Diamants sur canapé quantique

LE MONDE SCIENCE ET TECHNO |  | Par David Larousserie– pour lire l’article


Une équipe néerlandaise de l’université de technologie de Delft, associée à des Britanniques et des Espagnols, a mis en ligne le 24 août, sur le site dédié Arxiv.org, un article confirmant une bizarrerie quantique qui avait perturbé en son temps jusqu’à Albert Einstein : deux objets géographiquement séparés constituent une seule entité au point qu’ils peuvent s’influencer de façon littéralement instantanée – plus vite même que la lumière. De quoi bouleverser la notion de réalité, au sens philosophique ou physique. Le processus de relecture en cours interdit aux auteurs de l’étude tout commentaire sur leur travail.

Après de premières tentatives aux Etats-Unis dans les années 1970, Alain Aspect parvient au début des années 1980 à Orsay à faire le premier test considéré comme vraiment déterminant. En mesurant indépendamment l’état de deux photons intriqués, il trouve qu’ils sont corrélés au-delà du seuil défini par Bell distinguant théorie quantique et classique. « Auparavant, le sujet était quasi sulfureux et peu connu des physiciens. Ces expériences ont popularisé le sujet, en lui donnant une vraie légitimité scientifique, et en ouvrant de nouveaux champs de recherche », estime Philippe Grangier, directeur de recherche CNRS à l’Institut d’optique, qui a travaillé dans les années 1980 avec Alain Aspect sur ces questions.
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Cependant, d’irréductibles physiciens ont souligné qu’il existe deux échappatoires pour sauver d’éventuelles théories non quantiques. D’abord, ces expériences, certes stupéfiantes, ne détectent pas tous les photons intriqués. L’échantillon mesuré pourrait alors ne pas être représentatif de ce qu’est vraiment la Nature.

Ensuite, à cause de la lenteur des mesures, de l’information aurait le temps de passer entre les deux jumeaux de la paire, faisant prendre pour quantique ce qui serait en fait classique.

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L’expérience de Delft est donc la première à colmater simultanément ces deux brèches. « C’est le couronnement d’une ligne de recherche impulsée dans les années 1970, salue Alexei Grinbaum, du Laboratoire de recherche sur les sciences de la matière au Commissariat à l’énergie atomique. Ce n’est pas une nouvelle découverte mais une preuve expérimentale importante. » « Cela clôt un sujet en respectant enfin toutes les hypothèses du théorème de Bell, et cela en ouvre un autre », ajoute Philippe Grangier.
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Comment ces physiciens ont-ils réussi ? Les jumeaux de la paire sont deux diamants séparés de 1,3 kilomètre. Plus précisément, chacun des jumeaux est un électron libre à l’intérieur de ces diamants. On commence par intriquer, dans chaque diamant, l’électron avec un photon créé en excitant le diamant par des micro-ondes. Ces photons rouges se rejoignent via une fibre optique en un autre point éloigné d’au moins 800 mètres. Là, ils sont mesurés simultanément, ce qui a pour effet d’intriquer les deux électrons, pourtant éloignés de plus de 1 kilomètre. Ne reste plus qu’à tester les corrélations sur ces particules et constater qu’elles sont 20 % supérieures à ce que prévoient des théories classiques.

 

 

 

 

 

 

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