sur le site http://adelin.pagesperso-orange.fr/realite1.htm
Mais, plus que tout, cette organisation de la conscience semble obéir à un processus dynamique subtil engendré par un facteur extérieur, universel, autorisant le dépassement des seules performances biologiques. Remarquable potentiel à la transcendance, capable de stimuler les précédents attributs de la conscience et d’éveiller la sensibilité spirituelle, cette mystérieuse source d’énergie agirait l’être humain. Les vécus d’expansion de la conscience, spécifiques de certains EMC, nous montrent que la conscience du sujet est en mesure d’accéder au domaine d’un Absolu immanent à toute la Création, que je désignerai ici sous le terme de Supra-Conscience. De celle-ci émergerait toute forme de vie, depuis les origines, par l’entremise de l’Énergie Fondamentale, force immatérielle comparable au Souffle Vital cher à Bergson. Outre son influence dans le domaine biologique, en modelant la matière vivante, cette énergie interviendrait dans la création, l’activation et la pérennisation de la conscience de l’individu.
Certains courants de pensée estiment d’ailleurs que les expériences d’expansion de la conscience ouvrent à la véritable réalité et démontrent que l’essence précède l’existence. C’est le cas de la mystique qui, selon Fritjof Capra[1], « …regarde la conscience comme une réalité première, comme l’essence de l’Univers, le fondement de toute chose, et tout le reste — toute les formes de matière et tous les êtres vivants — comme des manifestations de cette conscience pure. Cette conception mystique de la conscience, poursuit-il, se fonde sur l’expérience de la réalité dans des modes de conscience non ordinaires, et une telle expérience mystique, disent ceux qui l’ont vécue, est indescriptible. »
Il va de soi que les précédentes références à la Supra-Conscience et à l’Énergie Fondamentale sont en complète rupture avec les modèles rationalistes habituels. Elles s’inscrivent dans une alternative aux limitations d’un cadre scientifique inapte à rendre compte de cet impalpable-là. Un cadre dont l’évocation justifie une courte digression afin de montrer que notre propension à rationaliser pourrait, malgré tout, se satisfaire de la notion d’Énergie Fondamentale.
En effet, l’option vitaliste envisagée ici, quoi qu’on en pense, n’est pas en contradiction avec les présupposés de la recherche fondamentale dans le domaine des sciences physiques. Nul ne discute, par exemple, la légitimité de la force gravitationnelle. Sans pesanteur, si la vie était encore possible, nous flotterions dans un indescriptible chaos cosmique. Sa réalité est manifeste puisque les objets « plus lourds que l’air » sont irrésistiblement attirés vers le sol. Les propriétés de la gravitation, composante de la réalité ordinaire, sont un peu mieux connues depuis les travaux de Newton et d’Einstein. Pourtant, aucun scientifique à ce jour n’est parvenu à en découvrir le support physique. Grâce à des investissements colossaux on présume, depuis des années, que cette découverte ne saurait tarder… Les opinions sont néanmoins partagées entre les tenants d’une force dont le messager serait une particule, l’hypothétique graviton, et les partisans d’une théorie géométrique, plus conforme à la relativité einsteinienne, pour lesquels la gravitation serait une conséquence de la courbure de l’espace inhérente à tout objet massif de l’univers.
En tout cas, bien que l’on ne dispose à ce jour d’aucun modèle explicatif vérifié expérimentalement, la réalité de la gravitation est une évidence. De la même manière, l’existence d’une Énergie Fondamentale, une force qui organise et donne forme à la matière, puis lui permet l’accès à la conscience, n’est pas moins légitime. Pour l’heure, le support physique de cette force-là est tout simplement aussi mystérieux que celui de la gravitation.
L’Énergie Fondamentale est en quelque sorte le messager de la Supra-Conscience. Elle est ce prolongement du principe initiateur qui permet à la conscience de se manifester dans la matière, le corps humain pour ce qui nous concerne, dont elle stimule parallèlement l’organisation. Dès la fusion des deux gamètes à l’origine d’un être humain, les conditions d’un formidable potentiel évolutif se trouvent réunies. L’initialisation[2] de ce potentiel par l’Énergie Fondamentale actualise aussitôt une aptitude au développement organique, parallèlement à celui de la conscience. Ainsi, aux premiers instants de la vie, une sorte de programme commun est délivrée à tout embryon par l’entremise de l’Énergie Fondamentale. Les variables environnementales et génétiques, dont la pression n’est pas à négliger, relèvent pour leur part d’un domaine strictement humain.
L’Énergie Fondamentale intervient simultanément dans l’enclenchement des différents stades de l’embryogenèse, en accord avec le schéma génétique individuel, et dans l’adéquation d’un niveau de conscience conforme à chacun d’eux ; l’efficience de la conscience allant crescendo au fil de la complexification de la structure organique. Mais alors que le développement de la matière connaît rapidement son apogée, avant le lent déclin auquel elle est vouée, l’évolution de la conscience se poursuit incessamment[3] de façon plus ou moins achevée selon les individus ; le potentiel évolutif de la conscience n’étant accessible qu’à ceux qui en ont pleinement… conscience.
En résumé, la poussée évolutive de la conscience suit les étapes du développement embryonnaire, puis fœtal et se poursuit jusqu’au terme de l’existence sans qu’elle soit jamais complètement achevée sauf, peut-être, pour des êtres d’exception. Rien d’étonnant que l’éveil de la conscience dans ses habits de chair suscite l’illusion de son enfermement dans cette enveloppe corporelle et son identification à celle-ci.
Une caractéristique essentielle de l’Énergie Fondamentale intéresse directement notre propos : sa capacité à transcender les aptitudes physiques, psychiques et surtout spirituelles de l’homme. Dans ce dernier registre elle serait à l’œuvre, imperceptible, lors de nombreux états modifiés de conscience. Elle connecterait alors directement le niveau personnel de la conscience au niveau transpersonnel de la Supra-Conscience, s’affranchissant du filtre cérébral grâce à un neuromédiateur opportun, voire un cocktail de neurohormones. Mais le phénomène est graduel et ce n’est qu’à l’occasion d’un EMC très profond, une expérience d’expansion de la conscience extrême, que l’homme fusionnerait avec la Supra-Conscience. Il aurait alors accès au fichier de la mémoire universelle, domaine de l’indicible et de l’incommensurable. Cette faculté à la transcendance serait significative de la parcelle de divinité consentie à l’être humain. Une divinité nommée ici Supra-Conscience mais que tout un chacun peut désigner dans un autre terme à sa convenance[4].
De la Supra-Conscience nous avons dégagé une propriété essentielle : sa capacité d’animer (de anima : souffle vital, âme) la matière par l’entremise de l’Énergie Fondamentale qui insuffle dans la machinerie biologique, puis y entretient, ce que l’on nomme la vie. Ce concept d’Énergie Fondamentale remonte probablement à la nuit des temps et son universalité est d’ailleurs attestée par la tradition religieuse, de l’hindouisme (Prâna) au taoïsme (Ch’i) en passant par le christianisme (Saint-Esprit). Mais hors les religions cette mystérieuse énergie a reçu bien d’autres noms : principe animateur, conscience-énergie, conscience cosmique, énergie spirituelle, souffle vital, fluide vital, élan vital, source-mère… Supputons que l’énergie psychique de ce réservoir des pulsions qu’est le Ça[5] n’est autre que la vision psychanalytique de l’un des attributs de l’Énergie Fondamentale.
[1] Sagesse des sages, page 135, Belfond/L’âge du Verseau, 1988.
[2] À entendre dans le sens de la terminologie informatique, c’est à dire que l’activation de ce potentiel évolutif résulte de l’insertion, dans un support vierge, d’informations spécifiques délivrées par la Supra-Conscience via l’Énergie Fondamentale. L’objectif étant de créer les conditions du déclenchement puis de la gestion du processus évolutif.
[3] Prenons garde à ne pas confondre les attributs de la conscience avec ceux du psychisme, bien qu’elle soit en grande partie tributaire de ce dernier.
[4] Le parallèle entre les concepts de Dieu et de Supra-Conscience est patent, de même qu’entre ceux de Saint-Esprit et d’Énergie Fondamentale. En dépit de ces analogies, l’auteur ne souhaite pas voir associer la Supra-Conscience et l’Énergie Fondamentale à une quelconque doctrine religieuse.