobles
vrits du Bouddha celle o est introduit Ç lĠoctuple sentier È.
II. 29 Les huit aspects du yoga sont :
-la discipline sĠimpose dĠabord. Il sĠagit dĠune dmarche grossire mais ncessaire en son
temps. CĠest le pralable toute volution spirituelle srieuse.(yama= contrle de soi, discipline, on la retrouve dans
toutes les traditions spirituelles)
- les observances, qui purifient raffinent le systme nerveux. LĠenfance de
lĠhumanit ne pourrait se passer de la morale sans se perdre mais par la suite
le code moral devient superflu. (niyama=code moral de comportement vis--vis des autres)
-lĠassise, prpare le
corps pour lĠintriorisation car
les huit aspects du yoga nous emmnent toujours plus vers lĠintrieur(asana=prpare
le corps pour lĠintriorisation et la mditation. Si le corps nĠest pas heureux,
la mditation sera difficile voire impossible. LĠassise favorise la libration
du souffle.
-le pranayama. Il y a un saut avec pranayama : la connaissance prcde
et dpasse alors la pense (la rvlation intime est que ce nĠest plus notre
souffle mais le Souffle)
-lĠintriorisation, (pratyahara) est le mouvement centripte du mental qui rentre chez lui et
se retire de plus en plus de lĠtourdissement extrieur.
-le
recueillement (concentration) (dharana) permet dĠacclrer lĠvolution en focalisant sur une seule
ralit.
-la mditation (dhyana) constitue lĠaction
suprme, celle qui mne la connaissance vritable.
-le samdhi. Etat transcendant de
lĠUnique, le yoga, la vision lumineuse du Soi.
Patanjali va permettre un tre humain qui dpend dĠune
lumire extrieure de devenir une toile au firmament de la conscience et de
distribuer sa vie et sa chaleur partout autour de lui.
II.30 La discipline consiste dans le respect de la vie, la
franchise, la non-convoitise, la chastet et la retenue.
Cette discipline sĠnonce en sanskri
sous forme dĠinterdits. Le respect de la vie est beaucoup plus que le simple
fait de ne pas tuer ou blesser, le respect de la vie signifie que nous avanons
dans le sens du flot de la vie, que nous coulons avec elle.
En somme il sĠagit dĠtre un avec la vie. Quand nous avons
compris cela nous en bnficions immdiatement et long terme.
II.31. Ces grandes lois ne sont pas limites par le mode de
vie, le lieu, le temps ni les circonstances ; elles sont universelles.
CĠest lĠattitude face la vie qui compte plus que lĠacte
lui-mme. Par exemple tuer par peur, par colre, par vengeance, par avidit ou
par indolence, cĠest de lĠignorance. Mais certaines circonstances peuvent
commander la destruction dĠun corps humain ou animal.
La cathdrale vritable nĠest pas de pierre, cĠest le systme
nerveux de lĠhomme. Il ne sĠagit pas de suivre un code moral tatillon et
quoique nous fassions toujours un peu hypocrite mais simplement dĠtre la vie.
II.32 Les observances sont la puret, le contentement,
lĠascse, lĠauto-observation et lĠabandon au Divin.
La puret est la vertu lmentaire, non seulement propret
physique mais aussi propret mentale et verbale.
Il sĠagit dĠtre clair dans notre corps, notre environnement,
nos penses. Vivre dans un environnement en dsordre ne tend pas mener vers
lĠillumination.
Le contentement(santosa) est une
dmarche plus ponctuelle que lĠtat dĠquanimit(vairagya).Le
contentement exige, du moins dans ce stra encore un certain effort, alors que
le second est un rsultat, un tat bienheureux gnral.
(LĠascse est un feu purificateur ncessaire pour tablir une
certaine discipline, lĠauto-observation et lĠabandon au Divin ont dj t
discuts en II-1)
II.33 Quand une pense indsirable nous oppresse, nous nĠavons
quĠ nourrir la pense contraire.
Quand une telle pense nous harcle cĠest que nous lui avons
gnralement accord beaucoup dĠattention dans le pass.
Il faut prter attention la pense contraire. Il ne faut pas
prter attention la somme dĠefforts requise pour modifier la situation. Il
faut avancer en toute srnit, en posant un pied devant lĠautre. Le plus long
voyage commence par un pas.
II.34 Les penses indsirables sont celles qui sĠopposent au
flot de la vie, que nous les excutions nous-mmes, que nous en causions
lĠexcution ou que nous le permettions chez les autres. Elles sont le produit de
lĠavidit, de la colre e de lĠgarement ; leur intensit peut varier de
lgre, modre, forte. Le rsultat est une errance et une souffrance sans
fin. Voil pourquoi on doit alimenter les penses contraires.
É qui sĠoppose au flot de la
vie : peu importe que cette opposition soit court, moyen ou long terme
et peu importe notre degr de responsabilit dans lĠexcution de cette pense.
II.35 Quand nous sommes fermement tablis dans le respect de
la vie, toute animosit disparat autour de nous.
(AHIMSċ : Ç Non nuisance È. Ne point nuire
dĠaucune sorte toute structure porteuse de vie.
Quand nous sommes Un avec la vie les tres vivants le sentent,
dĠune faon ou dĠune autre et ils ne peuvent que se sentir en confiance. Nous
sommes tous des ponges qui absorbons les vibrations environnantes.
Tel tait le pouvoir de St Franois avec les animaux.
II.36 Lorsque nous sommes fermement Çtablis dans le respect
de la vrit, nos actions sont naturellement couronnes de succs.
SATYA : la vracit, le non-mensonge.
(Il y a le
mensonge aux autres utile ou inutile et le mensonge soi-mme toujours
inutile. Le mensonge aux autres est utile quand il permet dĠviter une nuisance
lĠautre mais il faut lutter contre les justifications permanentes dans
lesquelles lĠhomme est littralement ancr.)
Mensonge,
tromperie, duplicit etcÉ tout cela exprime la
tentative dĠen arriver une fin, sa
fin. Tt ou tard le ciel nous tombe sur la tte car rien nĠest spar du Tout. Fermement est important, cela veut
dire lĠaccomplissement ultime de la vrit.
Seul un tre tabli ce point est un juste, il est la vrit. Cet tre possde alors
le pouvoir de bnir, c..d. la capacit de rendre lĠaction fructueuse.
Ce stra suggre une sorte dĠintermdiaire entre lĠhomme
ordinaire, dont le dsir goste trop marqu nuit lĠefficience de sa demande,
et le yogi accompli, qui nĠa plus aucune demande formuler.
II.37 Quand nous sommes fermement tablis dans la
non-convoitise, lĠabondance vient nous.
(ASTEYA : le non vol, la Ç non appropriation È.
Quand nous ne convoitons rien tout vient point. Plus nous
donnons, plus nous recevons condition dĠtre Ç un È avec le flot.
La vie est lĠunique abondance, il suffit de la laisser tre la vie en nous pour
crer les conditions de lĠabondance.
Quand nous travaillons lĠÏuvre du Divin, tout le ncessaire
nous vient aisment car lĠÏuvre elle-mme est le Divin.
Ç Ainsi, tout ce que vous dsirez que les autres fassent
pour vous, faites-le vous-mmes pour eux : voil la Loi et les
Prophtes. È (Matthieu 7,12)
II.38 Fermement tablis dans la chastet, nous disposons dĠune
grande nergie intrieure.
(Brahmacharya :
sĠabstenir
des formes dĠmotions qui accompagnent la vie sexuelle et qui se produisent
mme en dehors.
QuĠest ce que la chastet ? Le mot Ç Brahmacharya È signifie littralement Ç le
disciple de Brahma È ou Ç celui qui suit lĠexemple de Brahma È.
Brahma est le crateur, lĠnergie cratrice. Le disciple maintient son
attention sur lĠnergie cratrice c..d. lĠnergie tout court. LĠnergie
sexuelle nĠest pas part des autres. La chastet vritable nĠa donc rien
voir ni avec une vie sexuelle
active ni avec sa rpression. La chastet consiste plutt en un raffinement de
lĠnergie vitale qui nĠa plus besoin de sĠexprimer par les canaux de la
gnitalit. Les relations amoureuses se transforment en une merveilleuse et
innocente tendresse.
Cette chastet procure une nergie abondante (vrya) car on a alors dcouvert la source de lĠnergie.
II. 39 Fermement tablis dans la retenue, nous pouvons
connatre le sens de la vie.
La retenue est la libert
face aux dsirs.
(APARIGRAHA )
II.40. La puret nous aide nous dtacher de notre propre
corps et cesser la recherche de la matire.
(SHAUCHA : premire des accessions de niyama.
Elle se subdivise en puret extrieure et intrieure.
QuĠest ce que la puret ? Ce qui est pur est un. La
puret totale est la ralisation de lĠUnique. Le corps est le temple de
lĠesprit. Ds lors nous ne recherchons plus la compagnie des autres corps mais
plutt la prsence de leur tre.
II.41 Avec la puret amene par lĠlvation spirituelle
viennent la gaiet dĠesprit, la puissance de concentration, la matrise des
sens et la capacit de raliser le Soi.
Avec la puret, lĠme sĠest dbarrasse des lourdeurs, des
obstacles les plus grossiers. Les nergies fondamentales sĠquilibrent et
laissent agir la troisime, plus subtile (sattva)
Ç Heureux les cÏurs purs car ils verront Dieu È
(Matthieu 5,8)
Cet esprit de gaiet est la condition naturelle dĠun saint
authentique et contraste avec les images morbides que lĠon nous a trop souvent
laisses.
II.42 Grce au contentement, nous atteignons un bonheur
insurpass.
( Samtocha : le contentement inconditionnel quelque soit plaisir ou peine.
La mthode traditionnelle consiste rechercher les objets,
personnes, situations, motions qui plaisent au mental c..d. aux impressions
mentales accumules.
La sagesse courante veut que la recherche du bonheur soit
dĠatteindre quelque chose qui nous fait dfaut. Or, cĠest objet est toujours
limit et ne peut donc fournir quĠun bonheur limit.
Il nĠest absolument pas question de fuir les objets et les
circonstances qui nous plaisent. Que dit le stra ? La joie est la marque
de lĠtre et lĠtre nĠa besoin
de rien.
La poursuite du plaisir est un besoin maladif. Cela est trs
loign de la joie naturelle ressentie au contact de tout ce qui plat la vie
et nous.
II.43 Grce lĠascse nous liminons les impurets et nous
atteignons la perfection du corps et des sens.
(TAPAS : lĠaustrit. Trois composantes : physique,
verbale et mentale.
LĠascse constitue ici, dans son acception particulire, une
rupture brutale avec la poursuite du plaisir. Le mental enivr nĠa parfois pas
dĠautres moyen que de recourir la force pour se sparer de son objet de
prdilection.
LĠascse vritable consiste maintenir notre attention sur la
conscience qui peroit lĠobjet, sur la joie elle-mme. Ascse signifie devenir vrai, simple et un.
II. 44 A force de mditer sur nous-mmes, nous en arrivons la
communion avec notre dit bien-aime.
(SVċDHYċYA : le Ç dveloppement de soi È qui conduit une
conscience trs claire de lĠEtre suprme.
LĠobservation suggre ici veut dire toute rflexion mene en
vue de nous amliorer, c..d. de corriger nos tendances lĠerrance. Ce qui
nous rapproche le plus du Divin, ce nĠest pas la prtention dĠtre non affect
quand nous sommes affects par les vnements, cĠest de voir ce qui est.
Il peut nous apparatre Jsus, Mose, Khrishna
ou notre grand-mre, mais le plus important cĠest la libration amene par le
regard honnte.
II.45 Nous atteignons lĠtat de
parfait samdhi en nous abandonnant totalement au
Divin.
(ISHVARA PRANIDHARċ : Ç lĠabandon la divinit È
Ce stra nous mne lĠessence mme de la mditation.
Jean-Baptiste dclarait : Ç Nul ne peut rien sĠattribuer qui ne lui
soit donn du ciel. È (Jean 3,27)
LĠabandon au Divin ne constitue pas un exercice dlibr et
volontaire sinon cĠest encore le fait de lĠgosme. Cela ne veut, pas dire
sĠabandonner un autre tre mais bien au seul tre, son tre.
Le samdhi nĠest pas un exercice
mental, cĠest lĠeffet de la grce clairante qui touche lĠhomme.
Swami Shyam (auprs duquel Jean Bouchard dĠOrval a sjourn en
Inde) lanait : ÈNe vous inquitez pas au sujet de samadhi : cĠest mon affaire ! Contentez-vous de
maintenir votre corps en sant et votre mental pur. È
LĠintensit de la foi conduit la contemplation et aux
facults exceptionnelles qui lĠaccompagnent. Facults potentielles chez tout
individu.
II.46LĠassise sera stable et facile.
Asana signifie exactement cela. Les asanas ou postures du hatha-yoga ont
pour principale vertu de permettre au corps de sĠasseoir en mditation sans
tre drang. Cela est par la suite devenu une discipline.
Quand tout va bien dans le corps ; il nĠenvoie aucun
signal et le relchement sĠinstalle. Mais gardons nous dĠattendre la situation
idale pour mditer.
Un tel tre demeure Ç fermement tabli dans un espace
heureux È (Grard Blitz dĠaprs Franoise Mazet yoga-stra de Patanjali
–Spiritualit vivante nĦ89 de 1991.)
Les conseils de Patanjali sont simples, il est compltement
inutile, voire nuisible, de se lancer dans des dmarches compliques et de se
charger dĠun lourd fardeau pour le voyage de la libration.
Ç Venez moi, vous tous qui peinez et ployez sous le
fardeau, et moi je vous soulagerai. Chargez-vous de mon joug et mettez-vous
mon cole, car je suis doux et humble de cÏur, et vous trouverez soulagement
pour vos mes. Oui, mon joug est ais et mon fardeau lger. È (Matthieu11,
28-30)
II.47 Pour cela il suffit de se relcher et de sĠabsorber dans
lĠInfini.
Le Divin est la joie et lĠaisance. Est-il pensable dĠy accder
par la souffrance et la crispation ?
II.48 Nous ne sommes alors plus drangs par les paires
dĠopposs.
Absorb dans lĠInfini quĠest ce qui pourrait nous
dranger ? Sinon nous sommes assailli par gain/perte, plaisir/douleur,
bien/mal etcÉ
II.49 Nous pouvons alors dvelopper notre nergie, en
pratiquant la non-respiration, le pranayama
Le prana est lĠnergie vitale. Elle
nĠa pas de forme spcifique. CĠest lĠnergie avant quĠelle ne se manifeste sous
une forme quelconque. Son expansion est donc essentielle. Il faut sentir cette
nergie en nous et pour la diriger
vers des niveaux plus subtils, il est bon dĠviter de la diriger rgulirement
vers des rgions plus grossires.
Les anciens dj, en Occident, reconnaissaient le lien entre le souffle et
lĠEsprit : rouha
en hbreu, pneuma en grec, spiritus en
latin veulent dire la fois souffle et esprit.
II.50 Le souffle est suspendu aprs lĠexpiration ou aprs
lĠinspiration. Selon le volume, la dure et la frquence de rptition, le
souffle se fait prolong et subtil.
Le pranayama est un tat de cessation du processus habituel de
la respiration qui peut se produire nĠimporte o. Le souffle se fait prolong
et subtil. LĠacquisition dĠun souffle profond et subtil lve et raffine la
conscience et rciproquement.
II.51 Le quatrime tat de pranayama transcende les notions
dĠexpiration et dĠinspiration.
Le mouvement entier du souffle est peru comme lĠactualisation
de la non-respiration, qui est lĠunique ralit. Ce quatrime tat transcende
lĠespace et le temps, cĠest une grce totale. Cet tat subtil est la cessation
parfaite dcrite dans le premier chapitre.
II.52 Ce qui voilait la lumire disparat alors.
LĠmergence du quatrime tat de pranayama limine le voile et
nus fait dboucher dans lĠinconnu, l o il nĠy a rien dĠautre connatre.
II.53Le mental est dsormais apte au recueillement.
La subtilit de la nouvelle perception permet le recueillement
du mental. Tout sĠaccomplit doucement et en silence. Les exercices de pranayama
nous font prendre conscience de lĠnergie plutt que des formes quĠelle
emprunte.
II.54 LĠintriorisation se dveloppe lorsque les sens ne sont
plus mis en contact avec leur objet et quĠils atteignent la subtilit du mental.
LĠintriorisation cĠest le retournement de lĠattention vers ce
qui est plus prs de nous. Nous sommes ds lors moins attirs par le fard de
lĠtre. -le phnomne- que par la ralit elle-mme.
Mais le signe de lĠintriorisation mature cĠest quand nous
sommes intrioriss y compris quand nous sommes en contact avec le monde
Ç extrieur È.
II . 55 L rside la matrise suprme des sens.
La matrise suprme des
sens ne consiste certainement pas les rprimer ou les mpriser. Il nĠy a
rien atteindre Ç l-bas È. Il ne reste quĠ clbrer. Tel est
lĠaspect du yoga : favoriser lĠmergence de la clart et la laisser
sĠactualiser dans notre vie.
Hraclite disait Ç Avoir lĠesprit clair est la plus haute
vertu ; la sagesse consiste parler de la ralit telle quĠelle est et agir
selon sa nature vritable, demeurant son coute. È
LE DEPLOIEMENT
(Vibhuti pada)
(Il dcrit la capacit du
mental qui, grce aux diverses pratiques nonces aux deux premiers chapitres,
peut atteindre un tat dpourvu de distraction. Un tel mental peut explorer
profondment des objets et des concepts. Ses possibilits sont vraiment
innombrables. Le pratiquant acquiert une connaissance des objets dĠun niveau
inconnu jusquĠici. Pourtant mme cette connaissance peut son tour devenir
source de distraction et empcher la personne dĠatteindre lĠtat dĠtre
suprme. Cet tat suprieur est lĠaffranchissement de toute perturbation,
quelle quĠelle soit et tout moment.)
III.1 Le recueillement est le maintien de lĠattention sur un
mme objet.
Nous ne pouvons prendre en
considration quĠun seul objet la fois. Quand nous avons lĠimpression de
faire plusieurs choses en mme temps, cĠest simplement que notre attention
voyage de lĠune lĠautre.
La cl est dans le mot Ç maintien È. Le temps durant
lequel sĠexerce lĠattention fait toute la diffrence.
Sans recueillement, la conscience de lĠobservateur ne peut
devenir une avec lĠobjet observ, car elle nĠa pas le temps de se dtacher de
tous les accessoires ( nom, forme, ides associes etcÉ)
Tant que nous ne pouvons devenir Ç un Ç avec lĠobjet,
tant que nous sommes spars de lui, nous ne pouvons le connatre vraiment.
Sur le chemin de la connaissance, le recueillement est
incontournable. Ç Qui nĠest
pas avec moi est contre moi et qui nĠamasse pas avec moi dissipe. È (Luc11,23)
Pourquoi Ç recueillement È plutt que la traduction
habituelle de Ç concentration È ? Car ce mot ouvre une clairire
que lĠautre ne pouvait indiquer. La pense sĠest habitue recueillir
Ç lĠtant È, la forme ; il sĠagit ici de recueillir lĠtre de
tous les Ç tants È.
Quand la pense, lasse de ses poursuites futiles et victoires
fallacieuses, demeure tranquille dans un moment respectueux, quand le silence
sĠcoule en un torrent ininterrompu, quelque chose de nouveau voit le jour.
Ravi, lĠexprimentateur confie cela la mmoire qui le prend
en garde. Avec la pratique persistante de ce moment de recueillement inou, la
pense se met rflchir cela.
Peu peu, elle sĠhabitue accueillir tel quel le continuum
dĠune joie sans sujet ni objet,
lĠaction procde dsormais dĠun trop plein du cÏur et dĠune abondance de
lĠEsprit.
III.2 Lorsque lĠobjet du recueillement occupe le champ de la
conscience dĠune faon totale et ininterrompue, cĠest la mditation.
La mditation suit le recueillement, la frontire entre les
deux peut sembler floue mais on peut la tracer l o tout effort cesse et quand
le recueillement devient total et ininterrompu.
Il convient de demeurer assez rigoureux pour ne pas laisser
lĠinflation verbale ravaler la mditation une activit qui, par comparaison,
demeurera toujours relative, limite et mondaine.
On peut mditer sur nĠimporte quoi comme le dit le stra
III.6. La mditation ramne ultimement sur la prsence, sur la
conscience ; CĠest cela qui permet finalement la transformation du mental.
III.3 Lorsque la nature essentielle de lĠobjet resplendit en
toute puret, comme sĠil nĠavait plus de forme propre, cĠest le samdhi.
CĠest lĠtat de conscience dans lequel lĠintellect ne peroit
plus quĠune seule ralit et quĠil sĠidentifie cette ralit.
Ç Je suis Celui qui est, issu de Celui qui est
gal È (Thomas 61)
CĠest ce stade seulement que lĠon peut parler de
transcendance. LĠexprience du Samdhi, qui est en fait la fin des expriences,
ne peut tre ni analyse ni explique.
Pour celui qui le connat, le samdhi
vritable est le seul tat qui soit. Il nĠexiste rien en dehors de ce samdhi.
III.4 Les trois forment un tout : le samyam.
Ide de fusion avec lĠobjet, dĠabsorption complte. Mais ce
langage est dfectueux.
Le samyam est lĠtablissement de
lĠunicit dans ce que nous appelons la conscience individuelle. CĠest le
symbolisme de la tunique de Jsus. Ç Cette tunique tait sans couture,
tisse tout dĠune pice de haut en bas È (Jean19, 23)
III.5 Une fois le samyam matris,
lĠintelligence suprme sĠpanouit.
LĠintelligence, cĠest la facult de Ç lire
entre È : entre les lignes, entre les gens, entre les formes, entre
les phnomnes. CĠest aussi le pouvoir de Ç lier ensemble È.
LĠintelligence suprme (pragya) serait donc de
dvoiler Cela qui est le plus inconnu. Elle rvle
que la continuit vritable de la vie repose dans lĠtre et jamais dans le
phnomne. Tant la physique quantique que notre vie de tous les jours nous font
signe dans cette direction.
Mais pour tre en mesure de raliser Cela, il faut dĠabord
abandonner le connu et laisser la vrit faire son chemin jusquĠ nous.
Connatre cĠest tre ce que lĠon connat et il nĠy a quĠun
tre. Le samyam tablit lĠunicit entre le sujet et
lĠobjet ; il ouvre donc la connaissance et la puissance. Les pouvoirs
surnaturels (siddhi) sont fonds sur cette ralit.
III.7 Ces trois aspects de la pratique sont plus intimes que
les prcdents.
La discipline du yoga constitue un vritable mouvement du
dehors (lĠtant, la forme, la conscience) vers le dedans (lĠtre, lĠexistence,
la conscience). De toute faon, la vie elle-mme semble bouger en ce sens. La
discipline du yoga ne fait que lĠaccentuer. On dit des trois aspect
du yoga, rsums par le terme samyam, quĠils sont plus
internes, car ils nous font accder lĠtre plus que tous les autres.
La quintessence de la pratique, cĠest la ralisation de lĠtre
et non les exercices de hatha yoga, lĠascse ou les
exercices de respiration.
III.8 Mais mme le samyam demeure un
exercice en de du samdhi absolu.
Rien, absolument rien, ne peut se comparer au samdhi absolu, car cĠest l et seulement l que luit la
pleine splendeur de lĠtre. La tentation est grande de nous croire
Ç arrivs È ds que nous commenons matriser le samyam. Mais tant quĠun soupon dĠerrance demeure, la
pense pensera sous emprise, bloquant toute possibilit de libration ou
dĠaccomplissement total.
III.9 La transformation de la cessation sĠopre lorsque le
mental devient lĠinstant de cessation, avec la disparition des tendances
mentales centrifuges et lĠapparition de ses tendances centriptes.
La vie nĠest quĠune suite de transformations. La
transformation proclame par Patanjali, reprsente alors la premire et seule
mtamorphose digne de ce nom. Ce profond bouleversement est le passage de la
pense la non-pense. Tout ce qui demeure en de relve du domaine de
lĠactivit mentale, du point de vue et de lĠopinion.
III. 10 Le silence sĠcoule alors en un torrent ininterrompu,
entran par sa propre impulsion.
A mesure quĠelle sĠinstalle, la cessation fait boule de neige.
Plus on mdite et plus on a envie de mditer.
Le ruisseau devient bientt une cascade, puis un torrent de
silence, une rivire de paix profonde et un fleuve dĠamour qui sĠouvre finalement
sur lĠinfini.
III.11 La transformation du samdhi
est la fin de la dispersion mentale et la monte de la vision de lĠunicit.
La vision de lĠUnique se dploie de plus en plus nettement.
A chaque niveau de Sampragyaha, (cf I.17) le mental passe de la dispersion la
concentration. Nous rencontrons, chaque pas, un espace de distraction et un
espace de recueillement sur le fond, sur lĠessence. Il y a alternance des deux
tats.
III.12 Il sĠensuit alors la transformation de lĠunicit :
le mental reoit lĠapaisement et lĠactivation de son mouvement cognitif en un
moment unique.
Quand nous nĠenregistrons plus de diffrence entre le son et
le silence qui remplit les interstices, ou entre lĠactivit mentale et la
cessation, nous parlons alors de la transformation de lĠunicit.
Chaque moment de la mditation est le Moment, qui est la
conscience unique, la seule ralit. Nous ne divisons plus lĠexistence ;
il nĠy a plus quĠune seule ralit. A ce moment nous avons cess de sparer
mditation et action. Nous vivons alors la vie comme elle devrait tre vcue.
III.13 On dcrit de la mme faon les transformations qui
affectent le monde physique, par rapport aux changements de formes, la
description temporelle de ces changements et lĠtat des formes.
Le mme patron de transformation se retrouve dans le monde
physique et le monde mental.
Le changement peut tre illustr par la transformation que
subit un tronc dĠarbre qui devient papier, carton puis livre etcÉ
De la mme faon, le mental peut-tre concentr ou dispers.
Mais chaque tat des formes correspond une maturit de cette forme : le
jeune arbre diffre du vieil arbre, de mme pour le papier ou le livre.
Il convient donc dĠobserver sur un long terme et ne pas
sĠinquiter des priodes o il ne se passe rien.
III.14 LĠessence est ce qui perdure travers toutes les
transformations, rvolues, actuelles ou potentielles.
LĠessence est ici la substance qui est le sige du changement,
cela qui perdure malgr toutes les mtamorphoses.
Dans notre exemple de lĠarbre, lĠessence serait la matire
ligneuse, compose des molcules organiques. La vie spirituelle consiste
maintenir lĠattention sur lĠessence de la vie, sur la pure conscience, au-del
de toutes les formes quĠelle emprunte.
CĠest l le secret de tous le siddhis
ou pouvoirs surnaturels. Le maintien de lĠattention sur lĠessence permet de
raliser que nous sommes lĠessence et quĠil nĠy a que cela.
III. 15 La diversit des formes est la consquence de la loi
de lĠvolution.
La mme ralit a expriment des myriades de transformations,
donnant naissance aux formes que nous observons.
En mditant sur cela, nous connaissons lĠtre et son rapport
avec sa manifestation. CĠest la connaissance de ce rapport qui constitue la
base dĠo les pouvoirs surnaturels agissent sur la manifestation.
III.16 En faisant samyam sur les
triples changements, nous acqurons la connaissance du pass et du futur.
Ce que lĠon nomme pass et futur demeure renferm dans
lĠessence et cela de tout temps. En faisant samyam
sur les transformations de lĠessence, nous pouvons connatre le pass et le
futur.
Les Ç triples changements È sont ceux mentionns en
III.13
Comment cela se passe–t-il ? Il sĠagit de connatre
la forme prsente et de diriger notre attention sur les transformations passes
ou futures. Alors Ç le film se droule, È image par image, chacune reprsentant
une transformation infinitsimale par rapport la prcdente ou la suivante.
La technique est simple mais cĠest parce que le samyam
ncessite une longue pratique avant dĠtre matris –il ne sĠagit pas
dĠun tat de conscience banal- que
la connaissance du pass et du futur est aussi rare.
III.17 Notre intelligence des tres est habituellement confuse
parce que leurs sons, le sens et les concepts qui y sont associs se trouvent
tous enchevtrs dans le mental. En dirigeant le samyam
sur la distinction entre les trois, nous pouvons connatre le langage de tout
tre vivant.
On y fait rfrence dans les aphorismes I.42 et I.43.Il sĠagit
de voir clair malgr la fort. Le samyam nĠentretient
quĠune seule ralit : lĠtre. Tout son mis par un tre vivant renferme
sa vrit. Tout est dans tout. Nous pouvons connatre quelquĠun la faon dont
cette personne se tient, marche, sĠassied, par sa voix, par son criture, par
ses yeux, etcÉLa vrit dĠun tre vivant ne se livre
nous que si nous ne la noyons pas sous nos ides et nos perceptions. Voir la
ralit telle quĠelle est, dans tout son dpouillement : telle est lĠide
de base du Samyam car alors nous nĠcoutons plus nos
propres projections mentales.
III.18 En prenant directement conscience des impressions
mentales latentes, nous acqurons la connaissance des vies antrieures.
Les impressions mentales ne sont que le rsultat des
expriences passes. On peut les Ç remonter È et ainsi connatre le
pass, Ç son Èpass. Pour cela il suffit de suivre la trace une
tendance mentale significative ; on fait samyam
sur cette tendance. Les incarnations surviennent dans la foule du cycle
action-impression-dsir-action.
Tout ce qui nous est facile, nous lĠavons accompli trs
souvent dans le pass. Nous pouvons donc faire samyam
sur tout ce en quoi nous avons une habilet inne, tout ce qui nous plat, tout
ce qui nous sourit.
Mais nous pouvons faire samyam sur
ce qui nous fait peur et nous repousse. Il sĠagit donc de faire samyam sur tout ce qui ne nous est pas indiffrent :
cĠest autour de cela que les incarnations se cristallisent.
Cette faon dĠappliquer le samyam
aux tendances mentales est valable tant pour nous-mmes que pour les autres.
III.19 En concentrant le samyam sur
les penses dĠun autre mental, nous en connaissons la nature.
Les penses qui nous viennent ne font que reflter le mental.
Ce dernier nĠest quĠun concept permettant de nommer la collectivit des
impressions.
III.20 Nous ne connaissons pas le contenu de ce mental, car
cela nĠentre pas dans le champ de ce samyam.
Nous ne pouvons connatre toutes les penses dĠun autre
mental, car il y a un lment non linaire qui entre en jeu. Nous ne pouvons
mme jamais connatre notre propre mental : comment il ragira chaque
situation, quĠest ce quĠil imaginera. A plus forte raison donc un autre mental.
Au niveau mental, rien nĠest jamais termin.
Un concept bien encr veut quĠun tre ralis sache toutes les
penses de quiconque se tient devant lui. Un tel tre connat uniquement les
penses quĠil a connatre.
III.21 Si nous portons le samyam sur
la forme de notre corps, nous pouvons rendre celui-ci invisible, simplement en
bloquant le pouvoir quĠil a dĠtre peru par lĠÏil.
La matire nĠest pas la matire. Tout nĠest que conscience et
la matire nĠest que la conscience manifeste.
Ç Ainsi parla Jsus et sĠen allant il se droba leur
vue È (Jean 12,36)
III.22 Les actes portent leurs fruits plus ou moins
rapidement. En appliquant le samyam sur eux, nous
pouvons connatre lĠheure de notre mort et dchiffrer les prsages.
Cet aphorisme sĠapparente III,18.
Les actes rsultent des dsirs et chaque incarnation ajoute une tape dans ce
jeu. Une incarnation particulire se termine quand ce qui avait t accompli ou
appris lĠa t, quand certains actes passs ont port leurs fruits. Personne ne
part trop vite et chaque chose arrive en son temps.
Tant que le moment nĠest pas venu, rien ni personne ne saurait
provoquer la dissolution dĠune forme.
Quand lĠheure a sonn rien ne pourrait la faire retarder.
Ç Qui dĠentre vous peut, en sĠen inquitant, ajouter une
seule coude la longueur de sa vie È ? (Matthieu 6,27)
Cette connaissance est possible tout simplement parce que les
consquences des actes sont ces mmes actes, sous une autre forme. LĠessence
demeure malgr les transformations. ( voir III.13
et14)
III.23. En portant notre samyam sur
la bienveillance, la joie et la compassion, ces qualits fleurissent.
Nous pouvons exprimenter cela aisment. Par le samyam, nous devenons un avec lĠobjet contempl.
Nous apprenons souvent par mulation. Quand nous admirons
intensment un personnage et maintenons notre attention sur lui, nous finissons
par adopter ses qualits. La vie des matres spirituels est stimulante. Nous
pouvons aussi porter notre attention sur la compassion.
III.24 En dirigeant le samyam sur la
force dĠun lphant, nous acqurons cette force.
CĠest la force qui est forte jamais une personne. En faisant samyam sur la force nous devenons la force ;
III .25 Grce lĠabsorption sur lĠclair premier de
lĠintelligence, nous connaissons ce qui est subtil, voil ou ignor.
En devenant lĠclair intuitif, nous perons tous les voiles
car nous nous plaons avant la manifestation. Nous voyons directement et non
par phnomnes interposs. Les apparences voil tout ce que lĠhomme non
entran au samyam est mme de percevoir.
Jsus affirme : Ç il nĠy a rien de cach qui ne se
rvlera. È(Thomas5)
III.26 En appliquant le samyam sur
le soleil, nous connaissons les diverses rgions de lĠunivers.
Faire samyam sur le soleil (soleil intrieur) cĠest
contempler lĠordre cosmique.
III.27 En portant le samyam sur la
lune, nous connaissons la disposition des toiles.
III.28 En faisant samyam sur lĠtoile
polaire, nous connaissons le mouvement des toiles.
Il sĠagit du mouvement autour de lĠtoile polaire. Cela
conduit, entre autres, la ralisation que la Terre tourne autour de lĠaxe
polaire.
III.29 En faisant samyam sur le
plexus du nombril, nous connaissons lĠarrangement interne de lĠorganisme.
CĠest par l que nous sommes relis la mre. LĠorganisme
entier sĠest distribu et rparti de l.
III. 30 En faisant samyam sur le
creux de la gorge nous matrisons la faim et la soif.
III.31 En faisant samyam sur le
canal dĠnergie en forme de tortue, nous acqurons la stabilit.
Le diaphragme est
ni plus ni moins quĠune porte entre le monde des motions et le monde de la
lumire, de lĠamour et de la paix.
Le samyam sur le Ç mridien en
forme de tortue È dans la cage thoracique apaise les motions et libre la
voie vers les ralisations suprieures. Ce passage est critique dans
lĠvolution de tout individu. Notre culture fait beaucoup porter lĠaccent sur
les motions, de sorte que nous en venons souvent considrer celles-ci comme
la forme la plus leve de la manifestation humaine. Il sĠagit en ralit dĠune
manifestation relativement grossire. Les grandes motions flattent lĠgo. Trs
peu dĠentre nous russissent transcender lĠenclos des motions.
Le samyam guide ici lĠhomme vers une
ralit la fois plus subtile et plus durable.
III.32 En faisant samyam sur la
lumire de la connaissance au sommet de la tte, nous pouvons voir les tres
clestes.
La lumire de la connaissance, cĠest la lumire divine. Or les
tres parfaits (les siddhas) sont
cette lumire.
III.33 La lumire de lĠintuition directe permet de tout
connatre.
Exprimenter directement cĠest tre. Rien ne peut remplacer
lĠexprience directe. Pourquoi ne pas viser le Tout ds le dpart ?
Ç Cherchez dĠabord le Royaume des Cieux et sa justice, et
tout le reste vous sera donn par surcrot È (Matthieu 6,33)
Pourquoi nous contenter dĠune recherche partielle et de
rsultats en de de la ralisation parfaite ?
III.34 En faisant samyam sur le cÏur
de lĠtre, nous acqurons la connaissance du mental.
QuĠest ce que le cÏur ? Il nĠa rien voir avec les
motions. Le cÏur est cette facult dĠabandon total lĠtre.
Le cÏur cĠest le secret de lĠtre, cĠest ce qui est le plus
intime. Il nĠest donc pas recommand de condamner son mental, encore moins de
le torturer, le, battre ou le tuer. Tout ce quĠil y a faire cĠest de
tranquillement remonter son essence, le cÏur de lĠtre.
III. 35 LĠEsprit et la lumire cognitive sont en fait trs
diffrents, car la lumire est lĠinstrument de lĠEsprit. Notre soif
dĠexpriences et de savoir extrieurs marque notre incomptence distinguer
les deux.
En faisant Samyam
sur ce qui existe en soi, nous acqurons la connaissance de lĠEsprit.
Quelle est la principale diffrence entre lĠEsprit et la
lumire cognitive (sattva) ?
LĠEsprit est ; il ne va nulle part. La lumire cognitive,
elle, a encore un objectif, mme si cet objectif est trs noble. Mme si elle
claire et raffine, elle entretient encore entre deux ralits.
Nous pouvons demeurer accrochs trs longtemps la lumire
cognitive. Nous percevons lĠEsprit travers cette lentille dformante et
sommes encore dans le monde fragment.
Pour connatre
lĠEsprit, il faut mditer sur Lui. Le matre affirme : Ç Si les gens
vous disent Ç dĠo tes-vous ? È dites-leur : Ènous
sommes venus de la lumire o la lumire est ne dĠelle-mme. È (Thomas50)
III.36 De l naissent lĠclair de la connaissance directe,
lĠaudition subtile, le toucher subtil, la vision subtile, le got subtil et
lĠodorat subtil.
Quand lĠpais se retire, le subtil devient apparent. Nous
nĠavons pas besoin de crer le subtil ; il nĠy a quĠ se librer du
grossier ! Nous en venons connatre subtilement, car nous remontons vers
la source.
III.37 Voil des pierres dĠachoppement sur le chemin de la
libration, mais des russites pour un mental encore tourdi par le monde
extrieur.
Ce monde subtil se maintient malgr tout au niveau de la
forme, sur le plan du phnomne.
Nous avons tous la profonde nostalgie de ce monde de lĠastral
et cĠest pourquoi nous pouvons en venir le rechercher dans cette vie-ci.
Plus le niveau atteint est lev et plus il blouit et plus il
est difficile de sĠen dtacher.
Ici encore
lĠapport dĠun matre vivant sĠavre extrmement prcieux.
Les crits philosophiques qui accompagnent la
pratique accomplissent aussi un rle du mme genre, mais nous pouvons toujours
tenter dĠinterprter notre guise. Nous ne pouvons pas manipuler un matre
vivant et cĠes pourquoi les egos fragiles le redoutent.
III.38 Quand lĠattachement au corps se relche et que nous
matrisons parfaitement les mouvements du mental, celui-ci peut entrer dans un
autre corps.
LĠattachement au corps (c'est--dire lĠespace et au temps)
alourdit le mental et nous empche de nous envoler. Avec la pratique cet
attachement relche son emprise graduellement. Nous en venons connatre
Ç les mouvements du mental È qui nĠobissent pas ncessairement aux
lois de lĠespace et du temps telles que nous les connaissons.
Ç Misrable est le corps qui dpend dĠun corps et
misrable est lĠme qui dpend de ces deux. È (Thomas87)
III .39 Si nous matrisons lĠnergie ascendante, nous
pouvons nous lever au-dessus de lĠeau, de la boue et des pines (nous pouvons
lviter)
Qui ne connat pas lĠhistoire de Jsus marchant sur les
eaux ?
LĠnergie ascendante, udana,
constitue lĠune des cinq nergies de base, ou prana,
dans le systme humain. Matriser cette nergie veut dire la connatre
directement.
III.40 Si nous matrisons lĠnergie quilibrante, le corps
devient radieux.
Cette È nergie quilibrante È est celle qui
distribue les ressources nergtiques dans le systme humain. Quand nous la
matrisons le corps acquiert une beaut exceptionnelle. On remarque que le
corps des mditants, mme avant cette matrise totale, devient de plus en plus
raffin et radieux.
III.41 En dirigeant le samyam sur la
relation entre le pouvoir dĠaudition et lĠespace, nous acqurons lĠaudition
cleste.
Toute vibration fait vibrer quelque chose. On nomme cela un milieu
propagateur. ( lĠair est un milieu propagateur du son
sur la terre).
LĠaudition cleste permet de percevoir une sorte de son
subtil, que nous pourrions nommer le son du silence.
Il sĠagit dĠune sorte de courant secret souvent perturb par
les bruits extrieurs ou intrieurs.
LĠespace mentionn ici nĠa rien de physique (akasa) cĠest le milieu propagateur du son cleste.
III.42 En portant le samyam sur la
relation entre le corps et lĠespace, ou en nous imprgnant de la lgret du
coton, nous pouvons nous dplacer volont dans lĠespace.
III.43 On appelle Ç grand tat ex-corporel È lĠtat
durant lequel le mental opre lĠextrieur des limites du corps. Le voile qui
recouvrait la lumire est alors lev.
Nous ralisons alors dĠune faon dramatique que nous ne sommes
pas le corps.
III.44 En amenant le samyam sur les
lments physiques, sur leurs formes visibles et subtiles, sur leurs
interrelations et sur leur but volutif, nous matrisons les lments.
III.45 De l viennent les manifestations de rtrcissement
relatif au corps ; celui-ci acquiert la perfection et devient dsormais
protg.
En fait, il lĠest souvent bien avant cela car nous sommes
protgs par lĠintelligence qui nous a manifests.
III.46 Les perfections du corps sont la beaut, la grce, la
force et la rsistance du diamant.
Le corps est la vitrine du dedans. Si le mental devient
parfait, le corps suivra. Platon crivait ;:
Ç la beaut cĠest la splendeur du vrai. È
III.47 En dirigeant le samyam sur la
perception des sens, la forme physique de leur manifestation, le sentiment
dĠindividualit qui les accompagne, leurs relations et leur but volutif, nous
obtenons la parfaite matrise de ces sens.
Ce samyam remonte la piste des sens,
partir de leur manifestation grossire jusquĠ leur cause. Il faut connatre
la nature vritable des sens avant
dĠesprer les matriser. La parfaite matrise des sens correspond la
ralisation du but volutif des sens et du sentiment dĠindividualit : la
connaissance du Soi.
III.48 Nous pouvons alors nous dplacer la vitesse du mental
et acqurir la perception et lĠaction extra-sensorielles ; cĠest la
matrise de la Nature.
Le corps est plus lent que le mental mais cet tat de chose
peut-tre modifi quand nous ralisons lĠinhrente unicit entre le physique,
le mental et la ralit sous-jacente.
III.49 Seul celui qui ralise la distinction entre lĠEsprit et
la lumire cognitive rgne sur toute la cration et sait tout.
Raliser la diffrence entre lĠEsprit (purusa) et la lumire
cognitive (sattva) cĠest abattre la dernire et plus subtile barrire sur la
voie. La lumire cognitive est le premier mouvement de manifestation du Soi.
CĠest cela qui est Ç au commencement È dans la,
Gense et le prologue de Jean.
III.50 Celui qui demeure dtach, mme de cet tat, a dtruit
jamais les germes de tout asservissement ; cĠest la libration absolue.
Ds que nous arrtons quelque part, nous devenons asservis.
Nous devons maintenir le cap sur la connaissance vritable, sur la parole, car
seule la vrit nous libre.
Ç Si vous demeurez dans ma parole, vous tes vraiment mes
disciples et vous connatrez la vrit et la vrit vous librera. È(Jean 8,31-32)
Cet aphorisme met en garde contre la tentation de sĠarrter
lĠomniscience (celle des phnomnes mmes subtils)
La ralisation est dynamique, jamais statique. Ce qui demeure
fig est appel mental ou monde de la reprsentation.
III. 51 Nous ne devrions pas tirer un plaisir indu ou tomber
dans lĠorgueil cause des manifestations supranormales ; ici encore nous
pouvons trbucher.
Prendre un plaisir indu aux pouvoirs surnaturels cĠest encore
les traiter comme quelque chose dĠextraordinaire et dĠextrieur.
II.52 En faisant samyam sur les
moments et sur leur succession, nous acqurons le plus fin discernement.
Le concept de Ç moment È(ksana) est trs rpandu dans la philosophie indienne.
Le temps nĠa de sens que sĠil y a mouvement, changement. Il
doit donc y avoir perception dĠune ou plusieurs formes. CĠest un peu
lĠvolution dĠun phnomne Ç image par image È. Quand nous nous
absorbons dans lĠintervalle entre deux perceptions nous dcouvrons le vide
interstitiel. Si nous portons notre attention sur ce vide avant le dbut de la
perception suivante nous acqurons le plus fin discernement.
Ce stra remet en question notre comprhension habituelle de
la causalit. Ce nĠest pas un moment qui entrane le suivant. Les deux sont la
manifestation de lĠunique. Nous nĠchappons pas encore au monde de
lĠaffirmation et de la ngation, au monde des contraires. Toute illusion tombe
et la ralit nĠest plus quelque chose percevoir, encore moins atteindre.
CĠest cela la voie du milieu ( madhya) quand , dans lĠabsorption dans le vide
interstitiel, lĠnergie emprunte la voie du milieu en nous.
Einstein avec sa thorie de la relativit restreinte avait
remont la piste ouverte par cet aphorisme. Le temps est un outil du mental et nĠa aucune ralit absolue en lui-mme.
Cette ralit que quiconque peut vrifier dans lĠintimit de
sa conscience trouve un bel cho dans la description magistrale de lĠunivers
par la physique quantique.
Le smyam sur les moments nous fait
voir lĠirralit du temps tel que nous lĠimaginons habituellement. Tous les
changements et phnomnes sont donns. CĠest la donne initiale et unique de
lĠunivers. Le fait que nous puissions connatre le pass et le futur montre que
tout est crit de tout temps.
III.53 Ceci permet de distinguer deux objets qui autrement
sont identiques par leur genre, leur apparence et leur position dans lĠespace.
Au niveau des formes jamais lĠunivers nĠest le mme. Par ce samyam, on parvient percer les formes les plus subtiles.
III.54 Cette connaissance ne du discernement est
transcendante, omnisciente, au-del de lĠespace et du temps, et elle nĠest pas
volutive.
Patanjali dissipe ici tout doute quant la nature de la connaissance . On se gardera bien de banaliser ces
connaissances en lĠassimilant une quelconque mondanit.
Notre connaissance intellectuelle est volutive, mais pas la
connaissance ultime. La mditation vritable est sans objet, sans but ni utilit.
III.55 Lorsque la lumire cognitive devient aussi pure que
lĠEsprit lui-mme, celui-ci brille comme lĠunique ralit sans aucune
autre ; cĠest la libration absolue.
LA PLENITUDE
(Kaivala pada)
(Il prsente les
possibilits offertes une personne qui aurait acquis un mental hautement
purifi. Le mental est fondamentalement un serviteur, non un matre. En
permettant au mental de jouer le rle du matre, quels que soient les
accomplissements raliss, la personne sera finalement en butte des problmes
et la srnit sera hors de son atteinte)
IV.1 Nous pouvons possder des pouvoirs surnaturels
inns ; nous pouvons aussi les acqurir au moyen de drogues, en rcitant
des mantras, par lĠascse ou par le samdhi.
Les pouvoirs ou siddhis dcrits au dernier chapitre peuvent tre acquis
autrement que par le samyam. Par exemple, si nous les
possdions au cours de la dernire incarnation. Il nĠy a pas de brisure dans
lĠvolution. Il en va de mme avec nĠimporte quel talent que nous avons pu
dvelopper dans le pass.
IV.2 Tout changement dĠtat est le dbordement du trop-plein
de la nature en dploiement.
Par exemple la vie spirituelle, comme telle, ne peut dbuter
que lorsque les tendances les plus grossires du mental se sont retires et
quĠun certain vcu a t accumul.
Ce nĠest pas la personne qui est la source des pouvoirs ;
cĠest lĠtre, la conscience. Il faut se rappeler que la Ç personne È
nĠest que la vitrine de lĠtre.
IV.3 Les causes apparentes dĠun changement ne sont pas
vraiment motrices, elles ne font que briser les obstacles lĠvolution
naturelle, tout comme le fermier ne fait quĠaider la nature.
Nous passons notre temps nous illusionner sur les causes des
changements auxquels nous assistons. Il nĠexiste quĠune seule force motrice
cĠest la vie. Tout nous est donn en temps voulu. Jsus disait :
Ç Votre pre cleste sait que vous avez besoin de tout cela. È
(Matthieu 6,32). Le jardinier nĠest que lĠoutil du dploiement de la nature.
Celui qui sauve est compltement diffrent de notre concept de
messie, qui est toujours peru comme un Dieu extrieur nous. CĠest notre
propre Soi qui est lĠÏuvre en nous, par nous et pour nous.
IV.4 Tout mental nĠest que la cration de lĠego.
Ce que Patanjali nomme mental est en ralit la collection des
impressions mentales accumules depuis toujours et qui dictent nos prfrences
et nos aversions.
Patanjali avait abord son expos en admettant la ralit du
mental ; cĠest pourquoi on dit son approche Ç dualiste È. Mais
on comprend que cela ne signifie pas que Patanjali ignore lĠunicit de lĠtre.
IV.5 Bien que chaque mental agisse diffremment, tous agissent
sous lĠimpulsion du champ mental unique.
Il sĠagit dĠun concept pour dcrire une suite dĠactions,
ractions, impressions. Il nĠy a quĠun seul champ mental lĠintrieur dĠune
seule conscience. Les frontires entre personnalits sont artificielles et
nĠont de ralit que celle que lĠon veut bien leur prter. Pendant tout ce
temps nous sommes la Pure Conscience et nous demeurons conscient du champ
mental.
IV.6 De ces mentaux, seul celui qui mdite parvient se
librer du cycle des dsirs.
Cet aphorisme capital nonce le fondement de la pratique
mditative. Seule, la mditation dissout cette ide tenace que nous sommes une
entit spare, un ego, un mental une personnalit, un corps, etcÉOr, cette ide est le fondement du cycle des dsirs. Il
faut recueillir la lumire de la mditation, pour ensuite confronter nos ides
irralistes et malsaines avec ce qui est. Toute autre procdure laisse
lĠerrance intacte. Par cette parole, Patanjali nous livre lĠinformation
capitale qui a fait si cruellement dfaut la tradition occidentale, tradition
tronque, ampute de son aspect pratique. Le message est clair : la
pratique de la mditation est essentielle pour se librer de lĠerrance.
Parvenus un certain niveau de ralisation, il est tentant de nous croire
au-dessus de cela, mais cĠest une erreur grossire.
IV.7 Les actes dĠun tre illumin ne sont ni blancs ni
noirs ; ceux des autres sont triplement colors.
LĠtre illumin est celui qui sĠest libr du cycle des
dsirs. Ses actes ne sont ni bons ni mauvais car il nĠy a plus personnes pour
en revendiquer la paternit. Ç Pourquoi mĠappelez-vous bon ? È
dit Jsus. Par contre, lĠtre qui se croit encore limit, nĠchappe pas au
destin engendr par la croyance quĠil est lĠauteur de Ç ses È actes.
Notre nature originelle nĠest ni bonne ni mauvaise. La Gense,
dans sa langue trs mtaphorique, dcrit cette chute originelle de lĠhomme qui
aurait mang du fruit de Ç lĠarbre de la science du bien et du mal È.
La chute originelle cĠest lĠoubli que nous sommes tous le Mme et que ce Mme
nĠest ni bon ni mauvais. Il est.
IV.8 Les seuls dsirs qui se manifestent sont ceux dont la
ralisation portera maturit les tendances mentales rsiduelles.
Pourquoi tel dsir vient-il telle personne et pas une
autre ? CĠest tout simplement que les tendances rsiduelles diffrent
cause de lĠhistoire diffrente de ces personnes.
Ç LĠhomme bon, de son bon trsor tire de bonnes
choses ;et lĠhomme mauvais, de son mauvais trsor
en tire de mauvaises. È(Matthieu 12,35)
Il nĠarrivera jamais quĠun dsir survienne sans quĠil ne doive
son apparition quelque tendance latente, parfois oublie depuis longtemps.
Cela explique beaucoup de comportements inattendus et
surprenants de la part de personnes que lĠon croyait pourtant connatre trs
bien.
IV.9 Les tendances rsiduelles ne sont ni plus ni moins que
des souvenirs ; ceux-ci forment les tendances qui agissent en nous dĠune
faon continue dans le temps, dans lĠespace et lĠoccasion des incarnations
successives.
Platon crivait que penser cĠest se souvenir. Mme les
Ç dcouvertes È sont des souvenirs. LĠEcclsiaste nous
dit : ÈCe qui fut, cela sera ; ce qui sĠes fait se refera ;
et il nĠy a rien de nouveau sous le soleil. Soi quelque chose dont on
dise : Ç Tiens ! cĠest neuf ! Cela
fut dj dans le pass. È (LĠcclsiaste 1,9-10)
Quant la joie lie aux objets, elle est galement une forme
de souvenir, car lĠtre est la joie pure et cĠest la nostalgie de cette joie
qui nous fait rechercher les objets ou les circonstances qui, croit-on, vont
faire revivre cette joie. Les tendances rsiduelles ont le bras long et peuvent
se manifester trs longtemps, y compris au cours dĠincarnations ultrieures. Le
mental en errance croit quĠil doit agir sous lĠimpulsion du moindre de ses
dsirs, alors que lĠtre illumin demeure libre face ceux-ci ; cĠest en
cela que rside toute la diffrence.
IV.10 Les dsirs remontent la nuit des temps, car la soif de
plnitude est ternelle.
Au plus profond de chacun dĠentre nous la soif de plnitude
nous appelle passer de lĠautre ct, nous installer sur lĠautre rive. Cette
soif est ternelle, il nĠy a donc aucun autre moyen de combler notre soif.
Jsus disait la Samaritaine : Ç Quiconque boit de
cette eau, aura soif nouveau ;mais qui boira de
lĠeau que je lui donnerai nĠaura plus jamais soif ; lĠeau que je lui
donnerai deviendra en lui source dĠeau jaillissant en vie
ternelle. È(Jean4, 13-14) Hraclite disait : Ç Il est pnible
de lutter contre le dsir car il sĠachte prix dĠme. È
LĠhomme plong dans les tnbres de lĠerrance poursuit ses
dsirs avec frnsie. LĠhomme, plong dans les tnbres de la raction,
rprime ses dsirs avec vengeance . Ni lĠun ni lĠautre ne voit la plnitude. La
paix nĠa rien voir avec lĠaccomplissement ou non des dsirs. Il suffit de voir.
La sagesse est avant tout pratique. Elle est pure intelligence
et lĠintelligence cĠes savoir Ç lire entre È. Nous nĠenlverons rien
la vie que nous menons, sauf le brouillard et la confusion. LĠapplication
dĠune lumire fulgurante sur les derniers bastions de la confusion fait la
diffrence entre des moments dĠillumination fugitifs et la libration finale et
donc, entre lĠtat de sabija samadhi(I-46) et nirbija samadhi(I-51) ou kaivalya (IV-34)
IV.11 Les dsirs sont perptus par lĠasservissement du mental
aux objets de son attention ; il sĠagit dĠun cycle de causes et dĠeffets.
LĠlimination de et asservissement entrane la disparition des dsirs.
Tant que la joie est tributaire des phnomnes, elle demeure
incomplte et passagre. LĠerrance consiste croire que les objets, les
personnes, les expriences et les motions vont un jour nous procurer la joie
absolue. Or, cĠest justement l la cause de notre asservissement et de notre
souffrance. Contrairement ce que prchent un grand nombre de moralistes,
dĠditorialistes, de gens bien pensants et dĠhommes religieux, il est inutile
dĠessayer dĠliminer, dĠignorer, de combattre ou de refouler les dsirs dĠune
faon permanente ; nous nĠavons pour nous en convaincre, quĠ observer
lĠchec lamentable de tous ces braves gens.
Jsus dit : Ç Il nĠest pas possible que quelquĠun
entre dans la maison du fort et la prenne de force moins quĠil ne lui lie les
mains ; alors il bouleversera sa maison. È (Thomas 35)
Mditer cĠest abandonner lĠespoir quĠun jour tout ira mieux en
faveur de la certitude que tout est parfait.
IV.12 Le pass et le futur ont une ralit ; ils sont le
rsultat des chemins volutifs diffrents des formes manifestes.
Ce que nous nommons prsent,
semble rel, alors que le pass et le futur seraient plutt des ides. En fait
tout est rel, cĠest lĠunique Conscience, lĠunique Moment. CĠest cela qui
semble rel dans le Ç prsent È. CĠest lĠide que nous sommes des
cratures spares existant dans le prsent qui limite notre vision aux formes
telles quĠelles sont maintenant. Nous sommes la prsence. Le pass et le futur
sont rels car ils se tiennent dans la prsence. LĠtre explore toutes les
avenues en mme temps et nĠen tient aucune pour plus ou moins relle que les
autres. CĠest le jeu du Divin. Quand Patanjali affirme que le pass et le futur
ont une ralit, il entre dans le jeu. Le tout est dĠy entrer consciemment.
IV.13 Les caractristiques manifestes constituent le
prsent ; celles qui ne le sont pas forment le pass et le futur. Toutes,
sont le jeu des nergies fondamentales.
Les nergies fondamentales, examines dans les chapitres
prcdents, se combinent de faon crer tout ce qui existe dans lĠunivers
manifest, tous les niveaux. Rien ne disparat ni nĠapparat, car lĠessence
demeure non affecte par les transformations.
IV.14 LĠtat particulier dĠun objet est lĠexpression de
lĠunicit dĠune certaine combinaison des nergies fondamentales.
Chaque objet est lĠexpression dĠune combinaison unique des
nergies fondamentales. Tout nĠest quĠapparitions diffrentes du Mme.
IV.15 Deux objets identiques paraissent diffrents cause des
faons diffrentes dont ils sont perus par le mental.
Voil qui rejoint bien la physique quantique, ou, mieux, est
rejoint par la physique quantique. LĠobservateur doit toujours spcifier le
mode dĠobservation dĠun objet, car cela influence le rsultat observ. Une
observation est toujours le rsultat de
lĠinteraction de lĠobservateur avec lĠobjet. Si nous nous percevons
comme des individus spars, alors nous acceptons la fragmentation ainsi cre,
avec toutes ses squelles.
IV.16 LĠexistence dĠun objet ne dpend pas de sa perception
par un mental individuel ; sinon quĠest-ce qui existerait quand lĠobjet
nĠest pas peru par ce mental ?
Patanjali rfute une exagration grossire qui a encore
parfois cours, savoir que lĠexistence de lĠobjet dpend uniquement de
lĠobservateur particulier. Rien nĠest plus faux. QuĠest ce donc quĠun
objet ? Seul un esprit mditatif peut-tre saisi de cette ralit. La
ralit, ou la continuit (tantram) dĠun objet nĠest
ni dans la forme È perue ni dans le mental qui peroit. Elle est Dieu et
cĠest ce que nous sommes aussi, cette pure conscience.
IV.17 On peroit lĠobjet uniquement lorsque celui-ci colore le
mental.
La perception est le processus par lequel lĠobjet est peru par les
sens. LĠÏil et le nerf optique auront beau tre en bonne sant si la rgion du
cerveau qui forme les images est endommage, rien nĠest peru par le mental. La
perception est beaucoup plus interne quĠon ne le croit.
IV.18 Le mental et toute son activit sont toujours perus par
leur crateur, lĠimmuable Esprit.
Ce qui connat est lĠEsprit (Purusa) ; rien dĠautre ne
connat. Quand on dit que le mental connat, cela signifie que lĠEsprit connat
lĠobjet tel que peru par les sens et enregistr dans la pense (le mental).
Quand Il est au repos, Il se connat comme pur Esprit. Quand
lĠactivit mentale prend place, Il se connat en tant quĠactivit mentale.
Quand lĠtre humain a ralis sa nature vritable, Il se connat comme
Esprit qui inclut lĠactivit
mentale.
Ç SĠils vous demandent quel est le signe de votre Pre
qui est en vous, dites leur : cĠest un mouvement et un repos. È
(Thomas 50). LĠEsprit est le Tout ; Il est la fois le Tout, la lumire
du Tout, les objets du Tout, lĠobservateur du Tout et la ralisation du Tout
parvenu au Tout travers le systme nerveux humain.
Jsus dit : Ç Je suis la lumire qui est sur eux
tous. Je suis le Tout. Le Tout est sorti de moi et le Tout est parvenu moi.
Fendez du bois, je suis l ; levez la pierre, vous me trouverez l. È
IV.19 Le mental ne sĠclaire pas lui-mme ; il est clair.
Ce qui est conscient est cela qui connat. Le reste nĠest que
concepts utiles, inutiles ou nuisibles. Le mental est un de ces concepts.
LĠerrance consiste croire que nous sommes le mental et quĠen
tant que tel nous nous clairons. La monte de la lumire spirituelle vient
bouleverser cela de fond en comble.
Jsus disait : Ç CĠest pour un discernement que je
suis venu en ce monde : pour que ceux qui ne voient pas voient et que ceux
qui voient deviennent aveugles. È(Jean 9, 39). Nous russissons tablir
la lumire en mditant sur la lumire et non sur ses reflets changeants que
sont les phnomnes et les penses.
IV.20 CĠest pourquoi il ne peut tre la fois conscient de
lĠobjet et de lui-mme.
La mditation portera donc sur ce qui claire plutt que sur
ce qui est clair ; cĠest la seule mditation qui puisse librer.
Les visualisations, les musiques douces, les mantras, les
expriences astrales et autres, tout cela est connu et ne connat pas. Ce ne
sont que des images de la ralit mme si elles peuvent avoir leur utilit.
Ç Nous sommes venus de la lumire, l o la lumire est
ne dĠelle-mme. È (Thomas 50)
IV.21 Si le mental tait clair par
un autre mental, il faudrait alors une infinit de mentals,
avec une inluctable confusion des impressions enregistres.
Il met en garde contre la construction presque inconsciente
dĠun Ç observateur È qui ne serait en fait quĠune nouvelle crature
du mental, un super-mental
connaissant le premier et peut-tre lui aussi connu par un autre
observateur. LĠObservateur vritable est la vie, lĠunique ralit. Aucun
concept ne peut nous donner la ralisation que procure la connaissance de notre
vraie nature.
CĠest ce quĠavanait Jsus : Ç Si ceux qui vous
guident vous disent : Ç Voici, le Royaume est dans le ciel , alors les oiseaux du ciel vous
devanceront ; sĠils vous disent quĠil est dans la mer, alors les poissons
vous devanceront. Mais le Royaume, il est le dedans et il est le dehors de
vous. Quand vous serez connus, alors vous serez connus et vous saurez que cĠest vous les fils du Pre le
Vivant. Mais sĠil vous arrive de ne pas vous connatre, alors vous tes dans la
pauvret, et cĠest vous la pauvret. È (Thomas 3)
IV.22 La connaissance de soi apparat quand le mental assume
une forme immuable.
Quand le mental assume une forme immuable, cĠest que le Soi
reflte en lui sa nature vritable en tant que Soi, en tant que lumire. CĠest
la dernire transformation subie par le mental, cĠest le couronnement de
lĠvolution. Tant quĠil connat le changement, il ignore la ralit.
IV.23 Le mental color la fois par la conscience et par
lĠobjet connat tout.
Un tel mental ne connat plus la fragmentation. La science
relle ne consiste pas, comme on le croirait, savoir tout ce quĠil y a
savoir ; cĠest plutt de demeurer tabli dans lĠtat exempt de questions.
CĠest le samadhi
permanent.
IV.24 Malgr ses tendances
innombrables, le mental existe pour le Soi, car il nĠen est pas spar.
Le sens de lĠvolution devient apparent lorsque celle-ci tire
sa fin. Les Ç innombrables tendances du mental Ç ne nous
distraient plus. La manifestation vise fournir lĠexprience du Soi et rien
dĠautre, mme si en cours de route il semble se dessiner une plthore de buts
et de desseins.
IV.25 Celui qui peroit la distinction ralise la conscience
du Soi et nĠentretient plus aucune interrogation son sujet.
Tant que nous nĠavons pas peru directement la distinction
entre mental et Soi nous demeurons dans le doute, le scepticisme, les
hypothses, les doctrines religieuses, les dogmes, les exercices intellectuels
comme thologie et philosophie, les tergiversations, les discussions
acadmiques, les sermons motifs, bref, dans lĠerrance et la misre
spirituelle.
Le prophte Isae disait : Ç le Seigneur a
dit : ce peuple mĠhonore des lvres, mais leur cÏur est loin de moi. Vain
est le culte quĠils me rendent : les doctrines quĠils enseignent ne sont
que prceptes humains, leons apprises !... La sagesse de ses sages
tournera court, lĠintelligence de ses intelligents sĠclipsera. È Isae
29,13-14)
Patanjali, Jsus et tous les matres et les prophtes passs
et prsents nous indiquent le moyen de nous extraire de cette indigence
lamentable ; ce qui compte ce nĠest pas le personnage historique, cĠest la
pratique de ce quĠil a recommand. Ç Ce nĠest pas en me disant :
Ç Seigneur , Seigneur È, que lĠon
entrera dans le Royaume des Cieux, mais cĠest en faisant la volont de mon Pre
qui est dans les Cieux. È(Matthieu 7,21)
Raliser la distinction entre le Soi et le mental, cĠest
savoir ce qui est, par rapport aux reprsentations
de ce qui est.
Le jour o nous laissons les Ç prceptes humains È
-que nous croyons divins- et que nous considrons la ralit telle quĠelle est,
ce jour l une grande lumire jaillit et lĠon entre dans un espace o les questions
perdent leur sens.
Quelle question peut-on entretenir sur le Soi quant on est le
Soi ?
Ç Ce jour l, vous ne me poserez aucune question È.
(Jean 16,23)
IV.26 Ds lors, le mental maintient une propension continue au
discernement et il est irrsistiblement attir par lĠunique ralit.
Le point tournant de la vie consiste en cette exprience
directe, cette comprhension vritable de ce quĠest le Soi. Ds lors plus rien
nĠest pareil, nous ne pouvons plus revenir en arrire et feindre dĠignorer.
Nous perdons intrt tout ce qui ne rvle pas notre vraie nature en tant que
Soi. Quand la vision de lĠUnique demeure stable, cĠest la libration dfinitive
et totale, la plnitude.
IV.27 Toute autre pense qui se glisse alors dans le mental
nĠest que le rsultat des impressions rsiduelles.
Une ou des expriences directes ne veulent pas dire que le
mental a t totalement purifi. En fait, cĠest ce moment que le travail peut
commencer. Il sĠagi dĠexaminer mesure quelles se prsentent les penses
porteuses de fragmentation mentale et de les lessiver avec la connaissance que
nous sommes le Soi. Tant que cela nĠest pas complt, les impressions mentales
risquent de refaire surface et dĠobscurcir la vision.
IV.28 Nous pouvons les amener au repos de la faon dcrite
pour les obstacles.
Cf chapitre
II.
LĠexprience dmontre que tant que nous ne nous engageons pas
srieusement dans cette pratique nous demeurons de la matire premire pour les
thrapeutes de toutes sortes.
IV.29 Celui qui vit en permanence dans le discernement ne
ressent plus aucun engouement, mme pour les plus subtils niveaux
intellectuels ; il a atteint le samadhi dit du
Nuage de Vertu.
IV.30 Celui-ci limine les causes de souffrance et
dĠasservissement aux actes et au destin.
Il ne reste plus personne pour revendiquer les actes et leurs
consquences.
IV.31 Toute impuret enleve, la connaissance se rvle tre
infinie ; le savoir relatif parat alors insignifiant.
IV.32 De ce fait, lĠvolution des nergies fondamentales,
ayant rempli son rle, arrive son accomplissement.
Le long chemin que nous avons cru interminable sĠachve dans
lĠapothose vritable.
IV.33 LĠvolution est la squence ininterrompue des
moments ; nous la comprenons vraiment lorsquĠelle arrive son terme.
Le Christ assure : Ç Ce jour l vous ne me poserez
plus aucune question. È( Jean 16, 23)
IV. 34 Les nergies fondamentales nĠont alors plus de rle
jouer pour la Conscience et elles retournent leur tat latent originel. CĠest
la plnitude : la puissance de la Pure Conscience est ainsi tablie dans
sa nature vritable.
La fin est dans le commencement, dans la puissance. Ç Je
suis lĠAlpha et lĠOmga. Ç (Apocalypse 1,8)
Ç Le vent souffle o il veut et tu entends sa voix, mais
tu ne sais pas dĠo il vient ni o il va. Ainsi en est-il de quiconque est n
de lĠEsprit. È (Jean 3,8)