La Divine bibliothèque – Juan Manuel de Prada

 

Juan Manuel de Prada, né le  à Barakaldo, est un écrivain, éditorialiste et critique littéraire espagnol.

Il étudie le Droit à l’Université de Salamanque où il obtient un diplôme d’avocat, profession qu’il n’exercera jamais car il décide de se consacrer entièrement à la littérature.

Juan Manuel de Prada est traditionaliste et défend dans ses articles des positions proches de l’Église catholique sur les questions de l’avortement ou de l’euthanasie. Il est éditorialiste du journal madrilène de droite ABC depuis de nombreuses années. Il est aussi très critique du libéralisme et de l’aliénation de l’individu dans le contexte du postmodernisme et du capitalisme, dans une ligne distributiste de pensée socio-économique qui le séduit.

Il revendique le Moyen Âge, nie qu’il s’agisse d’un âge obscur et estime que le monde occidental a atteint son apogée au XIIIé siècle. La crise que nous traversons actuellement trouve ses racines au XVIé siècle. À cette époque, trois événements essentiels apparaissent pour comprendre l’histoire européenne ultérieure : l’œuvre de Machiavel, qui sépare la morale de la politique ; la révolte contre l’Église romaine, menée par Luther et cause de la naissance du protestantisme ; et la théorie politique de Jean Bodin, créateur du concept de Souveraineté qui superposait l’État à l’unité de la chrétienté dans un Empire. Il considère également que la violation juridique de Hobbes et la violation sociale de la paix de Westphalie sont pertinentes. Tous ces échecs se cristallisèrent lors de la Révolution française de 1789, lorsque De Prada considéra que « toute la philosophie moderne » devenait « anti-chrétienne, anti-thomiste et anti-aristotélicienne ».

Il s’oppose à la modernité, au puritanisme et au capitalisme influencé par Chesterton. Il soutient que Rousseau est le père de l’ingénierie sociale tandis qu’il faisait l’éloge d’Alexis de Tocqueville. Il a également critiqué Descartes ,Adam Smith, David Ricardo, Stuart Mill, Hegel, ou Nietzsch. Il soutient que « le progressisme, en fin de compte, n’est rien d’autre qu’une expression dévalorisée de l’esprit hégélien du monde ». Il s’oppose à l’Union européenne et défend la justice sociale. Il considère le libéralisme économique comme « l’une des idées les plus néfastes de l’histoire de l’humanité. Elle assimile le capitalisme au communisme. Elle affirme que le libéralisme crée les conditions sociales, économiques et morales optimales pour le triomphe de la gauche socialiste et du communisme. Elle comprend que les maux que la droite attribue au communisme sont en réalité causés par le capitalisme. Il croit que le pape François défend l’orthodoxie économique de l’Église27.Diplômé en droit, il est un détracteur du positivisme.. Influencé par Aristote, considère que conservatisme et progressisme partagent une vision erronée de la nature humaine: la vision libérale32. s’est opposé le Processus de BologneIl a déclaré que « la mentalité catholique est tellement défensive qu’elle a cessé de comprendre le sens de l’art »« montrer le péché aujourd’hui est scandaleux »« l’artiste doit montrer comment la Grâce agit sur le territoire du diable » et que «Dans un cinéma authentiquement catholique, le mal doit être attirant ».] Il convient avec Leonardo Castellani que Baudelaire a été le plus grand poète catholique du XIXe siècle. De Prada déteste le puritanisme :

« Notre monde est hypocrite et puritain. Le puritanisme est une dégénérescence de l’hypocrisie qui prétend d’abord être vertueuse et, lorsqu’elle se rend compte que la vertu absolue est impossible, essaie de transformer ses vices en vertus, de telle sorte que notre faiblesse est absolument niée et devient une force. La position catholique est beaucoup plus réaliste avec la réalité humaine: on admet qu’elle est faible mais cette faiblesse est pointée du doigt. »

Sur le pharisaïsme, il a déclaré :

« Le pharisaïsme est l’incapacité d’accepter que Dieu pardonne nos fautes, en s’érigeant en purs qui ne peuvent y tomber. C’est l’incapacité d’accepter la conversion du pécheur, la possibilité de l’homme nouveau, et de prétendre que, si quelqu’un est tombé dans le passé, il faut toujours continuer à lui frotter le visage (les pharisiens n’auraient jamais admis la sainteté de Marie-Madeleine ou d’Augustin d’Hippone). Et la propre justice n’est pas d’admettre que Dieu peut agir à travers nous, pécheurs , que ce que font les pharisiens, les pécheurs peuvent être guéris par Dieu avec sa grâce, et que Dieu peut utiliser les pécheurs pour accomplir son œuvre de salut

Introduction aux grandes œuvres
de la littérature chrétienne

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3. Pedro Calderón de la Barca, Le grand théâtre du monde (1655)

Le Grand Théâtre du monde donne le vertige. Chef d’œuvre de l’auto sacramental (un théâtre religieux conçu pour les processions spectaculaires de la Fête-Dieu), il est une clé de voûte du grand art dramatique de l’Espagne au Siècle d’or. Poésie sublime, rire délicat, rigueur doctrinale, Calderon convoque ici tous ses talents pour façonner un formidable trompe-l’œil baroque, où l’angoisse existentielle se place au service d’une foi irréductiblement optimiste. Le Grand Théâtre du monde est une leçon de vanité mondaine, qui trouve dans le Ciel sa raison d’espérer. Synthèse dramatique de tout l’univers d’un maître de la littérature universelle, véritable encyclopédie en miniature des grands concepts du Siècle d’or, ce texte émouvant est la meilleure façon de pénétrer le génie d’un peuple qui

 

 

 

6. Ernest Hello, Physionomie des saints (1875)

« Ce siècle est un combat, un fracas, un éclat, un tumulte.
Souffrez que je vous présente en ce moment quelques hommes pacifiques. Car il y en eut ; à regarder le monde, on est tout près de s’en étonner. Il y eut des Pacifiques. Parmi eux plusieurs ont reçu une dénomination singulière, officielle, et s’appellent des Saints. Des Saints ! Souffrez que je vous arrête un instant sur ce mot. Des Saints ! Oubliez les hommes dans le sens où il le faut pour vous souvenir de l’homme. Souvenez vous de vous-même. Regardez votre abîme.»

Ernest Hello

Ernest Hello (1828-1885), dont Barbey d’Aurevilly, Huysmans ou encore Michaux ont salué l’influence sur leurs propres œuvres, raconte, en écrivain et en croyant, la vie des saints.

 

 

7. Léon Bloy, Journal (1892-1917)

T1

Les colères, les peurs et les exaltations du grand pèlerin de l’absolu. Des mots qui font sursauter. L’auteur du mot qui frappe.

Léon Bloy (1846-1917) est un bloc erratique dans la littérature fin-de-siècle. Il récuse les langues mordorées de son époque pour se lancer, avec véhémence, dans le déchiffrement du mystère qu’est l’homme. Il le fouille sans complaisance, mettant à nu ses faiblesses et ses souffrances. Pamphlétaire coruscant, il combat la société bourgeoise de son temps, mais aussi ses ennemis, comme Zola et les naturalistes. La plupart de ses romans ont un caractère autobiographique et prennent leur essor dans un Journal tenu sans relâche pendant un quart de siècle (1892-1917). C’est ce document que Bloy destinait lui-même à la publication qui est donné ici, entouré pour la première fois des clefs qui permettent au lecteur moderne de déchiffrer les nombreuses allusions à la vie et à l’époque de l’auteur. Pierre Glaudes est professeur à l’université de Toulouse-Le Mirail ; il a publié de nombreux travaux sur la littérature française du XIXe et du XXe siècle (notamment sur Balzac, Barbey d’Aurevilly et Huysmans).

T2 ;

Léon Bloy (1846-1917) ressemble à un prophète de l’Ancien Testament dénonçant les vices de la société qui l’entoure. Il ne cesse de lancer ses anathèmes contre la veulerie de ses contemporains, de fustiger leur matérialisme, leur incapacité de s’élever au-dessus des mesquineries quotidiennes et de concevoir un quelconque idéal. Pèlerin d’un absolu situé hors du temps, menant une vie non pas de moins (bien au contraire) mais de marginal bourru, Bloy a fini par devenir un étranger dans son propre pays, moqué, honni. Ses romans (La Femme PauvreLe Désespéré) et ses nouvelles (Histoires désobligeantes) n’ont d’abord été appréciés que par de rares lecteurs avertis. Quant à son Journal, auquel il a consacré les vingt-cinq dernières années de sa vie, il est resté totalement méconnu. Il s’agit pourtant d’un des textes majeurs de cette littérature autobiographique qui mène des Confessions de Rousseau au Journal de Gide. Avec une intransigeance et une violence qui n’ont pas leur pareil, Bloy retrace l’histoire de sa vie et de son œuvre, évoque ses rencontres, enregistre ses impressions de lecture, nous fait part de ses tentations, de ses colères, de ses doutes, de ses déchirements. Ce texte n’est pas seulement un document unique sur la Belle Epoque, mais aussi le cri d’un homme de douleur meurtri dans sa chair et dans son âme.
Robert Kopp.

 

8. Henryk Sienkiewicz, Quo vadis ? (1896)

Juillet 64 après J.-C. Rome brûle et le feu, activé par un vent violent, semble devoir ne jamais s’éteindre. Quelques semaines plus tard, d’autres flammes s’élèveront mais dont les victimes seront des hommes et des femmes, coupables d’avoir propagé une foi nouvelle, celle du Christ.

Derrière ces murs de flammes, un seul homme: Néron. Néron l’incendiaire, Néron le persécuteur, Néron la bête de l’Apocalypse, Néron l’Antéchrist.

À la cour impériale, la belle mais cruelle Poppée, le sage mais complaisant Sénèque, le dandy mais sceptique Pétrone. Dans l’ombre des catacombes, Paul, infatigable thuriféraire de la foi de Pierre, zélateur passionné de Jésus.

Çà et là, rodent quelques monstres: le sauvage Tigellin, préfet du Prétoire et le sycophante Chilon, un Grec cupide et fourbe.

Entre les prières et les persécutions, entre la croix du Seigneur et les crocs des lions, naît un amour impossible entre le jeune et beau Marcus Vinicius, noble Romain pur et dur et la douce et frémissante Lygie, dont le cœur jusque là n’avait battu que pour Jésus.

Au milieu des cris des victimes et du sang des Justes, les deux amants accompliront leur destinée, sous la protection du bon géant Ursus. Tout comme le fera Pierre, honteux de sa fuite devant les supplices, mais que la vision de Jésus transformera en glorieux martyr.

C’est tout cela Quo Vadis. Mais c’est aussi bien autre chose encore: un monument romanesque, accueilli triomphalement dans le monde entier et que le cinéma fera sans cesse, depuis ses origines, revivre devant des foules admiratives et enthousiastes.

Lire aujourd’hui Quo Vadis dans son texte intégral, c’est faire un fabuleux voyage au cœur de la capitale du monde, la Rome de Néron. Fascinante et bariolée, antre de tous les délices et de toutes les perversions.

 

9. Frederick William Rolfe, Hadrien VII (1904)

En lisant ce roman, on se rend compte que l’auteur s’est nommé Pape dans son esprit et raconté en 400 pages sous le nom de Hadrien VII, pour pouvoir de plus haut, juché sur le trône de Pierre, au milieu d’un parterre de princes et de cardinaux, foudroyer un journaliste qui l’avait accusé d’avoir en son jeun temps dévoré  » des omelettes coûteuses dans des hôtels de premier ordre  » aux frais d’un mécène abusé… autour de cette omelette en folie, l’incroyable Baron Corvo a réussi à bâtir un chef-d’œuvre, un monument, une cathédrale de style baroque. Alexandre Vialatte, La Montagne, 20 mars 1962

 

10. Gilbert Keith Chesterton, Le nommé Jeudi : un cauchemar(1908)

« Entouré qu’il était depuis son enfance par toutes les formes possibles de la révolte, il était fatal que Gabriel se révoltât aussi contre quelque chose ou en faveur de quelque chose. C’est ce qu’il fit en faveur du bon sens, ou du sens commun. Mais il avait dans les veines trop de sang fanatique pour que sa conception du sens commun fût tout à fait sensée. » Dans le Londres victorien, Gabriel Syme est recruté par Scotland Yard pour lutter contre des groupes anarchistes. À cette fin, il se rapproche de Lucien Gregory, un poète, qui l’introduit dans une société secrète qu’il fréquente… Ce thriller métaphysique constitue l’un des livres charnières du XXᵉ siècle, où se rejoignent l’absurde fantastique de Lewis Carroll et les constructions cauchemardesques de Kafka et de Borges.

 

11. Léon Bloy, Le sang du pauvre (1909)

“ Le Sang du Pauvre, c’est l’argent. On en vit et on en meurt depuis les siècles. Il résume expressivement toute souffrance. Il est la Gloire, il est la Puissance. Il est la Justice et l’Injustice. Il est la Torture et la Volupté. Il est exécrable et adorable, symbole flagrant et ruisselant du Christ Sauveur, in quo omnia constant. Le sang du riche est un pus fétide extravasé par les ulcères de Caïn. Le riche est un mauvais pauvre, un guenilleux très puant dont les étoiles ont peur. La Révélation nous enseigne que Dieu seul est pauvre et que son Fils Unique est l’unique mendiant. « Solus tantummodo Christus est qui in omnium pauperum universitate mendicet », disait Salvien. Son Sang est celui du Pauvre par qui les hommes sont « achetés à grand prix ». Son Sang précieux, infiniment rouge et pur, qui peut tout payer ! Il fallait donc bien que l’argent le représentât : l’argent qu’on donne, qu’on prête, qu’on vend, qu’on gagne ou qu’on vole ; l’argent qui tue et qui vivifie comme la Parole, l’argent qu’on adore, l’eucharistique argent qu’on boit et qu’on mange. Viatique de la curiosité vagabonde et viatique de la mort. Tous les aspects de l’argent sont les aspects du Fils de Dieu suant le Sang par qui tout est assumé. ”

12. Gilbert Keith Chesterton, Saint François d’Assise (1924)

Nous avions publié, en 2009, la première des biographies écrites par Chesterton, celle du poète Robert Browning. Celle qu’il écrit en 1923 sur saint François, peu après sa conversion au catholicisme, est plus tardive mais tout aussi éblouissante de fraîcheur et d’intelligence. Il ne serait d’ailleurs pas impossible de tracer une filiation entre les deux livres. L’admiration de Chesterton allait au Browning « démocratique », qui, dans L’Anneau et le Livre, donnait la parole à tous, du criminel au pape, car « nul n’a jamais vécu sur terre sans avoir un point de vue propre ». L’homme qui parlait aux oiseaux n’était déjà pas si loin. D’ailleurs Chesterton voit d’abord dans saint François « un poète dont l’existence entière fut un poème ». Certes, il existe beaucoup de livres sur saint François d’Assise, et beaucoup d’un abord plus savant. Mais personne n’a jamais mieux saisi l’esprit de saint François que Chesterton. C’est ce que montre avec brio Anne Weber dans sa préface : « A chaque idée toute faite, à chacune de nos représentations à la fois vagues et stéréotypées, le Saint François de Chesterton oppose une tout autre vision correspondant à une tout autre réalité. » Du coup : « Nul besoin d’être soi-même « catholique orthodoxe », comme Chesterton, ni catholique tout court, ni même d’être croyant. Du moment qu’on est un être humain, comment ne pas être ébloui face au merveilleux personnage que l’on découvre et qui ressemble si peu à l’idée que l’on se fait communément d’un saint, ni d’ailleurs à rien de ce qu’on a jamais connu. »

 

13. Charles Williams, La guerre du Graal (1930)

L’affrontement millénaire entre les forces de la lumière et celles des ténèbres pour la possession du pouvoir sacré du graal… Cette étrange histoire débute par un crime banal au sein d’une respectable maison d’édition dirigée par Stephen Persimmons. Mais, au fur et à mesure que l’enquête progresse, on découvre que cet assassinat est le fait d’une conspiration occulte qui vise à s’approprier le Graal récemment découvert au cœur d’un paisible village de la campagne anglaise. Dès lors, il ne s’agira plus que de l’affrontement entre les forces de la Lumière et celles des Ténèbres…

14. Georges Bernanos, Journal d’un curé de campagne (1936)

Le roman décrit l’existence discrète d’un jeune prêtre catholique dans la petite paroisse artésienne d’Ambricourt dans le nord de la France. Il est marqué par ses douleurs à l’estomac et son désespoir devant le manque de foi dans la population du village. Il se sait faible, inférieur, et se pense parfois touché par la folie, mais croit vivement que la grâce de Dieu passe par son sacerdoce : « Tout est grâce ! ».

 

15. Graham Greene, La puissance et la gloire (1940)

Dans son éclairante préface, John Updike note que  » La Puissance et la Gloire est généralement considéré comme le chef-d’oeuvre de Greene, son roman le plus célèbre et le plus estimé par la critique « . En le relisant aujourd’hui, on comprend pourquoi ce roman a eu un tel impact auprès du public international.
Graham Greene y raconte le martyre d’un prêtre, intrigue que lui avait inspirée un voyage dans la province de Tabasco, au Mexique, en 1938 : sous la dictature du tristement célèbre Garrido Canabal, les prêtres étaient persécutés ou assassinés. Un seul avait réussi à se cacher pendant dix ans dans les forêts et les marais. Fuyant sans cesse les serviteurs d’un régime totalitaire, hostile à l’Église, il resta fidèle à une vocation à laquelle il croyait pourtant avoir failli.

16. Betty Smith, Le lys de Brooklyn (1943)

Dans le quartier de Williamsburg, Brooklyn, entre 1912 et 1920.
Francie Nolan a 9 ans, des rêves plein la tête, un optimisme à toute épreuve et une envie un peu folle : écrire. Écrire sur sa mère, Katie, qui sait insuffler de la poésie dans leur quotidien ; sur Johnny, son père, son héros, la plus belle voix de Brooklyn ; sur Neeley, son petit frère, un débrouillard qui court les rues avec ses copains ; sur ses tantes, la douce Evy qui a marié le laitier et la pétulante Sissy, qui collectionne les  » John « , des fiancés si éphémères qu’elle ne prend plus la peine de retenir leur véritable prénom ; sur l’arbre dans la cour, dans lequel elle s’abrite du soleil en été ; sur Williamsburg, son quartier, où tout le monde se connaît et s’entraide.
Mais Francie voudrait aussi pouvoir écrire la vérité : sur sa mère qui s’use les mains à faire des ménages ; sur son père qui dépense le peu d’argent qu’il gagne au café du coin ; sur Neeley et les petits de Williamsburg qui fouinent, fouillent, volent ferrailles et haillons pour les revendre aux chiffonniers ; sur la faim qui les tenaille jour après jour ; sur ces hivers où il fait si froid ; sur Williamsburg, le quartier le plus misérable de New York, celui où échouent tous les immigrants venus chercher fortune en Amérique. Alors Francie va lire tous les livres de la bibliothèque, écouter toutes les histoires de sa grand-mère, observer toute la vie de Williamsburg, avant de réussir à trouver sa voix…

 

17. Gustave Thibon, Ce que Dieu a uni. Essai sur l’amour (1945)

La création, dans sa diversité infinie, forme un ensemble harmonieux dont toutes les parties sont liées entre elles et vivent les unes par les autres. De l’atome à l’ange, de la cohésion des molécules à la communion des saints, rien n’existe seul ni pour soi. Dieu n’a créé qu’en unissant. Le drame de l’homme c’est de séparer. Il se coupe de Dieu par l’irréligion, il se coupe de ses frères par l’indifférence, la haine et la guerre, il se coupe enfin de son âme par la poursuite des biens apparents et caducs. La métaphysique de la séparation est la métaphysique même du péché, mais comme l’homme ne peut pas vivre sans un simulacre d’unité, ces parties de lui-même, disjointes et tuées par le péché, se rejoignent, en tant que mortes, non plus comme les organes d’un même corps, mais comme les grains de sable du même désert. Il n’est pas d’autre moyen de salut que le retour à l’unité dans la diversité. Gustave Thibon a toujours essayé de montrer les voies de ce retour sur le plan religieux et social et aujourd’hui il tente de placer dans le même éclairement les problèmes de l’amour humain.

 

18. Evelyn Waugh, Le cher disparu (1948)

Hollywood, fin des années 1940. Lorsque Francis Hinsley, un employé modèle des studios Megalopolitan, apprend son licenciement en découvrant un inconnu assis à son bureau, il ne voit qu’une seule issue possible : la pendaison. Son jeune ami et poète, Dennis Barlow, est chargé par la communauté anglaise d’organiser les obsèques, qui devront être assez grandioses pour accueillir tout le gratin hollywoodien.
Bijou d’humour noir, Le Cher Disparu dépeint avec une certaine cruauté l’Amérique et ses travers, et donne le ton d’une oeuvre dédiée à la critique cynique de notre civilisation.

 » Waugh donne ouvertement dans la caricature et la farce, comme si, laissant momentanément souffler ses compatriotes, il avait trouvé un meilleur emploi de ses dons satiriques dans la peinture des aspects outrageusement cocasses du Nouveau Monde.  » Maurice Nadeau

 

 

19. Pär Lagerkvist, Barabbas (1950) 20. Gustave Thibon, Vous serez comme des dieux (1954)

 » A tant de chrétiens modernes qui acclament sans réserve tous les progrès temporels comme les effets et les preuves de la vocation divine de l’homme, je voudrais poser cette question-limite qui départage à jamais les hommes de l’avenir et les hommes de l’éternité: si, du jour au lendemain, la science supprimait la mort, que penseriez-vous de ce  » plan de Dieu sur l’histoire  » qui perpétuerait indéfiniment la séparation entre l’homme et Dieu? Et surtout que choisiriez-vous ? De profiter d’une découverte qui vous priverait pour jamais de la vision de celui que vous appelez votre Dieu ou bien de vous précipiter dans l’inconnu pour le rejoindre? Si vous optez pour la première branche de l’alternative, vous avouez que votre patrie est dans le temps et que votre Dieu n’est qu’une chanson de route dont se berce la fatigue d’une humanité en marche vers le Paradis terrestre. Et ce Dieu-là se rapproche singulièrement de la  » dernière auberge  » de Baudelaire, du  » bouche-trou  » de Nietzsche ou de  » l’opium du peuple  » de Marx. Mais si, gorgé de tous les biens et de toutes les sécurités d’ici-bas, vous pouvez dire avec saint Paul: cupio dissolvi et esse tecum, si vous désirez du fond de votre être voir Dieu, non plus dans le miroir de la création, mais face à face, alors vous êtes vraiment les disciples de Celui dont le Royaume n’est pas de ce monde et qui ne donne pas comme le monde donne.  » – Gustave Thibon

 

21. Leonardo Castellani, La vérité ou le néant (1957)

Prêtre, écrivain, philosophe, théologien, exégète et poète, Leonardo Castellani (1899-1981) est l’une des plus grandes figures de la pensée catholique du xxe siècle, l’une des plus singulières aussi. Considéré comme un jésuite rebelle parce qu’il critiquait les égarements de l’Église et du clergé argentin, il refusa de quitter la Compagnie de Jésus, comme l’exigeait sa hiérarchie. Il accepta la réclusion en Espagne, puis s’évada au bout de deux ans, en 1949. Revenu en Argentine, il vécut en « ermite urbain » à Buenos Aires, payant le prix de son combat héroïque pour la Vérité.Pourquoi redécouvrir aujourd’hui ce maître oublié, que ses ennemis surnommaient le «Curé fou » ? Parce qu’en dépit des persécutions, Castellani suivit le Christ jusqu’au bout. Parce qu’il éleva son chant au-dessus des fracas du monde, avec autant d’humour évangélique que de rectitude et de sagesse visionnaire. Quarante ans après sa mort, à l’heure où l’humanité bascule dans le néant, son âme s’adresse aux âmes qui veulent encore se sauver.Conçu par Erick Audouard à partir d’une oeuvre comptant plus de cinquante livres, organisé en trois parties – « Vérité sur le monde », « Vérité sur soi », « Vérité de Dieu » -, cet ouvrage anthologique trace un chemin vivant, à la rencontre de l’Éternel et de sa Gloire.
Erick Audouard est écrivain et poète. Il a présenté et traduit Leonardo Castellani pour la première fois en 2017 dans une anthologie très remarquée, Le Verbe dans le sang, aux éditions Pierre-Guillaume De Roux. Chez le même éditeur, il a publié en 2018 Comprendre l’apocalypse avec René Girard et Leonardo Castellani.

 

22. Clive Staples Lewis, Apprendre la mort (1961)

Comment survivre à nos défunts ?

« Sans pathos, sans niaiserie, C.S. Lewis, après la mort de sa femme, a écrit cette traversée d’un paysage de cris. En refermant Apprendre la mort, on éprouve la gratitude ressentie vis-à-vis de l’éclaireur, d’un esprit dont le tranchant a ouvert un chemin dans la forêt obscure qui a manqué de nous avaler et que l’on laisse à présent derrière soi, tandis que le ciel s’ouvre à nouveau.
Un livre de première nécessité, une sorte de de plan à même d’aider chacun à s’orienter dans le chaos et la béance du deuil. Une leçon de lucidité, de noblesse aussi. La leçon d’un courage salutaire, seule façon de rendre justice à l’amour. »
Mathieu Terence

23. Shûsaku Endô, Silence (1966)

Japon, 1614. Le shogun formule un édit d’expulsion de tous les missionnaires catholiques. En dépit des persécutions, ces derniers poursuivent leur apostolat. Jusqu’à ce qu’une rumeur enfle à Rome : Christophe Ferreira, missionnaire tenue en haute estime, aurait renié sa foi. Trois jeunes prêtres partent au Japon pour enquêter et poursuivre l’oeuvre évangélisatrice… Dans ce roman encensé par la critique internationale, Shûsaku Endô éclaire une part méconnue de l’histoire de son pays. Ce roman d’aventures se fait réflexion sur le caractère universel des religions et le sens véritable de la charité chrétienne, témoignage étonnant des relations complexes entre Japon et Occident.

 

24. Flannery O’Connor, Nouvelles (1972)

Dans ce recueil de nouvelles, Flannery O’Connor nous entraîne dans les profondeurs de l’âme humaine de ses contemporains, mettant à jour leurs bassesses, leurs compromissions et leurs faiblesses. Des hommes violents, narcissiques, des femmes castratrices, baignant dans une fausse religiosité, des enfants handicapés, névrosés… Les nouvelles se succèdent dans un crescendo d’échecs, de cruautés et de fins tragiques. Ainsi, dans la nouvelle, Vue sur les bois, un grand-père n’aura de cesse de monter sa petite fille contre son fils qu’il méprise jusqu’au dénouement tragique. Dans Braves gens de la campagne, une jeune fille unijambiste, en manque d’amour, se fait duper par un charlatan.
Une telle noirceur est parfois étouffante pour le lecteur qui espère, en vain, un peu d’humanité. Pour Flannery O’Connor, le mal existe : il est la conséquence de nos compromissions et de nos lâchetés. Et le meilleur moyen de le débusquer est de le mettre en lumière. Pour cela, elle va utiliser le grotesque afin de provoquer chez son lecteur un choc salutaire. Là réside le génie de Flannery O’Connor : dans sa capacité à décrire des personnages et des situations ordinaires qui glissent vers l’absurde par un phénomène de distorsion.

Pour apprécier ces nouvelles, il faut préciser que Flannery O’Connor appartient au groupe d’écrivains du Sud qui évoluent dans une société marquée par le traumatisme de la guerre civile et l’humiliation de la défaite. Il faut ajouter qu’elle est catholique et que sa vision du monde est marquée par le péché et son corollaire, la rédemption. Explorer l’âme humaine à l’aune de l’histoire du salut est à la racine de son écriture. Et à partir d’un territoire, la Géorgie, qu’elle connaît intimement pour y avoir habiter toute sa vie. Cette religiosité n’est pas spécifique à Flannery O’Connor. Tout le Sud est habité par l’intuition que l’homme est créé à l’image de Dieu mais que le péché originel a terni cette image que seule la grâce donnée en Jésus-Christ peut restaurer. Pour elle, écrire n’est pas distraire le lecteur mais susciter chez lui une réaction à la hauteur de l’enjeu qu’elle perçoit dans le monde et qu’elle devine dans le lointain : la perte totale des repères et du sens de la vie qui mènent l’humanité vers l’abîme.
(édition américaine : Complete stories)

 

25. Vladimir Volkoff, L’hôte du pape (2004)

Peu de romanciers peuvent se targuer, comme Vladimir Volkoff, d’être traversés par de véritables traits de génie. En prenant comme trame fictionnelle la concomitance entre la mort du pape Jean-Paul Ier et celle du métropolite de Léningrad, l’auteur donne accès à un monde romanesque extrêmement riche. Mais, comme à chacune de ses publications, ce grand Russe blanc qu’est Vladimir Volkoff apporte un éclairage original à sa problématique. Surtout, il sait comme personne brosser une galerie de personnages aussi crédibles qu’attachants. Ainsi, du pape Jean-Paul Ier au prince romain décadent Innocenti, sans oublier la très belle figure, centrale, du monseigneur Ilia, à la fois archevêque et officier du KGB, le lecteur fera la connaissance de « vraies gens  » s’il en est, d’une dimension humaine et spirituelle tout à fait hors du commun. À travers la plupart de ces personnages se révèlent les contradictions de la défunte société soviétique, que l’auteur dépeint avec une acuité et une drôlerie que l’on peut qualifier d’exceptionnelles. Aucun doute n’est permis, L’Hôte du Pape est un grand, un très grand Volkoff.

26. Fabrice Hadjadj, La foi des démons ou l’athéisme dépassé (2009)

L’athéisme qui nie l’existence de Dieu n’est pas le pire refus de Dieu possible. Certains croyants ont trouvé Dieu et pourtant ne Le servent pas, on pourrait même avancer qu’ils Le servent d’autant moins. Ils se perdent précisément dans la mesure où ils L’ont trouvé. Ceux-là ne sont pas athées ; ils reconnaissent tous les articles de la foi chrétienne et, néanmoins, ils refusent Dieu de la manière la plus radicale, en connaissance de cause. Ils surpassent l’athéisme et nous révèlent un lieu plus ténébreux, d’autant plus ténébreux qu’il se sert de la lumière pour épaissir ses ténèbres.

Tel est le lieu du démoniaque, qui ne concerne pas seulement le danger des démons : un chrétien ne saurait l’ignorer, car il désigne aussi une possibilité tragiquement sienne, celle d’une perdition qui s’ouvre au cœur même de la chrétienté. Le démoniaque n’est pas tant de vouloir le mal que de vouloir faire le bien par ses seules forces, sans obéir à un Autre, dans un don qui prétend ne rien recevoir, dans une espèce de générosité qui coïncide avec le plus subtil orgueil.

Cet ouvrage a reçu le Prix de littérature religieuse 2010.

 

 

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